Trentino-Alto
Adige/Südtirol
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Trentin-Haut-Adige
Regione Autonoma Trentino-Alto Adige
Autonome Region Trentino-Südtirol
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Capitale régionale:
Trento
Population: 1,0 million (2010)
Langue officielle (province du Trentin):
italien
Langues officielles (province de Bolzano):
italien et allemand
Groupes majoritaires: italien (Trento); allemand (Bolzano);
Groupes minoritaires: allemand, ladin, mochène, cimbre
Système politique: région autonome formée de deux provinces: Bolzano et
Trento
Articles constitutionnels (langue):
art. 3 de la Constitution de 1947 et
Statut
spécial du Trentin-Haut-Adige (1972) abrogé par le
Statut
spécial pour le Trentin-Haut-Adige du 31 janvier 2001 ;
Loi constitutionnelle du 31 janvier
2001
Lois linguistiques italiennes:
Décret du président de la République
du 31 mai 1974, n° 417 : Règlement sur le statut juridique du
personnel enseignant, du personnel de gestion et d'inspection des écoles
maternelles, primaires, secondaires et des écoles artistiques de l'État;
Loi du 14 avril
1975, n° 103 en matière de
diffusion radiophonique et télévisée ;
Décret
du président de la République du 26 juillet 1976, n° 752 en
matière de proportionnalité dans les bureaux de l'État dans la province
de Bolzano et la maîtrise des deux langues dans la fonction publique;
Décret
du président de la République du 19 octobre 1977, n° 846
en matière proportionnelle dans les bureaux de l'État situés dans la
province de Bolzano et en matière de connaissance des deux langues dans
les emplois publics ;
Décret du président de la République du 6 avril 1984, n° 426
sur la création du tribunal administratif régional du Trentin et la
section autonome de Bolzano ;
Décret du président de la République du 15 juillet
1988, n° 574 sur l'emploi de l'allemand et du ladin dans les
relations entre les citoyens et l'administration publique et dans les
procédures judiciaires; Décret
législatif du 16 avril 1994, n° 297, en matière d'instruction; Décret-loi n° 321 du 2 septembre 1997
en matière de protection des minorités linguistiques dans la province du
Trentin;
Décret
législatif n° 487 du 15 décembre 1998
en matière d'initiatives pour la réception de programmes de
radiotélévision en ladin;
Décret législatif du 20 avril
1999, n° 161, en matière d'initiatives pour la réception de
programmes de radiotélévision en ladin; Décret
législatif n° 344 du 8 septembre 1999
concernant les écoles situées dans les localités ladines;
Règles en
matière de protection des minorités linguistiques historiques, n° 482, du 15 décembre 1999;
Règles de principe en matière
d'organisation du système de radiotélévision et de la RAI, n° 112 du
3 mai 2004; Décret législatif du 16 décembre 1993,
n° 592, en matière de
protection de la population de langue ladine dans la province du Trentin;
Décret du président de la
République, n° 345, du 2 mai 2001, portant sur les règles de
protection des minorités linguistiques historiques;
Décret législatif du 4 avril 2006,
n° 177: Règles d'application du Statut spécial de la région du
Trentin-Haut Adige/Sudtirol, concernant des modifications au décret du
président de la République du 15 Juillet 1988, n° 574, en matière de
protection de la population de langue ladine dans la province de Bolzano;
Décret législatif du 4 avril
2006, n° 178, concernant les modifications au décret législatif du
16 décembre 1993, n° 592, en matière de protection de la population de
langue ladine dans la province du Trentin;
Loi du 3 mai 2004, n° 112, en matière
d'organisation du système de radiotélévision et de la RAI ;
Décret législatif du 14 mai 2010, n° 86, sur l'équivalence des certificats d'aptitude en italien et en
allemand.
Lois régionales:
Loi
régionale du 20 novembre 1988, n° 26, sur les
mesures de compensation au bilinguisme et d'indemnité dans les
transcriptions des actes et documents;
Loi
régionale du 21 février 1991, n° 5, sur
l'amélioration du service de traduction dans l'administration
régionale et les mesures d'urgence en ce qui concerne le
personnel et le règlement du personnel des chambres de commerce,
etc.;
Loi régionale du 19 juin 2009,
n° 2, sur la publication et la diffusion du Bulletin officiel de la
Région autonome du Trentin-Haut-Adige. |
1 La région autonome
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L'Italie compte 102 provinces réparties dans 20
régions «à statut ordinaire». Cinq de celles-ci bénéficient d’un
«statut spécial»: outre le Trentin-Haut-Adige (en italien: Trentino-Alto
Adigo), il s’agit du Val-d’Aoste (Valle d'Aosta), du Frioul-Vénétie Julienne (Friuli Venezia Giulia), de la Sardaigne (Sardegna) et de la Sicile
(Sicilia). Ces régions
autonomes jouissent d’une autonomie législative et administrative assez
considérable.
L'article 116.3 de la
Constitution italienne reconnaît ce statut
spécial au Trentin-Haut-Adige/Südtirol, de même qu'au Frioul-Vénétie
Julienne, à la Sardaigne, à la Sicile et au Val d'Aoste:
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Article 116
1. Des formes et des
conditions particulières d'autonomie sont attribuées au
Frioul-Vénétie Julienne, à la Sardaigne, à la Sicile, au
Trentin-Haut Adige/Südtirol et au Val d'Aoste, selon les statuts
spéciaux respectifs adoptés par loi constitutionnelle.
2. La région autonome du
Trentin-Haut Adige/Südtirol se compose des provinces autonomes du
Trentin et de Bolzano.
3. Des formes et des
conditions particulières d'autonomie concernant les matières visées
au troisième alinéa de l'article 117 et les matières visées au
deuxième alinéa dudit article aux alinéas l), pour ce qui est de
l'organisation de la justice de paix, n) et s), peuvent être
attribuées, par la loi de l'État, à d'autres régions, à l'initiative
de la région intéressée, après avoir reçu l'avis des collectivités
locales, dans le respect des principes fixés par l'article 119.
Ladite loi est adoptée par les chambres à la majorité absolue de
leurs membres, sur la base d'une entente entre l'État et la région
intéressée.
[modifié par la loi de révision n° 3 du 18 octobre 2001]
|
Le paragraphe 2 du même article reconnaît un statut
d'autonomie aux provinces du
Trentin (en italien:
Provincia autonoma di Trento) et de
Bolzano (en italien: Provincia Autonoma di Bolzano / Alto Adige;
en allemand: Autonome Provinz Bozen / Südtirol), qui font partie de la Région
autonome du Trentin-Haut-Adige.
1.1 La situation
géographique
La Région autonome du Trentin-Haut-Adige
porte officiellement un nom bilingue: Regione
Autonoma di Trentino-Alto Adige en italien et Trentino-Südtirol
en allemand. Le
Trentin-Haut-Adige a une superficie de 13 607 km² et est situé au nord-est de l’Italie, c’est-à-dire
juste à la frontière sud du Tyrol autrichien (en all.: Tirol).
La Région est donc située entre la ville d'Innsbruck en Autriche et les
villes de Brescia et Verone en Italie. Au point de vue géographique, le Trentin-Haut-Adige fait
partie du Tyrol qui s'étend sur la chaîne des Alpes et comprend le Tyrol du
Nord (Autriche), le Tyrol de l'Est (Italie), le Tyrol du Sud (Italie) et le
Trentin (Italie).
Le nom de Trentin provient du nom de la capitale Trento, alors
que le Haut-Adige, appelé aussi le Tyrol du Sud (par
opposition au Tyrol autrichien situé au nord ou Tyrol du Nord), désigne la partie nord de
la région de l'Adige, un fleuve qui prend sa source dans les Alpes, aux
confins de la Suisse et de l’Autriche.Les organismes gouvernementaux de la région du Trentin-Haut-Adige sont le
Conseil régional (Consiglio regionale), le gouvernement régional ou
junte régionale (Giunta regionale) et le président du gouvernement
régional. Le Conseil régional (ou Parlement régional) est composé des députés
des diètes provinciales (parlements provinciaux) de Bolzano et du Trentin, ce
qui représente 35 membres pour chacune des provinces. Les réunions du Conseil
régional se tiennent successivement dans la ville du Trentin (pour la première
moitié du mandat) et à Bolzano/Bozen (pour la seconde moitié).
Le gouvernement régional (Giunta regionale) est formé en fonction
des communautés linguistiques, ce qui signifie que les italophones, les
germanophones et les ladinophones sont assurés d’être représentés au
gouvernement et au Conseil régional. Conformément à la Constitution, le
Conseil régional a la compétence législative dans les matières suivantes:
l’organisation
des services régionaux et du personnel qui leur est affecté, l’organisation
des services para-régionaux, l’organisation des collectivités locales et de
leurs circonscriptions, l’expropriation pour cause d'utilité publique, l’établissement
et la mise à jour des livres fonciers, les services de lutte contre les
incendies, l’organisation des établissements de santé et hospitaliers, l’organisation
des chambres de commerce, le développement de la coopération et surveillance
des coopératives, l’assistance pour des ouvrages publics réalisés par
d'autres organismes publics et compris dans le cadre du territoire régional.
Bref, rien au sujet de la langue qui reste l’une des prérogatives du
Parlement italien.
1.2 Les deux provinces du
Trentin-Haut-Adige
La Région autonome du Trentin-Haut-Adige est
elle-même formée de deux
provinces autonomes, Bolzano/Bozen au nord et Trento (en français
Trente) au sud.
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Au nord,
la province de Bolzano/Bozen porte à la fois un nom italien et
allemand: Provincia autonoma di Bolzano Alto Adige et
Autonome Provinz Bozen Südtirol. Historiquement, la
province italienne de Bolzano (Südtirol) est liée au Tyrol
autrichien dont elle faisait auparavant partie jusqu’en 1919 (voir
la carte). En 2009, la population du Südtirol était de 500 030
habitants. |
Au sud, la province
du Trentin (Trento en italien) porte le nom de Provincia
autonoma di Trento. En 2009, la population de cette province
était de 519 800 habitants. |
Il s'agit là des seules provinces italiennes
dotées de véritables pouvoirs législatifs, dans la mesure où elles ne sont que fort peu
soumises à la Région du Trentin-Haut-Adige. Les deux provinces sont en effet
titulaires d’un pouvoir législatif similaire à celui des régions autonomes et
celui de l’État italien. La quasi-totalité des compétences
régionales fut transférée aux provinces. En fait, la Région, sauf
pour quelques rares exceptions (organisation de la Région, sécurité civile,
impôt foncier, etc.), a comme rôle principal de coordonner la politique des deux
provinces. Ainsi, le Conseil régional (ital.: Consiglio regionale) est
formé des deux assemblées provinciales (Consiglio provinciale,
anciennement Dieta provinciale ou «Diète provinciale»), ce qui signifie
qu'il n'existe pas de conseil régional distinct. Le Conseil
provincial de chacune des provinces désigne une instance exécutive appelée
Junte provinciale (Giunta provinciale). À la tête du Conseil
provincial on trouve un «président» (Presidente) qui préside également la
province et la Junte provinciale. Il désigne ses «assesseurs» (assessori)
parmi les membres de la Junte et dirige les services administratifs de la
province. Les membres Conseil provincial et le président de la province sont
élus par les citoyens résidant dans la province. Alternativement, aux deux ans,
la présidence de la Région passe du président d'une province à l'autre. La ville
du Trentin est la capitale du Trentin-Haut-Adige, mais Bolzano est le siège du
Conseil régional et d'une partie de l'administration régionale.
Chacune des deux provinces (Trento et Bolzano) dispose d’un Exécutif
provincial (Junte provinciale) responsable de l'application des lois adoptées par le Parlement
régional et de celles du Conseil provincial, puis administre la province. Le
gouvernement provincial se compose du gouverneur de la province, d'un
vice-gouverneur de langue allemande et d'un autre de langue italienne, ainsi que
des conseillers provinciaux.
La scission
du Trentin-Haut-Adige en deux entités distinctes, la Province autonome du
Trentin et la Province autonome de Bolzano, est destinée à assurer à la minorité
germanophone du «Tyrol du Sud» une autonomie territoriale et garantir sa
protection au sein de la Région du Trentin-Haut-Adige.
Le Trentin-Haut-Adige compte 223 communes
dans la province du Trentin et 116 dans la province de Bolzano (Südtirol). On
peut aussi consulter la carte des sous-régions (voir
la carte). L'État italien a officiellement remplacé, depuis la
modification constitutionnelle du 31 janvier 2001, le terme Trentino Alto Adige par
la
dénomination bilingue «Trentino Alto Aldige
/ Südtirol», ce qui en français se traduit par Trentin-Haut-Adige /
Sud-Tyrol.
2 Données démolinguistiques
La Région du Trentin-Haut-Adige comptait en 2009 plus d'un
million d'habitants (plus précisément : 1 019 830), dont 519 800 dans la
province du
Trentin (50,9 %) et 500 030 dans la province de Bolzano (49 %).
|
La Région autonome du Trentin-Haut-Adige
/ Sud-Tyrol
comprend trois groupes linguistiques inégaux parlant l’italien
(65 %), l’allemand (32
%) ou le ladin (3 %). La
filiation linguistique de l'italien en tant que
langue romane et de l'allemand
en tant que langue germanique
est généralement bien connue. Mais le cas du ladin est en principe
plus méconnu. À l’instar
de l’italien, du français, de l’espagnol, etc., le ladin fait partie des langues
romanes dont il constitue un sous-groupe particulier avec le romanche et le
frioulan. Il s'agit des langues dites rétho-romanes
(voir la structure arborescente et la
carte linguistique). Le romanche est
parlé dans le canton suisse des Grisons, le ladin,
dans les provinces italiennes de Bolzano et du Trentin et le
frioulan
dans le Frioul-Vénétie Julienne en Italie, à l'est des Alpes (voir
la carte linguistique des langues rhéto-romanes). |
Province |
Toponyme alternatif |
Population (2009) |
Superficie (km²) |
Densité (hab./km²) |
Province autonome de Bolzano |
Haut-Adige, Tyrol du Sud |
500 030 |
7 399,97 |
67,57 |
Province autonome du Trentin |
Trentin |
519 800 |
6 206,90 |
83,75 |
Trentin-Haut-Adige |
Trentin-Tyrol du Sud |
1 019 830 |
13
606,87 |
74,90 |
|
2.1 Les italophones du Trentin Les italophones
sont minoritaires dans la province de Bolzano (26,4 %), mais
majoritaires dans la province du Trentin (98 %). Ils occupent presque
tout le territoire de la province du Sud, mais au nord ils vivent
principalement dans les villes de Bolzano/Bozen, Méran et Leifers,
ainsi que dans les quelques centres urbains de cette province.
Dans le Trentin, les italophones parlent soit
l'italien standard comme langue maternelle soit une variété
dialectale appelée le
trentino (le «trentin»), notamment dans
la province du Trentin. Cette langue non officielle, le dialetto trentino,
est assez proche du vénitien, mais conserve des influences du lombard, du ladin et de
l'allemand. Ainsi, le nom de certains outils utilisés en agriculture et en
artisanat proviennent souvent de l'allemand. Le dialecte trentin est encore grandement
employé dans les zones rurales et les petits centres urbains.
Cependant, tous les italophones écrivent en italien standard.
|
2.2 Les germanophones
Si les germanophones sont majoritaires dans la province de
Bolzano/Bozen (69,1 %), ils sont fortement minoritaires dans la province du
Trentin (0,6 %). Ils occupent pratiquement tout le territoire de la province de
Bolzano/Bozen, mais uniquement quelques îlots linguistiques dans la province du
Sud: ils sont concentrés dans la vallée de Mòcheni (communes
de Fierozzo/Vlarötz, Frassilongo/Garait et Palù del Ferzina/Palai en Bersntol)
et de Lucerne (Luserna/Lusérn).
Les germanophones du Trentin ne parlent généralement pas
l'allemand standard comme langue maternelle. Ce sont, en principe, des anciens «Autrichiens du Tyrol»
parlant l’une des variétés
dialectales de type austro-bavarois: le tyrolien du Sud
(ou Südbairisch). Cette variété austro-bavaroise,
généralisée dans la province de Bolzano/Bozen, est fortement
influencée par la langue italienne. Dans la province du Trentin, les
germanophones parlent aussi des variétés austro-bavaroises proches du tyrolien
du Sud (ou Südbairisch): il s’agit du fersentaler ou
mochène
(ou mòcheno) et du cimbre (ou
cimbro). Tous les germanophones du Trentin-Haut-Adige font partie des minorités
nationales en Italie. Ils constituent des populations autochtones au même titre
que les italophones et les ladinophones.
Toutefois, si le plurilinguisme semble bien réel dans le
Trentin-Haut Adige, les italophones éprouvent des difficultés dans l’emploi de
l'allemand. En effet, les germanophones n'utilisent l’allemand standard (Hochsprache)
que dans des circonstances formelles et dans les écoles, alors qu'ils ont
recours dans les autres circonstances au tyrolien du Sud (Südbairisch).
Cette diglossie de la communauté germanophone constitue un véritable obstacle à
la diffusion du bilinguisme parmi les italophones, qui apprennent l’allemand,
mais ne comprennent pas le tyrolien.
2.3 Les ladinophones
La Ladins forment 4,3 % de la population de la province de
Bolzano/Bozen, contre 1,4 % dans la province du Trentin. Dans toute l'Italie, on
compterait quelque 30 000 ladinophones, dont 21 000 dans la province du Nord, et
8000 dans la province du Sud. Les ladinophones sont répartis dans trois
provinces: Bolzano/Bozen, Trento et Belluno (voir
la carte linguistique).
Dans la province de Bolzano, la langue ladine s’est
maintenue jusqu'à aujourd'hui dans les deux vallées des Dolomites, la vallée
de Gröden et celle de Gader. Le pourcentage de la population utilisant
quotidiennement le ladin s'élèverait à 98 % au Val Badia et à 60 % au Val Gardena.
Dans les huit communes de ces vallées, environ 90 % de la population (1991) a
déclaré appartenir au groupe linguistique ladin; les Ladins sont majoritaires
dans toutes ces communes.
Dans la province du Trentin, les populations ladinophones occupent les communes
septentrionales de Campitello Val di Fassa, Canazei, Mazzin, Moena, Pozza di Fassa, Soraga et Vigo di Fassa et une partie de la commune de Val Pusteria. En tant que groupe
linguistique le plus petit de la Région du Trentin-Haut-Adige, et ce, dans les
deux provinces, les Ladins appartiennent
à la minorité linguistique la plus menacée.
Dans la situation actuelle, les Ladins d'Italie sont
répartis entre deux régions autonomes (Trentin-Haut-Adige et Vénétie) et trois
provinces (Bolzano, Trento et Belluno), et sont donc protégées selon trois
mécanismes juridiques différents.
3 Données historiques
Le territoire de l’actuelle région autonome du Trentin-Haut-Adige fut
conquis par les Romains au Ier siècle avant notre ère et la
population fut entièrement latinisée. On comprend qu’avec les siècles se
développèrent les langues ladines, toutes issues du latin.
3.1 La germanisation du territoire
Mais à la fin du Ve siècle, les Ostrogoths, qui se déplaçaient
vers le sud, occupèrent la région du Tyrol autrichien ainsi que celle du Tyrol
du Sud et y introduisirent leur langue germanique. La région fut ensuite prise
par les Lombards (VIe siècle), puis par les Francs (VIIIe
siècle) avant de devenir une possession du Saint Empire romain germanique.
Seule une partie de la population latinisée conserva sa langue: le ladin qu’on
retrouve aujourd’hui dans la région. Cependant, du point de vue linguistique,
le territoire du Trentin-Haut-Adige — l'ancienne «Vénétie-Tridentine» (ou
Alpes tridentines) — est considéré comme une aire linguistique germanophone,
sauf pour ce qui est des vallées de langue ladine. Ainsi, ce territoire
constitue un carrefour où se rencontrent les langues germaniques du Nord et les
langues latines du Sud.
Dès le début du XIIe siècle, la ville de Bolzano/Bozen devint
un centre de commerce et d'affaires, mais surtout un important lieu de rencontre
des cultures germanique et latine. La ville commerçante atteignit son apogée
au début du XVIIe siècle par la création d’une autorité
municipale bilingue. La capitale de la province du Südtirol (Bolzano/Bozen) est, encore aujourd’hui,
restée fidèle à sa fonction économique et culturelle, agissant comme un pont
entre les aires de langue allemande et italienne. Quant à la ville de Trento
(Trente en français), elle devint célèbre en raison du concile qui s'y tint de
1545 à 1563. Le concile de Trente fur l'un des plus importants de l'histoire du
catholicisme. Convoqué par le pape Paul III en 1542, le concile de Trente débuta
le 13 décembre 1545 pour se terminer dix-huit ans plus tard, après avoir couvert
cinq pontificats (Paul III, Jules III, Marcel II, Paul IV et Pie IV) et
tenté de répondre aux demandes formulées par Martin Luther dans le cadre de la
Réforme protestante.
Sous la souveraineté des Habsbourg d’Autriche, les princes-archevêques
gouvernèrent la région de 1363 à 1802 (à l’exception d’une période d’occupation
française de 1797 à 1801), date à laquelle la principauté fut laïcisée et
intégrée politiquement au Tyrol autrichien. Les Français reprirent la région
en 1809 (avec la création du département français du Haut-Adige), mais elle
fut rendue à l’Autriche en 1814. Puis ce fut la Première Guerre mondiale
avec comme conséquence la disparition de l’Empire austro-hongrois.
3.2 Le rattachement à l’Italie
Le traité de
Versailles, signé le 28 juin 1919, mit un terme à l’Empire
austro-hongrois, mais ce fut le traité de Saint-Germain-en-Laye de 1919 qui
rattacha à l’Italie le Tyrol du Sud et la province du Trentin (ainsi que la
province de Trieste et le Frioul-Vénétie Julienne). Selon les termes du traité
de Saint-Germain-en-Laye, le Tyrol du Sud et la province du Trentin, auparavant
sous la souveraineté de l'Empire austro-hongrois, furent rattachés à l'Italie.
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À cette époque, la
région du Trentin-Haut-Adige ne comptait que 7000 italophones, mais plus de 220
000 germanophones. Il s’agissait pour l’Italie d’une acquisition
considérable, au surplus obtenue facilement de la part des puissances alliées.
La grande majorité des germanophones du Südtirol ont à l'époque considéré ce
«rattachement» comme une véritable «annexion» par l'Italie. En effet, les Tyroliens du Sud croyaient que
le Tyrol autrichien, qui comprenait alors le «Tyrol du Nord» (all.: Nordtirol),
le «Tyrol de l'Est» (all.: Osttirol), le «Tyrol du Sud»
(all.: Südtirol) et le Trentin (all. : Welschtirol
signifiant «Tyrol celte» ou «latin»), serait partagé
conformément à la frontière linguistique, donc entre le Tyrol du Sud et le
Trentin. Or, ce n'est pas ce qui s'est passé: les Italiens ont
annexé le Haut-Adige (Tyrol du Sud) en ne respectant pas la
frontière linguistique. Ils n'ont pas accepté le principe
d’autodétermination des germanophones et des ladinophones. Ils ont plutôt consenti à des
accommodements linguistiques à l'égard des germanophones de la
nouvelle «province de Bolzano» (Südtirol). Mais les
germanophones ne se sont jamais considérés comme des «Italiens». |
Au début des années 1920, Mussolini prit le pouvoir en Italie et
fit interdire l'usage officiel de la langue allemande, sous peine de sanctions
graves, et réussit à supprimer des services publics la quasi-totalité des
«Tyroliens du Sud» de langue allemande, c’est-à-dire les «personnes de
race étrangère», comme le rappelait Mussolini dans un discours au Parlement
de Rome en 1928. Les fascistes italiens entreprirent une politique d'italianisation
du territoire en y introduisant des milliers de travailleurs italophones venus
de toute la péninsule. Pour leur assurer des emplois, on encouragea les
grandes entreprises à s'installer dans la région, grâce à une série de
mesures fiscales avantageuses. La volonté de supprimer tout «élément étranger»
fut telle que même l’appellation Tyrol fut interdite.
Cette politique eut pour effet, d’une part, de forcer un nombre
appréciable de germanophones à quitter le Tyrol du Sud et, d’autre part, d’imposer
l'italianisation des toponymes et même des patronymes (noms des individus). Le
nombre des expatriés germanophones augmenta après les accords Mussolini-Hitler
(1939), lorsque de nombreux habitants du Tyrol du Sud choisirent d'émigrer en
Allemagne. Lorsque les troupes alliées débarquèrent en Italie du Sud, l’armée
italienne capitula sans condition, le 8 septembre 1943. Puis le nord du pays fit
envahi par la Wehrmacht allemande. La région du Trentin-Haut-Adige faisait alors
partie de la Zone d’opération des Préalpes (ZOP), une région que les
fascistes contrôlaient difficilement. La langue allemande fut aussitôt restaurée
dans les postes publics, les école, les journaux, les patronymes, les toponymes.
Ce fut autour des italophones de subir la discrimination. Cette occupation nazie
contribua à développer un fort sentiment nationaliste chez les Italiens de la
région. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, quelque 12 000 germanophones
retournèrent en Italie. Néanmoins, la croissance du groupe linguistique
italophone se poursuivit et favorisa l'immigration massive de cette communauté
linguistique. La population italophone s'est concentrée principalement dans les
villes, dans les vallées et dans la zone industrielle de Bolzano/Bozen. Malgré
tout, les germanophones restèrent majoritaires dans la province de Bolzano.
Aussitôt après la fin de la guerre, surgit une formation politique, le
Südtiroler Volkspartei (SVP), qui réclama le droit à l’autodétermination,
l’annexion à l’Autriche, sinon la création d’un État autonome, le Tyrol.
Mais les annexions des territoires germanophones furent à nouveau confirmées par
le traité de Paris de 1946 et le traité de Saint-Germain-en-Laye de 1947.
Selon les termes de ces accords, l'Italie s'engageait à assurer l'égalité des
langues allemande et italienne dans cette région bénéficiant d’une certaine
autonomie en 1948. De fait, le Trentin-Haut-Adige est devenu officiellement une
région à statut autonome en 1948, après l'accord austro-italien De
Gasperi-Gruber (du nom des ministres des Affaires étrangères de l’Autriche
et d’Italie). Il était prévu que, par des mesures particulières et des lois
à promulguer, «les citoyens de langue allemande» retrouveraient, après
l'époque de la répression fasciste envers la population de langue allemande,
«le droit à l'usage des langues allemande et italienne dans les services
publics et les documents officiels». On peut lire les dispositions linguistiques de
l'accord De Gasperi-Gruber (Annexe IV)
en cliquant ICI, s.v.p.
Cependant, même si ces mesures de
protection avaient été prévues pour la seule province de Bolzano et non pour
celle du Trentin, l’autonomie administrative fut étendue aux deux provinces,
et ce, malgré de violentes résistances de la part des représentants du Südtirol. En vertu du Statut d’autonomie de 1948, des compétences
considérables furent attribuées à la Région, mais les dirigeants régionaux
se les approprièrent avec comme conséquence que les provinces n’en reçurent
que très peu. Pour les germanophones, ces pouvoirs provinciaux furent
considérés comme insignifiants.
3.3 Les revendications germanophones
De toute façon, l’application des mesures prévues à la Région se fit
tellement attendre que l'impatience et la déception des germanophones de la
province de Bolzano s'en trouvèrent exacerbées. Une
autonomie restreinte fut alors accordée à la région. Après le traité de
Vienne du 15 mai 1955, restaurant la totale indépendance de l’Autriche, celle-ci
demanda une meilleure application de l’accord et de nouvelles négociations
bilatérales, toutes refusées par l’Italie entre 1958 et 1961. En 1957, les premiers
attentats à la bombe survinrent; le 17 novembre de la même année, une
importante manifestation fut organisée en guise de protestation au château
Sigmundskron et, deux ans plus tard, en 1959, le Parti populaire du Tyrol du Sud
(Südtiroler Volkspartei ou SVP), le principal parti politique
fondé en 1945, quitta le gouvernement régional en signe de protestation.
En
septembre 1960, comme l'Autriche prétendait rester la «puissance garante et
protectrice» des germanophones du Tyrol du Sud (en all.:
Südtirol), son ministre des Affaires
étrangères saisit les Nations unies de la question du Tyrol du Sud afin de
forcer le dialogue avec Rome. L’Assemblée
générale des Nations unies adopta deux résolutions en 1960 et 1961, et incita
les deux pays à négocier, ratifiant ainsi de façon implicite le droit de l’Autriche
à veiller au sort des Tyroliens du Sud, conformément aux termes du traité de
Paris. Comme ces efforts ne connurent pas le succès
escompté, la violence se poursuivit et aboutit à la Feuernacht (la
«nuit des Feux») du 11 juin 1961, alors que 37 attentats eurent lieu en une
seule nuit.
La violence s’est poursuivie au cours des années suivantes avec plus de 300 attentats
perpétrés par des extrémistes germanophones. De plus, le gouvernement italien
fut montré du doigt par l’opinion publique internationale lorsque les
représentants de la communauté germanophone allaient régulièrement
manifester leurs désaccords devant le parlement de Vienne en demandant leur
rattachement à l’Autriche et en dénonçant le non-respect par l’Italie des
accords internationaux.
Peu à peu, une série de mesures pour la mise en vigueur de l'administration
autonome furent conclues; elles furent adoptées le 23 novembre 1969 par
l'Assemblée plénière de la province de Bolzano, puis approuvées par les
gouvernements autrichien et italien. En
1969, l’accord dit «paquet» ou «pacchetto» en faveur de la minorité des
Tyroliens du Sud fut signé. Mais il aura fallu plus de 30 ans de patience et
de laborieuses négociations pour mettre au point le nouveau
Statut
d'autonomie de 1972, qui donna suite à cette égalité de droits au moyen
de modalités d'application et de divers décrets particuliers. Ce Statut d’autonomie
conférait aux provinces de Bolzano et du Trentin une assez grande autonomie à l’égard
de la Région autonome du Trentin-Haut-Adige et de l’État italien. Mais, surtout,
le nouveau statut d’autonomie de 1972 affirmait deux nouveaux principes : le
bilinguisme obligatoire dans l’administration publique (trilinguisme dans les
vallées ladines) et la règle de proportionnalité dans la vie politique et
sociale.
Les pouvoirs les plus importants sous la juridiction de la province de
Bolzano concernent la dénomination des lieux, la protection des valeurs
artistiques et populaires, les us et coutumes locales, l’artisanat,
l'assistance publique, les écoles maternelles, la construction des bâtiments
scolaires et l'assistance scolaire, l'entraînement professionnel, les
transports, le tourisme et l'hôtellerie, sans oublier l'aménagement du
territoire, la promotion des logements sociaux, la prévention des catastrophes,
l'exploitation minière, la chasse et la pêche, etc. Les compétences
considérées comme secondaires furent l'enseignement dans les écoles primaires
et secondaires, l'hygiène et la santé, le sport et l'organisation des loisirs,
le commerce, etc.
C’est seulement en mai 1989, après de fastidieuses négociations, que fut
promulgué le Décret du président de la République
n° 574/1988 pour la
parité des langues italienne et allemande, et pour l'utilisation de la langue
allemande dans l'administration publique, au tribunal, à la police, etc. Dans
la province de Bolzano/Bozen, les services gouvernementaux régionaux et
provinciaux sont tenus, lors de leurs relations avec les germanophones,
d'utiliser la langue allemande. Au cours de l’été de 1992, le gouvernement
autrichien annonça que le gouvernement italien avait finalement appliqué les
mesures de l’accord «paquet», soit après une vingtaine d'années d'attente. La
déclaration de l'Autriche mit ainsi un terme aux négociations entre les deux
pays au sujet du Trentin-Haut-Adige.
En 1996, l’Autriche et l’Italie informèrent
les Nations unies qu’une solution mutuellement satisfaisante avait été trouvée.
Aujourd’hui, l’Autriche continue à surveiller l’application de l’accord
et, compte tenu des bonnes relations qu’entretiennent maintenant entre les
deux pays, l’Italie ne lui conteste plus ce droit.
3.4 Les mesures de protection
|
Finalement, les germanophones de la province de
Bolzano/Bozen ont obtenu la séparation des écoles en
fonction de la langue (enfants germanophones et enfants italophones) et jouent
maintenant un rôle central dans la formation des gouvernements régionaux et
provinciaux, comme dans la plupart des municipalités de la province de Bolzano.
Enfin, Rome finit par adopter, le 31 janvier 2001, une troisième réforme du Statut d'autonomie
: le
Statut spécial pour le Trentin-Haut-Adige
(italien: Statuto speciale per il Trentino-Alto Adige; all.:
Sonderstatut
für Trentino-Südtirol),
dont l’entrée
en vigueur était prévue pour le 16 février 2001. Depuis lors, le Südtirol, la province de
Bolzano/Bozen, peut maintenant
décider librement la forme de gouvernement qu’il désire (par exemple, l’élection
directe du gouverneur de la province). De plus, un représentant du groupe ladin
peut être désigné au sein de la Junte provinciale (Giunta provinciale),
indépendamment de la représentation proportionnelle des Ladins. C'est à ce
prix que le calme est revenu et qu'ont disparu l'irrédentisme et les tensions
politiques avec Rome. Mais, contrairement à d’autres
minorités non italophones d’Italie, les germanophones de
Bolzano/Bozen ont bénéficié de certains facteurs historiques qui ont
favorisé le respect de leurs droits linguistiques. Ainsi, le fait que la
langue allemande soit considérée comme une grande langue de
communication «porteuse de culture» n’est pas négligeable.
|
Le fait également que l'annexion du
Tyrol du Sud s’est réalisée contre la volonté de la population constitue un
autre facteur d’une certaine importance, sans oublier la répression et
l'interdiction de la langue allemande durant la période fasciste. Il fallait
trouver des mesures destinées à faire oublier ces malheureux événements. Les
années 1980 ont néanmoins été marquées par des conflits entourant la
déclaration des groupes linguistiques, la résolution sur la représentation
proportionnelle dans la fonction publique, les tests sur le bilinguisme,
l'utilisation de la langue devant les tribunaux, l’apprentissage de la
«langue seconde» — l'italien pour les écoles allemandes, l'allemand pour
les écoles italiennes — à l'école maternelle, l'inscription dans les
écoles de langue allemande ou italienne, le choix des toponymes ou les modèles
d'immersion à l'école, etc.
Entre 1993-1998, l'autonomie fut élargie, notamment dans le domaine scolaire et
les compétences sur l’enseignement universitaire avec la fondation en 1997 de
l'Université libre de Bolzano/Bozen (ital.: Libera Università di Bolzano; all.:
Freie Universität Bozen; angl.: Free University of Bozen/Bolzano), la juridiction administrative, l’engagement de
l’État italien envers les droits des Ladins (loi constitutionnelle), la prise en
charge des routes nationales, etc. L'entrée en vigueur du troisième
Statut
d'autonomie du 31 janvier 2001 amena une réorganisation des
structures de la Région et des provinces du Trentin et de Bolzano (ou Südtirol). Le nouveau
statut réformé implique une attribution plus grande des pouvoirs pour les
provinces aux dépens de ceux la Région. Ce sont maintenant les provinces, non la
Région, qui décident des véritables politiques linguistiques et qui les
appliquent.
Rappelons que les modifications constitutionnelles du 12 mars
2001 ont reconnu pour la première fois le nom du Südtirol pour
désigner dorénavant la province de Bolzano. Dans ce pays, quand on parle de
«fédéralisme à l’italienne», on réfère à une minime décentralisation
administrative. Le 7 octobre 2002, les Italiens ont été appelés à se
prononcer par référendum pour renforcer «considérablement» les pouvoirs des
régions autonomes; le mot «dévolution» a été employé pour désigner cette
redistribution des pouvoirs dans les régions. Près de 80 % des Italiens (34 %
des ayants droit) ont approuvé cette mesure. La question était celle-ci:
Approuvez-vous le texte de la loi constitutionnelle concernant les
modifications au titre V, de la seconde partie de la Constitution, approuvé
par le Parlement et publié dans le Journal officiell n° 59, du 12
mars 2001?
|
En fait, il n’y a rien dans les nouvelles dispositions constitutionnelles
(articles 114 à 132) qui concernent directement la langue. Pour les
«régionalistes» italiens, il s’agit là d’une simple décentralisation
administrative qui accorde dans les faits un bilinguisme dans la dénomination
officielle de deux des cinq régions. En effet, l’ancien article 116 utilisait
les termes de Sicilia (Sicile), Sardegna (Sardaigne), Friuli Venezia
Giulia (Frioul-Vénétie Julienne), Trentino-Alto
Adige (Trentin-Haut-Adige) et
Valle d’Aosta
(Val-d’Aoste), alors que le nouveau texte mentionne maintenant Sardegna,
Sicilia, Friuli Venezia Giulia, Trentino-Alto Adige/Südtirol
et
Valle d’Aosta/Vallée d’Aoste.
Bref, seules les deux dernières régions autonomes sont maintenant affublées d’une dénomination
officiellement bilingue.
3.5 La province du Trentin
Jusqu'à la réforme du Statut d'autonomie de 2001, la province du Trentin ne s'était
que fort peu préoccupée de ses minorités ladinophones et germanophones.
Contrairement à la province de Bolzano/Bozen, qui a choisi un système de
protection basé sur la déclaration d'appartenance ethnique en fonction d'une
approche dite «personnelle» ou «individuelle», la Province autonome du Trentin a
introduit un critère territorial pour assurer la protection et la valorisation des
minorités linguistiques. Cela signifie que les minorités linguistique ne sont
protégées que dans les aires reconnues et non dans toute la province, alors que
dans la province du Nord toutes les minorités ont les mêmes droits, peu importe
leur lieu de résidence. Ainsi, dans la province du Trentin, les
minorités ladines résidant dans les communes du Val di Fassa et les minorités
germanophones du Val dei Môcheni (le groupe mochène) et de la commune de Luserna/Lusèrn
(le groupe cimbre) bénéficient d'une protection efficace. Tous les germanophones ou ladinophones résidant à l'extérieur des communes protégées ne bénéficient
d'aucun droit linguistique.
À la suite aussi de l'adoption par le Parlement national
de la loi n° 482 du 15 décembre 1999 (Règles en
matière de protection des minorités linguistiques historiques), de
la Loi provinciale n° 4 du 30 août 1999,
de la Loi provinciale n° 5 du 7 août 2006
(Système d'éducation et formation du Trentin) et surtout de la
Loi provinciale du 19 juin 2008, n° 6
(Règles de protection et de promotion des minorités linguistiques locales), les
minorités linguistiques sont maintenant protégées au plan juridique. La mise en œuvre des mesures de protection
prévues par la législation a entraîné la création du Service de promotion des
minorités linguistiques locales (Servizio per la promozione delle minoranze
linguistiche locali). Dans ce cadre, la réglementation nationale en
matière de minorités linguistiques (cf. la loi n° 482 du 15 décembre 1999
portant
dispositions en matière de protection des minorités linguistiques historiques)
prévoit d'autres
mesures ainsi que la possibilité pour les administrations
publiques d'accéder à des allocations financières de l'État italien.
Enfin, par la
Loi provinciale du 7 août 2006, n° 5
(Système d'éducation et de formation
du Trentin), la Province a affirmé le principe de la protection des minorités
linguistiques dans les établissements d'enseignement situés dans les
communes ladines, mochènes et cimbre (Luserna).
4 La protection juridique des langues minoritaires
Le statut juridique des langues pour la Région du
Trentin-Haut-Adige est défini à différents niveaux administratifs: le niveau
national (Parlement de Rome), le niveau régional (Conseil régional) et le
niveau provincial (Conseils provinciaux de Bolzano et du Trentin), voire le
niveau municipal (les communes). Cela signifie qu'une loi nationale prévaut
sur une loi régionale, laquelle a préséance sur une loi provinciale. En
principe, l'État italien définit le cadre juridique. Dans la présente
analyse, seules les dispositions juridiques s'appliquant à la région seront tenues en
compte. Cela signifie que, les dispositions juridiques concernant les
provinces elles-mêmes seront présentées dans des articles distincts dans
chacune des provinces: la
Province autonome de
Bolzano et la
Province autonome du Trentin.
Rappelons que, au point de vue juridique, les provinces de
Bolzano et du Trentin disposent depuis 2001, davantage de pouvoirs que n'en
possède la Région. Par exemple, toute modification du
Statut d’autonomie doit provenir des provinces et non pas de la
Région. Alors qu'avant 2001, la Région pouvait s’attribuer des pouvoirs, sans tenir
compte des provinces, maintenant ce sont les provinces qui ont le droit
d’intervenir auprès de la Région. De plus, les Ladins sont assurés
d’être représentés tant au Conseil régional qu’au gouvernement
régional, indépendamment de leur représentation proportionnelle.
4.1 La protection nationale
La protection accordée par la législation nationale, le
Parlement de Rome, est assez considérable. Mentionnons d'abord la
Constitution italienne de 1947 (articles 3 et 6),
ainsi que l'accord De
Gasperi-Gruber (1947), lequel équivaut à un texte constitutionnel. De plus,
l'Italie a adopté un statut juridique particulier pour la Région du
Trentin-Haut-Adige: le
Statut
spécial du 31 janvier 2001. Il existe aussi de nombreuses lois et
plusieurs décrets concernant strictement le Trentin-Haut-Adige ou l'une ou
l'autre des deux provinces constituantes (Bolzano et Trento). Voici une liste
non exhaustive de la législation nationale au sujet de la Région du
Trentin-Haut-Adige:
-
Statut
spécial pour le Trentin-Haut-Adige du 31 janvier 2001
- Décret du président de
la République du 31 mai 1974, n° 417 : Règlement
sur le statut juridique du personnel enseignant, du personnel de gestion et
d'inspection des écoles maternelles, primaires, secondaires et des écoles
artistiques de l'État;
-
Loi du 14 avril
1975, n° 103 en matière de
diffusion radiophonique et télévisée ;
- Décret
du président de la République du 26 juillet 1976, n° 752 en
matière de proportionnalité dans les bureaux de l'État dans la province
de Bolzano et la maîtrise des deux langues dans la fonction publique
;
-
Décret
du président de la République du 19 octobre 1977, n° 846 en matière proportionnelle dans les bureaux de l'État situés dans la
province de Bolzano et en matière de connaissance des deux langues dans
les emplois publics
;
- Décret du président de la République du 6 avril 1984,
n° 426
sur la création du tribunal administratif régional du Trentin et la
section autonome de Bolzano
;
- Décret du président de la République du 15 juillet
1988, n° 574 sur l'emploi de l'allemand et du ladin dans les
relations entre les citoyens et l'administration publique et dans les
procédures judiciaires;
- Décret
législatif du 16 avril 1994, n° 297, en matière d'instruction
;
- Décret-loi n° 321 du 2 septembre 1997
en matière de protection des minorités linguistiques dans la province du
Trentin ;
- Décret-loi n° 487 du 15 décembre 1998
en matière d'initiatives pour la réception de programmes de
radiotélévision en ladin ;
- Décret législatif du 20 avril
1999, n° 161, en matière d'initiatives pour la réception de
programmes de radiotélévision en ladin;
- Décret
législatif n° 344 du 8 septembre 1999
concernant les écoles situées dans les localités ladines ;
- Règles en
matière de protection des minorités linguistiques historiques, n° 482, du 15 décembre 1999 ;
- Règles de principe en matière
d'organisation du système de radiotélévision et de la RAI, n° 112 du
3 mai 2004 ;
- Décret législatif du 16 décembre 1993,
n° 592, en matière de
protection de la population de langue ladine dans la province du Trentin
;
- Décret du président de la République,
n° 345, du 2 mai 2001, portant sur les règles de protection des
minorités linguistiques historiques ;
-
Décret législatif du 4 avril 2006, n° 177:
Règles d'application du Statut spécial de la région du Trentin-Haut Adige/Südtirol,
concernant des modifications au décret du président de la République du 15
Juillet 1988, n° 574, en matière de protection de la population de langue ladine dans la province de Bolzano ;
- Décret
législatif du 4 avril 2006, n° 178 : Règlement
d'application du Statut spécial de la région du Trentin-Haut-Adige/Südtirol
concernant les modifications au décret législatif du 16 décembre 1993, n° 592, en matière de protection de la population de langue ladine dans la
province du Trentin ;
- Décret législatif du 14 mai 2010, n° 86, sur l'équivalence des certificats d'aptitude en italien et en
allemand ;
4.2 La protection régionale
Il faut compter également sur la législation régionale,
celle adoptée par le Conseil régional (ou Parlement régional) composé des
députés des diètes provinciales (parlements provinciaux) de Bolzano et du
Trentin, ce qui représente 35 membres pour chacune des provinces. Les lois
régionales en matière de langue ne sont pas nombreuses. En voici quelques-unes:
-
Loi
régionale du 20 novembre 1988, n° 26, sur les
mesures de compensation au bilinguisme et d'indemnité dans les
transcriptions des actes et documents;
-
Loi
régionale du 21 février 1991, n° 5, sur
l'amélioration du service de traduction dans l'administration régionale
et les mesures d'urgence en ce qui concerne le personnel et le règlement
du personnel des chambres de commerce, etc. ;
- Loi régionale du 19 juin 2009, n° 2, sur la publication et la diffusion du Bulletin officiel de la
Région autonome du Trentin-Haut-Adige ;
À cette législation il conviendrait d'ajouter les lois
provinciales, qui sont fort nombreuses, tant pour Bolzano/Bozen que Trento. Cependant, il convient de rappeler que
toutes ces
lois linguistiques (ou à incidence linguistique) ne s’appliquent pas
nécessairement à toute la région autonome, mais à une seule province, parfois en
conformité avec les résolutions adoptées par les conseils municipaux. Chacune des communes dispose de sa propre autonomie administrative,
dont les compétences comprennent tous les domaines qui concernent la
population et le territoire communal, notamment les services sociaux, les
écoles et la langue, la planification et l'utilisation du territoire, ainsi que
le développement économique. Autrement dit, des droits linguistiques reconnus
par le gouvernement italien en faveur des minorités nationales peuvent n’avoir
aucun effet dans la réalité si les élus locaux n’en veulent pas. Or,
lorsqu’on connaît les légendaires magouilles des politiciens de ce pays, il
faut comprendre que même les lois ne suffisent pas à faire appliquer les mesures
de protection. Dans le cas des deux provinces du Trentin, les loi linguistiques
sont généralement efficaces, car elles ont été entérinées par les provinces et
les communes concernées.
5 Les mesures réelles de protection
Les lois nationales peuvent donc laisser
libres certaines entités locales d'appliquer les dispositions juridiques en matière linguistique.
Ces lois correspondent souvent à des principes généraux dont la
portée réelle n'est pas évidente, car ce sont les régions, les provinces, voire
les conseils municipaux, qui décident de l'application des droits
linguistiques. Autrement dit, ce n'est pas l'État italien qui peut dicter ce qu'il faut faire.
Néanmoins, dans le cas du Trentin-Haut-Adige, certaines lois nationales
demeurent contraignantes en matière de droits linguistiques pour la Région et,
surtout pour la Province autonome de Bolzano/Bozen.
5.1 Le statut des langues dans la
Région du Trentin-Haut-Adige
L'article 99 du Statut
spécial pour le Trentin-Haut-Adige du 31 janvier 2001 ne proclame
pas formellement que l'italien et l'allemand sont les langues officielles de la
Région. Il énonce que «la langue allemande est à parité avec l’italien qui est
la langue officielle de l'État». D'ailleurs, il est stipulé que «la langue
italienne prévaut dans les actes ayant caractère législatif et dans les cas où
le présent Statut prévoit une rédaction bilingue»:
Article 99
Dans la Région, la langue allemande est à parité avec
l’italien qui est la langue officielle de l'État. La langue italienne
prévaut dans les actes ayant caractère législatif et dans les cas où le
présent Statut prévoit une rédaction bilingue.
|
Si la langue allemande est à parité avec
l'italien, il faut comprendre que ce statut ne vaut que pour
l'administration de la Région, pas nécessairement celle des
deux provinces. Ainsi, le même statut est autorisés dans la
Province autonome de Bolzano, mais pas dans la Province
autonome du Trentin.
De plus, il faut interpréter l'article 2 du
Statut spécial
d'autonomie pour comprendre que «les droits reconnus aux
citoyens de la Région, quel que soit le groupe linguistique
auquel ils appartiennent», sont égaux:
Article 2
La parité de droits est reconnue aux citoyens de la
Région, quel que soit le groupe linguistique auquel ils appartiennent, et le
respect de leurs particularités ethniques et culturelles est garantie.
|
C'est en ce sens qu'on peut considérer que l'italien et
l'allemand sont les langues officielles de la Région du Trentin-Haut-Adige. De
la même façon, on peut estimer que le ladin est aussi co-officiel dans les
localités ladines des provinces de Bolzano et du Trentin. Si l'allemand est
considéré comme officiel dans toute la province de Bolzano, ce statut n'est
attribué dans la province du Trentin que dans les localités ou vivent les
minorités germanophones mochèmes et cimbres. En fait, l'article 102 du
Statut d'autonomie de 2001 (ainsi
que celui de 1972, aujourd'hui abrogé) reconnaît aux minorités ladines et germanophones de la
province du Trentin un statut de minorité:
Article 102
1. Les populations ladines et celles du mochène et du
cimbre des communes de Fierozzo, de Frassilongo, de Palu de la Fersina et
Luserna ont droit à la valorisation de leurs initiatives et de leurs activités
culturelles, récréatives et celles concernant la presse, ainsi qu’au respect de leur toponymie
et de leurs traditions.
|
Bref, l'allemand est une langue co-officielle avec
l'italien pour la Région, mais uniquement pour la province de Bolzano et dans
les localités germanophones de la province du Trentin. Quant au ladin, il est co-officiel,
avec l'italien, dans les localités ladines des deux provinces.
5.2 L'application des droits
linguistique dans les lois et règlements
En vertu de l'article 57 du
Statut spécial
d'autonomie, au niveau de la Région, les lois et règlements doivent
être au moins bilingues (italien-allemand):
Article 57
1.
Les lois régionales et provinciales et les
règlements régionaux et provinciaux sont publiés au Bulletin officiel de
la Région en italien et en allemand. Ils entrent en vigueur quinze jours
après leur publication, à moins que la loi n'en dispose autrement.
2.
En cas de doute, l'interprétation de leurs
dispositions se fonde sur le texte italien.
3.
Un exemplaire du Bulletin officiel est envoyé au
commissaire du gouvernement.
|
Mais, en vertu de l'article 58 du
Statut spécial
d'autonomie, la Région doit publier en allemand
les lois et règlements de la République italienne, qui concernent la Région, mais pas
nécessairement chacune des provinces:
Article 58
1.
Les lois et les décrets de la République qui
intéressent la Région sont également publiés en langue allemande au Bulletin
officiel de la Région sans préjudice de leur entrée en vigueur.
|
D'ailleurs, l'article 5 du Décret du président de la
République du 15 juillet 1988, n° 574 précise bien que
la publication bilingue des lois concerne la province de Bolzano/Bozen:
Article 5
Les actes et les dispositions, pour lesquels il est prescrit la
publication dans le Journal officiel de la République italienne en
provenance des organismes, bureaux et fournisseurs de services
conformément à
l'art. 1, ainsi que les personnes physiques ou morales, sociétés,
associations, fondations, comités et autres du genre,
résidant ou ayant leur siège dans la province de Bolzano, doivent être
publiés dans les deux langues dans le Bulletin officiel de la Région du
Trentin-Haut Adige.
|
La Loi régionale du 19 juin 2009,
n° 2, énonce, pour sa part, à l'article 9, que les actes sont publiés
simultanément en italien et en allemand, à l'exception de ceux de la Province
autonome du Trentin, de ceux de la Région destinés à s'appliquer seulement sur le
territoire de la Province autonome du Trentin:
Article 9
Emploi des langues allemande et ladine
1. En vertu des deux premières parties relatives aux actes visés
par les articles 4 et 5, ceux-ci doivent être publiés simultanément
en italien et en allemand, à l'exception de ceux de la Province
autonome du Trentin, de ceux de la Région destinés à s'appliquer
seulement sur le territoire de la Province autonome du Trentin, ainsi
que ceux de l'État et de l'Union européenne, et qui ne concernent
que la Province autonome du Trentin.
2. Afin de promouvoir une meilleure
compréhension de la part des citoyens germanophones, dans la
législation de l'État, sont également publiés en vertu de la
deuxième partie, conjointement avec l'italien et l'allemand, les
lois et décrets nationaux autres que ceux énumérées à l'article 5,
s'ils concernent la Région ou la Province autonome de Bolzano, en
fonction des critères énoncés au paragraphe 3.
3. Sont considérés d'intérêt
régional ou de provincial, aux sens du paragraphe 2, les lois et les
décrets de l'État, qui se réfèrent au territoire de la Province
autonome de Bolzano.
|
Dans le même article de la
Loi régionale du 19 juin 2009,
n° 2, il en est ainsi pour les actes du Trentin-Haut-Adige qui doivent
être publiés en ladin, ainsi que ceux des provinces autonomes du Trentin et
Bolzano, s'ils se rapportent en particulier aux populations ou localités ladines:
Article 9
4. Afin de promouvoir une meilleure
compréhension de la part des citoyens ladinophones, dans la
législation régionale et provinciale, sont également publiés en
ladin les lois et règlements du Trentin-Haut Adige et ceux des
provinces autonomes du Trentin et Bolzano, s'ils se rapportent en
particulier aux populations ou localités ladines.
5. Sont aussi publiés en ladin les
actes émanant des administrations aux sens de l'article 32 du
Décret
du président de la République du 15 juillet 1988, n° 574, et du
Décret législatif du 16 décembre 1993, n° 592, là où la publication
est exigée par une disposition d'une règle de loi ou si ces actes
concernent l'ensemble des citoyens.
6. Le texte en ladin est commandé
par les administrations qui en demandent la publication.
|
5.3 La procédure judiciaire
Rappelons les dispositions de l'article 122 du
Code de procédure civile :
Article 122
Emploi de la langue
italienne - Désignation de l'interprète
1. Durant tout la procédure, l'emploi
de la langue italienne est prescrit.
2. Lorsque quelqu'un qui ne connaît
pas l'italien doit comparaître, le juge peut désigner un interprète.
3. Tout interprète, avant d'exercer
ses fonctions, doit prêter serment devant le juge qu'il s'acquittera
fidèlement de ses obligations.
|
Cette disposition du Code de procédure civile
n'autorise pas en principe l'usage d'une autre langue que l'italien, sauf
que, en cas de force majeure, le juge peut recourir à un interprète.
Cependant, il existe en Italie, particulièrement au Trentin-Haut-Adige, des
langues «reconnues». L'article 109 du
Code de procédure pénale autorise
l'emploi des langues reconnues:
Article 109
1. Les actes de la procédure pénale
doivent être faits en langue italienne.
2. Devant l'autorité judiciaire ayant juridiction en première
instance ou en appel dans un territoire où est installée une
minorité linguistique reconnue, le citoyen italien qui appartient à
cette minorité est, à sa demande, questionné ou examiné dans la
langue maternelle et le procès-verbal applicable est rédigé dans
cette même langue. Dans cette langue sont traduits les actes de la
procédure qui la concernent à sa demande. Le tout sans préjudice des
autres droits prévus par des lois spéciales et les conventions
internationales.
3.
Les dispositions du présent article doivent être respectées sous
peine de nullité. |
Le chapitre IV du
Décret du président de la République du 15 juillet
1988, n° 574, est consacré à l'emploi des langues dans les
procédures judiciaires. Il est mentionné à l'article 13 que les bureaux et les organismes judiciaires doivent
se servir, dans leurs relations avec les citoyens de la province de Bolzano
et dans les actes qui les concernent, de la langue
employée par le requérant:
Article 13
Les bureaux et les organismes judiciaires mentionnés à l'article 1 doivent
se servir, dans leurs relations avec les citoyens de la province de Bolzano
et dans les actes qui les concernent, de la langue
employée par le requérant, sauf pour les dispositions prévues dans les articles
qui suivent.
|
Dans les tribunaux du territoire,
la langue des parties constitue la langue de procédure. Dans un
procès civil, l'administration publique est tenue d'employer la
langue présumée du défendeur. L'allemand est utilisé lorsque
quiconque s'adresse au tribunal et ne peut s'exprimer correctement
en italien. D'après l'article 18 du DPR n° 574, les
témoins et l'accusé sont entendus dans leur langue maternelle, les actes
du procès sont traduits dans l'autre langue, les déclarations et les requêtes orales sont traduites
immédiatement après avoir été formulées dans l'une ou l'autre langue,
les procès-verbaux sont rédigés simultanément dans les deux
langues et les décisions du juge, y compris les sentences, sont
prononcées et toutes rédigées dans les deux langues. Mais il n'y
aura pas de traduction si la procédure doit se dérouler dans
en seule langue, l'italien ou l'allemand. Dans un procès unilingue, les sentences et les autres décisions du
juge sont rédigées dans la langue du procès. Dans un procès bilingue,
elles sont rédigées simultanément dans
les deux langues (art. 20 du DPR n° 574). Quant à la
Loi régionale
du 19 juin
2009, n° 2, l'article 5 prévoit
l'emploi de l'allemand et du ladin dans les relations entre les citoyens et
l'administration publique de la procédure
judiciaire:
Article 5
Seconde partie : les actes officiels et
communautaires
2. Sont également publiés les actes et dispositions visés à l'article
5 du Décret du président de la
République du 15 juillet 1988, n° 574, contenant les règles pour
la mise en œuvre du Statut spécial pour le Trentin-Haut-Adige
concernant l'emploi de l'allemand et du ladin dans les relations
entre les citoyens et l'administration publique de la procédure
judiciaire.
|
Lorsque des parties parlent des langues
différentes et qu'elles exigent que la cour utilise leur langue, la
procédure est menée dans les deux langues, avec au besoin le recours à la
traduction. Ce n'est pas la langue des juges ni celle des avocats, qui
autorise l'emploi d'une autre langue que l'italien, mais celle du
justiciable, le droit de l'accusé d'utiliser sa langue étant garanti. Les
documents et les témoignages peuvent être produits en allemand, au besoin
avec l'aide d'interprètes et de traducteurs sans frais supplémentaires pour
la personne concernée. Si les témoignages ne sont pas formulés dans la
langue choisie au début du procès, ceux-ci ne sont pas admis.
Il faut comprendre que le juge n'est pas nécessairement
tenu de comprendre le ladin ou l'allemand, et qu'il lui faut procéder à l'aide
d'un interprète assermenté. Précisons que peu de juges peuvent parler
l'allemand.
5.4 L'administration publique
Comme dans toute l'Italie, l'italien est la langue de
l'administration en Italie, mais tout citoyen du Trentin-Haut-Adige a le droit
de communiquer avec celle-ci dans sa langue. Au niveau de la Région, l'allemand
est co-officiel avec l'italien. D'ailleurs, l'administration de la Région est
totalement bilingue, ainsi que celle la Province autonome de Bolzano/Bozen.
L'État italien a fait des efforts considérables pour améliorer son offre de
services bilingues, surtout dans les bureaux situés dans la province de Bolzano.
Cela signifie que non seulement l'italien est utilisé par l'administration
centrale, mais également l'allemand et le ladin dans la mesure où ces services
sont demandés dans les limites du territoire du Trentin-Haut-Adige. Dans la
province du Trentin, le bilinguisme administratif n'est assuré que dans les
localités germanophones et ladinophones.
Le Statut
spécial pour le Trentin-Haut-Adige du 31 janvier 2001 compte
quelques articles portant sur l'emploi des langues dans l'administration
publique de la Région: les articles 99, 100, 101 et 102. Ce sont des
dispositions qui prévoient cependant l'emploi de l'allemand uniquement dans la
province de Bolzano:
Article 100
1. Les citoyens de langue allemande de la province de
Bolzano ont la faculté d'employer leur langue dans les rapports avec les
organismes judiciaires et les services et bureaux de l’Administration
publique situés dans la province ou ayant compétence régionale, ainsi qu’avec
les fournisseurs de services d'intérêt public offerts dans ladite province.
|
Il en est ainsi du Décret du président de la République du 15 juillet
1988, n° 574, sur l'emploi de l'allemand et du ladin dans les
communications entre les citoyens et l'administration publique.
L'article 4 précise qu'il est obligatoire d'utiliser conjointement les langues
italienne et allemande de la part des organismes, bureaux et fournisseurs de
service public ainsi que pour les actes destinés à l'ensemble des citoyens, les
actes individuels destinés à l'usage public et ceux destinés à la majorité des
bureaux:
Article 4 Conformément au dernier
paragraphe de l'article 100 du Décret du président de
la République du 31 août 1972, n. 670, l'emploi conjoint des langues
italienne et allemande de la part des organismes, bureaux et
fournisseurs, prévu à l'article 1, est obligatoire pour les actes destinés à
l'ensemble des citoyens, les actes individuels destinés à
l'usage public et ceux destinés à la majorité des bureaux.
Article 7
Les organismes, bureaux et fournisseurs de services prévus à l'article 1, qui reçoivent des
requêtes, questions, dénonciations
ou déclarations, sont tenus de formuler les actes et dispositions, et
d'effectuer les communications ou notifications prescrites dans la
langue employée par le requérant, celui qui fait la dénonciation ou
fait la déclaration là où se trouve le destinataire.
Si la requête, la question, la plainte ou la déclaration est
formulée oralement et n'est pas enregistrée, la langue utilisée par le
requérant doit être employée, sauf si la réponse est immédiate.
|
Ces dispositions ne valent que pour les germanophones et
les italophones de la province de Bolzano. Cependant, l'article 32 du même DPR
n° 574 offre cette possibilité aux
ladinophones de la province, à la condition que ce soit dans les localités
ladines:
Article 32
Les citoyens de langue ladine de la
province de Bolzano ont la possibilité d'employer leur langue dans les
communications
orales et écrites avec les services de l'administration publique, à
l'exclusion des Forces armées et des forces policières ainsi que des sites
situés dans les
localités ladines de la même province, avec les organismes locaux et les
établissements scolaires desdites localité, avec les bureaux de la
province qui exercent des fonctions exclusivement ou principalement
auprès des populations ladinophones, même si les sites sont à
l'extérieur des localités susdites, ainsi qu'avec les fournisseurs
de services, conformément à l'article 2, qui œuvrent exclusivement dans les localités ladinophones.
Les administrations et les
fournisseurs de services prévus au paragraphe précédent sont
tenus de répondre par oral en ladin ou par écrit en
italien et en allemand, puis par un texte en ladin.
Les actes publics provenant des administrations
mentionnés au premier paragraphe sont
rédigés en italien et en allemand, puis du texte en ladin.
|
Évidemment, dans les communications avec les bureaux de l'administration publique
situés
dans la province de Bolzano, le citoyen ladinophone peut employer l'italien ou
l'allemand.
Conformément au
Décret
du président de la République du 26 juillet 1976, n° 752, les
employés de l'Administration nationale, régionale et provinciale sont tenus de
maîtriser l'italien et l'allemand, mais de façon limitée à certains contingents
dans la province du Trentin:
Article 1er
La maîtrise de l'italien et de
l'allemand, adaptée aux besoins de
la
bonne marche du service, constitue une qualification pour le
recrutement structuré de
toute façon et désigné pour des postes dans l'administration de
l'État, y compris ceux faisant partie du système d'autonomie,
et dans les organismes publics dans la province de Bolzano. [...]
Les mêmes
qualifications s'appliquent au personnel des tribunaux, des
organismes et des bureaux auprès du gouvernement régional établis
dans la province du Trentin, de façon limitée à certains contingents,
en accord avec les présidents du gouvernement régional du
Trentin-Haut-Adige et de la Junte provinciale de Bolzano, selon la
modalité nécessaire pour assurer le bon fonctionnement du service
également en allemand; |
En vertu de l'article 17 du
DPR n° 752, des mesures sont
prévues aussi pour les Ladins habitant dans la province de Bolzano:
Article 17
[...]
Les membres du groupe ethnique ladin doivent être
éventuellement employés dans des bureaux ou des services des
localités ladines ou ayant juridiction pour ces localités.
|
Selon la législation en vigueur dans le
Trentin-Haut-Adige, notamment l'article 32 ter du
DPR du 26 juillet 1976, n° 752, c'est la
représentation proportionnelle («ripartizione proporzionale» ) qui régit la
répartition des employés dans la fonction publique dans la province de Bolzano.
La maîtrise de l'italien et de l'allemand, adaptée aux besoins de la bonne
marche du service constitue, une qualification incontournable pour le
recrutement à des emplois dans l'administration de l'État, y compris ceux
faisant partie du système d'autonomie, ainsi que dans les organismes publics de
la Province autonome de Bolzano. De plus, selon le
Décret
du président de la République du 19 octobre 1977, n° 846, en matière
de proportionnalité dans les bureaux de l'État situés dans la
province de Bolzano, des examens sont prévus pour vérifier et attester
la maîtrise de l'italien et de l'allemand dans les emplois publics; la réussite de l'examen sur la connaissance
de l'italien et de l'allemand est une condition nécessaire pour accéder à des
postes publics. Les membres du groupe ladin doivent être
éventuellement employés dans des bureaux ou des services des
localités ladines ou ayant juridiction pour ces localités. Par
ailleurs, la
Loi
régionale du 20 novembre 1988, n° 26, prévoit
des
mesures de compensation au bilinguisme, c'est-à-dire des indemnités dans les
transcriptions des actes et documents administratifs. Quant à la
Loi
régionale du 21 février 1991, n° 5, elle
prévoit des mesures pour améliorer le service de traduction dans l'administration régionale
et des dispositions en ce qui concerne le personnel des chambres de commerce, de l'industrie, de l'artisanat
et de l'agriculture des provinces du Trentin et de Bolzano, ainsi que des règles pour l'usage du ladin
de la part des employés dans les communes ladines de la province de Bolzano.
Ajoutons aussi que certains décrets législatifs (Décret législatif du 16 décembre 1993,
n° 592,
Décret législatif du 4 avril 2006, n° 17, Décret
législatif du 4 avril 2006, n° 177) imposent des mesures concernant les
papiers d'identité dans les liocalités ladines des deux provinces.
Afin de favoriser la pleine maîtrise de l'italien, de
l'allemand et du ladin, des cours de formation linguistique sont
prévus pour les
employés de l'administration de l'État et des organismes publics en
service dans la province de Bolzano.
Dans le domaine de l'affichage public, l'italien et
l'allemand sont les deux langues employées sur les panneaux identifiant
les édifices administratifs de la Région du Trentin-Haut-Adige, de même que ceux
de la Province autonome de Bolzano. Dans la plupart des municipalités de cette
province, le bilinguisme allemand-italien est de rigueur dans les bureaux des
conseils municipaux, ainsi que sur les panneaux routiers identifiant le nom des
villes et des divers lieux (toponymes). Dans les localités ladines, le
trilinguisme est généralement pratiqué pour l'affichage public. En ce qui
concerne l'affichage commercial dans la province de Bolzano, il se fait
généralement dans l'une ou l'autre langue, rarement dans les deux à la fois,
mais il est plus fréquent dans la ville de Bolzano/Bozen. Cette pratique est
conforme à l'article 10 de la loi nationale du 15
décembre 1999, n° 482 :
Article 10
Dans les municipalités mentionnées à l'article 3, en plus des toponymes
officiels, les conseils municipaux peuvent délibérer sur l'adoption de
toponymes conformes aux traditions et aux usages locaux.
|
Il en est ainsi de l'article 9 du
Décret du président de la République du 2
mai 2001, n° 345, portant sur les règles de protection des minorités
linguistiques historiques:
Article 9
Toponymie
1) L'application de l'article 10 de la loi est réglementée par les
statuts et règlements des organismes
locaux concernés.
2) Dans les cas prévus pour les signaux des affiches des
localités dans la langue déclarée sous protection, les règlements du code
de la route sont appliqués, avec la parité graphique dans les deux
langues.
|
Le paragraphe 1 du même article précise bien que ce sont
les administrations locales qui décident du bilinguisme dans l'affichage des
panneaux routiers.
5.5 L'éducation et l'enseignement des
langues
L'article 19 du Statut
spécial pour le Trentin-Haut-Adige du 31 janvier 2001 prévoit que,
dans la province de Bolzano, l'enseignement dans les écoles maternelles,
primaires et secondaires est dispensé dans la langue maternelle italienne ou
allemande des élèves par des enseignants pour lesquels cette langue est aussi la
langue maternelle. Il en est ainsi pour l'enseignement du ladin dans les
localités ladines:
Article 19
1. Dans la province de Bolzano, l'enseignement dans les
écoles maternelles, primaires et secondaires est dispensé dans la langue
maternelle italienne ou allemande des élèves par des enseignants pour
lesquels cette langue est aussi la langue maternelle. Dans les écoles primaires, à partir de la deuxième ou
de la troisième classe, selon ce qui sera fixé par une loi provinciale à la
suite d’une proposition qui engage le groupe linguistique intéressé, et
dans les écoles secondaires, l'enseignement de la langue seconde est
obligatoire et il est dispensé par des professeurs dont cette langue est la
langue maternelle.
2. La langue ladine est employée dans les écoles
maternelles et est enseignée dans les écoles primaires des localités
ladines. Cette langue est aussi utilisée comme matière d'enseignement dans
les écoles de tout ordre et degré de ces mêmes localités. Dans ces écoles
l'enseignement est dispensé en italien et en allemand sur une base de parité
d'horaires et d'examens.
|
Pour la province du Trentin, l'article 102.2 du Statut
d'autonomie garantit l'enseignement de la langue et de la culture ladines ou allemandes
dans les communes de la province du Trentin, là où est parlé le ladin, le mochène ou le cimbre
Article 102
2. Dans les écoles des communes de la
province du Trentin,
là où est parlé le ladin, le mochène ou le cimbre, l'enseignement de la langue
et de la culture ladines ou allemandes est garanti.
|
Le cadre juridique qui régit les langues d'enseignement
dans le Trentin-Haut-Adige prescrit que les trois groupes linguistiques ont le
droit de posséder leur propre système d'enseignement. Il existe donc un système
en italien, un en allemand et un autre en ladin, puisque les enfants ont le
droit à l'enseignement dans leur langue maternelle. Dans les écoles
germanophones, l'allemand sert de langue d'enseignement, alors que l'italien est
introduit comme langue seconde langue à partir de la 2e année du primaire. Ce
n'est donc pas le tyrolien du Sud, ni le mochène ni le cimbre qui sont
enseignés, mais l'allemand standard. Dans les écoles italophones, la langue
d'enseignement est l'italien, et l'allemand sert de langue seconde à partir de
la 2e année du primaire. Dans les écoles ladinophones, l'enseignement est
dispensé dans trois langues: en ladin, en italien et en allemand. Bien que la
législation accorde le libre choix de la langue d'enseignement aux parents des
enfants, ceux-ci fréquentent généralement des écoles dans la langue propre de
leur groupe ethnique. L'allemand constitue aussi la principale langue
d'enseignement dans les écoles techniques et professionnelles.
Le gouvernement italien a pris des mesures pour que les
manuels des écoles germanophones, tant au primaire qu'au secondaire, soient
conformes aux normes exigées en Autriche; d'ailleurs, les manuels sont produits
soit au Trentin-Haut-Adige soit en Autriche. La totalité des manuels de
classe dans les écoles germanophones sont disponibles en allemand, mais au
secondaire certains manuels ne peuvent être offerts qu'en italien.
Pour ce qui est des enseignants, ceux-ci sont recrutés
parmi les locuteurs des trois langues reconnues dans la Région, afin d'assurer
un niveau de bilinguisme adéquat. Des examens sont prévus à cet égard afin de
vérifier et attester la connaissance d'au moins deux langues, dont celle
constituant la langue d'enseignement. Pour l'allemand, plusieurs cours de
formation de base supplémentaire sont offerts par le Pädagogisches
Landesinstitut für die Schule mit deutscher Unterrichtssprache (Institut
pédagogique national pour les écoles de langue allemande). Dans les postes de
direction et les postes administratifs dans les écoles du Trentin-Haut-Adige,
des quotas sont réservés pour les représentants des trois groupes linguistiques.
L'article 47 du Décret du président de la
République du 31 mai 1974, n° 417, prescrit les concours pour accéder
à des postes du personnel enseignant dans les écoles primaires, les instituts et
les écoles secondaires, les instituts et lycées artistiques avec l'allemand
comme langue d'enseignement dans les écoles primaires, secondaires et
artistiques des localités ladines de la province de Bolzano
Article 47
Recrutement du personnel enseignant
Pour accéder à des postes du personnel enseignant dans les écoles
primaires, les instituts et les écoles secondaires, les instituts et
lycées artistiques avec l'allemand comme langue d'enseignement dans les
écoles primaires, secondaires et artistiques des localités ladines de la
province de Bolzano, des concours spéciaux sont organisés pour les
qualifications et les examens en conformité avec le présent décret.
À ces concours sont autorisés les citoyens italiens dont la langue
maternelle est l'allemand et, de façon limitée aux écoles des localités
ladines, les citoyens des groupes linguistiques prévus au Décret du
président de la République du 20 janvier 1973, n° 116.
|
Dans l'enseignement supérieur, il existe un seul
établissement de niveau universitaire : la Theologisch-Philosophische Hochschule
(Université de théologie et de philosophie) située à Brixen/Bressanone, dans la
province de Bolzano, juste au nord de la ville de Bolzano. Dans cet
établissement bilingue, les cours sont dispensés en allemand et en italien, en
plus des cours de langue et de culture ladines offerts comme matières
supplémentaires. Les diplômes qui y sont décernés sont reconnus aussi bien en
Autriche qu'en Italie (cf. Décret législatif du 14 mai 2010,
n° 86, sur l'équivalence des certificats d'aptitude en italien et en
allemand).
5.6 Les médias
La législation italienne autorise l'emploi des langues des
minorités nationales dans les médias électroniques, la législation demeurant
muette sur la presse écrite. L'article
8.4 du Statut d'autonomie mentionne que la province a compétence législative
pour «les manifestations et activités artistiques, culturelles et éducatives
locales, et aussi, pour la province de Bolzano, avec les moyens de la
radiotélévision».
- La protection juridique
L'article 19 de la Loi
du 14 avril 1975, n° 103 (modifiée en 2000), en
matière de diffusion radiophonique et télévisée, énonce que la société de
diffusion est tenue de préparer des émissions de radio et de télévision en
allemand et en ladin dans la province de Bolzano, en français pour la région
autonome du Val-d'Aoste et en slovène pour la région autonome
du Frioul-Vénétie Julienne:
Article 19
La société de diffusion, en plus de la gestion des services de la concession,
est tenue par les services suivants:
c) préparer des émissions de radio et de télévision en
allemand et en ladin dans la province de Bolzano, en français pour la
région autonome du Val-d'Aoste et en slovène pour la région autonome
du Frioul-Vénétie Julienne. |
La Loi du 3
mai 2004, n° 112, en matière d'organisation du système de
radiotélévision et de la RAI, énonce les principes généraux en matière de
diffusion radiotélévisée en encourageant les cultures régionales ou locales
dans le cadre de l'unité politique, culturelle et linguistique de l'État
italien :
Article 7
Principes généraux en matière de diffusion radiotélévisée dans le secteur
local
1) La diffusion radiotélévisée dans le secteur local valorise et
encourage les cultures régionales ou locales dans le cadre de l'unité
politique, culturelle et linguistique de l'État. Les règles concernant la
protection des minorités linguistiques reconnues par la présente loi
s'appliquent.
|
L'article 17 de la même loi (n°
112) garantit la diffusion de transmissions radiophoniques et télévisées
en allemand et en ladin pour la province autonome de Bolzano, en ladin dans
le cas de la province autonome du Trentin, en français pour la région
autonome de la Vallée d'Aoste et en slovène pour la région autonome du
Frioul-Vénétie Julienne:
Article 17
2) Le service public général de radiotélévision, conformément au
paragraphe 4 de l'article 6, garantit de toute façon:
f) La
diffusion de transmissions radiophoniques et télévisées en
allemand et en ladin pour la Province autonome de Bolzano,
en ladin dans le cas de la Province autonome du Trentin, en
français pour la région autonome du Val-d'Aoste et en
slovène pour la région autonome du Frioul-Vénétie Julienne;
|
- La radio
Dans la presse électronique, il existe des stations
locales de la RAI («Radio Audiovisione Italiana»): la RAI-Sede di Bolzano,
la Rai-Sender Bozen et la RAI-Radio TV Ladina. La RAI-Sede di
Bolzano transmet en italien les nouvelles de l'actualité sur la fréquence de
Radio 1 et des émissions récréatives et culturelles sur celle de Radio 2. Les
programmes régionaux, entre 6 h et 22 h, sont transmis alternativement un jour à
partir de Bolzano, le jour suivant à partir du Trentin. Quant à la Rai-Sender
Bozen, elle émet en allemand sur tout le territoire du Trentin-Haut-Adige à
partir de Bolzano, entre 6 h et 22 h. Mais la station Sender Bozen diffuse
également en italien des bulletins de nouvelles (14 h 05 et 15 h 30), ainsi que
des émissions d'information en ladin (13 h 30 à 14h05 et 19 h à 19 h 30).
Pour ce qui est de la RAI-Radio TV Ladina, il s'agit d'une station
publique de radio et de télévision, qui émet en ladin, entre 13 h 30 et 19 h,
dans les deux provinces du Trentin-Haut-Adige (Bolzano et Trento), ainsi que
dans les localités ladines de la province voisine de Belluno (Vénétie). Tous les
jours, les stations de radio autrichiennes ORF 1 et ORF 2 (Österreichischer
Rundfunk) diffusent entièrement en allemand. La radio nationale italienne, la
RAI, diffuse entièrement en italien. Mentionnons aussi la Radiotelevisione
Azienda Speciale per la Provincia autonoma di Bolzano (fr.: Agence spéciale
de radiotélévision pour la Province autonome de Bolzano; all.: Rundfunkanstalt
Südtirol; ladin: Radiotelevijion-Azienda per Südtirol), une société de
radiodiffusion de service public, qui a la responsabilité de la diffusion de
programmes de radio et de télévision en allemand et en ladin sur le
territoire de la province de Bolzano. Pour le ladin, il faut aussi souligner la
présence de Radio Rumantsch, captée uniquement dans la province de
Bolzano, qui provient du canton des Grisons (Suisse) et diffuse en romanche, une
variété rhéto-romane (voir la
structure arborescente et la carte
linguistique) aisément compréhensible par les Ladins d'Italie.
Du côté des radios privées, il existe une grande quantités
d'émetteurs tant en italien qu'en allemand. La plupart des stations privées
germanophones proviennent d'Autriche: Radio Wien, Radio Niederösterreich, Radio
Oberösterreich, Radio Burgenland, Radio Salzburg, Radio Steiermark, Radio Tirol,
Radio Vorarlberg, Radio Kärnten, etc. Il y en a aussi plusieurs en ladin, dont
la plus connue, Radio Gherdëina, émet quatre heures/semaine en ladin. Le
taux de transmission de la station atteint plus de 70% des Ladins, ce qui en
fait le diffuseur le plus populaire auprès de ces derniers.
- La télé
En ce qui a trait à la télévision publique, les chaînes RAI 1, RAI 2 et RAI 3
diffusent uniquement en italien. Mais la RAI Sender Bozen diffuse des
émissions en allemand dans trois éditions quotidiennes d'informations: 14 h, 19
h 30 et 22 h 45. La
télévision privée, telle RETE 4 et CANALE 5, diffusent en italien. Cependant, il
est possible de recevoir des chaînes germanophones par satellite et il existe
aujourd'hui une station d'émission officielle pour les programmes de télévision ORF 1, ORF 2, ZDF et SRG.
La chaîne italienne RAI-TV Ladina émet en ladin quatre minutes
et demie par jour à 19 h 55
et trente minutes toutes les trois semaines, le reste des émissions
étant en italien et en allemand. La chaîne suisse SRG émet
aussi en romanche des Grisons. En somme, les services de
télévision pour les minorités du Trentin-Haut-Adige sont relativement limitées.
- La presse écrite
L'Alto Adige est le plus grand quotidien en langue
italienne du Haut-Adige. Il compte des nouvelles locales, nationales et
internationales. Les villes de Bolzano, Trento et Belluno bénéficient d'éditions
distinctes pour les nouvelles locales. Pour la minorité ladine, l'Alto Adige
publie chaque semaine une page en ladin, principalement en ladin des Dolomites,
mais aussi en romanche et en frioulan (les langues rhéto-romanes). Depuis
quelque temps, les minorités mochènes et cimbres de la province du Trentin ont
obtenu une page deux fois par mois dans l'édition du vendredi. Cette page est
publiée dans trois éditions, dont celle de la minorité ladine: celle de la
minorité mochène s'appelle « Liaba lait» («Cher Peuple»), celle de la minorité
cimbre, «Lusern Saito» («La page de Luserna»). Les germanophones
bénéficient d'un quotidien tiré à 40 000 exemplaires, le Dolomiten (sous-titré en Tagblatt der
Südtirol: «Journal des Tyroliens du Sud»), ainsi que de plusieurs
hebdomadaires et magazines: Südtirol Profil, Südtirol Tageszeitung,
Zett, Katholische Sonnagsblatt («Journal catholique du
dimanche»), Südtiroler Wirtschafttszeitung («Journal économique du
Tyrol du Sud»), etc.
Les italophones disposent d’un hebdomadaire (Il Segno),
d’un bimensuel (Do Puschtra) et d’un mensuel (Pustrissa).
Quant aux Ladins, ils possèdent leur propre hebdomadaire (La Usc di Ladins).
Il existe aussi des périodiques bilingues allemands-italiens (Erker, Brixner,
Vinschger, etc.).
Pour l'ensemble des germanophones du
Trentin-Haut-Adige, un quotidien, le Dolomiten, tiré à 40 000 exemplaires, paraît
entièrement en allemand. En outre, plusieurs
journaux des pays germanophones voisins (Autriche, Suisse et Allemagne) sont disponibles dans la région et
bénéficient comme les autres journaux produits en Italie d'une aide financière.
Le cas des minorités linguistiques du Trentin-Haut-Adige
est particulier: les germanophones de la Province autonome de Bolzano sont
majoritaires, mais ils sont minoritaires dans la Province autonome du
Trentin. Si le statut des langues est nettement avantageux pour les
germanophones de Bolzano, il l'est moins pour la province du Trentin.
Cependant, les lois nationales ont permis l'élargissement des droits
linguistiques des trois principales communautés: les italophones, les
germanophones et les ladinophones. Toutes ces communautés peuvent bénéficier
de droits à peu près équivalents dans les services publics nationaux,
régionaux, provinciaux et municipaux, la justice et les écoles. Mais ce sont
les provinces, et non la Région, qui ont en fait sorte que les minorités
nationales ont pu obtenir des droits relativement égaux.
Puisque cette page
était consacrée à la Région du Trentin-Haut-Adige, elle ne contenait que peu
d'informations sur la législation des provinces. En Italie, la législation
nationale prévaut sur toutes les autres législations. En matière de
langue, elle se contente de proposer les principes et les objectifs, mais ce
sont les autorités locales, régionales, provinciales et municipales, qui
doivent appliquer ou non cette législation. Dans le Trentin-Haut-Adige, le
Conseil régional a délégué ses pouvoirs aux provinces, avec le résultat que
ce sont elles qui décident des droits à accorder. C'est pourquoi seule la
province de Bolzano a, dans un premier temps, adopter des mesures pour
protéger ses minorités germanophones et ladines, puis, plus tard, la province du Trentin a fait de même. Durant quelques décennies, les germanophones et les Ladins de
la province du Trentin n'ont bénéficié que de droits linguistiques très réduits pour ne pas
dire nuls, alors que les Ladins de la province de Bolzano recevaient une
protection presque acceptable et que les germanophones détenaient une
protection presque remarquable, parce qu'elle avait été imposés par un traité
international. Pour plus de précision, il faut consulter les
pages portant spécifiquement sur la
Province autonome de
Bolzano et la
Province autonome du
Trentin.
Quoi qu’il en soit, pour les germanophones du
Trentin-Haut-Adige, l’autonomie
obtenue restera toujours fragile, un retour en arrière demeurant encore
possible, et ce, malgré toutes les dispositions constitutionnelles et
législatives de la
République italienne. Ils savent que le pouvoir centralisateur de Rome peut
toujours mettre en péril leur statut chèrement acquis, surtout si l’extrême-droite
politique effectuait une remontée.... Pour les groupes minoritaires en Italie,
rien n’est définitif, il leur faut rester vigilants. Par ailleurs, des tensions
perdurent entre les communautés linguistiques. Périodiquement, des groupes
germanophones relancent la question de l’autodétermination. Quant aux Ladins,
ils demandent la création d’une «nouvelle province autonome», dans laquelle
seraient regroupés les 36 000 Ladins qui vivent actuellement dans les provinces
de Bolzano, du Trentin et de Belluno (Vénétie). Le mouvement Autonomia Ladina
Dolomites réclame que la Ladina devienne la troisième province de la
Région du Trentin Haut-Adige.
Dernière mise à jour:
18 févr. 2024
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du plurilinguisme» dans Grande Europe, Paris, La Documentation
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CARROZZA, Paolo. «Situation juridique des minorités en Italie» dans Les
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LECLERC, Jacques. Recueil des législations linguistiques dans le monde, tome
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Les
États non souverains