Article 15
Étrangers,
apatrides, citoyens européens
1) Les
étrangers et les apatrides qui se trouvent ou habitent au
Portugal jouissent des mêmes droits et sont soumis aux
obligations du citoyen portugais.
3)
Aux
citoyens des États de langue portugaise ayant une résidence
permanente au Portugal il leur est reconnu, conformément à la
loi et dans des conditions de réciprocité, des droits non
conférés à des étrangers, sauf pour l'accès aux postes de
président de la République, de président de l'Assemblée de la
République, de premier ministre, de présidents des cours
suprêmes et le service dans les Forces armées et la carrière
diplomatique.
[...] |
Cependant, si le Portugal n'a connu
dans le passé que fort peu de problèmes avec ses minorités nationales,
il doit faire face depuis quelque temps à certaines difficultés
d'intégration avec les nouvelles communautés immigrantes. La tâche
semble particulièrement importante avec les
groupes qui ont tendance à conserver leur langue maternelle, notamment
l'espagnol, l'arabe, l'anglais, le français, l'allemand, etc.
5 La politique liée à
l'immigration et la naturalisation
Depuis la révolution des
Œillets du 25 avril
1974, le Portugal s'est engagé dans un processus de modernisation sur la
base de trois facteurs: la normalisation internationale après une
période d'isolement qui lui avait valu la perte de ses territoires
d'outre-mer, un développement économique sans précédent afin de se
mettre au niveau de ses partenaires européens et, enfin, d'enraciner la
démocratie après quarante ans de dictature salazariste. C'est dans le
cadre de cette modernisation que s'est ensuite élaborée toute la
politique de l'État portugais. Or, la question de l'immigration
s'inscrit dans cette règle, car elle fait partie du projet
d'intégration européenne auquel a adhéré le Portugal en 1986. C'est
pourquoi l'immigration est devenue rapidement un objet de controverse
politique. Jusqu'alors, cette question ne préoccupait guère les
Portugais, mais les problèmes d'intégration sont devenus importants
lorsque les nouveaux arrivants éprouvèrent des difficultés à apprendre
le portugais ou ne le parlaient que de façon insuffisante.
5.1 La citoyenneté
portugaise
L'obtention de la citoyenneté
portugaise est accessible aux citoyens d’autres pays, notamment les
immigrants, à partir du moment où ils satisfont aux conditions prévues
par la loi. Depuis
l'intégration du Portugal à l'Union Européenne ainsi que le
développement du pays au cours des dernières années, les demandes
d’attribution et d’acquisition de la nationalité portugaise ont
sensiblement augmenté. L'une des raisons motivant l'acquisition de la
citoyenneté portugais consiste à avoir la possibilité d'accéder à un
système public de santé gratuite, de qualité comparable aux autres États
de l'Union européenne.
La loi
portugaise prévoit deux formes d'acquisition de la citoyenneté :
l'acquisition dite «originaire» et l'acquisition dite «dérivée». La
première constitue un droit fondamental des enfants de citoyens
portugais vivant au Portugal, en territoire portugais ou dans un
pays de l'Union européenne. Ce type d'acquisition de la nationalité ne
concerne pas les citoyens étrangers. Cependant, l'accès à la nationalité
portugaise par des ressortissant des autres États peut se faire
essentiellement de quatre façons: par attribution de la nationalité
originaire, selon les dispositions de l'article 1 de la
Loi n° 37 sur la
nationalité; par l'adoption légale de la part d’un citoyen portugais;
par l'acquisition volontaire sur demande; par naturalisation. L'article
6 énonce les conditions pour obtenir la naturalisation,
dont l'une (l'alinéa c) est d'avoir
une connaissance suffisante du
portugais:
Article 6
Conditions
1) Le gouvernement peut accorder la
nationalité portugaise, par naturalisation, aux étrangers qui
satisfont à l'ensemble des conditions suivantes:
a) Être majeur ou
affranchi de l'autorité parentale par
une loi du Portugal;
b) Être résident en territoire portugais ou sous
administration portugaise, avec permis de séjour valide pour
au moins six ou dix ans, selon
qu'ils sont des ressortissants de pays où le portugais est une
langue officielle ou dans d'autres pays;
c)
Avoir une connaissance
suffisante du portugais;
d) Prouver l'existence d'un lien effectif avec la communauté nationale;
e) Détenir la responsabilité
civile;
f) Être à même de s'occuper de sa personne et assurer sa
subsistance.
2)
Les conditions énoncées aux alinéas b) à d) peuvent être levées à
l'égard de ceux qui ont eu la nationalité portugaise, ceux qui sont
de descendants de Portugais,
les membres des communautés d'ascendance portugaise
et les étrangers qui ont servi ou sont appelés à rendre des services
importants à l'État portugais. |
Les articles
19, 20, 22 et 23 du Décret-loi n° 237-A sur
la naturalisation des étrangers (2006)
traitent également des conditions concernant la naturalisation des
étrangers résidant sur le territoire portugais (art. 19), la
naturalisation des enfants nés sur le territoire portugais (art. 20), la
naturalisation des étrangers qui sont des descendants de ressortissants
portugais (art. 22) et la naturalisation des étrangers nés sur le
territoire portugais (art. 23).
5.2 La
connaissance obligatoire du portugais
La condition relative à la
connaissance du portugais peut être levée à l'égard de ceux
qui ont eu la nationalité portugaise, ceux qui sont de descendants
de Portugais, les membres des communautés d'ascendance portugaise et
les étrangers qui ont servi ou sont appelés à rendre des services
importants à l'État portugais. Pour les autres, le portugais est
obligatoire. L'article 15 du
Règlement sur la nationalité portugaise précise les éléments
constituant une preuve de la connaissance du portugais:
Article 15
4)
La preuve de connaissance du portugais
peut être faite
selon l'une des façons suivantes:
a) Un
diplôme d'examen
émis par un établissement public d'enseignement portugais;
b)
Un document écrit, lu et signé
par le requérant devant un notaire portugais,
avec la mention des circonstances respectives concernant la
reconnaissance de la lettre et sa signature;
c) Un document écrit, lu et signé par le
requérant devant le responsable des services consulaires portugais
ou le bureau de la mairie de sa résidence ou, à Lisbonne et à Porto,
devant le directeur des services centraux et culturelle ou un
fonctionnaire désigné par celui-ci, qui est tenu de déclarer ces
faits sur ledit document, et de l'authentifier avec sa signature et
le sceau officiel.
|
L'article 25 du Décret-loi
n° 237-A sur
la naturalisation des étrangers (2006) reprend
les éléments prouvant la connaissance du portugais en étant plus
explicite.
Article 25
2)
La preuve de la connaissance du portugais peut être
faite par l'une des façons suivantes:
a) Un
certificat de qualification
émis par un établissement d'enseignement public ou privé, ou
une coopérative reconnue par la loi;
b) Un
certificat d'approbation
du test diagnostic réalisé dans n'importe quel établissement
d'enseignement prévu au paragraphe précédent, dont les
modèles sont approuvés par arrêté conjoint des ministres de
la Justice et de l'Éducation;
c) Un
certificat d'approbation
du test diagnostic prévu au paragraphe précédent émis par
les services consulaires, lorsque le requérant réside à
l'étranger;
d) Un certificat de portugais langue étrangère émis
à l'issue du test par un centre d'évaluation du portugais langue
étrangère et reconnu par le ministère de
l'Éducation grâce à un protocole.
4) Dans le cas d'un mineur de moins de
dix ans ou qui ne
sait ni lire ni écrire, la preuve de la connaissance du
portugais doit être adaptée à sa capacité à acquérir
ou à démontrer sa connaissance de ladite langue.
5) Dans le cas d'un individu qui a fréquenté un
établissement d'enseignement public ou un établissement privé,
ou une coopérative reconnue par
la loi dans un pays où la langue officielle est le portugais,
la preuve de la connaissance du portugais peut être faite par
un certificat de qualification émis par cet établissement
d'enseignement.
6) Dans le cas prévu au paragraphe précédent, s'il
subsiste un doute
sur la qualité du certificat présenté comme preuve de la
connaissance du portugais, le Service central de l'état civil peut demander aux
autorités compétentes du ministère de l'Éducation de se
prononcer sur la preuve qui, si elle n'est pas considérée comme
suffisante, ne peut être présentée comme preuve de connaissance.
|
Précisons aussi que les citoyens
lusophones, au nombre desquels sont compris les
ressortissants des États de langue officielle portugaise, peuvent
bénéficier de droits non reconnus à d'autres ressortissants étrangers,
sauf pour ceux qui participent aux organismes de l’État ou de
l'administration régionale, pour ceux qui sont en service dans les
Forces armées et la carrière diplomatique. Ainsi, les immigrants
originaires des pays du PALOP ("Países
Africanos de Língua Oficial Portuguesa"), c'est-à-dire les «Pays
africains de langue officielle portugaise», peuvent profiter de certains
avantages dans le domaine de l'éducation. Le PALOP regroupe six pays
lusophones d'Afrique formé en 1996: l'Angola, le Mozambique, la
Guinée-Bissau, le Cap-Vert, Sao
Tomé-et-Principe et la Guinée
équatoriale. Ces pays, qui font aussi partie de la Communauté des pays
de langue portugaise (CPLP: "Comunidade dos Países de Língua Portuguesa"),
ont signé un protocole de coopération avec divers pays et organismes
dans les domaines de la culture, de l'éducation ainsi que la promotion
et la préservation de la langue portugaise. Il existe également
une convention de ce type avec le Brésil
(langue officielle: portugais).
5.3 Les
cours de portugais
Afin de faire apprendre le portugais aux ressortissants étrangers,
l'État portugais a prévu à cet effet une offre de cours en langue
portugaise.
Il faut dire que, jusqu'à récemment, l'offre en cours du portugais demeurait assez limitée.
|
Dans le cadre du
programme Portugal Acolhe («le Portugal vous
accueille»), il était proposé aux immigrants d’acquérir des
«rudiments de portugais» ("noções
básicas de portugues")
dans un délai de quelque cinquante heures de cours, ce qui
ne correspondait guère aux normes des autres pays de l'OCDE
(Organisation de coopération et de développement
économiques). En général, il est plutôt proposé entre 250 et
900 heures pour apprendre une nouvelle langue dans des
conditions acceptables. Au final, trois unités de formation
de courte durée (50 heures chacune) sont autorisées.
Au Portugal, seuls les immigrants qui ont un emploi peuvent
bénéficier de ce programme. |
Le Programa
Portugal Acolhe
apparaît comme une stratégie indispensable pour répondre à
l'intensification des flux migratoires qui ajoutent de nouveaux défis et
de nouvelles possibilités dans un pays qui a toujours été caractérisée
comme une zone d'émigration. L'objectif est d'assurer que les citoyens
étrangers aient à leur disposition les outils nécessaires à l'exercice
de la citoyenneté active, notamment en ce qui concerne l'exercice des
droits et devoirs au travail. Or, l'outil indispensable commence par
l'acquisition du portugais, soit la capacité d'expression et de
compréhension dans cette langue, afin de pouvoir s'intégrer à part
entière dans la société portugaise, notamment dans le marché du travail.
D'ailleurs, l'article 16 du
Décret-loi n° 259/2009 du 25 septembre 2009 réglementant l'arbitrage à
force exécutoire et l'arbitrage obligatoire oblige l'État à n'utiliser que le portugais dans une procédure
d'arbitrage:
Article 16
Questions de
procédure
4)
Dans tous les actes d'arbitrage,
la langue
portugaise doit être utilisée,
sans préjudice du tribunal qui autorise à l'unanimité
l'ajout de documents dans une langue étrangère dans la
procédure. |
Les immigrants n'ont guère le choix:
il leur faut apprendre le portugais s'ils veulent intégrer le marché du
travail.
5.4 L'emploi du
portugais
Bien qu'il n'y ait pas de
réglementation nationale sur l'emploi du portugais dans l'affichage
public et commercial, l'usage de cette langue est omniprésente, que ce
soit la signalisation routière, les inscriptions des ministères, la
publicité commerciale, etc. Il peut bien avoir de temps en temps des
inscriptions en anglais ou dans d'autres langues, mais celles-ci sont
limitées généralement aux endroits touristiques. Le Portugal est une
destination touristique recherchée en Europe, la clientèle est forcément
étrangère à la langue portugaise. La plupart des touristes qui visitent
le Portugal sont de nationalité française, espagnole et allemande, mais
les marchés qui ont le plus augmenté sont ceux du Brésil, avec 46,6%, la
Russie, 36,3%, les États-Unis, 31,1% et le Royaume-Uni avec 15,1%.
Dans les faits, la présence du portugais prend toute
la place dans le pays. Parfois, dans les hauts lieux touristiques,
notamment dans l'hôtellerie et dans la restauration, certaines affiches
peuvent être en anglais, mais il s'agit toujours de cas exceptionnels.
6
La politique linguistique en éducation
Afin de mettre en œuvre les cours de langue
portugaise, le Portugal s'est doté d'une politique linguistique. On doit distinguer,
dune part, les mesures liées aux minorités nationales parlant le galicien, le
mirandais, le romani (ou le gitan), dautre part, celles reliées aux minorités
immigrantes, surtout les réfugiés africains provenant des îles du
Cap-Vert et de la
Guinée-Bissau, sans parler des Mélanésiens du
Timor Lorosae. La difficulté est de trouver
des moyens permettant aux enfants de ces citoyens dutiliser leur langue tout en
apprenant la langue officielle, le portugais.
Au Portugal, les municipalités (communes)
assurent le lien entre le système d'éducation et la communauté locale. Dans ce
domaine, les municipalités sont particulièrement responsables de la gestion des
équipements, du personnel auxiliaire et de l'action sociale scolaire, le tout
dans le cadre de l'enseignement préscolaire (maternelle), du premier cycle de
l'enseignement fondamental.
6.1 L'enseignement
national du portugais
L'article 7 de la
Loi n° 49 du 31 août sur l'éducation
(2005), loi qui modifie celle de 1986, précise que
l'un des objectifs de l'enseignement primaire et d'offrir
l'apprentissage d'une première langue étrangère et
l'initiation à une seconde, et d'accroître la sensibilisation et l'appréciation des valeurs
caractéristiques de
l'identité, de la langue, de l'histoire et de la culture portugaises
:
Article 7
Objectifs
Les objectifs de
l'enseignement fondamental sont les suivants:
d) Offrir
l'apprentissage d'une première langue étrangère et l'initiation
à une seconde
;
g ) Accroître la sensibilisation et l'appréciation des valeurs
caractéristiques de l'identité,
de la langue,
de l'histoire et de la culture portugaises ;
|
L'article 10 de la
Loi n° 49 du 31 août sur l'éducation
(2005) porte sur les objectifs de l'enseignement
secondaire, dont des cours de
langue et de culture portugaises ajustées à la nature des divers cours
:
Article 10
Organisation
3)
L'enseignement secondaire est organisé selon des formes différentes
en considérant l'existence de cours principaux
adaptés à la vie professionnelle ou pour la poursuite d'études
complémentaires, qui contient toutes les composantes de formation à
portée technique, technologique et professionnelle,
ainsi que de langue et de culture portugaises
ajustées à la nature des divers cours. |
L'article 11 de la même loi impose
notamment comme objectif de l'enseignement supérieur, qui comprend
l'enseignement universitaire et l'enseignement polytechnique, de
promouvoir
et de valoriser la langue et la culture portugaises :
Article 11
Portée
et objectifs
1) L'enseignement supérieur comprend l'enseignement universitaire
et polytechnique.
2)
Les objectifs de
l'enseignement supérieur sont les suivants:
h)
Promouvoir et valoriser la langue et la culture portugaises
;
|
De plus, l'article 22 de la
Loi fondamentale n° 46/86 sur le système
déducation contient des
dispositions concernant l'enseignement du portugais à l'étranger,
notamment pour les individus qui voudraient émigrer au Portugal:
Article 22
Enseignement du portugais à l'étranger
1)
L'État doit promouvoir la diffusion
et l'étude de la langue et de
la culture portugaises à
l'étranger par divers moyens et mesures visant en particulier son
introduction dans les programmes des autres pays et la création et
l'entretien de lectorats portugais, sous la direction d'enseignants
portugais dans des universités étrangères.
2)
Des écoles portugaises doivent être
encouragées à être créées dans
les pays lusophones et dans les
communautés d'émigrants portugais.
3)
L'enseignement de la langue et de la
culture portugaises destiné
aux aux travailleurs émigrants et à leurs enfants doit être dispensé
au moyen de cours et d'activités de promotion dans les pays
d'immigration au sein d'un régime d'intégration et de
complémentarité à l'égard de leurs systèmes d'éducation.
|
Bref, l'État prend au sérieux son
rôle de promouvoir la langue et la culture portugaises au Portugal même,
puis à l'étranger.
6.2 L'enseignement
des langues
étrangères
Le Portugal obliges les élèves à apprendre une langue étrangère dès le
primaire. Parmi les langues enseignées, citons l'anglais, le français,
l'espagnol et l'allemand; d'autres langue sont possibles dont le
chinois, le russe, l'arabe. Depuis 2005, l'enseignement de l'anglais est
obligatoire dès la 3e année du primaire (premier cycle). Aux 2e et 3e
cycle, l'anglais est généralement choisi comme la première langue
étrangère, ce qui laisse peu de place pour les autres langues, notamment
le français, l'espagnol et l'allemand. L'article 7 du
décret-loi n° 6/2001 sur l'enseignement
fondamental précise que
l'apprentissage d'une seconde langue étrangère est
obligatoire au 3e cycle:
Article 7
Langues étrangères
1) Les écoles du premier cycle peuvent, en conformité avec les ressources
disponibles, prévoir l'initiation à une langue étrangère en mettant
l'accent sur l'expression orale.
2) L'apprentissage d'une langue étrangère commence
obligatoirement au second cycle et se poursuit au troisième cycle, afin de
fournir aux élèves la maîtrise d'une langue dans une gradation de l'adéquation
et de l'aisance.
3)
L'apprentissage
d'une seconde langue
étrangère est
obligatoire au troisième cycle. |
Cette loi de 2001 maintient
l’introduction d’une première langue obligatoire (généralement
l'anglais) en cinquième année de la scolarité et réintroduit
l’obligation de débuter l’apprentissage d’une deuxième langue en
septième année de scolarité. Cette obligation est entrée en vigueur
à la rentrée de 2002. Auparavant, la deuxième langue était
facultative, car les élèves avaient le choix entre une deuxième
langue, une discipline artistique ou une discipline technique. La
décision de rendre la deuxième langue obligatoire est plus favorable
à la diversification, notamment pour le français, qui est déjà la
langue la plus enseignée à ce niveau. Cette mesure permet aussi
d'accorder de l'importance à la langue espagnole et, dans le sud du
pays, à l’allemand qui est de plus en plus souvent exigé sur le
marché du tourisme.
Pour des raisons économiques, le
Portugal n’a guère la possibilité de proposer un nombre important de
langues au choix des élèves et des familles. La première langue
choisie par les élèves est, dans la très grande majorité, l'anglais.
Le français, qui occupe la deuxième place. Il est suivi par
l'espagnol, puis par l'allemand.
6.3 L'enseignement chez les minorités
nationales
En ce qui a trait aux minorités nationales,
cest-à-dire les locuteurs parlant le galicien (15 000), le mirandais (10 000), le
romani (500) ou le gitan (5000), il existe des écoles — plutôt
généralement des classes — où les enfants appartenant à ces
minorités peuvent faire leurs études primaires dans leur langue.
La résolution n° 29 de 1991 du Conseil des ministres sur le Programme d'éducation pour tous
("Programa Educação Para Todos")
préconise l'adoption de mesures d'intervention tendant à aider ceux qui ont des besoins
pédagogiques particuliers, notamment les membres des minorités linguistiques.
Larrêté normatif (Despacho Normativo) n° 104 du 16 novembre 1989
(aujourd'hui abrogé par le décret-loi n° 329/98)
veillait à ce que les différentes confessions aient les mêmes possibilités d'enseigner
les principes fondamentaux de leur religion. Ainsi, des mesures éducatives spéciales ont
été prises en faveur des enfants gitans nomades, afin qu'ils soient admis dans les
différentes écoles et que les enseignants soient formés pour leur apporter une aide
spécifique. Si lon fait exception des quelques journaux et revues disponibles, ce
sont là les seuls droits des minorités nationales au Portugal.
- Le statut du mirandais
En ce qui concerne plus spécifiquement le
mirandais,
le Parlement portugais a adopté à l’unanimité, en novembre 1998, une loi relative
au statut officiel du mirandais: il s’agit de la
loi nº 7/99 du 29 janvier 1999 portant sur la reconnaissance officielle
des droits linguistiques de la Communauté mirandaise (district de Bragança). En vertu de cette loi,
le mirandais, une variété d’asturien (ou d'asturo-léonais) parlée par 7000 à 10 000 locuteurs,
voire de 12 000 à 15 000, est reconnu
avec le portugais comme co-officiel dans un territoire de moins de 500 km²;
et inclut les villes de Miranda du Douro et de Sendín (à la frontière
nord-est du Portugal). Le statut de co-officialité
s’applique en
principe dans l'administration locale, les écoles et un certain nombre
d’organismes publics.
En vertu de l’article 3 de la
loi n° 7/99 du 29 janvier 1999,
l'État reconnaît le droit aux enfants d’apprendre le mirandais:
Article 1er
Le présent document vise à
reconnaître et promouvoir
la langue mirandaise.
Article 2
L'État portugais reconnaît le droit de
développer et de promouvoir le
mirandais en tant que patrimoine culturel,
instrument de communication et soutien d’identité de la région de Terra da
Miranda.
Article 3
L'État reconnaît
le droit aux enfants d'apprendre le mirandais,
conformément aux dispositions prévues dans la réglementation.
|
À l’article 4, il est
précisé que «les institutions publiques placées sous la responsabilité du
Conseil de Miranda del Douro pourront publier leurs documents dans leur version
mirandaise».
Cette loi a été suivie de l'arrêté
n° 35 du 5 juillet 1999. L'article 1er
précise que l'étude du mirandais dans les établissements d'enseignement du
primaire et du secondaire de la commune de Miranda de Douro est autorisée en
tant que source d'enrichissement du programme scolaire:
Article
1er
Aux élèves des
établissements d'enseignement primaires et secondaires de la commune
de Miranda de Douro
l'étude du mirandais est autorisé
en tant que source d'enrichissement du curriculum scolaire.
|
Cependant, la
disponibilité des cours en mirandais
appartient aux établissements d'enseignement primaire et secondaire de
la commune de Miranda de Douro, moyennant le développement de projets en
vertu desquels ceux-ci visent à préserver et promouvoir la langue mirandaise
(art. 2).
En 2003, un projet de loi pour
reconnaître davantage le mirandais a été présenté: la
proposition de loi sur la
reconnaissance officielle du mirandais.
- La standardisation du
mirandais
Le processus de
standardisation de la langue mirandaise a commencé en
1995, avec la publication de la proposition de Convention orthographique
mirandaise (Proposta de Convenção Ortográfica Mirandesa) et consolidé
en 1999, avec la la publication de la Convention orthographique de la langue mirandaise.
L'État portugais a adopté en 2002 la
Convenção Ortográfica da Língua Mirandesa, dont l'objectif est d'établir
des règles pour l'éventuelle adaptation des emprunts traitant le cas particulier
des mots qui, en portugais, s'écrivent avec un [x]:
ambidextro > ambidestro, contexto >
cuntesto, dextro > destro, dextralidade > destralidade, pretexto > pretesto,
sexto > sesto, sextante > sestante, texto > testo, textual > testual, etc. Le nom de «langue» est légitimé par le fait que le mirandais a été reconnu
comme langue officielle par la loi
n° 7/99 du 29 janvier 1999.
- L'enseignement du
mirandais
Dans les faits, le mirandais est enseigné dans les écoles
primaires et comme matière
facultative au premier cycle du secondaire dans les lycées de la région.
Actuellement, quelque 400 élèves mirandais apprennent leur langue maternelle à
l'école, bien que ce soit une matière facultative. De
plus, l'enseignement du mirandais n’est soumis à aucun organisme d'inspection
et les professeurs sont laissés à eux-mêmes.
On comprendra que dans ces conditions les locuteurs du
mirandais soient assez pessimistes quant à l’avenir de leur langue. Comme le mirandais est au surplus considéré comme «arriéré» par rapport
au portugais, son usage social, généralement limité aux manifestations
folkloriques, apparaît en nette régression. Sans un soutien important de la
part de l’État portugais, cette langue semble en voie d’extinction, et ce,
d’autant plus que la distance linguistique qui la sépare du portugais s’avère
relativement faible.
- L'administration
et justice
Dans les localités où résident un
nombre important de locuteurs du mirandais, l'État portugais s'est
engagé à s'assurer à ce que ceux-ci puissent présenter, dans la mesure
du possible, des requêtes en mirandais, tant à l'oral qu'à l'écrit.
Ainsi, les locuteurs du mirandais peuvent, en principe, présenter des
documents rédigés dans cette langue. Les autorités locales peuvent
également présenter leurs documents officiels en mirandais en plus du
portugais. Le gouvernement autorise aussi l'emploi du mirandais dans la
toponymie locale. Enfin, l'État portugais s'est engagé à recruter
et à former du personnel en nombre suffisant afin de répondre à la
demande en mirandais. En fait, dans les services publics, le portugais
est la seule langue employée, sauf lorsque le fonctionnaire de service
est un Mirandais. Les autorités portugaises se montrent généralement
réticentes à utiliser le mirandais, même dans les indications
toponymiques de la région, notamment dans la partie spécifique d’un nom
de lieu.
En matière de justice, le gouvernement portugais s'est engagé, là où
résident les locuteurs du mirandais, à rendre possible les documents,
requêtes et témoignages en mirandais, et ce, même s'il y a nécessité de
recourir à des interprètes et des traducteurs. Selon l'intention du
gouvernement, la langue mirandaise ne doit pas être considérée comme un
obstacle à la bonne administration de la justice. Dans les faits, la
seule langue officielle utilisée demeure le portugais, mais il arrive
que le mirandais soit employé occasionnellement et que des interprètes
soient disponibles.
6.4 L'enseignement aux minorités
immigrantes
Avec l’arrivée importante d‘immigrants de
race noire, le Portugal a commencé à vivre ses premiers conflits raciaux. Les
Portugais blancs se méfient des Noirs et la discrimination à l’égard de ces
derniers était devenue à ce point considérable qu’il a fallu que le gouvernement
adopte des mesures législatives pour limiter et éliminer si possible les abus.
Au point de vue linguistique, la problématique réside dans l'intégration des
immigrants, particulièrement dans
lapprentissage du portugais dans les écoles. Il nest pas surprenant
quun article de la Constitution en fasse mention. En effet, larticle 74 (par. 2, alinéa
i) de ladite Constitution a trait à la langue de lenseignement du portugais aux minorités
immigrantes:
Article 74
Enseignement
1) Tous ont droit à
l'éducation avec la garantie du droit à l'égalité des chances d'accès et de
réussite à l'école.
2) L'application de la
politique d'éducation incombe à l'État :
a) Assurer l'enseignement
fondamental universel, obligatoire et gratuit;
b) Créer un système
public et développer le système général d'enseignement préscolaire ;
c) Garantir l'éducation
permanente et éliminer l'analphabétisme ;
h) Protéger et
valoriser la langue des signes portugaise,
en tant qu'expression culturelle et d'instrument pour l'accès à
l'éducation et à l'égalité des chances ;
i) Assurer aux enfants
des émigrants
l'enseignement de la langue portugaise et l'accès à la culture
portugaise ;
j) Assurer aux enfants
des immigrants une aide appropriée pour qu'ils s'acquittent de leur
droit à l'éducation.
|
De plus, la résolution n° 38 de 1993 ("Resolução
do Conselho de Ministros n° 38/93") prescrivait
des mesures favorisant la pleine intégration sociale et professionnelle des immigrants et
des minorités nationales. Il sagit de la part du gouvernement daider les
immigrés et les minorités nationales afin de favoriser leur pleine intégration
socioprofessionnelle, notamment par l'adoption de mesures en matière d'éducation, de
formation professionnelle et d'intervention sociale. Une commission interministérielle
pour l'intégration des immigrés et des minorités ethniques a été chargée de rendre
compte des conditions de vie des immigrés, de proposer aux pouvoirs publics des mesures
et stratégies en leur faveur, d'évaluer les actions et leurs résultats et de coordonner
et suivre les campagnes et programmes menés sur ce terrain.
Par ailleurs, un médiateur du ministère de la Justice, le Provedor
de Justiça («médiateur judiciaire»), conformément à larticle 23 de la Constitution, a été nommé, et
sa fonction a été précisée par l'article 2 de la
loi n° 9 du 9 avril 1991
(ou Estatuto do Provedor de Justiça). La principale
tâche de ce «médiateur» consiste à défendre et à promouvoir les droits,
libertés et garanties des citoyens portugais.
Article 2
Champ d'action
1) Les
activités du médiateur judiciaire sont d'exercer des services
publics ou des services d'exploitation des biens publics, en
particulier dans le contexte de l'activité des services de
l'administration publique centrale, régionale et locale, des Forces
armées, des instituts publiques, des entreprises publiques ou à
capitaux publics majoritaires.
2) Le champ
d'action du médiateur judiciaire peut également mettre l'accent sur
les relations entre les individus impliquant une relation spéciale
de prédominance,
dans le contexte de la
protection des droits, des libertés et des garanties. |
Le médiateur judiciaire est saisi
des plaintes des particuliers; il intervient par voie de recommandations adressées aux
autorités compétentes pour empêcher et réparer les injustices. Par exemple, après
qu'un conseil municipal du nord du Portugal eut décidé d'interdire l'établissement de
gitans en refusant l'installation de tout type de caravane ou de tente, le procureur
général de la République et le médiateur judiciaire ont immédiatement
réagi: le parquet a demandé l'annulation du règlement municipal au motif qu'il était
illégal, car il allait à lencontre, entre autres, du principe d'égalité.
- L'enseignement bilingue
Dans les faits, la politique portugaise en est une
déducation bilingue afin de faciliter lintégration sociolinguistique des
enfants dimmigrants. La
Loi fondamentale n° 46/86 sur le système
déducation prévoit les principes généraux pour la réorganisation du système
d'éducation portugais, et la plupart des dispositions juridiques réglementant le système
déducation sont basés sur cette loi.
De façon générale, lenfant est alphabétisé
dans sa langue maternelle lors du tout premier cycle du primaire (Ensino básico),
qui dure quatre ans, pour passer graduellement à lenseignement du portugais. Au
cours des deux autres cycles (deux ans pour chacun), lenseignement devient
systématiquement bilingue. Ce système se poursuit au secondaire (Ensino secundario),
mais le temps consacré au portugais comme langue denseignement devient
prépondérant. Pour léducation supérieure, seul lenseignement en portugais
est accessible.
L'article 8 du
décret-loi n° 6 sur l'enseignement
fondamental prévoit une
disposition concernant l'offre d'activités scolaires spécifiques pour
apprendre le portugais comme langue seconde pour les
élèves dont la langue maternelle n'est pas le portugais.
Article 8
Portugais comme langue seconde
Les écoles doivent offrir des activités scolaires
spécifiques afin d'apprendre
le portugais comme langue seconde pour les élèves dont la
langue maternelle n'est pas le portugais. |
Selon le décret-loi n° 6/2001,
l'activité d'enrichissement du programme d'études est une composante
hors programme ou complémentaire ("componente extracurricular"), ainsi
appelée parce qu'elle fait partie de la charge de travail exigée de
l'élève chaque semaine, car cette initiative n'est pas obligatoire pour
les enseignants.
7 Les médias et les langues
La presse est libre au Portugal
et elle n'est pas réglementée. Le pays a connu, au cours des
dernières années, la plus forte hausse hausse au plan du tirage de
journaux au sein de l'Union européenne (12,5%). Cependant, le nombre
de lecteurs y demeure relativement faible, car seules 73,5 personnes
sur 1000 lisaient un journal régulièrement (en 2000). Le
quotidien portugais le plus important est le Diário de Noticias
suivi du Correio da Manha. La revue financière et d'affaires
hebdomadaire, Visão, se vend à 98 000
exemplaires. L'Expresso est le journal du dimanche le plus
populaire, avec un tirage de 141 000 exemplaires. Outre les journaux
étrangers, toute la presse est en langue portugaise. La langue
mirandaise ne bénéficie
d'aucune présence dans les médias écrits, à l'exception de quelques
rares articles parus dans la presse locale et d'une colonne
mensuelle publiée dans le journal portugais
Publicó.
7.1 Les médias
électroniques
Dans les médias électroniques, le
radiotélédiffuseur national, la chaîne RTP (Rádio e Televisão de
Portugal: Radiotélévision portugaise), occupe le devant de la
scène avec ses succursales RTP 1, RTP 2, RTP Açores, RTP Madeira,
RTP Memória (programmes d'archives et d'histoire), RTP Internacional,
RTP África et RTP N (information en continu). Toutes les chaînes
portugaises diffusent en portugais. À la radio, il existe environ
300 stations de radio, mais elles ne sont que sept à émettre (en
portugais) sur tout le territoire national. Seules quelques rares
stations locales diffusent des émissions en mirandais, dont Rádio
Miradum FM (Miranda do Douro).
La législation protège la
production originale en langue portugaise. L'article 40 de la
Loi n° 32 du 22 août sur la
télévision
(2003) énonce que les émissions
télévisées doivent être «orales ou
sous-titrées en portugais»; les services de programmes de télévision
de couverture nationale, sauf ceux dont la nature et la thématique
s'y opposent et ces services doivent consacrer au moins 50 % de
leurs émissions à la diffusion de programmes d'origine en portugais:
Article 40
Défense de la langue portugaise
1) Les
émissions doivent être orales ou
sous-titrées en
portugais, sans
préjudice de l'emploi possible de toute autre langue dans le cas des
programmes qui répondent à des besoins informatifs occasionnels et à
l'enseignement des langues étrangères.
2) Les
services de programmes de télévision de couverture nationale, sauf
ceux dont la nature et la thématique s'y opposent, doivent consacrer
au moins 50 % de leurs
émissions à la diffusion de programmes d'origine en portugais,
à l'exclusion du temps d'antenne consacré à la publicité, au
télé-achat et aux services de télétexte.
3) Nonobstant le paragraphe précédent, les télédiffuseurs
doivent consacrer au moins 15 % du temps de leurs émissions à la
diffusion de
programmes créés à l'origine en portugais.
4) Les pourcentages visés aux paragraphes 2 et 3 peuvent être
comblés jusqu'à un maximum de 25 % des programmes des pays
lusophones autres que le Portugal.
5) Les opérateurs de télévision doivent s'assurer que le respect des
pourcentages visés aux paragraphes 2 et 3 ne sont pas effectués dans des
périodes d'audience restreinte.
|
Précisons que les émissions
en portugais peuvent provenir des autres pays de langue
portugaise (Brésil, Cap-Vert, etc.). Les opérateurs de
télévision doivent diffuser des programmes spécialement conçus
pour les Portugais vivant en dehors du Portugal et aux
ressortissants des pays de langue portugaise, également résidant
hors du Portugal (art. 47-e). Il en est ainsi dans la
Loi n° 33 du 22 août
approuvant la restructuration de la part entrepreneuriale de
l'État dans le domaine de l'audio-visuel (2003).
En ce qui a trait au mirandais,
dans la mesure où la radio et la télévision ont une mission de
service public, le gouvernement portugais s'est engagé à encourager
et à faciliter la création d'une station de radio et d'une station
de télévision en mirandais, et à prendre les mesures appropriées
afin que les émissions soient programmées en mirandais. Dans les
faits, cette langue est quasi inexistante dans les médias
électroniques.
7.2 Le cinéma
Signalons qu'il existe une
réglementation concernant le cinéma. Par exemple, la
Loi n° 55/2012, du 6 septembre établissant les principes de l'action de
l'État dans le cadre de la promotion, du développement et de la
protection de l'art cinématographique et des activités
cinématographiques et audiovisuelles l'État portugais doit
Promouvoir la langue et de la culture portugaises ainsi que la
valorisation de l'image du Portugal dans le monde et approfondir la
coopération avec les pays lusophones:
Article 3
Principes et objectifs
1) Dans le cadre
des matières réglementées par la présente loi, l'État doit
être guidé par les principes suivants :
a) le soutien à la
création, à la production, à la distribution, à
l'exposition, à la diffusion et à la promotion d'œuvres
cinématographiques et audiovisuelles en tant
qu'instruments d'expression de la diversité culturelle,
d'affirmation de l'identité nationale,
de promotion
de la langue et de valorisation de l'image du Portugal
dans le monde, en notamment
en ce qui concerne l'approfondissement des relations
avec les pays lusophones;
2) Dans le cadre
des matières réglementées par la présente loi, l'État
poursuit les objectifs suivants :
a) Encourager la
création, la production, la distribution,
l'exploitation, la diffusion et l'édition d'œuvres
cinématographiques et audiovisuelles nationales,
notamment par des mesures de soutien et d'incitation ;
d) Promouvoir la
langue et de la culture portugaises
;
g) Approfondir la la coopération avec
les pays lusophones
;
|
Le Portugal est une petit pays qui
doit faire face à la concurrence mondiale, surtout américaine, parfois
espagnole, française ou italienne. Il doit faire des efforts pour
protéger sa langue nationale, mais en cette matière il peut aussi
compter sur le cinéma brésilien.
8 La politique de valorisation du portugais au plan international
Fort homogène au point de vue linguistique
aujourd'hui, le Portugal a longtemps été dialectophone. Jusqu'au
XXe siècle, le portugais officiel
n'était parlé que par l'élite, alors que les populations rurales continuaient de
parler leur langue locale. Les progrès du portugais comme langue nationale ont
suivi le progrès de la scolarisation, de l'urbanisation et de la démocratisation
de la vie sociale. Ainsi, la diffusion du portugais comme langue normalisée pour
toute la nation ne s'est achevée que dans le courant du XXe
siècle.
8.1 La diffusion du
portugais
En réalité, le Portugal semble avoir
développé davantage des ambitions au plan de la diffusion internationale de sa
langue. D’ailleurs, trois articles de la Constitution traitent de cette
question, soit les articles 7, 9 et 78
:
Article 7
Relations internationales
4) Le Portugal maintient des liens d'amitié et de coopération
privilégiés
avec les pays de langue
portugaise.
|
Article 9
Tâches fondamentales de l'État
Les tâches fondamentales de
l'État sont les suivantes:
e) Protéger et
renforcer le patrimoine culturel du peuple portugais,
défendre la nature et l'environnement, préserver les ressources naturelles
et assurer un bon aménagement du territoire;
f) Assurer l'enseignement et
l'évaluation permanente,
défendre l'usage et promouvoir la diffusion internationale de la langue
portugaise ;
g) Promouvoir le
développement harmonieux de tout le territoire national, en tenant compte
notamment du caractère ultrapériphérique des archipels des Açores et de
Madère;
|
Article 78
Avantages et création culturelle
1) Tous ont droit aux
avantages et à la création culturelle, ainsi qu'au devoir de préserver,
défendre et valoriser le patrimoine culturel.
2) Il appartient à
l'État, en collaboration avec tous les agents culturels :
a) D'encourager et assurer
l'accès pour tous les citoyens aux moyens et instruments d'action
culturelle, ainsi que corriger les déséquilibres existant dans le pays dans
ce domaine ;
b) De soutenir les
initiatives qui stimulent la création individuelle et collective dans ses
multiples formes et expressions, ainsi qu'une plus grande circulation des
œuvres et des biens culturels de qualité ;
c) De promouvoir la
sauvegarde et le développement du patrimoine culturel en rendant vivifiant
l'élément de l'identité culturelle commune ;
d) De développer les
relations culturelles avec tous les peuples,
surtout ceux de langue
portugaise, et assurer la
défense et la promotion de la culture portugaise à l'étranger ;
e) D'articuler la politique
culturelle et les autres politiques sectorielles. |
Mais la
Loi n° 49 du 31 août sur l'éducation
(2005) va plus loin que les dispositions
constitutionnelles. En effet, l'article 25 de la loi 49 oblige l'État
notamment à «promouvoir
la diffusion et l'étude de la langue et de la culture portugaises à
l'étranger», encourager «la création d'écoles portugaises» et offrir des
cours pour «l'enseignement de la langue et de la culture
portugaises pour les
travailleurs émigrants et leurs enfants»:
Article 25
Enseignement du portugais
à l'étranger
1) L'État doit
promouvoir la diffusion et l'étude de la langue et de la culture
portugaises à l'étranger
par l'entremise de divers moyens et de diverses mesures visant,
entre autres, à leur introduction dans les programmes des autres
pays, ainsi que la création et l'entretien des lectorats portugais,
sous la direction des enseignants portugais dans les universités
étrangères.
2)
La création d'écoles portugaises doit être encouragée dans les pays de langue
portugaise portugais et dans les communautés d'émigrants portugais.
3)
L'enseignement de la langue et de la culture portugaises
pour les
travailleurs émigrants et leurs enfants est assuré par des cours
et des activités de promotion dans les pays d'immigration en régime
d'intégration ou de
complémentarité relativement aux systèmes respectifs d'éducation .
4) Les
initiatives d'association d'entités portugaises et étrangères,
publiques et privées, seront encouragées et soutenues par l'État,
lorsqu'elles contribuent à la réalisation
des objectifs énoncés dans le présent article. |
Cependant, le Portugal a
aussi adopté un décret-loi portant exclusivement sur l'enseignement du
portugais à l'étranger : le
décret-loi n° 234/2012 du 30 octobre.
L'article 2 du décret-loi décrit les objectifs de l'enseignement du
portugais à l'étranger :
Article 2
Objectifs
1) L'enseignement du portugais à l'étranger
est destiné à affirmer
et à diffuser la langue portugaise dans le monde comme une grande
langue de communication internationale et à promouvoir la culture
portugaise.
2)
L'enseignement du portugais à l'étranger
est également destiné à
offrir l'apprentissage de la langue, de l'histoire, de la géographie et
de la culture nationale, en particulier les communautés portugaises. |
L'article 4 du
décret-loi n° 234/2012 énonce les responsabilités de l'État
portugais en la matière:
Article 4
Responsabilité de l'État
1)
Il
incombe à l'État, en conformité avec les principes visés à l'article
précédent :
a)
La promotion et la diffusion de l'enseignement et de
l'apprentissage du portugais comme langue maternelle
et non comme langue seconde ni comme langue étrangère;
b) La promotion et la diffusion de l'étude
de l'histoire, de la géographie et de la culture portugaises;
c) La qualification et l'amélioration de l'enseignement et
de l'apprentissage de la langue et de la culture portugaises
dans le monde.
2) Pour s'acquitter pleinement de cette responsabilité, l'État
doit mettre en place et développer la coopération avec les
organisations de la société civile, en particulier avec les
institutions ou associations ayant des fonctions culturelles et
éducatives, ainsi que des partenariats avec des établissements
d'enseignement étrangers et les organisations internationales. |
Quant à l'article 5 de la loi,
il décrit en détails les formes
d'intervention de l'État : le
développement d'initiatives diplomatiques;
la promotion de cours et d'activités en régime de
complémentarité relativement aux systèmes d'éducation du pays
concerné; la
promotion et la diffusion de
l'enseignement de la langue, de l'histoire, de la géographie et de la
culture portugaise;
le recrutement, l'embauche et les contrats du personnel enseignant;
la formation et le soutien à la formation du personnel enseignant;la production de ressources didactiques et pédagogiques spécifiquement destinées à l'enseignement de la langue,
de l'histoire,
de la géographie et la culture portugaise à l'étranger, notamment
dans les systèmes d'enseignement à distance, etc.
8.2 L'Institut
Camões
L'Institut Camões, un institut pour la coopération et la langue, est une institution
publique qui a été créée le 15 juin 1992 au Portugal, sous la juridiction du
ministère portugais des Affaires étrangères, lequel est chargé d'assurer l'orientation, la
coordination et l'exécution de la politique culturelle du pays à l'étranger,
mais surtout de la diffusion de la langue portugaise.
La mission de l'Institut est de promouvoir la
langue et la culture portugaises à l'étranger. La loi portugaise confère au
Camões un statut de personne morale de droit public, dotée d’autonomie
administrative et patrimoniale. L'Institut travaille en collaboration
avec d'autres instances compétentes de l'État, principalement avec le
ministère de l'Éducation et de la Culture. Des accords de coopération
pédagogique peuvent être signés par le gouvernement portugais et d'autres
gouvernements étrangers (France, Allemagne, Japon, Maroc, Inde, Chine, etc.). Le siège central de
l'Institut se trouve à Lisbonne.
En 2012, le Portugal a adopté une loi importante, le
décret-loi n° 21/2012 du 30 janvier
sur l'Institut de la coopération et de la langue (2012). En fait, cette
loi
décrit avec précision l'Institut Camões,
c'est-à-dire
l'Institut pour la coopération et la langue, les objectifs et les fonctions
de l'Institut, le rôle du conseil d'administration, celui du Conseil
consultatif de la langue et de la culture portugaises ("Conselho Consultivo para a Língua e Cultura Portuguesas"),
celui des centres culturels portugais ("Centros culturais portugueses"),
les dépenses et les revenus, etc.
L'article 3.3 du décret-loi n° 21/2012 du 30
janvier sur l'Institut de la coopération et de la langue (2012)
énonce les objectifs de l'Institut
Camões, qui sont fort nombreux. Ils démontrent éloquemment les
préoccupations du Portugal pour propager sa langue dans le monde
entier:
Article 3
Objectifs et
fonctions
3) Les
fonctions du Camões, I.
P., sur la promotion extérieure de la langue et de la culture portugaises
sont les suivantes
:
a) Assurer la représentation du pays dans la négociation d'accords
culturels et leurs programmes de coopération, coordonner la
participation des départements de l'État ayant des responsabilités
dans les domaines de la culture, de l'éducation, de l'enseignement
supérieur, de la jeunesse, du sport et des médias ;
b) Établir des programmes d'aide à la création de chaires et de
départements universitaires de portugais ou de structures
équivalentes dans des universités étrangères ainsi que des écoles et
à la contractualisation locale d'enseignants;
c) Promouvoir, coordonner et
développer l'organisation de cours de langue portugaise
et d'autres contenus culturels, soit dans un système avec présence
soit au moyen des technologies de l'information et de communication
;
d) Élaborer, en coopération avec les
universités portugaises ou étrangères, des systèmes d'évaluation et
de certification des compétences pédagogiques et didactiques pour
l'enseignement et/ou
l'apprentissage du portugais et des compétences communicatives en
portugais ;
e) Établir des partenariats et
soutenir la réalisation d'études et de recherches sur la présence et
le statut de la langue et de la
culture portugaises, en
particulier dans la perspective de sa diffusion internationale;
f) Concevoir, promouvoir, proposer, soutenir et mener à la
production d'œuvres et de projets pour la diffusion de la langue et
de la culture portugaises à l'étranger ;
g)
Stimuler, soutenir et promouvoir des projets qui favorisent la
diffusion et l'échange international des formes d'expression
artistique, notamment dans les grands salons et dans les événements
internationaux ;
h) Établir des lignes directrices et des domaines prioritaires
d'intervention
dans les centres culturels portugais à l'étranger,
ainsi qu'en proposer la création;
i) Accorder des bourses, des subventions ou d'autres aides
liées à des accords culturels ou à des programmes de diffusion de la
langue et de la culture portugaises, conformément au règlement
interne ;
j) Coordonner les activités des chargés de
cours de la langue et de la culture portugaises
;
l) Développer et coordonner l'activité de formation des enseignants
dans les domaines
de la langue et la culture portugaises
;
m) Mettre au point des mécanismes nécessaires pour la consolidation
du réseau d'enseignement auprès des établissements d'enseignement
étrangers, y compris par la création de centres de langue portugaise ;
n) Promouvoir la conclusion d'accords de coopération culturelle et
en surveiller la mise en œuvre ;
o) Éditer du matériel de diffusion de la langue et de la culture
portugaises dans différents supports ;
p) Coordonner le travail des enseignants de la langue et de la culture
portugaises à l'étranger et promouvoir l'interaction entre les
différents niveaux et types d'enseignement ;
q) Assurer la
qualité de l'enseignement de la langue et de la culture portugaises
à l'étranger en fournissant un soutien scientifique et pédagogique ;
r) Encourager l'enseignement du portugais comme langue maternelle et
langue étrangère dans les programmes et les systèmes d'éducation,
notamment
dans les pays avec des communautés de langue portugaise. |
Quant à l''article 13 du
Décret-loi
n° 165-B/2009
du 28 juillet
sur le régime juridique des centres culturels de l'Institut
Camões
(2009), il
prescrit la
maîtrise
de
la langue portugaise
et
de la langue du
lieu de travail
pour postuler un emploi dans un centre culturel de l'Institut
Camões.
8.3 L'Académie des
sciences de Lisbonne
|
L'Académie
des sciences de Lisbonne (Academia das Ciências
de Lisboa) est l'organisme consultatif du gouvernement portugais en
matière linguistique. L'Académie compte deux grandes catégories de
recherches: celle des sciences (mathématiques, chimie,
physique, etc.) et celle des lettres (littérature,
philologie, linguistique, etc.). C'est pourquoi l'Académie
se préoccupe aujourd'hui des questions linguistiques. Selon
l'article 6 des
Statuts de l'Académie des sciences de Lisbonne, celle-ci coordonner son action avec l'Académie brésilienne
des lettres et les institutions culturelles des autres pays de
langue portugaise et des noyaux portugais à l'étranger. Il
appartient à ladite Académie de proposer au gouvernement ou
aux institutions scientifiques et services culturels des
mesures jugées appropriées pour assurer et promouvoir
l'unité et l'expansion de la langue portugaise. |
Article 6
En ce qui concerne l'unité et l'expansion de la langue portugaise,
l'Académie vise à coordonner son action avec l'Académie brésilienne
des lettres et les institutions culturelles des autres pays de
langue portugaise et des noyaux portugais à l'étranger.
Paragraphe unique.
Il appartient à l'Académie de proposer au gouvernement ou aux
institutions scientifiques et services culturels des mesures jugées
appropriées pour
assurer et promouvoir l'unité
et l'expansion de la langue portugaise. |
Or, les activités de
l'Académie des sciences de Lisbonne rayonnent à travers le
monde, particulièrement dans les pays lusophones, car les
décisions de l'Académie assurent le prestige des formes
préconisée en matière de langue portugaise.
|
Cette politique de valorisation
du portugais comme langue internationale se veut le prolongement de lancienne
politique coloniale du Portugal. On ne dénombre aujourdhui que deux pays
où le portugais est la langue maternelle de la grande majorité de la population,
le Portugal et le Brésil, ainsi que cinq pays dAfrique, sans
compter quelques îlots symboliquement lusophones
en Asie, tel
Macao (Chine).
Une anecdote mérite d'être soulignée: il s'agit de l'effigie du
championnat d'Europe de 2004. Les députés socialistes portugais avaient réagi avec
vigueur, car ils n'avaient pas semblé pas apprécier le choix du nom de la mascotte de
l'Euro 2004, Kinas. Selon eux, elle aurait dû s'appeler Quinas
(«écusson» en français), puisque la lettre K ne fait pas partie de l'alphabet
portugais et ne doit être utilisée que dans les mots étrangers. Pour les
socialistes, ce choix constituait une attaque à la «dignité de la langue portugaise
et des symboles nationaux». |
Dès le 18 décembre 1971, une convention internationale avec le
Portugal liait l'Académie brésilienne des lettres (Academia Brasileira de
Letras) dont le but était de maintenir la parité orthographique et
lexicale avec la langue portugaise du Portugal. En vertu de l’entente, le
portugais brésilien devait demeurer aligné sur la forme de prestige
préconisée par l'Académie des sciences de Lisbonne (Academia das Ciências
de Lisboa). Pour beaucoup de Brasileiros, la langue portugaise du
Brésil n'a jamais pu devenir tout à fait autonome.
8.4 L’accord orthographique
de 1990
Depuis 1990, de nombreux accords de coopération
scientifique et technique ont été signés entre le Portugal et le Brésil, ce
qui a donné lieu à plusieurs commissions communes de terminologie. Le traité
le plus important concerne l'Accord orthographique
sur la langue portugaise
de 1990 — Acordo Ortográfico da língua Portuguesa — qui a pris en
compte les différences linguistiques afin de réduire les difficultés liées
à la tendance naturelle à la différenciation et de préserver les intérêts
de la langue portugaise dans les pays lusophones.
À la suite des délibérations entre les délégations de
l'Angola, du Cap-Vert, de la Guinée-Bissau, du Mozambique et de São Tomé et
Príncipe, ainsi que des observateurs de la Galice (Espagne), les États
signataires — la République populaire d'Angola, la République fédérative
du Brésil, la république du Cap-Vert, la république de Guinée-Bissau, la
république de Mozambique, la république du Portugal et la République
démocratique de São Tomé et Príncipe — ont convenu des dispositions qui
suivent (l’accord comptant quatre articles).
L’article 1er ne fait que proclamer
l’adoption de l’accord orthographique de 1990, mais
l’article 2 énonce que les
États signataires prendront les mesures nécessaires en vue d'élaborer un vocabulaire orthographique commun de la langue portugaise en ce qui
concerne les terminologies scientifiques et techniques.
Article 2
Les États signataires doivent prendre, par l'entremise des institutions et organismes
compétents, les mesures nécessaires en vue de l'élaboration, jusqu'au 1er
janvier 1993,
d'un vocabulaire orthographique commun de la
langue portugaise, aussi complet que souhaitable et
normalisé que possible en ce qui concerne
les
terminologies scientifiques et techniques. |
Selon l’article 3,
l'Accord devait entrer en vigueur le 1er
janvier 1994, une fois que seront déposés les instruments de ratification de
tous les États signataires auprès du gouvernement de la république du Portugal.
Pour diverses raisons, la date butoir a été reportée en mai 2015, car en
janvier 1994 seuls le Portugal, le Brésil et le Cap-Vert avaient ratifié
l'accord. Quant à l’article 4, il oblige les États signataires à prendre les mesures
appropriées pour assurer le respect effectif de la date d'entrée en vigueur
établie à l’article précédent. Le document fut signé par les sept États, à
Lisbonne, le 16 décembre 1990.
Le traité est accompagné d’annexes
décrivant les points orthographiques et/ou grammaticaux sur lesquels porte l’accord:
alphabet, h initial et final, homophonie, séquences
consonantique, voyelles atones, voyelles nasales, accentuation des
oxytons/paroxytons, accent grave, tréma, trait d’union, apostrophe,
minuscules et majuscules, divisions syllabiques, etc.
Il subsiste des différences
relativement importantes entre le portugais européen et le portugais
brésilien.
Norme portugaise) |
Accord
orthographique |
acção («action») |
ação |
acto («acte») |
ato |
afecto («affection») |
afeto |
aspecto («aspect») |
aspeto |
infecção («infection») |
infeção |
óptimo («grand») |
ótimo |
recepção («réception») |
receção |
intersecção («intersection») |
interseção |
asséptico («aseptique») |
assético |
Egipto («Égypte») |
Egito |
|
Norme brésilienne |
Accord
orthographique |
lingüiça («saucisse») |
linguiça |
pingüim («pingouin») |
pinguim |
freqüência («fréquence») |
frequência |
qüinqüênio («quinquennat») |
quinquênio |
assembléia («assemblée») |
assembleia |
idéia («idée») |
ideia |
européia («européen») |
europeia |
abençôar («bénir») |
abençoar |
enjôo («nausée») |
enjoo |
vôo
(«vol») |
voo |
|
Ces différences concernent principalement les
accents, c'est-à-dire les signes accompagna nt les voyelles et les consonnes
pour en modifier la consonance (accent aigu, accent circonflexe, cédille, tréma,
tilde). Mentionnons aussi les lettres «muettes»: les Portugais écrivent
objecto («objet»), mais prononcent [ob-je-to]; ils devront donc écrire comme
les Brésiliens objeto. Par contre, les Brésiliens devront oublier
l'emploi du tréma dans freqüência qui devra s’écrire frequência.
Ils perdent d'autres accents jugés inutiles, par exemple l’accent de idéia,
qui devient ideia comme c'est le cas au Portugal.
Cela étant dit, l’Acordo
Ortográfico da Língua Portuguesa n'a pas fait que des heureux, y compris
au Portugal. Des campagnes de presse ont tout fait pour discréditer le traité.
Les mêmes événements se sont produits au Brésil, car
beaucoup craignent de perdre le caractère brésilien de la langue portugaise.
L'accord orthographique aurait dû entrer en vigueur le 1er
janvier 1994, mais à cette date seuls le Portugal, les Brésil et le
Cap-Vert avaient ratifié l'accord. La date-butoir a
été reportée en mai 2015 en raison des difficultés d'application, notamment en
Angola et au Mozambique. Les partisans de l’Accord considèrent que l'accord renforce la langue
portugaise dans le monde en réduisant son hétérogénéité, fruit de sa
dispersion géographique entre trois continents. Avec cet accord, le Brésil et le
Portugal pourraient enfin mettre en commun leurs efforts concernant la promotion
du portugais, surtout en Afrique où les différences sont en encore plus grandes.
8.5 La Communauté des pays de langue
portugaise
En 1996, le Portugal ainsi que sept de ses anciennes
colonies ont fondé la Comunidade dos Países de Língua Portuguesa (CPLP),
la Communauté des pays de langue portugaise. Les pays membres étaient les
suivants: outre le Portugal, l'Angola, le
Brésil, le
Cap-Vert, la
Guinée-Bissau, le
Mozambique et Sao Tomé-et-Principe.
Après son indépendance, le
Timor oriental a
rejoint l’organisation comme 8e pays membre.
La CPLP veut promouvoir la
langue portugaise ainsi que la culture commune qui unit les pays membres. Plus
particulièrement, les pays lusophones désirent collaborer dans le domaine de
l'éducation, mais chercheront aussi à renforcer les liens culturels,
politiques et économiques. La CPLP a son siège social à Lisbonne.
Grosso modo, les pays de la
CPLP veulent encourager la diffusion et l'enrichissement de la langue
portugaise, accroître les échanges culturels dans l’espace lusophone,
renforcer la coopération entre les pays de langue portugaise dans le domaine de
la concertation politique et diplomatique, encourager le développement
d'actions de coopération interparlementaire, développer la coopération
économique, dynamiser et approfondir la coopération dans le domaine
universitaire, de la formation professionnelle et dans les différents secteurs
de la recherche scientifique et technologique, mobiliser des efforts et des
ressources en appui solidaire aux programmes de reconstruction et de
réhabilitation, promouvoir la coordination des activités des institutions
publiques et entités privées, associations de nature économique et
organisations non gouvernementales œuvrant au développement de la coopération
entre les pays lusophones, etc.
- La Déclaration constitutive des pays de langue portugaise
Deux documents ont été signés par les États de la CPLP:
la Déclaration constitutive des pays de langue portugaise (du 17
juillet 1996) et les Statuts de la Communauté des pays de langue
portugaise, également du 17 juillet 1996.
La Déclaration constitutive a institutionnalisé la
Communauté des pays de langue portugaise (CPLP). L'article 3 de la Charte de la
Communauté des pays de langue portugaise exprime clairement les objectifs de
ces sept pays :
1) concertation politique et diplomatique entre ses
membres en matière de relations internationales, principalement dans le but
d'affirmer sa présence (de la CPLP) dans les congrès internationaux ;
2) la coopération, particulièrement dans les domaines
économique, social, culturel, juridique, technique et scientifique;
3) la mise en oeuvre de projets destinés à promouvoir et
à diffuser la langue portugaise.
- Les statuts des pays de langue portugaise
(CPLP)
La Déclaration constitutive est accompagnée des
Statuts
de la CPLP, qui comptent 22 articles. Seul l'article 3 traite de la langue
portugaise, les autres articles concernent le fonctionnement de la CPLP. Voici
les objectifs tels qu'énoncés par l'article 3:
a) la concertation politique et diplomatique entre ses membres en matière de
relations internationales, nommément en vue de renforcer leur présence aux
fora internationaux;
b) la coopération, nommément dans les domaines économique, social,
culturel, juridique, technique et scientifique;
c) la matérialisation de projets visant à la promotion et
à la diffusion de
la langue portugaise.
Encore ici, le Portugal se montre
très préoccupé de la diffusion de sa langue à travers le monde. De fait,
le Portugal, pratique une
politique d’internationalisation linguistique.
9 Les régions autonomes des Açores et de Madère
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Le Portugal
compte deux régions autonomes, les archipels des Açores et de Madère. Les
Açores
constituent un
archipel de neuf îles (et de plusieurs îlots) au milieu de l'océan
Atlantique, soit à environ 1200 km à l'ouest du continent européen; sa
superficie est de 2335 km².
Quant à
Madère,
c'est un archipel situé à 1000 km au sud-est de
Lisbonne, donc plus près du Maroc, avec une superficie totale des terres
de 794 km².
Plus au sud, on trouve
l'archipel des Canaries, appartenant à l'Espagne, situé à quelque
150 km des côtes africaines. |
Conformément à l’article 6 de la
Constitution, le Portugal demeure un État unitaire, y compris avec ses deux régions
autonomes:
Artigo 6
1) O Estado é unitário e respeita na sua organização e
funcionamento o regime autonómico insular e os princípios da
subsidiariedade, da autonomia das autarquias locais e da descentralização
democrática da administração pública.
2) Os arquipélagos dos Açores e da Madeira constituem regiões autónomas
dotadas de estatutos político-administrativos e de órgãos de governo
próprio. |
Article 6
1)
L'État est unitaire et respecte dans son organisation les principes de l'autonomie des
collectivités locales et de la décentralisation démocratique de l'administration
publique.
2)
Les archipels des Açores et de Madère
constituent des régions autonomes dotées de statuts politiques et administratifs et
d'organes de gouvernement qui leur sont propres.
|
Selon larticle 225, le régime politique et
administratif propre aux archipels des Açores et de Madère est «fondé sur les
caractéristiques géographiques, économiques, sociales et culturelles de ces régions et
sur les aspirations historiques autonomistes des populations insulaires». Mais
cest le troisième paragraphe qui doit retenir notre attention:
Artigo
Regime político-administrativo dos Açores e da Madeira
1) O regime político-administrativo próprio dos arquipélagos dos Açores e da Madeira fundamenta-se nas suas características geográficas, económicas, sociais e culturais e nas históricas aspirações autonomistas das populações
insulares.
2) A autonomia das regiões visa a participação democrática dos cidadãos, o desenvolvimento económico-social e a promoção e defesa dos interesses regionais, bem como o reforço da unidade nacional e dos laços de solidariedade entre todos os
portugueses.
3) A autonomia político-administrativa regional não afecta a integridade da soberania do Estado e exerce-se no quadro da Constituição.
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Article 225
Régime politico-administratif des Açores et
de Madère
1) Le régime politico-administratif propre
aux archipels des Açores et de Madère est fondé sur les caractéristiques géographiques, économiques, sociales et culturelles
de ces régions et sur les aspirations historiques autonomistes des populations insulaires.
2) La vie des régions vise la participation démocratique des citoyens, le développement
socio-économique et la promotion et la défense des intérêts régionaux, ainsi que le renforcement de l'unité nationale et des circuits de solidarité entre les tous les Portugais.
3)
L'autonomie politique et administrative régionale ne porte pas atteinte à la
souveraineté de l'État
et
s'exerce dans le cadre de la Constitution.
|
Cela signifie que les deux archipels doivent respecter
toutes les dispositions constitutionnelles du Portugal, y compris en matière de langue.
9.1 Les Açores
Larchipel des
Açores
(capitale: Ponta Delgada) est constitué de neuf îles et de plusieurs îlots,
au milieu de l'océan Atlantique, à environ 1200 km à l'ouest du Portugal.
Larchipel compte quelque 240 000 habitants. Presque tous les habitants des Açores
parlent le portugais comme langue maternelle; cest également la langue
officielle.
Dans
larchipel des Açores, la politique linguistique est la même quau Portugal.
Toute la vie politique, judiciaire, culturelle et économique se déroule dans cette seule
langue à lexception des classes daccueil destinées aux quelques enfants
dimmigrants. Depuis 1975, il sest développé dans cet archipel un mouvement
autonomiste et indépendantiste, mais quoi quil arrive à ce sujet le portugais
demeurera la seule langue dusage.
On peut consulter une page spécifique
consacrée à la politique linguistique des Açores
en cliquant
ICI, s.v.p.
9.2 L'archipel de Madère
Larchipel de Madère
(capitale: Funchal) est situé à 1000 km au sud-est de Lisbonne, face au Maroc,
et compte une population de 263 000 habitants qui parlent presque tous le portugais
comme langue maternelle.
Conformément à la Constitution qui
soumet larchipel aux mêmes obligations, le portugais est la langue officielle.
Toute la vie politique, judiciaire, culturelle et économique se déroule dans cette seule
langue à lexception des classes daccueil destinées aux quelques enfants
dimmigrants. Comme aux Açores, larchipel manifeste également des velléités
autonomistes, lesquelles nont rien à voir avec la langue.
Il est possible de consulter une page spécifique
consacrée à la politique linguistique de Madère
en cliquant
ICI, s.v.p.
10 La décolonisation du Timor oriental
|
Bien que le Timor oriental, cette ancienne colonie portugaise, ait
été envahi par les forces indonésiennes en 1975, les Nations unies nont jamais
entériné lannexion forcée du territoire et, au point de vue du droit
international, le Portugal demeure toujours la «Puissance administrante». Le 5
mai 1999, sous l'égide de l'Onu, l'Indonésie et le Portugal ont signé un accord qui, en
prévoyant un référendum pour le 30 août, ouvrait la voie à l'indépendance: 78,5 %
des Timorais ont refusé l'autonomie interne proposée par le gouvernement de
lIndonésie.
Par la suite, le Timor oriental a été mis à feu et à sang aussitôt
par des milices pro-indonésiennes ne dépendant pas du gouvernement mais jouissant d'une
impunité totale, et qui ont refusé de reconnaître l'écrasante victoire au référendum
en faveur de l'indépendance. Dans une démonstration de force sans précédent, les
milices indonésiennes se sont emparés de Dili, la capitale, et ont lancé une chasse
sanglante aux indépendantistes tout en détruisant 90 % de la ville. Après plusieurs
jours de tueries, de déportations et de pillages, lOnu a réussi à envoyer une
force dinterposition de 8500 Casques bleus (INTERFET) afin dimposer une forme
de paix. Le 20 septembre 1999, le Timor oriental devenait un territoire sous
administration provisoire des Nations unies. |
Il restait au Portugal, considéré alors comme la
«Puissance administrante», à abroger larticle 293 de la Constitution relatif au Timor
oriental:
Artigo 293
Autodeterminação e independência de Timor Leste
1) Portugal continua vinculado às responsabilidades que
lhe incumbem, de harmonia com o direito internacional, de promover e
garantir o direito à autodeterminação e independência de Timor
Leste.
2) Compete ao Presidente da República e ao Governo praticar todos os
actos necessários à realização dos objectivos expressos no número
anterior. |
Article 293
[abrogé]
Autodétermination et
indépendance du Timor oriental
1)
Le Portugal continue à assumer
les responsabilités qui lui incombent, conformément au droit international, visant à
promouvoir et à garantir le droit à l'autodétermination et à l'indépendance
du Timor
oriental.
2) Il appartient au président de la République et au gouvernement
dappliquer toutes les mesures nécessaires à la réalisation des objectifs
indiqués au paragraphe précédent.
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La révision constitutionnelle de 2001 n'avait
pas encore modifié cette partie de la Constitution portugaise, le Timor oriental
étant un État souverain depuis le 20 mai 2002. Cependant, la révision
constitutionnelle de 2004 a supprimé cette partie de la Constitution. On peut consulter la page Web consacrée au Timor
oriental (Timor Leste).