Union territoriale de
Pondichéry |
Pondichéry
(Puducherry / Putuccēri / Poudouchéry)
புதுச்சேரி
|
Capitale: Puducherry (Poudouchéry, en
français)
Population: 1,2 million (2011)
Langues officielles de l'État): anglais (de jure,
partout),
tamoul (de jure, partout), malayalam (de jure à Mahé), télougou
(de jure à Yanam), français
(de jure à Poudouchéry et à Karaikal)
-
Pondichéry: tamoul, anglais et français
- Mahé: malayalam et anglais
- Karaikal: tamoul et anglais
- Yanam: télougou et anglais
Groupe majoritaire: tamoul (88,4 %)
Groupes minoritaires: télougou (5,2 %), malayalam (4,3 %),
ourdou (0,7 %), hindi (0,4 %), bengali (0,1 %), gujarati (0,1
%), kannada (0,1 %), oriya, marathi, anglais,
français, etc. Système politique: territoire de l'Union indienne
Articles constitutionnels (langue): art.
15, 29, 30, 120,
210, 343 à 350 de la Constitution de 1956 (en vigueur);
Traité
de cession des Établissements français de Pondichéry, Karikal,
Mahé et Yanaon (1956).
Lois linguistiques
de l'Union:
Code de
procédure civile (1908);
Ordonnance
présidentielle de 1960;
Loi sur
les langues officielles (1963/1967);
Loi sur les textes autorisés (lois
fédérales) (1973);
Règlements sur les langues officielles
(1976/1987);
Ordonnance
n° 18 sur l'audition du procès et l'examen des témoins (1976);
Loi sur la Commission nationale pour les minorités (1992);
Loi sur les réseaux câblés de télévision
(Réglementation)
(1995);
Loi sur la Commission nationale
pour les
établissements d'enseignement minoritaires (2004);
Loi sur le droit à l'information
(2005);
Règlement sur la Commission nationale pour les établissements d'enseignement
minoritaires (procédure d'appel) (2006);
Directives relatives à la langue officielle
(2009);
Loi sur le droit des enfants à
une éducation gratuite et obligatoire
(2009);
Loi sur la justice pour mineurs (soins et protection des enfants)
(2015).
Lois de l'État:
Loi de Madras sur les prêteurs sur gage (1943, en vigueur);
Loi sur l'administration de Pondichéry (1962);
Loi sur le gouvernement des territoires de l'Union (gouv. central, 1963);
Loi sur les langues officielles
de Pondichéry (1965);
Règlement sur la procédure et la conduite des affaires de l'Assemblée
législative de Pondichéry (1966);
Loi sur les frais judiciaires et l'évaluation des poursuites
(1972);
Loi sur les sociétés coopératives de Pondichéry (1972);
Loi sur les municipalités de
Pondichéry (1973);
Loi sur l'Université de
Pondichéry (1985);
Loi sur l'instruction scolaire de
Pondichéry (1987);
Règlement sur l'instruction scolaire
de Pondichéry (1996);
Loi
sur l'instruction primaire obligatoire (2000);
Loi de Pondichéry sur le changement de nom (2006);
Règlement de Pondichéry sur le droit des enfants à l'instruction
gratuite et obligatoire (2011). |
Plan de l'article
1 Situation générale
1.1 Le morcellement du territoire
1.2 Le régime territorial
2 Données
démolinguistiques
2.1 Les langues parlées
2.2 La répartition linguistique selon les districts
2.3 Le rôle du français
2.4 L'apprentissage des langues
2.5 Les religions
3 Données historiques
3.1 Les comptoirs français
3.2 Les Établissements français de l'Inde |
3.3 La rétrocession de
Pondichéry (1954-1956)
3.4 L'Union territoriale de Pondichéry
4 La politique
linguistique
4.1 Le statut des langues
4.2 L'Assemblée législative et l'emploi des langues
4.3 Le changement de l'appellation du territoire
4.4 Les services aux citoyens
4.5 L'emploi des langues dans la justice
4.6 L'affichage
4.7 L'enseignement des langues
4.8 Les médias poudouchériens |
|
Pondichéry
(en français) ou Pondicherry (en
anglais), et Puducherry (nouvelle
dénomination officielle en tamoul, signifiant «nouveau village») —
en français: Poudouchéry est la
forme officielle — désigne à la fois un territoire autonome,
un district et une ville (Puducherry),
soit la capitale du Territoire autonome de Pondichéry (ou
Union territoriale de
Pondichéry: Union Territory of Puducherry), ancienne capitale des
Établissements français de l'Inde, fondés
peu après 1664. Le territoire de Pondichéry/Poudouchéry a obtenu son indépendance de la France en 1954.
Les autorités indiennes ont modifié le nom de plusieurs villes, dont
Pondichéry pour Puducherry, afin d'effacer le souvenir de la période coloniale. 1.1 Le morcellement du territoire Ce territoire de Pondichéry/Poudouchéry compte aujourd'hui quatre enclaves
non contiguës situées en
trois États du sud de l'Inde. Il comprend les villes côtières —
districts — de Pondichéry
(ou Poudouchéry) et
de
Karaikal (ou Karikal) dans le Tamil Nadu,
de Yanam (ou Yanaon) dans l'Andhra Pradesh et de
Mahé dans le Kerala.
|
Le territoire de Pondichéry (Poudouchéry) ne constitue
donc pas une unité
territoriale en Inde. La ville de Puducherry est située à environ 170 km au
nord de Karaikal, alors que Yanam est à 840 km au nord (Andhra Pradesh) et
Mahé sur la côte occidentale à 653 km dans le Kerala.
Appellation anglaise officielle |
Appellation française |
Puducherry
(anc. Pondicherry) |
Poudouchéry
(anc. Pondichréry) |
Karaikal |
Karikal |
Yanam |
Yanaon |
Mahe |
Mahé |
Le district de Poudouchéry compte 46 villages et celui
de Karikal en compte une centaine. Mais la juridiction de Yanam s'étend
sur huit villages : Agraharam, Darialtippa, Farampeta, Guerempeta,
Jambavanpeta, Kanakalapeta, Kurasampeta et Mettakur. Quant à la
juridiction de Mahé, elle comprend la ville de Mahé et la petite ville
de Kallayi, une enclave dans l'État du Kerala.
La superficie totale de toutes ces enclaves est de 492
km² : Poudouchéry (293 km²), Karaikal (160 km²), Mahé (9 km²), Yanam (30
km²). Le territoire bénéficie d'un statut particulier au sein de
l'Union indienne, avec son propre gouvernement et son assemblée, et qui englobe
les morceaux épars des anciennes possessions françaises que sont Pondichéry/Poudouchéry, Karaikal, Mahé et Yanam.
|
La répartition territoriale de la ville
de Poudouchéry
(Puducherry) reflète une situation fort complexe que beaucoup qualifieraient
d'ailleurs
de totalement absurde, ce qui ne serait pas vraiment faux. Ainsi, la ville de
Pondichéry elle-même (voir l'illustration à gauche), qui constitue un
district, est fractionnée en plusieurs petits îlots
(ou quartiers) perdus dans le grand ensemble administratif de l'État du Tamil Nadu: Puducherry
ou Poudouchéry,
Kalapetai, Zhukarai, Ariankuppam, Thavalkuppam, Bahour, Villianur, Kuppam,
Madagadipef, Kariamanikkam, Karayanputhur. La ville possède de nombreux
beaux bâtiments coloniaux, des églises, des temples et des statues, qui
conservent encore une grande partie de l'apparence coloniale. Ce
morcellement du territoire résulte des rivalités anglo-françaises passées, alors
que les Britanniques avaient souvent posé comme condition à sa restitution un
tel morcellement destiné évidemment à affaiblir les positions françaises dans la
région. |
1.2 Le régime territorial
Poudouchéry n'est pas un État indien, mais un territoire de
l'Union. Cela signifie que gouvernement territorial et son administration
relèvent en partie du gouvernement central à New Delhi. Néanmoins, comme pour le
territoire de Delhi, Poudouchéry demeure l'un des deux seuls territoires à
disposer d'une "Vidhan Sabha", c'est-à-dire d'une assemblée législative élue
(composée de 30 membres) et d'un gouvernement local. Bien que la législation du
territoire bénéficie d'une grande autonomie, la ratification du gouvernement
central ou du président de l'Inde est parfois nécessaire. Comparativement à un
État, le gouvernement central participe plus fortement aux finances du
territoire, ce qui permet à Poudouchéry de bénéficier d'impôts plus faibles. Le
gouvernement central est représenté dans le territoire par un
«lieutenant-gouverneur» qui réside au Raj Nivas, l'ancien palais du gouverneur
français.
La population du territoire de Pondichéry était en 2001 de 973 829
habitants. Lors du recensement de 2011, la population atteignait 1,2 million
d'habitants. Plus de 75 % de la population est concentrée dans le district de Poudouchéry, les autres étant dispersés à Karaikal (16 %),
à Yanam (4,4 %) et
à Mahé (3,3 %). Les habitants de ce territoire de l'Union sont appelés «Pondichériens»
ou «Poudouchériens» (en anglais:
"Puducherrians").
2.1 Les langues
parlées
Les districts de Poudouchéry et de Karaikal comptent une majorité de locuteurs du tamoul, alors que le district
de Yanam est en majorité de langue télougou, celui de Mahé, majoritairement
de langue malayalam. Ces trois langues comptent pour 97,9 % des locuteurs de
tout le territoire.
Langue maternelle |
Locuteurs (2001) |
Pourcentage |
Groupe linguistique |
tamoul |
861
502 |
88,4 % |
famille
dravidienne |
télougou |
50 908 |
5,2 % |
famille
dravidienne |
malayalam |
42
782 |
4,3 % |
famille
dravidienne |
ourdou |
7 092 |
0,7 % |
langue indo-iranienne |
hindi |
4 357 |
0,4 % |
langue indo-iranienne |
bengali |
1
180 |
0,1 % |
langue indo-iranienne |
gujarati |
1 180 |
0,1 % |
langue indo-iranienne |
kannada |
1 566 |
0,1
% |
famille
dravidienne |
oriya |
966 |
0,0 % |
langue indo-iranienne |
marathi |
824 |
0,0 % |
langue indo-iranienne |
anglais |
454 |
0,0 % |
langue germanique |
français |
200 |
0,0 % |
langue romane |
En ce qui a trait aux autres langues parlées par
la population du territoire autonome de Poudouchéry (Puducherry), on peut citer l'ourdou, l'hindi, le bengali, le gujarati, le kannada, l'oriya, le marathi,
l'anglais et quelques petites langues (une douzaine de langues
parlées par quelques individus). Le tamoul, le télougou, le
malayalam et le kannada sont des
langues dravidiennes, alors que les autres langues sont d'origine
indo-aryenne. L'anglais et le
français demeurent des langues étrangères.
2.2 La répartition linguistique selon
les districts
Les langues officielles de l'Union territoriale de
Poudouchéry sont le tamoul, le télougou, le malayalam, l'anglais et le français. Évidemment, le
statut
de ces langues officielles change selon la ville ou le district de résidence. En général, le
français et le tamoul sont présents partout au point de vue
administratif à Poudouchéry (Puducherry), mais ce sont l'anglais et le malayalam à Mahé, le
tamoul et le français à Karaikal, puis le télougou et l'anglais à Yanam.
|
District |
Superficie |
Population
(2001) |
Population
(2011) |
Pourcentage
(2011) |
Langues officielles |
Poudouchéry
(enclavé dans le Tamil Nadu) |
293 km² |
730 004
|
950 289 |
76,1 % |
tamoul-anglais-français |
Karaikal
(enclavé dans le Tamil Nadu) |
160 km² |
170 640 |
200 222 |
16,0 % |
tamoul-anglais-français |
Yanam
(enclavé dans l'Andhra Pradesh) |
30 km²
|
36
362 |
55 626 |
4,4 % |
télougou-anglais |
Mahé
(enclavé dans le Kerala) |
9 km² |
36 823 |
41 816 |
3,3 % |
malayalam-anglais |
TOTAL |
492
km² |
973 829 |
1 247 953 |
100 % |
tamoul-télougou-malayalam anglais-français |
|
Le district de Yanam,
étant enclavé dans l'État de l'Andhra Pradesh (avec le télougou comme langue
officielle), a comme langues officielles le télougou et l'anglais. Le
district de Mahé, enclavé dans l'État du
Kerala (avec le malayalam comme langue officielle), a le malayalam et l'anglais
comme langues officielles. Le français est totalement absent dans ces deux
districts. Par contre, les districts de Poudouchéry
et de Karaikal, tous deux enclavés dans
l'État du Tamil Nadu (avec le tamoul comme langue officielle), ont le tamoul,
l'anglais et le français comme langues officielles. Dans l'ensemble des quatre
districts, trois langues sont des langues maternelles locales : le tamoul, le
télougou et le malayalam. L'anglais et le français sont des langues étrangères,
sauf que, au point de vue juridique, l'anglais peut se substituer à n'importe
quelle de ces langues pour les fins officielles de l'Union territoriale de
Poudouchéry. Autrement dit, l'anglais peut servir de langue véhiculaire
pour le gouvernement qui doit transiger dans quatre districts et trois langues
locales.
2.3 Le rôle du
français
Le français dans le territoire de Poudouchéry
(Puducherry) a perdu depuis longtemps
son statut de langue véhiculaire
au profit de l'anglais, mais davantage surtout en raison de la puissance
d'attraction des langues locales, le tamoul (Poudouchéry et Karaikal), le
malayalam (Mahé) ou le télougou (Yanam). Même si le français a conservé
son statut symbolique de langue co-officielle avec le tamoul (districts de Poudouchéry et
de Karaikal), il n'est la langue maternelle
que pour les quelque 5000 Français d'origine indienne,
c'est-à-dire une infime minorité d'environ 200 personnes qui utilisent le français dans
leurs échanges quotidiens, alors que moins d'un tiers de ceux-ci possède une maîtrise courante du
français comme langue seconde.
Le tamoul est donc
aujourd'hui la langue maternelle
des «Franco-Pondichériens» (Franco-Poudouchériens). En somme, le français, en tant que langue maternelle, reste avant tout l'affaire des
quelque 600 Français d'Europe qui travaillent dans
les différentes institutions françaises de Pondichéry. Quant au français langue
seconde, il serait parlé à des degrés divers par quelque 5000
personnes sur l'ensemble du territoire, ce qui représenterait 1,4 % de la
population, bien loin derrière l'anglais, soit 102 000 locuteurs ou 17 % de
la population. De plus, ces Franco-Pondichériens
sont complètement ignorés par les partis politiques du territoire pour une
raison bien simple:
ils ont pas le droit de voter, ni à l'Assemblée législative ni au Parlement
territorial.
Le seul moment où ils peuvent voter est lors des élections présidentielles
françaises, car ils ont le statut de «citoyens français». Bien qu'ils aient
obtenu la nationalité française, ils paient des impôts et des taxes comme
tout autre citoyen indien, mais ils n'ont pas le droit de choisir leurs
élus.
Il existe encore un
certain nombre d'institutions françaises qui jouent un rôle local, notamment
dans les domaines de l'éducation et de la culture.
- L'Institut français
de Pondichéry
L'Institut français de Pondichéry (IFP)
est un établissement à autonomie financière sous la double tutelle du
ministère français des Affaires étrangères et du Centre national de la
recherche scientifique (CNRS). Il fait partie intégrante du réseau des 27
centres de recherche de ce ministère. L’IFP est un centre de recherche
affilié à l’Université de Pondichéry.
- Le Lycée français de Pondichéry
Lors de sa création en 1826, le lycée
avait pour nom «Collège royal»; il était destiné à l'instruction des classes
blanche et métisse. Dès cette époque coloniale, l'enseignement comprenait
des cours de français, de tamoul et d'hindoustani. En 1948, donc après la
Révolution, le Collège royal fut transformé en Collège national.
À la fin de la Seconde Guerre
mondiale, le Collège devient le «Collège français». Alors que les
Établissements français de l’Inde sont transférés à l’Union Indienne en
1954, il devint le Lycée français sous la tutelle du ministère des Affaires
étrangères (Direction générale des relations culturelles et techniques).
Aujourd'hui, le Lycée français est devenu le plus grand établissement de
toute l'Asie. Il accueille les enfants de trois ans jusqu'au bac,
c'est-à-dire entre 1000 et 1400 élèves, selon les années. La plupart des
élèves sont de nationalité française (85 % de Français et 15 % d’Indiens),
mais de culture et de langue tamoules. Les langues enseignées sont le
français, l'anglais et le tamoul; pour les non-francophones, ce sont
l'espagnol et/ou l'allemand.
- L'Alliance
française
L'Alliance française de Pondichéry fut
créée en 1897. Cet organisme propose des cours de français et offre à ses
membres de nombreux événements culturels, tels des expositions, des films
français, des concerts, etc. L’Alliance française de Pondichéry compte
annuellement entre 1600 et 1800 membres, dont environ 450 étudiants. La
moyenne d’âge se situe aux alentours de 20 ans, mais le public semble plutôt
hétérogène: étudiants, médecins, avocats, fonctionnaires, jeunes sans
emplois, etc.
- L'École
française d'Extrême-Orient
C'est un établissement de recherche sur
les sciences humaines et sociales; il est rattaché au ministère français de
l’Enseignement supérieur.
- Les Amis de la langue et de la
culture françaises
L'Association des Amis de la langue
et de la culture françaises fut créée en 1955. Elle environ 80 membres
(anciens professeurs, médecins, juristes, militaires, etc.). La mission de
cette association est de développer la connaissance de la langue
française en offrant des cours pour débutants et de promouvoir la
connaissance de la culture française par l’organisation de conférences dont
les thèmes sont variables.
2.4 L'apprentissage des langues
Il faut souligner que la
répartition fragmentée des districts et des secteurs du territoire favorise la
multiplicité des langues et le multilinguisme individuel. Ainsi, les individus bilingues ou
trilingues, voire quadrilingues, sont nombreux dans le territoire de
Poudouchéry. Cependant, l'acquisition des langues diffère pour chacun des
groupes linguistiques. Par exemple, les locuteurs de l'assamais (langue
maternelle) apprennent généralement plus l'hindi, puis le bengali. Mais pour
les locuteurs du bengali, c'est l'anglais, puis l'hindi et ensuite le
tamoul. Voici un petit tableau à ce sujet:
Locuteurs (langue maternelle) |
Langues connues ou apprises (multilinguisme) |
Assamais |
assamais + hindi + bengali
|
Bengali |
bengali + anglais + hindi + tamoul
|
Gujarati |
gujarati + anglais + tamoul + hindi |
Hindi |
hindi + anglais + tamoul + gujarati
|
Kannada |
kannada + tamoul + anglais + hindi |
Malayalam |
malayalam + tamoul + anglais + hindi
|
Oriya |
oriya + anglais + hindi + tamoul
|
Panjabi |
panjabi + anglais + hindi + tamoul
|
Sindhi |
sindhi + anglais + hindi + tamoul
|
Tamoul |
tamoul + anglais + télougou
|
Télougou |
télougou + tamoul + anglais + hindi
|
Ourdou |
ourdou + tamoul + anglais + hindi
|
Il ressort de ce tableau que les
individus bilingues ont tendance à acquérir d'abord une autre langue de la
même famille que celle qu'ils parlent. Ainsi, une personne parlant
l'assamais (langue indo-iranienne)
comme langue maternelle devrait apprendre l'hindi (langue
indo-iranienne) avant le tamoul (langue
dravidienne); il en est de même pour le bengali, l'oriya, le panjabi,
mais, contre toute attente, ce n'est pas le cas pour le gujarati et l'ourdou, deux langues
appartenant pourtant à la même famille. Un locuteur du tamoul ou du télougou
apprendra en principe une langue dravidienne avant une langue
indo-iranienne. Quoi qu'il en soit, ceux qui maîtrisent l'assamais, le bengali, l'oriya, le
panjabi ou le sindhi ont une plus grande connaissance de l'hindi que du tamoul.
Cependant, ceux qui connaissent le gujarati ou l'ourdou ont une plus grande
maîtrise du tamoul plutôt que de l'hindi.
La présence du multilinguisme individuel
dans l'Union territoriale de Poudouchéry s'explique par la
grande fragmentation géographique de ce territoire, lequel comprend quatre
anciens établissements français,
c'est-à-dire Pondichéry, Karikal, Mahé et Yanam. Les districts de
Poudouchéry et de Karaikal sont enclavés dans l'État du Tamil Nadu (de langue
tamoule); celui de Mahé dans le Kerala (malayalam); celui Yanam, dans
l'Andhra Pradesh (télougou).
2.5 Les religions
L'Union territoriale de Poudouchéry est
massivement hindouiste, mais cette ancienne colonie française a laissé un
héritage indo-français et chrétien. Selon le recensement de 2011, l'hindouisme
est la religion principale, mais il existe des minorités musulmanes (6 %) et
chrétienne (6,2 %), puis sikhes, bouddhistes, jaïnistes, etc.
Hindouisme |
Islam |
Christianisme |
Sikhisme |
Bouddhisme |
Jaïnisme |
Autres religions |
Non précisé |
87,3 % |
6,0 % |
6,2 % |
0,02 % |
0,0 4 % |
0,1 % |
0,0 1 % |
0,17 % |
1 089 462 |
74 877 |
77 373 |
249 |
499 |
1247 |
124 |
2121 |
La répartition par district donne le résultat
suivant :
District |
Religion
majoritaire |
Hindouisme |
Islam |
Christianisme |
Sikhisme |
Bouddhisme |
Jaïnisme |
Autres
religions |
Non précisé |
Poudouchéry |
hindouisme |
90,00 % |
3,44 % |
6,14 % |
0,03 % |
0,04 % |
0,14 % |
0,02 % |
0,20 % |
Karikal |
hindouisme |
76,23 % |
14,40 % |
9,19 % |
0,02 % |
0,03 % |
0,03 % |
0,01 % |
0,09 % |
Yanam |
hindouisme |
96,24 % |
2,14 % |
1,57 % |
0,01 % |
0,00 % |
0,01 % |
0,01 % |
0,02 % |
Mahé |
hindouisme |
66,82 % |
30,74 % |
2,29 % |
0,01 % |
0,05 % |
0,03 % |
0,01 % |
0,05 % |
Là où l'hindouisme est moins important
(Karikal avec 76,23 % et Mahé avec 66,82 %), l'islam (respectivement 14,4 % et
30,74 %) augmentent leur présence. Le christianisme est nettement plus élevé à
Kariak (9,19 %) qu'à Poudouchéry (6,14 %) ou ailleurs.
Des fouilles ont permis de révéler que des
origines romaines existaient à Pondichéry il y a plus de 2000 ans. À l'origine, les quatre districts de ce qui
constitue aujourd'hui l'Union territoriale de Pondichéry (Poudouchéry, Karaikal, Mahé et Yanam)
faisaient partie de leur région géographique respective. L'histoire de Pondichéry (Poudouchéry) commence avec
l'acquisition par la France de comptoirs commerciaux sur différents territoires
indiens. Il n'existait aucun lien, ni administratif, ni politique, entre
les diverses entités de ce territoire actuel de l'Inde.
3.1 Les comptoirs
français
Dans ses efforts pour développer le
commerce, le ministre de Louis XIV,
Jean-Baptiste Colbert (1609-1683), fonda
en 1664 une compagnie à monopole, la fameuse Compagnie des Indes orientales,
qui était en réalité la première entreprise commerciale française, la seule
à pouvoir échanger des marchandises avec l’Inde. La compagnie envoya
aussitôt plusieurs flottes dans l’océan Indien dans le but d'y fonder des
comptoirs. En Inde, le Grand Moghol Aurangzeb (1618-1707) autorisa les Français à s’établir à
Surate dans le Gujarat. Après avoir tenté d'établir une colonie dans l'île
de Ceylan (aujourd'hui le Sri Lanka), les Français remontèrent la côte du golfe du Bengale
et finirent par s'implanter à Pudu Cheri (francisé plus tard en «Pondichéry»),
un village de pêcheurs situé à l’embouchure de la rivière d’Ariancoupam. La
région était sous la souveraineté du sultan musulman de Bijapur. François
Martin, un agent de la Compagnie française des Indes orientales, signa avec
le sultan un accord lui permettant d’y fonder une «maison de commerce» en
1674. Il y érigea aussitôt un fort à la Vauban, puis des centaines
d'habitations furent construites. En 1691, on y recensait quelque 20 000
habitants. La France avait acquis en 1673 un
autre comptoir, Chandernagor, au nord de Calcutta (aujourd'hui
Kolkota dans le Bengale occidental). Viendront
s'ajouter en 1723 Mahé et Yanaon, ainsi que Karikal en 1738.
3.2 Les Établissements
français de l'Inde
|
Les Français avaient donc sous leur juridiction cinq
comptoirs commerciaux en Inde:
- Chandarnagor, fondé
en 1673 (aujourd'hui Chandannagar dans le
Bengale-Occidental); - Pondichéry, fondé en 1674 (aujourd'hui
Puducherry dans le Tamil Nadu); - Mahé, fondé en 1723 (aujourd'hui
Mahe dans le Kerala); - Yanaon, fondé en 1723 (aujourd'hui
Yanam dans
l'Andhra Pradesh); - Karikal, fondé en 1738 (aujourd'hui
Karaikal dans le Tamil Nadu);
En 1693, la ville de Pondichéry fut capturée par
les Hollandais lors de la guerre de la ligue d'Augsbourg (1688-1697), puis restituée à la
France en 1697 par le traité de Ryswick. Les Britanniques s'en emparèrent à trois
reprises au cours du XVIIIe
siècle et, après des périodes variant
entre deux à onze mois
d'occupation, le territoire de Pondichéry fut rendu à la France. En
1742, Joseph-François Dupleix devint gouverneur de l'Inde française.
C'est sous sa direction que Pondichéry connut son apogée.
Par ses victoires militaires contre les Britanniques, Dupleix réussit à
étendre le petit territoire autour de la ville de Pondichéry et à Karikal;
il exerça par le fait même une grande influence dans les affaires des souverains de
la région. Dupleix obtint le poste de gouverneur général de tous les
Établissements français de l'Inde. Il désirait acquérir pour son pays de
vastes territoires en Inde. |
Mais la colonie de Pondichéry passa de nouveau sous le
contrôle de la Grande-Bretagne de 1803 à 1814, avant de redevenir un
territoire français jusqu'en 1954, au moment où le territoire fut rétrocédé
à l'Inde.
Au cours
de cette dernière période française, Pondichéry n'était plus qu'une escale vers
les colonies française d'Extrême-Orient. Le français fut l'unique langue de
l'Administration et des affaires, le tamoul étant relégué aux communications
informelle entre Indiens. Autant on parlait français dans la ville blanche,
autant on parlait tamoul dans la ville noire. L'agglomération de Pondichéry
comptait environ 100 000 habitants, dont quelque 30 000 Français.
En 1940,
sous l'invitation
pressante des Britanniques, l'Inde française devint l'une des premières colonies à
soutenir le général de Gaulle et à se rallier au mouvement de la France libre.
Après la Seconde Guerre mondiale, la France introduisit des réformes
significatives en accordant aux Pondichériens une plus grande autonomie, en
créant notamment une Assemblée représentative, élue pour cinq ans au
suffrage universel direct. Mais son rôle demeura strictement administratif.
Quelques mois plus tard, les Pondichériens exprimèrent leur désaccord, car
cette assemblée ne disposait ni de l'autonomie législative ni de l'autonomie
financière pour pouvoir fonctionner adéquatement.
En dépit de la libéralisation du régime
français, la vague du nationalisme indien, qui triomphait partout en Inde,
atteignit les
Établissements français de l'Inde.
Le 15 août 1947, l'Inde obtint son
indépendance du Royaume-Uni et Nehru devint
premier ministre. Ce dernier croyait que les événements qui avaient mis fin
à la domination britannique sur l'Inde devaient concerner aussi les
possessions françaises (et portugaises) et aboutir au même résultat. De
fait, le maintien des enclaves coloniales (françaises et portugaises)
paraissaient un anachronisme.
En 1948, au moment du
transfert de facto du territoire à l'Union indienne, les
Établissements français de l'Inde comptaient quelque
362 000 habitants répartis sur une superficie de 509 km².
En 1950, la France perdit la ville de Chandernagor, après l'avoir administrée
sans interruption depuis 1816, la population locale ayant voté à 97 % à son
intégration dans l'État du Bengale occidental au sein de l'Union indienne.
La France (Pierre Mendès France) signait un accord avec New Delhi
(Jawaharlal Nehru), le 21 octobre
1954, sur la rétrocession du territoire à l'Inde. Il avait été alors
prévu que la cession de souveraineté ferait l'objet d'un traité ultérieur,
mais le principe du règlement de la cession des Établissements français de
l’Inde était acquis.
3.3 La rétrocession de
Pondichéry (1954-1956)
La passation officielle des pouvoirs eut
lieu le 31 octobre 1954, mais le
Traité officiel
de la cession de Pondichéry fut signé le 28 mai 1956, soit huit ans après le
transfert de facto, entre l'Union indienne et la République
française. Le Parlement français ne ratifiera le traité que le 16 août 1962.
C'est à cette même date que le Parlement indien adopta une modification à la
Constitution pour faire place à Pondichéry en tant que «territoire autonome»
au sein de l'Union indienne.
Au sujet de la langue, soulignons qu'aucune disposition du
traité de cession ne garantissait aux Français quelque droit que ce soit. Le
président René Coty (1954-1959) n’a aucunement songé à faire insérer une
quelconque disposition linguistique dans le traité, ce que le premier ministre Nehru n’aurait
certainement pas refusé. Les négociateurs français savaient probablement comment
protéger jusqu'à un certain point les biens et défendre les intérêts des
personnes, mais la survie de la langue ne
les préoccupait guère, à l'exemple précédent de Bonaparte lors de la vente de la
Louisiane aux Américains (voir le texte
du contrat de vente). Il en avait ainsi dans le
traité de Paris
de 1763 lors de cession de la Nouvelle-France par Louis XIV à la Grande-Bretagne.
C'est ainsi que se terminaient trois siècles
de présence française en Inde. Charles-Robert Ageron
(1923-2008),
un historien français spécialiste de la décolonisation, a jugé très sévèrement
cette période de transition vers l'indépendance (dans
La décolonisation française,
Paris, Armand Colin, 1991, p. 103) : «Les établissements français, qui auraient
pu constituer des plates-formes naturelles d'expansion culturelle et
commerciale, furent liquidés sans compensation, au terme d'un combat retardateur
imposé par l'incapacité des gouvernements à tourner la page.»
Quelques articles du
Traité de cession
de Pondichéry portaient sur le sort des établissements français
d'enseignement: les articles 20 à 25. Le gouvernement indien s'engageait à assurer leur maintien
et à faciliter, après accord, l'ouverture d'institutions nouvelles. La
France conservait la propriété du Collège de Pondichéry et continuait à en
assurer le fonctionnement. Les établissements privés étaient autorisés à
continuer à enseigner en français et recevoir, en dehors des subventions
locales, l'aide du gouvernement français. Les organismes et institutions
destinés à des études préparant à des diplômes de langue et de civilisation
françaises, à la recherche scientifique, et à la diffusion de la culture
française étaient conservés, et d'autres pouvaient être au besoin créés avec
l'accord du gouvernement indien. Il était prévu que l'Institut français de
Pondichéry, inauguré le 21 mars 1955, serait maintenu comme institut
d'enseignement supérieur et de recherches. Quant à l'article 28, il énonçait
que le français resterait langue officielle des anciens
Établissements français aussi longtemps que les représentants
élus ne prendraient pas de décision différente.
3.4 L'Union territoriale de Pondichéry
Après la cession officielle des
Établissements français à l'Inde en 1956, le gouvernement central a pris en
charge ces territoires. Pondichéry faisait alors
partie intégrante de l'ancien État de Madras, aujourd'hui l'État du Tamil Nadu. En janvier 1963, plusieurs milliers de Pondichériens choisirent d'opter pour
la nationalité française. Ces
«optants» et descendants d'«optants» demeurent aujourd'hui les seuls
«francophones» ou «francisants» à Pondichéry. Le 1er juillet de la même année, fut créé l'Union
territoriale de Pondichéry englobant les quatre anciens districts français de Pondichéry,
de Karikal, de Yanam et
de Mahé répartis dans trois États (l'Andhra Pradesh, le Tamil Nadu et le Kerala).
On estime que près de 20 000 descendants des Pondichériens vivent
aujourd'hui en France et que près de 7000
citoyens français résident dans le territoire de Pondichéry. On peut y voir
encore certaines traces de l'influence française, telles que le consulat, le
lycée français, des noms de rue encore inscrite en français, les képis des
policiers, la bibliothèque Romain-Rolland, les statues de Jeanne d'Arc et de
Joseph-François Dupleix, gouverneur des colonies françaises en Inde
de 1742 à 1754, etc. Mais le développement urbain des dernières décennies a
réduit de façon substantielle le cachet français qui en faisait le charme pour
devenir une ville à l'allure indienne.
Le 10 mai 1963, le Parlement indien adoptait
la
Loi sur le gouvernement des territoires de l'Union.
Cette loi prévoyait (art. 34) que le français pouvait demeurer la langue
officielle
aussi longtemps que l'Assemblée législative du territoire de l'Union de
Pondichéry n'en décide autrement; elle prévoyait aussi que l'Assemblée
législative pouvait adopter toute
autre langue
à des fins officielles, alors que l'anglais était obligatoire à la Législature à
moins que celle-ci
n'en dispose pas autrement par une loi.
En 1965, l'Assemblée territoriale adoptait la
Loi sur les langues officielles
de Pondichéry, qui proclamait le tamoul comme langue
officielle sous réserve que le malayalam pouvait être officiel dans le district de Mahé
et le télougou dans le district de Yanam. Évidemment, l'anglais demeurait
officiel dans tous les districts, alors qu'aucune mention n'était faite au sujet
du français. En 1973, l'Assemblée territoriale reconnaissait explicitement dans
la
Loi sur les municipalités de
Pondichéry l'usage de la langue locale dans les municipalités du
district de Pondichéry. En 2006, l'Assemblée législative de
Pondichéry, avec l'approbation du gouvernement central, a adopté une loi
modifiant le nom du territoire fédéral. Ce fut la
Loi sur le changement de nom qui modifiait «Pondicherry» («Pondichéry»)
en «Puducherry» («Poudouchéry»), une appellation qui s'approcherait davantage du
tamoul que la dénomination anglaise de Pondicherry.
Poudouchéry forme aujourd'hui l'Union territoriale de
Poudouchéry. Étant donné que le territoire est morcelé en des entités
distinctes et des populations différentes, il est possible quje la politique
linguistique de l'État soit diversifiée.
4.1 Le statut des langues
Le territoire de Poudouchéry a
adopté en 1965 la
Loi sur les langues officielles
de Pondichéry (Pondicherry Official Languages Act).
La croyance veut que la loi proclame l'emploi de cinq langues à des fins officielles: le
tamoul, le malayalam, le télougou, l'anglais et le français. Voyons ce qu'il
en est de cette loi qui ne compte que quatre articles. L'article 1er
sert d'article préliminaire sur le titre, l'application de la loi et son entrée en vigueur
:
Article 1er
[traduction]
Titre abrégé,
application et début
1) La présente loi peut être appelée
Loi sur les langues officielles de Pondichéry de 1965.
2) Elle
s'applique à l'ensemble de l'Union
du territoire de Pondichéry.
3) Elle entre immédiatement en vigueur.
|
L'article 2 est de moindre
intérêt, car il se limite à la définition des mots «administrateur» et
«Territoire de l'Union».
- Tamoul, télougou
et malayalam
Toutefois, l'article 3 de la
Loi sur les langues officielles
de Pondichéry est fondamental, puisqu'il porte sur l'emploi
explicite des langues officielles dans le territoire. D'abord, le tamoul
demeure la langue d'usage en totalité ou en partie aux fins officielles
du territoire de l'Union. C'est donc en principe la langue principale sur le territoire
de l'Union; il est même écrit «la langue tamoule qui doit (en
anglais: "shall") demeurer la langue d'usage en totalité ou en partie
à des
fins officielles», alors que dans le district de Mahé, il est possible
(en anglais: "may") d'utiliser le malayalam et, dans le district de Yanam,
le télougou, aux mêmes fins officielles:
Section 3
Official Language of the Union territory.
With effect from such date the Administrator may, by notification
in the Official Gazette, appoint in this behalf, the TamiI language
shall, subject to the provisions of section 34 of
the Government of
Union territories Act, 1963 (Central Act 20 of 1963), be the
language to be used for all or any of the official purposes of the
Union territory, and different dates may be appointed for different
official purposes or for different areas in the Union territory :
Provided the Administrator may, by like notification, direct
that in the case of Mahe area,
the Malayalam language, and in the
case of Yanam area, the Telugu language
may be used
for such
official purposes and subject to such conditions as may be specified
in such notification.
|
Article 3
[traduction]
À compter de la présente date, l'administrateur peut, par
un avis dans
le Journal officiel, désigner sous ce nom
la langue tamoule qui
doit,
sous réserve des dispositions de l'article 34 de la
Loi sur le
gouvernement des territoires de l'Union de 1963 (loi fédérale no 20
de 1963), demeurer la
langue d'usage en totalité ou en partie
à des fins officielles du
territoire de l'Union, et des dates différentes peuvent être
choisies pour différentes fins officielles ou pour différents domaines
dans le territoire de l'Union :
Sous réserve qu'il soit
possible que l'administrateur, par
un simple avis,
ordonne que, dans le cas du district de Mahé, la
langue malayalam et,
dans le cas du district de Yanam,
le télougou puissent être
utilisés aux mêmes fins officielles et sous réserve des conditions
qui peuvent être spécifiées dans ledit avis.
|
Ainsi, il existe une hiérarchie entre les
trois langues «indiennes»: le tamoul est obligatoire, mais il est possible
d'employer le malayalam à Mahé et le télougou à Yanam. Il en est ainsi de
l'anglais qui peut (angl.: "may") être employé partout.
Quant à l'article 4 de la
Loi sur les langues officielles
de Pondichéry, il précise que l'anglais, nonobstant les
dispositions de l'article 3, peut être utilisé en totalité ou en partie
à des fins officielles du territoire de l'Union:
Section 4
Use of the English language for official purposes.
Notwithstanding anything contained in section 3, as from the
commencement of this Act the English language
may be used for all or
any of the official purposes of the Union territory.
|
Article 4
[traduction]
Emploi de l'anglais à des fins officielles
Nonobstant les dispositions
de l'article 3, à partir de l'entrée
en vigueur de la présente loi, la langue anglaise
peut être utilisée
en totalité ou en partie à des fins officielles du territoire de l'Union.
|
|
- L'anglais
Autrement
dit, l'anglais peut, dans tout le territoire et tous les districts, se substituer à toute autre langue, y compris au tamoul.
On peut comprendre que le bilinguisme est de mise partout :
tamoul-anglais à Pourdouchéry et à Karaikal,
télougou-anglais à Yanam,
malayalam-anglais à Mahé.
- Le français
Dans la
Loi sur les langues officielles
de Pondichéry de 1965, il
n'est fait aucune mention du français. En effet, juridiquement parlant dans
cette loi, le
français n'est pas une langue officielle, puisque seulement quatre
langues, le tamoul,
le malayalam, le télougou et l'anglais, sont explicitement mentionnées.
Pourtant,
l'emploi du français est parfaitement légal dans tout le territoire de Poudouchéry; il est incontestablement admis
par tous, même sans texte juridique formel. Cet emploi du français
relèverait de la pure tradition orale, c'est-à-dire du droit coutumier
et de la Common Law britannique. En
réalité, le français a été reconnu par le gouvernement central indien à
l'article 28 du
traité de cession de 1956 :
Section 28
[version anglaise officielle]
The French language
shall remain the official language of the Establishments so long as
the elected representatives of the people shall not decide otherwise. |
Article 28
[version française officielle]
Le français doit rester
la
langue officielle des Établissements aussi longtemps que les
représentants élus de la population n'auront pas pris une décision
différente. |
Or, les «représentants élus de la
population», c'est-à-dire le gouvernement territorial, n'ont jamais pris de décision
différente à ce sujet, puisqu'ils s'en sont simplement abstenus. C'est en ce
sens qu'on peut affirmer que le français fait partie des cinq langues
officielles. De plus, l'article 34 de la
Loi sur le gouvernement des territoires de l'Union (1963),
adoptée par le Parlement central, énonce que « la langue française
continuera d'être employée comme une langue officielle de ce
territoire de l'Union pour les mêmes fins officielles pour lesquelles elle a
été utilisée dans ce territoire immédiatement
avant l'entrée en vigueur de la présente loi »:
Article 34
Langue officielle ou langues de l'Union territoriale et langue(s) d'usage à
l'Assemblée législative à ce sujet
1) L'Assemblée législative de l'union territoriale peut
par la loi d'adopter une ou plusieurs des langues en usage dans
le territoire de l'Union, ou bien l'hindi comme la langue ou les
langues officielles d'usage en totalité ou en partie pour les
fins officielles du territoire de l'Union:
Sous réserve que, aussi
longtemps que l'Assemblée législative du territoire de
l'Union de Pondichéry n'en décide autrement,
la langue française continuera d'être employée comme une
langue officielle de ce territoire de l'Union
pour les mêmes fins officielles pour lesquelles elle a été
utilisée dans ce territoire immédiatement
avant l'entrée en vigueur de la présente loi;
|
En réalité, si l'Assemblée législative a déjà décidé que le
tamoul et l'anglais seraient les langues officielles du territoire, elle n'a
jamais abrogé cette disposition qui reconnaît le français comme langue
officielle. Il ne subsiste guère de doute: le français est bel et bien
l'une des langues officielles du Territoire, dont le statut n'a jamais été
abrogé.
Pour le gouvernement de Poudouchéry, le territoire se
veut aussi «the Window of French Culture», une expression qu'avait
lui-même utilisée l'ancien premier ministre indien, Jawaharlal Nehru
(1947-1964) en 1954 lors de la rétrocession du territoire. À l'hôtel de
ville de Pondichéry, Nehru avait insisté sur l'importance de préserver la
culture française à Pondichéry; il voulait que le territoire demeure une
«fenêtre de la France sur l'Inde» ("a window of France on India").
Il faut aussi comprendre que la co-officialité
des langues n'est pas uniforme sur le territoire. Ce multilinguisme se
prête à de nombreuses applications et interprétations, lesquelles tiennent compte de la
situation géographique, du district, du quartier, de la fonction de
communication, etc. En principe, le tamoul est la langue officielle du
gouvernement territorial, mais le télougou et le malayalam le sont également dans les
communications avec les autres États, notamment le Kerala, l'Andrha Pradesh
et le Tamil Nadu. De plus, l'anglais peut remplacer l'une des ces trois
langues en toutes circonstances. Quant au français, il ne conserve son
statut de co-officialité de façon strictement symbolique, même dans la ville de
Poudouchéry.
4.2 L'Assemblée législative
et l'emploi des langues
Bien qu'il puisse exister juridiquement cinq
langues officielles pour le territoire de Poudouchéry, seuls deux d'entre elles
sont employées pour la rédaction des lois et règlements.
|
Ainsi, l'Assemblée
législative locale ne rédige
ses lois qu'en anglais, les traduit en tamoul, mais conserve le titre du Journal officiel
en trois langues, c'est-à-dire en tamoul, en français et en anglais. En ce qui a trait au français, son statut
demeure
avant tout symbolique, voire historique. Le Journal officiel a comme titre en
français «La Gazette de l'État de Poudouchéry» et en anglais
"The Gazette of Puducherry". Les débats des parlementaires se déroulent
généralement en tamoul, mais l'anglais peut aussi être utilisé, même le français
(théoriquement). Dans les faits, toutes les lois
sont rédigées en anglais, traduites en tamoules, très rarement
en malayalam ou en télougou, jamais en français. |
L'article 35 de la
Loi sur le gouvernement des territoires de l'Union (1963),
adopté par le Parlement central, précise que toutes les lois et tous les
projets de loi, de même que les ordonnances, les règlements et arrêtés,
doivent être rédigés en anglais, sous réserve de l'article 34 qui
autorise l'emploi d'une autre langue :
Article 35
Langue d'usage dans les lois, les projets de loi, etc.
Nonobstant toute disposition contenue à l'article 34, aussi longtemps que le
Parlement n'en dispose pas autrement par une loi, les actes
faisant autorité :
(a) tous les projets de loi introduits ou modifiés
qui sont proposés à l'Assemblée législative du le territoire
de l'Union;
(b) toutes les lois adoptées par l'Assemblée
législative du du territoire de l'Union, et
(c) toutes les ordonnances, toutes les règles, tous les règlements et statuts
émis
en vertu d'une loi adoptée par l'Assemblée législative du territoire de
l'Union;
doivent être
rédigés en anglais:
Sous réserve que, lorsque l'Assemblée législative du
territoire de l'Union a prescrit
une autre langue que
l'anglais pour son usage dans les projets de loi introduits
ou les lois adoptées par l'Assemblée législative du
territoire de l'Union ou d'une ordonnance, d'une règle, d'un
règlement ou d'un décret émis
en vertu d'une loi formulée par l'Assemblée législative du
territoire de l'Union, une traduction du document en anglais
publiée sous l'autorité de l'administrateur dans le Journal
officiel doit être considérée comme le texte de référence de
celui-ci dans la langue anglaise.
|
Rappelons que l'article
34 de cette loi fédérale mentionne explicitement la langue française
comme l'une des possibilités: «Sous
réserve que, aussi longtemps que l'Assemblée législative du territoire
de l'Union de Pondichéry n'en décide autrement, la langue française
continuera d'être employée comme une langue officielle de ce territoire
de l'Union pour les mêmes fins officielles pour lesquelles elle a été
utilisée dans ce territoire immédiatement
avant l'entrée en vigueur de la présente loi.»
4.3 Le changement de
l'appellation du
territoire
Depuis la fondation des Établissements
français de l'Inde, le territoire s'est toujours appelé en français
«Pondichéry», puis en anglais Pondicherry, mais davantage «Puducherry». En 2006, l'Assemblée législative de
Pondichéry, avec l'approbation du gouvernement central, a adopté une loi
modifiant le nom du territoire fédéral. Ce fut la
Loi sur le changement de nom (2006):
Article
3
Modification
du nom du territoire de Pondichéry
À partir du jour
fixé, le territoire de Pondichéry doit être connu comme le
territoire de Poudouchéry.
Article
4
Modification de
la partie VIII de la Constitution
Dans la partie
VIII de la Constitution, le mot «Pondichéry», partout où il se
produit, est remplacé par le mot «Poudouchéry».
Article
7
Modification de l'article 2 de la loi
n° 20 de 1963
Dans
la
Loi sur le gouvernement des territoires de l'Union de 1963, à
l'alinéa h) de l'article 2 du premier paragraphe,
le mot «Pondichéry»
est remplacé par le mot «Poudouchéry».
|
Le nom Pondicherry (en
anglais) a été changé pour Puducherry, un nom tamoul. Selon les
fonctionnaires qui ont proposé cette nouvelle appellation, le nouveau nom,
qui signifie «nouveau village», doit mieux refléter l'histoire autochtone de
la région. En réalité, ce mot était celui utilisé à l'origine et
l'administration française a employé ce nom dès le début pour son usage
officiel. Avec le temps, les Français l'ont modifié en Pondichéry (en
anglais: Pondicherry). Le gouvernement territorial a ordonné
d'employer le mot Puducherry dans toutes les places publiques. Ce
sont des nationalistes tamouls qui ont réussi à influencer le gouvernement
pour imposer la nouvelle appellation.
Cependant, pour beaucoup de Pondichériens
ou de Poudouchériens,
le mot Pondicherry (Pondichéry en français) est demeuré l'appellation la plus populaire pour
désigner la ville, ainsi que la dénomination familière
Pondy. La loi pondichérienne n'a
jamais été totalement respectée, sauf dans le titre du Journal officiel ("Gazette de
l'État de Poudouchéry"), que ce soit dans la correspondance en tamoul et dans les sociétés
de transport. Pour les reste, ni les fonctionnaires ni le public n'ont tenu
compte de cette loi de 2006. Lorsqu'un document officiel est rédigé en anglais,
le mot Pondicherry continue d'être utilisé. Il s'agit là d'une des
nombreuses contradictions de la politique linguistique du gouvernement
territorial.
4.4 Les services aux
citoyens
|
Rappelons que la ville de Poudouchéry est
située en pays tamoul. La plupart des citoyens sont donc de culture tamoule
et de langue tamoule. Or, la plupart des
fonctionnaires, surtout ceux exerçant des postes de direction dans le
gouvernement territorial, proviennent des services du gouvernement central.
Ce sont donc des hindiphones bilingues: ils parlent l'hindi et l'anglais. Il en résulte que le
recours du personnel hindiphone à Poudouchéry, à Mahé, à Karaikal et à Yanam
a pour effet de réduire considérablement l'usage du tamoul dans
l'administration, les fonctionnaires demeurant plus à l'aise en anglais et
en hindi qu'en tamoul.
Au point de vue administratif, il
n'existe pas de textes juridiques pondichériens sur l'emploi des langues. Le
seul texte important est la
Loi sur l'administration de Pondichéry (1962). |
Cependant, son article 6
ne traite pas de la langue, mais des droits, responsabilités et obligations
du gouvernement de la République française, qui sont transférés au
gouvernement central de l'Inde :
Article
6
Droits et obligations
Sous réserve des dispositions du Traité de
cession, tous les droits, toutes les responsabilités et les
obligations du gouvernement de la République française en
relation ou résultant de l'administration des anciens
Établissements français sont, à compter de la date fixée,
devenus les droits, les responsabilités
et les obligations du gouvernement central. |
Cela étant dit, il existe que des
pratiques à Poudouchéry, qui consistent à ne pas trop froisser les citoyens
sur ce sujet délicat qu'est la langue. Il n'est pas dans les habitudes du
gouvernement territorial d'imposer des mesures obligatoires en matière de
langue. Le principe appliqué depuis des décennies, c'est d'intervenir le
moins possible ou, à tout le moins, tout en douceur en ne contrariant pas les
citoyens dont le vote décide de l'avenir politique de chacun des
politiciens. Depuis plus d'un demi-siècle, l'une des façons courantes de fonctionner, c'est d'intervenir par des ordonnances
tout en se gardant bien
de les faire appliquer par la suite.
- La langue tamoule
Selon la politique linguistique pratiquée
par le
gouvernement territorial, le tamoul doit être employé pour toutes les fins officielles
du territoire de l'Union. Dans le cas des districts de Mahé et de Yanam, le
malayalam et le télougou peuvent être respectivement employés pour ces mêmes
fins. Dans les faits, la politique territoriale n'est pas bien respectée par les
fonctionnaires. Tous les documents officiels destinés au public sont
rédigés uniquement en anglais. Les fonctionnaires n'utilisent le tamoul que
pour répondre à des requêtes rédigées en tamoul; il en est ainsi à Mahé avec
le malayalam, à Yanam pour le télougou et avec le tamoul à Karaikal. Bref,
tous les textes officiels
sont d'abord rédigés en anglais, puis souvent traduits en tamoul, parfois,
selon le district, en malayalam et
en télougou, mais jamais en français.
De plus, si le gouvernement fait des
efforts pour répondre en tamoul, c'est en grande partie dû aux interventions
répétées de l'Action Committee for Tamil Development ("Comité
d'action pour le développement du tamoul") ou ACTD, un organisme formé
surtout d'enseignants et de spécialistes du tamoul et destiné à la promotion du
tamoul comme langue administrative et langue d'enseignement dans le but de
«protéger le tamoul de la dominance des autres langues.»
Ces dernières
années, l'administration territoriale a commencé à employer le tamoul, même
de façon limitée. En raison des demandes persistantes de l'ACTD, le
gouvernement a émis une ordonnance
informant tous les fonctionnaires de signer les registres officiels en
tamoul. Par la suite, le gouvernement n'a jamais insisté pas sur le suivi
de cette directive. L'anglais est redevenu rapidement privilégié comme langue de
l'administration et du pouvoir, bien que seule une petite minorité
de 454 locuteurs puisse maîtriser cette langue. Évidemment, le gouvernement territorial n'est pas prêt à renoncer à
l'anglais, encore moins à congédier son personnel, quitte à obliger ses
fonctionnaires à apprendre le tamoul. Le gouvernement nage entre deux eaux:
d'une part, il ne pratique pas une politique stricte de promotion du tamoul,
d'autre part, il ne veut pas se mettre à dos les mouvements pro-tamouls.
C'est pourquoi il a mis en œuvre des programmes très modérés qui consistent
à attribuer des récompenses, à accorder des subventions ou des prix liés à
la production de littérature, de musique, de prose, de danse ou d'autres
œuvres artistiques ou de festivals reliés à la langue tamoule.
Pour les membres du Comité
d'action pour le développement du tamoul (ACTD), ces activités, bien que
fort utiles, demeurent insuffisantes, car elles n'améliorent guère le statut
de la langue tamoule. Il convient plutôt d'appliquer les dispositions
de la
Loi sur les langues officielles de 1965. Pour ce faire, il faudrait
activer l'emploi du tamoul au sein de l'administration gouvernementale,
rendre la maîtrise du tamoul obligatoire pour obtenir un emploi dans la
fonction publique, accorder la préséance aux candidats maîtrisant le tamoul,
publier des glossaires administratifs de tamoul, former les fonctionnaires
en tamoul et faire suivre des cours de tamoul aux fonctionnaires qui
ignorent cette langue.
- La langue française
En ce qui a trait au français, le gouvernement
territorial ne s'oppose pas à son
emploi, mais il ne fait rien pour le promouvoir. Il considère la langue française et sa culture comme un héritage
culturel prestigieux. Dans les faits, le gouvernement se contente d'accorder certaines subventions aux
institutions culturelles françaises dans la ville de Poudouchéry.
4.5 L'emploi des
langues dans la justice
Les tribunaux de première instance qui
procèdent dans un district donné emploient généralement la langue du
district: le tamoul (Poudouchéry et
Karaikal), le télougou à Yanam et le
malayalam à Mahé. Mais l'anglais demeure
juridiquement une langue officielle dans les tribunaux. C'est même, en
principe, la seule langue que les juges sont tenus de savoir, ils ont reçu
une formation juridique dans cette langue. Cependant, l'anglais demeure
obligatoire à la Haute Cour de justice, dont le siège social est à Madras
(High Court of Judicature at Madras), aujourd'hui Chennai, la capitale du
Tamil Nadu. ce
L'omniprésence de l'anglais est un fait normal sur le territoire de
Poudouchéry. Cette présence de l'anglais est même obligatoire dans les
tableaux d'affichage à la Haute Cour de justice ainsi que l'emploi de la ou
des langues locales, comme on peut le constater à l'article 69 de la
Loi sur les frais judiciaires et l'évaluation des poursuites
(1972) :
Article 69
Pouvoir de la Haute Cour de prévoir des règlements
1) La Haute Cour peut prévoir des règlements pour assurer ou
réglementer la totalité ou l'une des questions suivantes, à
savoir:
(d)
l'affichage dans chaque cour d'un tableau
en anglais et
dans la langue ou les langues locales
montrant les frais exigibles pour le service et l'exécution
de la procédure.
|
De nos jours, si des avocats étaient autorisés à
s'adresser à la cour en français, il faudrait que le personnel
judiciaire soit qualifié en droit français et qu'il avoir la pleine
maîtrise de la langue française, afin d'entendre les témoignages en
français et de lire les lois en français. En principe, le français
pourrait être permis dans les tribunaux, mais il faudrait avoir recours
à l'interprétariat.
4.6 L'affichage
L'affichage dont il est question ici
concerne avant tout le nom des rues (odonymes), la publicité commerciale et
toute autre affiche publique.
|
- Le nom des rues
Les noms de rue à Poudouchéry constituent un
autre aspect de l'aménagement linguistique. Les vestiges du régime français
sont toujours présents dans la ville de Poudouchéry (moins à Karaikal), dans
l'urbanisme, les routes, les maisons, etc. La ville est construite avec des
rues projetées d'est en ouest et du nord au sud dans un rectangle parfait;
cet alignement à angle droit des rues reste un héritage vivant des
bâtisseurs français. Un long canal qui coule du
nord au sud a été construit pour distinguer l'ancien quartier des Blancs et
celui des Noirs, les Indiens.
Les noms de rue témoignent du statut des
langues dans la ville de Pondichéry. On distingue trois types de panneaux
pour les noms de rue:
1) Panneaux en français ou bilingues français-tamoul;
2) Panneaux en tamoul ou bilingues tamoul-anglais;
3) Panneaux unilingues tamouls.
|
|
Sur les panneaux bilingues
français-tamoul en métal, les mots sont rédigés avec des lettres
blanches sur fond bleu. Ils sont généralement fixés sur les murs
de la première et de la dernière maison de chaque rue. Le nom de
la rue peut être en tamoul en dessus et en français en dessous.
Sous le régime français, c'était l'inverse: le français était au
dessus, le tamoul, en dessous. Ce positionnement indique
clairement le statut du français aujourd'hui.
Notons que le nom des rues dans la ville «blanche» désignent
souvent des personnalités françaises (Rue Duplexi, Rue François-Martin,
Rue Saint-Louis, Rue Mahé de Labourbonnais), notamment des
gouverneurs. Dans la ville «noire», les noms sont en tamoul ou
en tamoul et en anglais, et désignent des personnalités
indiennes (Nehru Street), des temples (Muthu Mariamman
Koil Street, Cathedral Street) ou des castes (Chetty
Street).
Bien que la tendance actuelle soit de privilégier les
dénominations anglaises, la Ville de Poudouchéry fait des efforts pour
conserver la langue et la culture françaises dans le paysage linguistique.
|
|
Pour sa part, la bibliothèque Romain-Rolland (du nom de l'écrivain français
Romain Rolland), fondée en
1827, ne possède qu'une dénomination anglaise (Romain Rolland Library) et
tamoule;
elle possède une vaste collection de plus de 60 000 volumes en français, en
anglais et en tamoul |
- Les
recommandations de l'ACTD
Pour sa part, le Comité d'action pour
le développement du tamoul (ACTD) recommande au gouvernement
territorial plusieurs mesures:
- imposer des affiches ou des enseignes en tamoul pour identifier le nom des
établissements publics et privés;
- employer en tout temps l'appellation Pudu Cheri (en tamoul) au lieu de l'anglais
Pondicherry, mais le français Poudouchéry demeure
acceptable;
-
recourir à des symboles tamouls pour les chiffres et le calendrier;
- imposer le tamoul pour l'enregistrement des véhicules et les cérémonies
religieuses;
- interdire l'usage du sanskrit ou d'autres langues dans les
cérémonies de mariage.
L'ACTD demande, entre autres, que le gouvernement
écoute l'avis des spécialistes du tamoul pour trouver des solutions aux
problèmes linguistiques et de prévoir qu'un de ces spécialistes siège de
facto à l'Assemblée législative de Poudouchéry.
4.7 L'enseignement des
langues
En Inde, le système scolaire compte quatre
niveaux d'enseignement :
1) le «pré-primaire»
(maternelle) appelé
"pre-primary
school", non obligatoire;
2) le primaire ("primary"), obligatoire;
le primaire du second cycle ("upper primary"),
obligatoire;
3) le secondaire ("secondary"), obligatoire au premier
cycle; non obligatoire au second cycle "higher secondary");
4) l'enseignement supérieur.
Dans les établissements d'enseignement sous
la juridiction de l'Union territoriale de Poudouchéry, on
peut aussi utiliser les expressions "middle school" pour "upper
primary" et "high school" pour "secondary". En 2011, le taux
d'alphabétisation des adultes de Poudouchéry était de 81,2
%, dont 88,6 % pour les hommes et 73,9 % pour les femmes.
Rappelons que la fréquentation scolaire est obligatoire pour
les enfants. L'article 4 de la
Loi
sur l'instruction primaire obligatoire (2000)
l'énonce ainsi et impose aux parents contrevenants d'une
amende d'une centaine de roupies (plus ou moins 1,50 US$) :
Article 4
Il est du devoir de chaque parent ou tuteur d'un enfant d'âge scolaire
d'inciter son enfant à fréquenter une école
primaire.
Article
7
Chaque parent ou tuteur d'un enfant
d’âge scolaire qui ne s'est pas acquitté de son
obligation en vertu de l’article 4 est passibles
d'une amende pouvant aller jusqu'à une centaine
de roupies. |
Sur l'ensemble du territoire de Poudouchéry, d'après le
Directorat de l'enseignement scolaire (Directorate of School
Education), on comptait en 2010-2011 plus de 700 écoles
publiques, dont 301 écoles primaires. Selon le district, la
répartition était la suivante:
Type d'école |
Poudouchéry |
Karaikal |
Mahé |
Yanam |
Total |
Primaire I ("primary") |
190 |
82 |
14 |
15 |
301 |
Primaire II ("middle
school") |
76 |
24 |
7 |
1 |
108 |
Secondaire I ("high school") |
123 |
39 |
5 |
13 |
180 |
Secondaire II (highter
secondary school") |
93 |
18 |
6 |
1 |
118 |
Total |
482 écoles |
163 écoles |
32 écoles |
33 écoles |
710 écoles |
Les écoles privées non subventionnées:
Type d'école |
Poudouchéry |
Karaikal |
Mahé |
Yanam |
Total |
Primaire I ("Primary") |
27 |
15 |
4 |
0 |
46 |
Primaire II ("Middle
School") |
38 |
10 |
6 |
1 |
55 |
Secondaire I ("High School") |
64 |
17 |
2 |
4 |
87 |
Secondaire II (Highter
Secondary School") |
40 |
5 |
1 |
0 |
46 |
Total |
169
écoles |
47
écoles |
13
écoles |
5
écoles |
234
écoles |
Bien que le gouvernement territorial de Poudouchéry
ait élaboré une politique globale concernant les langues
officielles, il n'a jamais voulou fixer une politique unique relativement
à l'éducation et à l'enseignement des langues. En raison de la
discontinuité géographique des quatre districts (Poudouchéry, Karaikal,
mahé et Yanam), lesquels constituent l'Union territoriale, la
politique linguistique en éducation correspond à celle des États
voisins, qui devient celle du territoire poudouchérien. Ainsi, le
district qui se trouve enclavé dans l'État concerné adopte la politique
d'enseignement de cet État. Par exemple, les districts de Pondichéry et
de Karaikal,
situés dans le Tamil Nadu, là où le tamoul est la langue officielle,
ont comme politique d'enseignement celle de l'État du Tamil Nadu. Le district de Mahé, qui est
enclavé dans l'État du Kerala, a adopté la
politique de cet État, alors que le district de Yanam a choisi la politique
en usage dans l'Andhra Pradesh. Les examens publics pour les
différentes étapes au cours des études sont aussi décidés par ces États pour les étudiants de Poudouchéry.
Ainsi, pour ce qui est de l'éducation, le territoire de Poudouchéry est
considéré comme une partie des États respectifs, soit le Tamil Nadu, le Kerala
et l'Andhra Pradesh.
- Les garanties
constitutionnelles aux minorités
Dans le domaine de l'enseignement, l'article
350A de la
Constitution indienne
oblige tout État à assurer, au primaire, l'enseignement de
la langue maternelle aux enfants appartenant à des groupes
minoritaires :
Article 350A
Chaque État
et chaque autorité locale de cet État devra
faire en sorte de fournir aux enfants
appartenant à des groupes linguistiques
minoritaires des installations adéquates pour
l'enseignement dans leur langue maternelle au
niveau primaire; et le président, s'il juge
nécessaire ou approprié que ces installations
soient fournies, pourra donner des directives à
cet effet à tout État. |
Pour les langues minoritaires reconnues
(français, hindi, arabe et sanskrit), il suffit d'une
demande de 10 élèves sur 40 pour que le territoire de
Poudouchéry soit tenu d'offrir un enseignement dans une
langue donnée. Les locuteurs parlant le télougou (district
de Yanam) ou le
malayalam (district de Mahé) ne sont pas considérés comme des minorités
linguistiques dans leur district respectif, mais comme
faisant partie de la majorité de l'État de l'Andhra Pradesh
(Yanam) ou de l'État du Kerala (Mahé).
L'article 9 de la
Loi sur l'instruction scolaire de
Pondichéry (1987) reconnaît
l'existence des écoles pour les minorités:
Article
9
École minoritaire établie sans autorisation
Toute minorité, qu'elle soit fondée sur la religion
ou la langue,
peut créer et administrer une école privée sans autorisation en
vertu de l'article 6. |
L'article 6 du
Règlement sur l'instruction scolaire
de Pondichéry (1996) prévoit un enseignement dans d'autres
langues que le tamoul ou l'anglais:
Article 6
Parcours des études
1) Le directeur doit, conformément à la politique du gouvernement en
matière d'instruction scolaire, donner des instructions concernant
les
cours, les syllabus, le support d'enseignement, les langues, le calendrier,
les manuels
et toute autre question liée à la préparation
des élèves pour les examens que les écoles déclarent faire.
2) Même lorsque les écoles ne préparent pas à ces examens, le
directeur doit, conformément à la politique du gouvernement en matière
d'instruction scolaire, désigner les cours, les syllabus, le support
d'enseignement, les langues, le calendrier, les manuels et toute
autre question reliée à ce sujet.
|
L'article 24 du
Règlement de Pondichéry sur le droit des enfants à l'instruction
gratuite et obligatoire (2011) oblige le Conseil consultatif de
l'État sur l'enseignement primaire d'avoir au moins un
membre choisi parmi les des minorités :
Article 24
Constitution et fonctions du
Conseil consultatif de l'État sur l'enseignement primaire
1) Le Conseil consultatif de
l'État sur l'enseignement primaire aux fins de l'article 34 de la
loi se compose d'un président et de onze membres.
2) Le ministre responsable de l'instruction scolaire dans le
gouvernement de Pondichéry est d'office le président du Conseil.
3) Six membres du Conseil sont désignés par le gouvernement
de l'Union territoriale de Pondichéry parmi les personnes ayant des
connaissances et une expérience pratique dans le domaine de
l'enseignement primaire et le développement de l'enfant, comme suit :
a) trois membres, soit un de chaque
catégorie parmi les
personnes appartenant à des castes, les classes défavorisées et des
minorités ;
|
Le tableau suivant (source: 50e
Rapport de la Commissaire pour les minorités linguistiques
en Inde de 2013) indique le nombre de ces écoles
primaires (premier cycle) subventionnées et destinées à une
minorité (français, hindi, arabe et sanskrit) :
Langue -
classes I à V |
Nombre
d'écoles |
Nombre
d'élèves |
Nombre
d'enseignants |
Français
(langue d'enseignement) |
4 |
117 |
15 |
Hindi
(matière d'enseignement) |
10 |
280 |
5 |
Arabe
(matière
d'enseignement) |
10 |
73 |
2 |
Sanskrit
(matière
d'enseignement) |
2 |
11 |
2 |
Total |
26 |
481 |
24 |
Seule la langue française est employée comme
langue d'enseignement, car l'hindi, l'arabe et le sanskrit
constituent des matières dans l'enseignement qui est donné
en tamoul (Poudouchéry et Karaikal), en télougou (Yanam) ou
en malayalam (Mahé). S'il existe une minorité hindiphone
(4357 locuteurs représentant 0,4 % de la population), il n'y
a pas de minorité linguistique de l'arabe ou du sanskrit. Ce
sont des considérations religieuses qui font en sorte que
les parents des enfants choisissent l'arabe (pour les
musulmans) ou le sanskrit (pour les hindous).
Pour les classes de primaire de VI à VIII :
Langue -
classes VI à VIII |
Nombre
d'écoles |
Nombre
d'élèves |
Nombre
d'enseignants |
Français
(langue d'enseignement) |
4 |
107 |
24 |
Hindi
(matière d'enseignement) |
12 |
2 255 |
12 |
Arabe
(matière
d'enseignement) |
4 |
561 |
10 |
Sanskrit
(matière
d'enseignement) |
1 |
18 |
2 |
Total |
21 |
2 941 |
48 |
Dans le tableau précédent, on peut constater
que la minorité hindiphone bénéficie d'un plus grand nombre
d'écoles (12) et d'élèves (2255) que les autres.
Pour les classes de secondaire de IX et X :
Langue -
classes de secondaire IX et X |
Nombre
d'écoles |
Nombre
d'élèves |
Nombre
d'enseignants |
Français
(langue d'enseignement) |
4 |
48 |
24 |
Hindi
(matière d'enseignement) |
13 |
2 629 |
12 |
Arabe
(matière
d'enseignement) |
5 |
439 |
7 |
Sanskrit
(matière
d'enseignement) |
1 |
3 |
2 |
Total |
23 |
3 119 |
45 |
Pour les classes de secondaire de XI et XII
:
Langue - classes de secondaire XI et XII |
Nombre d'écoles |
Nombre d'élèves |
Nombre d'enseignants |
Français
(matière d'enseignement) |
12 |
420 |
8 |
Hindi
(matière d'enseignement) |
6 |
479 |
12 |
Arabe
(matière d'enseignement) |
4 |
224 |
1 |
Total |
22 |
1
123 |
21 |
Par conséquent, le territoire de Pondichéry a deux politiques différentes
en ce qui concerne l'enseignement des langues: l'une pour
l'agglomération de Pondichéry, l'autre pour les districts de Yanam,
de Karaikal et de Mahé.
Dans les écoles gouvernementales qui dépendent de
l'Union territoriale de Poudouchéry, ainsi que des écoles
gouvernementales centrales qui dépendent du gouvernement
central de Delhi, l’enseignement est offert en anglais; les
élèves n’ont pas d’autre choix que l'hindi comme option.
- L'agglomération
urbaine de Poudouchéry
Dans l'agglomération urbaine de
Poudouchéry, l'enseignement des langues est à la fois complexe et unique, car
plusieurs langues sont enseignées : le tamoul, l'anglais, l'hindi, le
sanskrit et le français. Le nombre des langues offertes de façon facultative
ou obligatoire dans les divers niveaux d'enseignement varie d'une école à
l'autre. La situation se présente ainsi: les élèves apprennent le tamoul,
l'hindi ou le français comme première langue. Il leur est possible de
choisir l'une de ces trois langues dans les écoles comme leur langue
maternelle et même de changer cette langue au cours des étapes ultérieures
jusqu'au secondaire, et ce, que ce soit dans les écoles publiques ou
privées. Le français est demeuré l'une des langues offertes parce que
beaucoup de Poudouchériens, au moment de la cession de Pondichéry à l'Inde,
ont opté pour la citoyenneté française. C'est pourquoi le gouvernement de
Poudouchéry a offert le français comme première langue (ou langue maternelle)
dans les programmes scolaires. Le gouvernement territorial a aussi ouvert des écoles
françaises non seulement à Poudouchéry, mais aussi à Villianur, qui
appartient à la région administrative de Poudouchéry, et à Karaikal.
De son côté, la France possède une école appelée
"Lycée
français de Pondichéry", dans laquelle la seconde langue enseignée est l'anglais,
mais le tamoul, l'allemand ou l'espagnol est offert comme troisième
langue. Dans les écoles françaises publiques, l'anglais est enseigné
comme matière, mais pas le tamoul. Dans l'agglomération urbaine de
Pondichéry, aucune école n'offre
le télougou ou le malayalam. Les familles qui proviennent de Mahé ou
de Yanam préfèrent pour leurs enfants l'hindi comme première langue plutôt que
le tamoul. Il y a un nombre significatif de bilingues chez les
hindiphones dans le territoire de Pondichéry. De plus,
afin de faciliter la tâche aux enfants des employés du gouvernement central, l'hindi est présenté comme langue
maternelle dans le système
scolaire de Pondichéry. La plupart des écoles anglaises privées offrent
le tamoul, l'hindi ou le français comme première
langue.
- Les districts de Mahé et
de Yanam
Dans les districts de Mahé (enclavé dans
le Kerala) et de Yanam (enclavé dans l'Andhra Pradesh), la
formule trilingue est adoptée. Le tamoul, le télougou et le
malayalam sont offerts comme première langue dans leur région respective,
c'est-à-dire le malayalam au Kerala (et Mahé), le télougou en Andhra Pradesh
(et Yanam) et le tamoul au Tamil Nadu (Poundouchéry et Karaikal). L'anglais
est la seconde langue, mais l'hindi est enseigné à Mahé et à Yanam à partir de la
cinquième année. Les élèves, qui ont
opté pour l'hindi ou le français comme langue maternelle, doivent
apprendre le tamoul comme langue complémentaire. Cela signifie que ces
élèves doivent d'abord étudier leur langue maternelle (la première langue),
soit l'anglais et le tamoul, alors que les autres élèves de langue maternelle
tamoule apprennent seulement deux langues, c'est-à-dire le tamoul et
l'anglais.
- L'importance de
l'hindi dans le territoire
La situation géographique de l'Union
territoriale de Poudouchéry est, comme le sait, fragmentée (divisée en quatre
districts dispersés). De plus, elle est située dans l'ère linguistique des
langues dravidiennes et non dans celle des
langues indo-aryennes comme
pour les États du Nord. Pourtant, l'hindi, l'une des langues officielles de
l'Inde et la plus importante langue du Nord, demeure une langue presque
incontournable dans cette partie du sud de l'Inde. On peut se demander
pourquoi. Cette situation
s'explique en partie par le fait que Poudouchéry n'a pas le statut d'un État,
mais celui d'un territoire de l'Union. Par ailleurs, rappelons qu'une grande
partie des fonctionnaires provient du personnel embauché par le gouvernement central,
dont la langue officielle est l'hindi. Il faut aussi se rappeler que l'hindi
n'est pas, au plan numérique, une langue importante dans le territoire: elle
n'est parlée que par 0,4 % de la population. Pourtant, l'hindi est à ce
point incontournable que beaucoup de Poundouchériens désirent apprendre
l'hindi en raison des possibilités d'emploi dans toute l'Inde. Évidemment,
tant que les citoyens demeurent dans les limites territoriales de
Pondichéry, soit
293 km², il n'y a pas de problème, mais la quasi-totalité des
Poudouchériens risquent de quitter, un jour ou l'autre, leur petit territoire d'origine.
Or, l'étude de l'hindi dans les écoles du
territoire poudouchérien est
axée sur l'usage de la langue écrite, donc sur la langue des manuels
et des dictionnaires. Les élèves et étudiants
apprennent cette variété d'hindi dès le début de leurs études. Une
fois sur le marché du travail, ils éprouvent certaines difficultés
d'adaptation, car la langue qu'ils ont apprise n'est pas celle que parlent
la plupart des hindiphones. Il peut même arriver, selon les régions de
l'Inde, qu'ils ne comprennent rien à l'hindi parlé, surtout s'il est teinté
d'influences dialectales. Par contre, les élèves qui apprennent le tamoul à
l'école se rendent compte qu'il est sensiblement le même que celui parlé
dans la vie quotidienne.
- Le français
Le français enseigné dans les écoles de
Poudouchéry est également celui des livres et des manuels. Cependant, les
possibilités de rencontrer de vrais francophones se limitent probablement à
des touristes français en visite dans le territoire. En effet, outre les
ressortissants français, les vrais «francophones» (plutôt «francophiles)
de Poudouchéry
semblent être les quelque 1400 élèves du lycée français (le plus
important des huit établissements du sous-continent indien) et les 400 élèves
de l'école de l'Ashram. Ces deux établissements offrent des cours de français dans l'enseignement,
la centaine d'étudiants des établissements indiens, du secondaire au supérieur,
qui apprennent le français comme langue étrangère, les 600 étudiants de l'Alliance française et un petit millier de
personnes; enfin, des anciens fonctionnaires de l'administration coloniale, des enseignants de français ou
des membres de l'Ashram.
En tant que langue étrangère, le français conserve
encore un rôle appréciable. À l'école, le français bénéficie d'une situation unique dans
la mesure où, l'anglais étant la langue normale d'enseignement, il reste la seule langue
étrangère.
Malheureusement, l’enseignement du
français se rapproche de l’enseignement d’une langue morte avec comme
résultat que les élèves sont généralement incapables de soutenir une
conversation en français, même minime.
- Les propositions de
l'ACTD et le tamoul
Quant au Comité d'action pour le
développement du tamoul (ACTD), il propose au gouvernement de rendre
obligatoire l'enseignement du tamoul dans toutes les écoles non tamoules,
dans tous les districts, à partir de la cinquième année; il propose aussi
l'enseignement de l'anglais comme langue seconde à partir de la sixième
année. L'ACTD va encore plus loin en suggérant au gouvernement de
transformer toutes les écoles anglaises en écoles tamoules et d'obliger les
universités à employer le tamoul dans l'enseignement. Le comité demande
également qu'il ne soit plus possible d'obtenir un diplôme d'études
primaires ou secondaires, sans même connaître la langue tamoule.
- L'enseignement
universitaire
Dans l'enseignement universitaire,
la
Loi sur l'Université de
Pondichéry (1985) précise que l'Université de Poudouchéry a le droit de
donner et d'organiser des cours en français (art. 5) et que les
ressortissants français d'origine indienne, autorisés à résider à long terme
dans l'Union territoriale de Poudouchéry , peuvent également être admissibles à
cette université (art. 8):
Article 5 Pouvoirs de l'Université
L'Université dispose des pouvoirs suivants,
notamment:
1) dispenser un enseignement dans les disciplines
d'études comme l'Université peut, de temps à autre, le décider et
prendre les dispositions pour la recherche, l'avancement et la
diffusion des connaissances;
2) offrir et organiser des études
en français;
[...]
Article 8
Université ouverte à toutes les castes
de classes et de croyance
1) L'Université doit être ouverte
aux personnes des deux sexes et de races, de religions, de classes
ou de castes divers, et il n'est pas permis à l'Université d'infliger ou
d'imposer à une personne un interrogatoire, que ce soit sur la
croyance religieuse ou la profession afin de lui accorder le droit
d'être admis à l'Université, et ce, autant pour un enseignant que
pour un
étudiant, ou de détenir un poste pour y obtenir un diplôme:
Que rien dans le présent article ne soit
considéré pour empêcher l'Université de prendre des dispositions
particulières pour des groupes plus faibles de la clientèle,
notamment pour les castes et les tribus reconnues.
2) Les
ressortissants français d'origine indienne
qui ont été autorisés à résider à long terme dans le territoire
d'Union de Pondichéry en vertu des dispositions du traité de cession
peuvent également être admissibles à l'Université. |
Dans les faits, la plupart des cours sont
donnés en anglais, parfois en tamoul ou en hindi, rarement en français.
Cela étant dit, c'est le seul texte de loi de l'Union territoriale de Poudouchéry à
employer le mot «français» ("French") dans un texte.
Au sein de l'Union territoriale de
Poudouchéry, cinq universités possèdent un «département de français» qui
offre des cours
en français et émettent des diplômes de français (B.A. French, M.A. French,
M. Phil in French, Ph. D in French) : le Bharathidasan College for Women, le Tagore
Arts College, l'Indira Gandhi College of Arts and Science, le Kanchi Mamunivar
Centre for P.G. Studies et l’Université Centrale de Pourdouchéry.
Les étudiants des autres départements de ces cinq universités peuvent
également choisir le français en option et suivre des cours de français
langue étrangère.
4.8 Les médias
poudouchériens
Le territoire de Poudouchéry reçoit de
nombreux journaux indiens et étrangers, mais n'en produit que fort peu en raison
de sa petite population. Il existe des journaux en langue tamoule tels que Daily
Thanthi, Dinamalar National, Dinamani, Dinakaran, Malai Malar Evening Tamil,
tous publiés à partir du Tamil Nadu. Le Dinamani, le Dinamalar et
le Dinakaran sont publiés avec des adaptations locales. Certains
périodiques, publiés à Poudouchéry et en petit nombre, sont en tamoul comme le
French Nesan (800 exemplaires), le Sukha Jivani (100 exemplaires) et
le Indian Advertiser en français, en anglais et en tamoul (100
exemplaires). Il existe aussi deux magazines mensuels, le teLi Tamil et le
Vellum tu:ya Tamil, lesquels sont destinés aux Tamouls afin de
promouvoir la langue tamoule à Poudouchéry.
|
Les quotidiens nationaux anglophones
tels The Hindu, le Deccan Herald, l'Indian Express, le
Times of India et le Hindustan Times sont également très populaires
auprès du lectorat pondichérien. On trouve à Poudouchéry un petit journal
mensuel en français d'une douzaine de pages avec pour titre
Le Trait d'Union. Par ailleurs, quelques commerces de Poudouchéry
(Grinde, Focus, Nilgiri, etc.) distribuent des périodiques français
régulièrement tels que Paris Match, L'Express, Le Point, Le Monde, etc. |
Pour les médias électroniques, tous les
Poudouchériens peuvent capter les ondes des stations et canaux en provenance
des États voisins. Les pratiques
observées démontrent que les Poudouchériens choisissent leurs médias
électroniques en fonction de la langue du diffuseur. Ainsi, les locuteurs du
bengali, de l'oriya, du sindhi, du gujarati et du marathi préfèrent des
émissions en hindi sur Doordarshan et Zee TV. Mais les locuteurs du
télougou, du malayalam, de l'ourdou et du kannada choisissent des
émissions en tamoul. Quoique les chaînes comme Udaya, Gemini, Asianet,
etc., soient disponibles en kannada, en télougou et en malayalam, les locuteurs
de ces langues préfèrent des chaînes en tamoul. Les locuteurs du marathi et
de l'ourdou regardent plus fréquemment des chaînes en télougou. Poudouchéry
offre aussi par satellite ou par câble des émissions en français sur TV5.
De nombreux Tamouls de Poudouchéry ont
développé une forte identité pro-tamoule en raison du caractère multilingue et
multiculturel de l'Union territoriale de Poudouchéry. La situation fragmentée des
divers districts formant le territoire fait en sorte que les habitants se
perçoivent plus facilement comme une minorité que comme une majorité. Si l'hindi
et l'anglais sont souvent considérés comme des langues rivales pour le tamoul,
il n'en est pas ainsi pour le français, la langue de l'ancien colonisateur du
territoire. La présence du français, ou ce qu'il en reste, n'est pas dangereuse,
et elle contribue au contraire à l'identité particulière des Poudouchériens.
Du point de vue de
nombreux Tamouls, la politique linguistique du gouvernement territorial paraît plutôt tiède
à l'égard de la langue tamoule; elle laisse croire que le gouvernement considère le tamoul comme une langue sans valeur, même
pour la simplement signature de documents administratifs. En réalité, le
gouvernement territorial n'a pas de
politique linguistique particulière autre que la non-intervention. Même la
Loi
sur les langues officielles de 1965 n'est à peu près pas appliquée, sinon de
façon timorée. Les vestiges
du français correspondent à une sorte de symbole identitaire dans cet ensemble
indien, unique en son genre. Évidemment, l'Union territoriale de Poudouchéry n'est pas un État francophone, car le français demeure
avant tout une langue seconde à simple valeur identitaire. Ce symbole
identitaire vaut surtout pour le district de Poudouchéry, moins pour Karaikal,
mais il ne joue qu'un rôle extrêmement réduit pour les districts de Yanam
(en Andhra Pradesh) et de Mahé (au Kerala). La langue à défendre sur ce territoire,
c'est paradoxalement celle de la majorité tamoule, la langue la plus
puissante étant l'anglais. Quant au télougou et au malayalam, ils ne sont co-officiels
respectivement qu'à Yanam et à Mahé.
Dernière mise à jour:
21 févr. 2024