Aotearoa

Nouvelle-Zélande

New Zealand
Aotearoa


 

Capitale: Wellington 
Population: 4,4 millions (2012)
Langues officielles: anglais (de facto), maori (de jure) et langue des signes néo-zélandaise (de jure
Groupe majoritaire: anglais (75 %) 
Groupes minoritaires: maori (13,5 %), samoan (3 %), cantonais (1,5 %), maori des îles Cook (1,3 %), tonguien (1 %), niuéen (0,5 %), coréen (0,5 %), wu (0,4 %), fidjien (0,2 %), filipino (0,2 %), japonais (0,2 %), etc. 
Système politique: démocratie parlementaire et monarchique (Commonwealth) 
Articles constitutionnels (langue): aucune disposition linguistique dans la Constitution de 1852
Lois linguistiques: Loi sur l'organisation judiciaire (1908); Loi sur la santé (1956); Loi sur les poursuites sommaires (1957); Loi sur la citoyenneté (1977); Loi sur les jurys (1981); Loi sur l'éducation (1989)
; Loi sur la radiodiffusion (1989); Loi sur les terres maories (1993); Loi sur la radio de Nouvelle-Zélande (1995); Règlement sur les tribunaux de la famille (2002); Loi sur la police (2008); Règlement sur les tribunaux de district (2009); Loi sur le traité de Waitangi (1975); Loi sur la langue maorie; Loi modifiant la Loi sur la langue maorie (1991); Loi sur les élections locales (2001); Règlement sur les élections locales (2001); Loi sur la langue des signes néo-zélandaise (2006); Règlement sur l'immigration (procédure du statut de protection et des réfugiés) (2010); Code de procédure pénale (2011); Règlement sur la procédure pénale (2012).

1 Situation géographique

La Nouvelle-Zélande est un État insulaire d'Océanie baigné par l'océan Pacifique-Sud et la mer de Tasmanie. Située à quelque 1600 km au sud-est de l’Australie et à environ 10 000 km de la côte ouest des États-Unis, la Nouvelle-Zélande s’étire du 1600 km. Sa superficie terrestre totale, qui est de 270 534 km², se rapproche de celle du Japon ou des îles britanniques.

Le pays comprend deux îles principales: l'île du Nord (115 000 km²) et l'île du Sud (151 000 km²), anciennement l'île Fumante et l'île de Jade. La Nouvelle-Zélande compte aussi une série d'autres petites îles dans le sud-ouest du Pacifique (voir la carte détaillée). Ses voisins les plus proches sont, au nord, la Nouvelle-Calédonie, les Fidji et Tonga, et à l'ouest l'Australie.

La Nouvelle-Zélande est divisées en 16 régions : Northland, Auckland, Waikato, Bay of Plenty, Gisborne, Hawke's Bay, Taranaki, Manawatu-Wanganui, Wellington, Tasman, Marlborough, Nelson, West Coast, Canterbury, Otago et Southland (consulter la carte des divisions administratives). La Nouvelle-Zélande possède aussi des territoires extérieurs qui ont acquis une certaine autonomie politique: l’île Niue, l’île Tokelau et les îles Cook, sans compter quelques îlots ou atolls (Stewart, Auckland, Bounty, Antipodes, Chatham, Kermadec, Campbell et Snares) et un territoire dans l'Antarctique.

Le territoire de la Nouvelle-Zélande fait partie d’un ensemble plus vaste couvrant une grande partie du Pacifique et formant ce qu’on appelé le triangle polynésien, dont les sommets sont Hawaï au nord, l’île de Pâques au sud-est et la Nouvelle-Zélande au sud-ouest.

En maori, la Nouvelle-Zélande est appelée Aotearoa, ce qui signifie «le pays du long nuage blanc».

2 Données démolinguistiques

La population de la Nouvelle-Zélande comptait 4,4 millions d'habitants en 2012, dont 3,3 millions dans l'île du Nord  (75 %) et 1,0 million dans l'île du Sud (22,7 %). Le pays est composée majoritairement, dans une proportion d'environ 78 %, de descendants d'Anglais, d'Écossais, de Gallois et d'Irlandais. On emploie le mot Pākehā (ou Pakeha) pour désigner les Néo-Zélandais d'origine anglo-saxonne ou européenne, bien que beaucoup de Maoris l'emploient pour désigner un non-Maori. Le Concise Māori Dictionary (1990) définit ainsi le terme Pākehā comme «étranger» ou «personne blanche». Ce terme est fréquemment employé de nos jours en anglais néo-zélandais.

2.1 Les groupes ethniques

Lors du recensement de 2006, Statistics New Zealand avait comptabilisé 4 186 900 personnes habitant la Nouvelle-Zélande, dont 69 % de la population s'est identifiée avec des groupes ethniques européens (voir le tableau de gauche). Si la plupart des Néo-Zélandais d'origine européenne ont des ancêtres britanniques ou irlandais, il y a eu aussi une immigration importante en provenance des Pays-Bas, de la Dalmatie, de l'Italie et de l'Allemagne, ainsi qu'une immigration européenne indirecte venue par l'Australie, l'Afrique du Sud et l'Amérique du Nord. Selon les prévisions du recensement de 2006, les enfants d'origine européenne compteraient en 2021 pour 63 % de la population mineure.

Le second groupe ethnique d'importance est constitué par les Maoris (14,6 % au recensement de 2006). Les Maoris font partie des peuples polynésiens de la Nouvelle-Zélande où ils se seraient installés par vagues successives à partir du VIIIe siècle de notre ère. Ce sont les autochtones du pays, bien qu'il y ait eu un certain mixage de la population avec les Européens. De fait, 53 % des Maoris s'identifient comme uniquement d'origine maorie. Plus de 70 000 Maoris vivent en Australie. Le troisième groupe est constitué par les Asiatiques (9,2 %), c'est-à-dire les Indo-Pakistanais, les Chinois, les Coréens, les Japonais, les Khmers, les Vietnamiens.

Le groupe ethnique suivant comprend des Insulaires du Pacifique (6,9 %), tous des Polynésines, venus principalement des îles Samoa (samoan), Cook (maori), Niué (niuéen), Tonga (tongau), Tokelau (tokelauan) et Fidji (fidjien).

Un autre groupe est formé des MELAA, ce qui correspond en Nouvelle-Zélande à "Middle Eastern, Latin American or African", c'est-à-dire les peuples du Proche-Orient, de l'Amérique latine et de l'Afrique. Le bureau des Statistics New Zealand (Statistiques de la Nouvelle-Zélande) a comptabilisé en 2006 quelque 28 637 individus dans ce groupe, dont approximativement 14 000 du Proche-Orient, 3000 de l'Amérique latine et 11 000 de l'Afrique.

La région d'Auckland est la région la plus multi-ethnique de la Nouvelle-Zélande, 56,5 % d'Européens, 18,9 % d'Asiatiques, 11,1 % de Maoris et de 14,4 % d'Insulaires du Pacifique.

Enfin, quelque 3,5 % des Néo-Zélandais estiment appartenir à deux groupes ethniques ou plus: européen-maori, européen-polynésien, européen-indien-chinois, maori-polynésien, etc.

2.2 Les langues

Les langues sont relativement nombreuses en Nouvelle-Zélande. L'anglais, le maori et la langue des signes néo-zélandaise sont les langues officielles, mais l'anglais demeure incontestablement prédominant. Puis ce sont les langues de la famille austronésienne qui sont numériquement les plus importantes, dont le maori, le samoan, le tonguien, le niuéen, le filipino (tagalog), le fidjien, etc. Suivent les langues asiatiques et certaines langues européennes (néerlandais, allemande, français, etc.).  Le tableau qui suit présente ces langues.

Ethnie Population Pourcentage Langue maternelle Affiliation linguistique
Anglo-Néo-Zélandais 2 823 000 63,9 % anglais langue germanique
Maoris 597 000 13,5 % maori famille austronésienne
Britanniques 236 000 5,3 % anglais langue germanique
Samoans 133 000 3,0 % samoan famille austronésienne
Indo-Pakistanais 75 000 1,6 % anglais langue germanique
Chinois cantonais 67 000 1,5 % cantonais ou yu famille sino-tibétaine
Maoris des îles Cook 60 000 1,3 % rarotongan famille austronésienne
Tonguiens 47 000 1,0 % tonguien famille austronésienne
Chinois anglophones 36 000 0,8 % anglais langue germanique
Hollandais 32 000 0,7 % néerlandais langue germanique
Anglo-Australiens 24 000 0,5 % anglais langue germanique
Niuéen 23 000 0,5 % niuéen famille austronésienne
Coréens 22 000 0,4 % coréen famille coréenne
Chinois wu 18 000 0,4 % chinois wu famille sino-tibétaine
Anglo-Sud-Africains 17 000 0,4 % anglais langue germanique
Anglo-Écossais 16 000 0,3 % anglais langue germanique
Irlandais 14 000 0,3 % anglais langue germanique
Philippins 13 000 0,2 % filipino (tagalog) famille austronésienne
Japonais 12 000 0,2 % japonais famille japonaise
Allemands 11 000 0,2 % allemand langue germanique
Fidjiens 10 000 0,2 % fidjien famille austronésienne
Américains 9 800 0,2 % anglais langue germanique
Khmers 7 700 0,1 % khmer famille austro-asiatique
Juifs anglophones 7 600 0,1 % anglais langue germanique
Tokelauiens 7 200 0,1 % tokelauien famille austronésienne
Thaïs 5 300 0,1 % thaï famille thaï-kadai
Anglo-Canadiens 5 100 0,1 % anglais langue germanique
Libanais 4 500 0,1 % arabe levantin famille chamito-sémitique
Insulaires du Pacifique 4 200 0,0 % anglais langue germanique
Vietnamiens 4 000 0,0 % vietnamien famille austro-asiatique
Gallois 4 000 0,0 % gallois langue celtique
Français 3 900 0,0 % français langue romane
Russes 3 600 0,0 % russe langue slave
Rakahanga-Manihiki 3 500 0,0 % rakahanga-manihiki famille austronésienne
Anglo-Africains 3  500 0,0 % anglais langue germanique
Italiens 3 400 0,0 % italien langue romane
Iraniens 3 200 0,0 % farsi occidental langue indo-iranienne
Pukapuka 3 100 0,0 % pukapuka famille austronésienne
Croates 2 800 0,0 % croate langue slave
Suisses allemands 2 700 0,0 % suisse allemand langue germanique
Grecs 2 600 0,0 % grec langue grecque
Malais 2 400 0,0 % malais famille austronésienne
Danois 2 300 0,0 % danois langue germanique
Indonésiens 2 300 0,0 % indonésien famille austronésienne
Tuvaluans 2 300 0,0 % tuvaluan famille austronésienne
Polonais 2 300 0,0 % polonais langue slave
Somaliens 2 200 0,0 % somali couchitique (chamito-sémitique)
Espagnols 2 100 0,0 % espagnol langue romane
Slovènes 1 700 0,0 % slovène langue slave
Turcs 1 600 0,0 % turc famille altaïque
Tahitiens 1 400 0,0 % tahitien famille austronésienne
Gitans anglophones 1 300 0,0 % anglo-romani langue mixte
Serbes 1 200 0,0 % serbe langue slave
Autrichiens bavarois 1 100 0,0 % bavarois langue germanique
Pitcairnais de Norfolk  200 0,0 % pitcairnais de Norfolk créole
Autres 13 000 0,2 % - -
Total 2012 4 415 100 100,0 %    

- L'anglais

L'anglais est la langue principale utilisée par la majorité de la population et dans la vie publique. En effet, plus de 75 % des Néo-Zélandais parlent l’anglais comme langue maternelle, ce qui comprend évidemment les Néo-Zélandais anglophones, les Britanniques, les Australiens, les Américains, les Anglo-Canadiens, les Anglo-Africains, les Juifs anglophones, mais aussi les Indo-Pakistanais anglophones, les Chinois anglophones, les Insulaires du Pacifique anglicisés, etc.  Plus de 90 % des habitants du pays peuvent parler l'anglais soit comme langue maternelle soit comme langue seconde. Un total de 24 090 personnes (soit 0,5 %) ont déclaré être capables d'utiliser la langue des signes néo-zélandaise, la troisième langue officielle du pays après l'anglais et le maori.

L'anglais parlé en Nouvelle-Zélande, le "New Zealand English", ressemble à celui de l'Australie parce que les premiers colons britanniques provenaient des même régions de la Grande-Bretagne, soit le sud de l'Angleterre, l'Irlande et l'Écosse, mais certaines prononciations particulières distinguent les deux variétés d'anglais. L'anglais néo-zélandais est caractérisé par certaines influences du maori, c'est-à-dire les noms de lieu et beaucoup de termes relatifs à la flore, à la faune et à la vie agricole. En réalité, beaucoup de mot maoris ont été adaptés phonétiquement à l'anglais au point où la plupart des Néo-Zélandais ignorent qu'il s'agit de mots d'origine maorie. On appelle cet anglais "Kiwi slang", le mot kiwi désignant les habitants de la Nouvelle-Zélande. Le kiwi est aussi l'emblème du pays: un oiseau dépourvu d'ailes et de queue, ce qui le rend totalement inapte au vol. Cousin éloigné de l'émeu, le kiwi mesure de 40 à 50 cm de haut. Le terme ne semble pas offensant pour les Néo-Zélandais.

- Le maori

La Nouvelle-Zélande est caractérisée aussi par la présence de ses autochtones, les Maoris (ou Tangata Whenua), qui forment 12,9 % de la population. Ils parlent en principe le maori (appelé "Te Reo"), une langue du groupe malayo-polynésien oriental (sous-groupe océanien) appartenant à la famille austronésienne et apparentée au tahitien et à l'hawaïen.  Sur une population d'environ 310 000 personnes d'origine maorie, seulement 30 000 à 50 000 Maoris parleraient encore couramment leur langue polynésienne, ce qui représente environ de 10 % à 16 % de cette population. Or, en 1930, les maoris parlaient leur langue ancestrale dans une proportion de 97 %, ce qui témoigne éloquemment des effets néfastes dus à des décennies d'endoctrinement, de politiques d'assimilation et des transformations profondes dans la société maorie. Aujourd'hui, très peu de Maoris sont unilingues maoris, la plus grande partie d'entre eux ne connaissant que l'anglais ou sont bilingues.

 

 

Les Maoris vivent dans toutes les régions du pays, mais ils sont davantage concentrés dans l'île du Nord, surtout les régions de Gisborne (plus de 40%), de Northland (28%) et de Bay of Plenty (27%), ainsi que les régions de Hawke's Bay (22%), de Waikato (20%) et de Manawatu-Wanganui (18%). À Auckland, la ville la plus peuplée du pays (1,3 million d'habitants), les Maoris représentent 11 % de la population, mais leur nombre est néanmoins considérable avec 137 000 individus, soit 23% de tous les Maoris néo-zélandais. Les régions de Taranaki (13%) et de Wellington (11%) sont celles comptant le plus faible pourcentage de Maoris dans l'île. 

Dans l'île du Sud, les Maoris sont beaucoup moins nombreux, et ce, d'autant plus qu'ils sont très largement minoritaires, car ils représentent généralement moins de 10% de la population totale de l'île: Southland (11%), Marlborough (9%), West Coast (8%), Nelson (8%), Tasman (7%), Canterbury (7%) et Otago (6%).

- Les langues polynésiennes

Près de 7 % de la population dit avoir des origines polynésiennes non maories, ou mélanésiennes ou micronésiennes, ce qui représente une augmentation de 0,4 % depuis 2001. Les langues polynésiennes autres que le maori sont le samoan (133 000), le rarotongan ou maori des îles Cook (60 000), le tonguien (47 000), le niuéen (23 000), le filipino ou tagalog (13 000), le fidjien (10 000, le tokelauien (7200), le rakahanga-manihiki (3500), le pukapuka (3100), le malais (2400), l'indonésien (2300), le tuvaluan (2300) et le tahitien (1400).

- Les langues asiatiques

Les locuteurs revendiquant des origines asiatiques formaient 9,2 % de la population en 2006, une augmentation considérable depuis 2001, où ils étaient 6,6 %. Parmi les langues asiatiques, citons les langues chinoises de la famille sino-tibétaine telles le cantonais (67 000) et le wu (18 000), puis le  coréen (22 000) de la famille coréenne, le japonais (12 000) de la famille japonaise, le khmer (7700) et le vietnamien (4000) de la famille austro-asiatique et le thaï (5300) de la famille thaï-kadai. Toutes ces langues sont issues de l'immigration et sont généralement concentrées à Auckland et dans la région de Wellington.

- Les langues européennes

La Nouvelle-Zélande reçoit encore beaucoup d'immigrants venus d'Europe. C'est pourquoi on trouve des langues telles le néerlandais, l'allemand, le gallois, le français, le russe, l'italien, le croate, le suisse allemand, le danois, le polonais, le slovène, etc.

- Les autres langues

 La Nouvelle-Zélande abrite aussi plusieurs autres langues qui font partie des MELAA ("Middle Eastern, Latin American or African"), les peuples du Proche-Orient, de l'Amérique latine et de l'Afrique. On trouve donc des langues comme l'arabe, le persan (ou farsi), le somali, le turc, l'espagnol,

 - Les religions

Selon le recensement de 2006, le christianisme est la religion la plus répandue en Nouvelle-Zélande avec 55,6 % de la population; 34,7 % des Néo-Zélandais se sont déclarés sans religion. Les principales subdivisions chrétiennes sont l'anglicanisme, le catholicisme, le presbytérianisme et le méthodisme; on trouve également des personnes se reconnaissant dans les églises pentecôtiste, baptiste ou mormone. Le mouvement chrétien Ratana trouve des fidèles parmi les Maoris. Parmi les religions non chrétiennes les plus répandues, on trouve l'hindouisme, le bouddhisme et l'islam.

3 Données historiques

Les premiers colons polynésiens seraient arrivés en Nouvelle-Zélande (appelée alors Aotearoa) il y a plus de 1000 ans. Les implantations maories étaient déjà répandues sur la plus grande partie du pays au XIIe siècle. En 1642, le navigateur hollandais Abel Tasman aperçut Aotearoa. Œuvrant pour le compte de la Hollande, Tasman lui donna le nom de «Nieuw-Zeeland». Mais ce n'est que 127 ans plus tard, soit en 1769, qu'un capitaine de la marine britannique, James Cook, devint le premier européen à fouler le sol néo-zélandais. Les insulaires qui habitaient le pays, les Maoris, n’apprécièrent pas trop leurs premiers contacts avec les Anglais. À son retour en Angleterre, Cook fit part de ses découvertes, notamment au sujet des énormes richesses en bois et en poissons. Londres mit au point un plan de colonisation et créa la New Zealand Compagny (1758). Des chasseurs de baleines et des aventuriers s’installèrent dans la région de Bay of Islands au nord de l’île du Nord et y instaurèrent la loi du plus fort. Les affrontement entre Européens et Maoris devinrent si violents que la région eut la triste réputation d’être «le trou d’enfer du Pacifique».

En 1838, un Français, Jean-François Langlois, chasseur de baleine, acheta des terres dans la péninsule de Banks. L'année suivante, la France accorda son autorisation pour fonder une colonie à Akaroa, appelée également Port-Louis-Philippe (en l'honneur du roi Louis-Philippe). En 1840, des colons français, au nombre de 63, fondèrent le premier et seul établissement français de la Nouvelle-Zélande.

3.1 Le traité de Waitangi de 1840

Britanniques et autochtones en vinrent à un terrain d’entente : ce fut le traité de Waitangi. En fait, ce traité fut signé par quelque 500 chefs maoris et le capitaine William Hobson (1792-1842), représentant de la reine Victoria et qui deviendra le premier gouverneur. Le traité déclarait que la Nouvelle-Zélande devenait un territoire britannique, mais garantissait en contrepartie certains droits aux Maoris, notamment des droits de propriété sur «leurs» terres. Le traité de Waitangi fut rédigé à la fois en anglais et en maori, mais il comportait d’importantes différences selon la version. Par exemple, la version maorie ne cédait aux Britanniques que le «droit de gouverner», alors que la version anglaise parlait de «souveraineté» proprement dite. Dans ces conditions, les Maoris et les Britanniques ont interprété le traité en fonction de leurs intérêts respectifs, c'est-à-dire de façon inconciliable. Tandis que les Maoris ont considéré le traité comme une forme de partenariat, les Britanniques l'ont perçu comme la prise en compte d'une nouvelle colonie. Or, le gouvernement britannique n'a jamais ratifié le traité de Waitangi qui, de nos jours, passe pour une «manoeuvre politique frauduleuse», car les chefs maoris n'ont signé que la version maorie.

Par la suite, toutes les décisions politiques des Britanniques se sont fondées uniquement sur la version anglaise du document. Évidemment, le traité de Waitangi n’a pas réussi à assurer quelque paix que ce soit, puisque les conflits commencèrent immédiatement après sa signature. D'une part, Maoris et Britanniques interprétèrent différemment les clause du traité; d'autre part, l'arrivée massive de colons européens mécontenta les Maoris qui subirent ainsi d'énormes pression pour céder leurs terres. Dans les faits, le traité servit à spolier les Maoris de leurs terres. L’entente reconnaissait à l’origine 66,4 millions d’acres de terres aux autochtones, mais 38 ans plus tard il ne leur en restait plus que 11 millions. Les Maoris appelèrent raupatu le mécanisme de dépossession de leurs terres par des moyens qu'ils estimèrent illégaux : c'était d'abord la confiscation pure et simple, puis l'achat des terres à des prix ridicules, suivi de la création forcée des «réserves maories». De plus, les fameuses «réserves maories» étaient contrôlées par des administrateurs de la Couronne afin de promouvoir officiellement l’établissement des Maoris. En général, le gouvernement louait à perpétuité les terres maories aux colons à des prix inférieurs aux taux du marché. Tous les Maoris furent assujettis à la raupatu.

Pendant que les Maoris restaient confinés dans l’arrière-pays à une vie de misère, le pays fut colonisé au profit des Britanniques, surtout des Anglais, mais aussi à l’avantage des Écossais, des Irlandais et des Gallois. La population maorie ira en décroissant durant tout le XIXe siècle. D'ailleurs, la Native School Act ("Loi sur les écoles autochtones") de 1867 imposait l'anglais comme unique langue d'enseignement pour les enfants maoris. Auparavant, ce sont les églises qui assuraient l'enseignement aux Maoris; cet enseignement était presque toujours dispensé en maori. À partir de 1867, les écoles qui voulaient bénéficier des subventions du gouvernement durent passer à l'anglais. Toutefois, le loi de 1867 prit fin en 1865, car les guerres en Nouvelle-Zélande forcèrent la fermeture des écoles, ce qui entraîna l'abandon des écoles des missions.

Par la suite,  les écoles destinées aux indigènes furent sous la responsabilité du Department of Education, qui fut créé en 1877. Dès le départ, l'enseignement de l'anglais fut la priorité de ces écoles. L'objectif était d'éliminer progressivement les écoles autochtones dès que l'anglais eut pris racine dans une communauté. Au début, la langue maorie fut autorisé à faciliter l'enseignement de l'anglais, mais avec le temps les programmes officiels se durcirent et en vinrent à interdire toute utilisation de la langue maorie. De nombreux enfants maoris furent punis s'ils parlaient leur langue maternelle à l'école. Pendant plusieurs décennies, l'insistance de l'anglais dans l'enseignement fut généralement acceptée par les communautés maories, parce que la connaissance de cette langue paraissait un moyen incontournable pour réussir dans la vie.

3.2. La Nouvelle-Zélande indépendante

La Nouvelle-Zélande devint un État indépendant de la Grande-Bretagne en 1907, mais le pays resta gouverné par les Britanniques néo-zélandais. Après la Première Guerre mondiale, la «question maorie» refit surface, surtout au cours des années trente, pour s'intensifier au début des années soixante avec le militantisme maori. Les principales revendications des Maoris portaient sur la restitution des terres reconnue dans le fameux traité de Waitangi (1840). En 1975, un tribunal Waitangi fut créé afin d'étudier les revendications maories concernant les terres et leur dédommagement, et de formuler des recommandations à ce sujet. Ce tribunal possédait les pouvoirs d’une commission d’enquête, qui furent renforcés en 1985 par l’adoption du Waitangi Amendment Act («Loi modifiant le traité du Waitangi»). Le tribunal Waitangi était constitué de membres de la magistrature de la Nouvelle-Zélande, d’Aînés et de chefs maoris, ainsi que d'un certain nombre de participants maoris et non maoris. Bien que les recommandations du tribunal ne soient pas exécutoires, elles ont permis de faire avancer le débat. Par exemple, le gouvernement de la Nouvelle-Zélande a reconnu que le système de la raupatu constituait une violation du traité de Waitangi.

Au début des années quatre-vingt-dix, d'énormes portions du territoire néo-zélandais firent l'objet de réclamations auprès des tribunaux. La plupart des litiges concernaient les nombreuses terres appartenant à l'État. En 1994, un accord entre les Maoris de Waikato et le gouvernement permit de régler de nombreux litiges avec des tribus particulières. Cependant, les progrès apparurent fort lents, ce qui fit réapparaître la contestation maorie, cette fois avec une certaine violence. En fait, la contestation maorie a remis en cause les institutions néo-zélandaises en revendiquant la «souveraineté maorie» avec comme point de départ la restitution des «terres spoliées» par les colons britanniques au cours du XIXe siècle. Pour le gouvernement néo-zélandais, le traité de Waitangi ne reconnaissait aucunement un quelconque droit à l'autodétermination, encore moins un droit à la sécession, ce qui remettrait en cause l'existence même du pays. 

Finalement, le 22 mai 1994, James Bolger et Dame Arkinui Te Atairangikaahu (reine des Tainu), la plus importante fédération tribale maorie, signèrent un accord réglant les litiges concernant quelque 50 000 hectares de terres saisis illégalement par les colons européens au cours des années 1860. Cet accord comprenait des remboursements ainsi que la restitution des terres contrôlées par le gouvernement d'une valeur estimée à 116 millions de dollars US. En 1995, la reine d'Angleterre, Elizabeth II, offrait ses excuses au peuple maori, tandis que le gouvernement néo-zélandais restituait une bonne part des territoires revendiqués.

Toutefois, la question maorie semble se poursuivre, car les Maoris sont aux prises avec de nombreuses difficultés telles que le taux de chômage élevé, une criminalité peu enviable, l'abandon scolaire généralisé, la violence familiale endémique, etc. Par ailleurs, en raison de leur droit sur les terres issues du traité de Waitangi, les Maoris refusent que le gouvernement adopte une loi garantissant l'accès au littoral à tout citoyen néo-zélandais. Le gouvernement de la Nouvelle-Zélande s’était engagé à verser un règlement global (connu sous le nom d'«enveloppe fiscale») de l’ordre de un milliard de dollars néo-zélandais, ce qui excluait l’indemnité versée aux tiers. Ce règlement a, lui aussi, fait l’objet d’un litige. Les Maoris considèrent cette somme «artificielle» et «insuffisante». Le gouvernement actuel a fini par supprimer le «plafond» sur les ententes, mais son souvenir constitue encore une menace pour les Maoris.

4 La législation linguistique

La Constitution de la Nouvelle-Zélande ne fait aucune référence à la langue. L'anglais n'est proclamé langue officielle dans aucun texte juridique néo-zélandais, sauf dans de vieilles lois anglaises qui ne sont plus en vigueur. Paradoxalement, la langue maorie fait l'objet d'une reconnaissance juridique par la Loi sur la langue maorie (Maori Language Act) de 1987. Il en est ainsi pour la langue des signes néo-zélandaise à l'article 3-a de la Loi sur la langue des signes néo-zélandaise (2006).

La Loi sur la langue maorie fait donc du maori l'une des trois langues officielles de la Nouvelle-Zélande. L'article 3 se lit comme suit: 

Article 3
La langue maorie, langue officielle de la Nouvelle-Zélande

Il est par les présentes déclaré que la langue maorie est une langue officielle de la Nouvelle-Zélande.

La loi garantit le droit d'expression en maori dans les tribunaux (art. 4) et établit par l'article 6 le Commissariat à la langue maorie (appelé te Taura Whiri i te Reo Maori). Le Commissariat a pour objectif de promouvoir la langue maorie en tant que "langue du quotidien". Aujourd'hui, même si peu de gens parlent le maori, tous les discours officiels commencent par quelques mots de maori, avant de passer définitivement à l'anglais que tout le monde comprend et parle partout au pays. 

Quant à la langue des signes néo-zélandaise, la Loi sur la langue des signes néo-zélandaise de 2006 la déclare comme «étant une langue officielle de la Nouvelle-Zélande»:

Article 3

But

Le but de la présente loi est de promouvoir et de maintenir l'emploi de la langue signes néo-zélandaise :

(a) en déclarant la langue des signes néo-zélandaise comme étant une langue officielle de la Nouvelle-Zélande; et

(b) en prévoyant l'emploi de la langue des signes néo-zélandaise dans la procédure judiciaire; et

(c) en autorisant de prévoir des règlements fixant des normes de compétence pour l'interprétation dans la procédure judiciaire de la langue des signes néo-zélandaise; et

(d) en énonçant des principes pour guider les ministères du gouvernement dans la promotion et l'emploi de la langue signes néo-zélandaise.

Plus précisément, l'anglais est la langue officielle de facto (selon le fait), le maori est une langue officielle de jure (selon le droit) ainsi que la langue des signes néo-zélandaise. Ainsi, la Nouvelle-Zélande est officiellement un État bilingue, avec trois langues officielles. Il reste à voir comment la Nouvelle-Zélande applique son bilinguisme institutionnel.

5 Les langues de la législation

Les débats au parlement de Wellington se déroulent toujours en anglais, mais les quelques députés maori (six sur 92 en 1987) utilisent parfois leur langue ancestrale. Depuis 1987, la langue maorie a été admise dans les débats du Parlement et un service de traduction simultanée (vers l'anglais seulement) est disponible sur demande. Cependant, les lois ne sont rédigées et promulguées qu'en anglais. Elles ne sont jamais traduites, à l'exception de la Loi sur la langue maorie qui a été rédigée en deux versions: l'une en anglais et un autre en maori. 

Pourtant, la Loi sur le traité de Waitangi (Treaty of Waitangi Act) de 1975 plaçait l'anglais et le maori sur un pied d'égalité de statut au Parlement. Rappelons que cette loi offrait aux Maoris un moyen juridique de demander réparation en justice et de faire entendre leurs revendications au sujet de leurs terres spoliées. Désormais, grâce à la Loi du traité de Waitangi, le point de vue maori est considéré comme une composante normale de tout débat public sur la planification et la répartition des ressources. En 1996, Sir Robin Cooke, le président de la Cour d'appel de la Nouvelle-Zélande, a décrit le traité de Waitangi comme étant «simplement le document le plus important de l'histoire de la Nouvelle-Zélande».

6 Les langues des tribunaux

La Nouvelle-Zélande peut compter sur plusieurs lois concernant les langues employées dans les tribunaux:

- Loi sur l'organisation judiciaire (1908);
- Loi sur les poursuites sommaires (1957);
- Loi sur les jurys (1981);
- Loi sur les terres maories (1993);
- Règlement sur les tribunaux de la famille (2002);
- Règlement sur les tribunaux de district (2009);
- Loi sur le traité de Waitangi (1975);
- Loi sur la langue maorie;
- Loi modifiant la Loi sur la langue maorie (1991);
- Loi sur la langue des signes néo-zélandaise (2006);
- Code de procédure pénale (2011);
- Règlement sur la procédure pénale (2012).

En réalité, la plupart des lois néo-zélandaises relatives à l'emploi des langues concernent le domaine de la justice. De plus, quelques-unes de ces lois se répètent et contiennent des dispositions identiques. Selon la  Loi sur le traité de Waitangi (1975), les langues autorisées sont l'anglais et le maori (à l'oral seulement); toute autre langue est possible avec l'aide d'un interprète en cas de force majeure.

Article 4

Droit de parler le maori dans la procédure judiciaire

1) Dans toute procédure judiciaire, les personnes suivantes peuvent parler le maori, quelles soient ou non capables de comprendre l'anglais ou de communiquer dans cette langue ou dans toute autre langue:

a) un membre de la cour, du tribunal ou de l'organisme devant lequel la procédure est introduite;
b) une partie ou un témoin;
c) un avocat;
d) toute autre personne ayant la permission de la personne présidant l'audience.

2) Le droit conféré par le paragraphe 1 du présent article de parler le maori ne donne pas droit:

a) à une personne à laquelle il est fait référence dans le paragraphe susmentionné d'insister pour qu'on lui adresse la parole ou qu'on lui réponde en maori;

b) ou à toute autre personne que celle qui préside l'audience d'exiger que le procès-verbal ou une partie de celui-ci soit rédigé en maori.

3) Lorsqu'une personne a l'intention de parler maori dans une procédure judiciaire, le président du tribunal doit s'assurer qu'un interprète compétent soit disponible.

4) Lorsque, dans une procédure judiciaire, l'exactitude de la traduction du maori vers l'anglais ou de l'anglais vers le maori est mise en doute, le président du tribunal doit trancher au meilleur de ses connaissances.

5) Un règlement de cour ou une autre règle de procédure appropriée peut être adopté pour exiger qu'une personne ayant l'intention de parler en maori dans le cadre d'une procédure judiciaire fasse connaître son intention dans des délais raisonnables, et pour indiquer d'une manière générale la marche à suivre lorsque, au cours d'une telle procédure, quelqu'un parle maori ou a l'intention de le faire.

6) Un règlement de cour ou toute autre règle de procédure appropriée de cette nature peut entraîner, à défaut du préavis exigé, un élément important en ce qui concerne l'établissement des coûts, mais personne ne peut se voir retirer le droit de parler maori dans une procédure judiciaire en raison de ce défaut de préavis.

Aux termes de la loi, toute personne peut s'exprimer en maori, et ce, qu'elle soit capable ou non de parler en anglais ou dans une autre langue. Lorsqu'un Maori décide d'exercer son droit linguistique, la cour doit recourir à un interprète si le juge ne comprend pas la langue. De plus, cette loi de 1975 ne confère pas aux Maoris le droit de s'adresser par écrit à la cour ni celui de recourir à des témoins en maori. À l'usage, seul l'anglais est employé et le maori est utilisé de façon très restreinte. De toute manière, le juge ne rend ses sentences qu'en anglais.

L'article 4 de la Loi sur la langue maorie reprend des dispositions similaires, l'emploi du maori impliquant nécessairement la présence d'un traducteur:

Article 4

Droit de parler le maori dans une procédure judiciaire

1) Dans toute action en justice, les personnes suivantes peuvent parler le maori, quelles soient ou non capables de comprendre l'anglais ou de communiquer dans cette langue ou dans toute autre langue:

a) un membre de la cour, du tribunal ou de l'organisme auquel l'action est soumise;
b) une partie ou un témoin;
c) un avocat;
d) toute autre personne ayant la permission de la personne présidant l'audition.

2) Le droit conféré par le paragraphe 1) du présent article de parler le maori ne donne pas droit:

a) à une personne à laquelle il est fait référence dans le paragraphe susmentionné d'insister pour qu'on lui adresse la parole ou qu'on lui réponde en maori;

b) ou à toute autre personne que celle qui préside l'audition d'exiger que le procès-verbal ou une partie de celui-ci soit rédigé en maori.

3) Lorsqu'une personne a l'intention de parler maori dans le cadre d'une action en justice, la personne présidant l'audition devra s'assurer qu'un interprète compétent est disponible.

En vertu de l'article 68 de la Loi sur les terres maories (1993), il est possible d'utiliser le maori devant un tribunal:

Article 68

Parties et témoins pouvant utiliser la langue maorie

Sans limitation les dispositions de la Loi sur la langue maorie de 1987, une partie ou un témoin lors d'une procédure devant la cour peut témoigner ou s'adresser à celle-ci en maori.

L'article 1.11 de la Loi sur l'organisation judiciaire (1908) autorise l'emploi du maori, conformément à l'article 4.1 de la Loi sur la langue maorie de 1987, mais pour ce faire il faut remettre à chacune des parties à l'instance un préavis de son intention d'utiliser le maori:

Article 1.11

S'exprimer en maori

1) Le présent règlement s'applique à quiconque, en vertu de l'article 4.1 de la Loi sur la langue maorie de 1987, a le droit de s'exprimer en maori dans une procédure ou lors de l'audition d'une requête interlocutoire.

2) Si une personne à qui s'applique le présent règlement souhaite s'exprimer en maori dans une procédure ou lors de l'audition d'une requête interlocutoire, ou si cette personne agit comme témoin parce qu'elle est appelée par l'une des parties, elle doit déposer et remettre à chacune des parties à l'instance un préavis de son intention d'utiliser le maori.

Selon la même loi (Loi sur l'organisation judiciaire), dans tous les cas, une cour de justice ne peut accepter un document dans la seule langue maorie; il faut obligatoirement une traduction certifiée des documents concernés:

Article 1.12

Traduction des documents en te reo maori

1) Quiconque est partie à une procédure avec un document qui lui est remis a le droit de recevoir une traduction dudit document dans la langue maorie s'il :

(a) s'adresse, oralement ou par écrit, au greffier à l'endroit où l'instance est en cours, dans les dix jours ouvrables suivant la date de l'émission pour une traduction du document dans la langue maorie; et

(b) indique une adresse postale pour le service de la traduction (si une adresse de service n'a pas déjà été transmise); et

(c) convainc le greffier qu'il est incapable de lire le document, mais pourrait le lire s'il était traduit en maori.

2) Le greffier doit exiger que la traduction soit préparée par la partie ou la personne au nom de laquelle le document a été remis.

3) La traduction doit être certifiée conforme par une personne détenant un certificat de compétence approuvé en vertu de l'article 18 de la Loi sur la langue maorie de 1987.

Cette obligation de la traduction est rappelée à l'article 160 du Règlement sur les tribunaux de la famille (2002:

Article 160

Déclaration sous serment dans une autre langue que l'anglais

1) Une déclaration sous serment dans une autre langue que l'anglais (déclaration dans une langue non anglaise) peut-être être déposée dans une procédure.

2) La déclaration dans une autre langue que l'anglais doit être accompagnée d'une déclaration sous serment par un interprète, à laquelle est présentée:

(a) une copie de la déclaration dans une autre langue que l'anglais ; et
(b) la traduction de l'interprète concernant la déclaration dans une autre langue que l'anglais.

Il en est ainsi à l'article 386 du Code de procédure pénale (2011):

Article 386

Règles

2)
Sans limiter la portée générale du paragraphe 1, le règlement adopté, conformément au présent paragraphe, peut:

[...]

(s) prévoir la traduction des documents en maori et dans la langue des signes;

L'article 1.16 de la Loi sur l'organisation judiciaire autorise aussi l'emploi de la langue des signes néo-zélandaise:

Article 1.16

Langue des signes

1)
Toute personne autorisée par la Loi de la langue des signes néo-zélandaise de 2006 à utiliser la langue des signes néo-zélandaise dans une procédure ou à l'audience d'une demande interlocutoire ou lors d'un entretien préliminaire doit donner à la cour et à toutes les autres parties un préavis de dix jours ouvrables pour l'intention de cette personne à le faire.

N'oublions pas que l'article 1.9 du Règlement sur la procédure pénale (2012) rappelle aussi que tout justiciable désirant s'exprimer en maori ou dans la langue des signes néo-zélandaise doit déposer un préavis pour ce faire, question de quérir un traducteur:

Article 1.9

S'exprimer en maori ou utiliser la langue des signes néo-zélandaise

1) Quiconque a le droit de s'exprimer en maori en vertu de l'article 4.1 de la Loi sur la langue maorie de 1987 ou d'utiliser la langue des signes néo-zélandaise en vertu de l'article 7.1 de la Loi sur la langue des signes néo-zélandaise de 2006, et qui a l'intention de le faire dans une procédure, conformément à la loi, peut: 

(a) soit déposer un préavis en vertu du présent règlement de son intention de s'exprimer en maori ou d'utiliser la langue des signes néo-zélandaise; ou

(b) soit d'inclure le préavis son intention de s'exprimer en maori ou d'utiliser la langue des signes néo-zélandaise en ce qui concerne l'aménagement de l'agenda ou le procès annoncé à l'agenda.

Ce préavis doit indiquer l'audience au cours de laquelle une personne a l'intention de s'exprimer en  maori ou d'utiliser la langue des signes néo-zélandaise et le remettre au plus tard dix jours ouvrables avant l'audience. Nécessairement, ce délai de dix jours alourdit la procédure judiciaire et peut décourager l'emploi spontané de ces langues.

Enfin, l'article 16AA de la Loi sur les jurys (1981) précise bien que la méconnaissance de l'anglais constitue un handicap suffisant pour être exclus comme membre d'un jury:
 

Article 16AA

Le juge peut libérer de la convocation une personne ayant des difficultés d'invalidité ou de langue

1) Sur demande, conformément au paragraphe 3, ou de sa propre initiative, un juge peut libérer de la convocation une personne s'il est convaincu que, à cause d'un handicap ou de difficultés de compréhension ou de communiquer en anglais, cette personne est incapable d'agir efficacement comme juré.

Il faut comprendre que les droits linguistiques accordés aux minorités maorie et malentendante ne sont pas les mêmes que pour les citoyens anglophones. Ces derniers peuvent en effet participer à une procédure judiciaire sans l'intermédiaire d'un traducteur et sont assurés d'être compris par le juge et le personnel judiciaire. Un membre de la minorité maorie ou de la minorité malentendante doit d'abord envoyer un préavis de dix jours au tribunal s'il a l'intention d'utiliser le maori ou la langue des signes néo-zélandaise, en plus de devoir passer par un interprète, car le juge et le personnel judiciaire ne sont pas tenus de comprendre ces langues.

7 Les langues de l'Administration 

L'administration du pays ne fonctionne qu'en anglais, que ce soit dans la gestion interne entre employés ou dans les services aux citoyens. Quelques municipalités de l'île du Nord peuvent communiquer en maori, mais il s'agit là d'une pratique peu étendue. L'anglais est l'unique langue de l'État néo-zélandais qui prévoit certains accommodements pour l'emploi du maori. Par exemple, la Loi sur la citoyenneté (1977) exige que le requérant ait une connaissance suffisante de la langue anglaise pour obtenir la citoyenneté néo-zélandaise:

Article 8

Citoyenneté par attribution

2)
Les exigences visées au paragraphe 1-d sont les suivantes:

(e) que le requérant ait une connaissance suffisante de la langue anglaise.

La loi ne mentionne même pas la langue maorie, qui a pourtant le statut de langue officielle.

La Loi sur la police (2008) prévoit qu'il est possible d'apporter des informations «dans une langue autre que l'anglais», sans nommer une langue en particulier, y compris le maori :

Article 96

Preuve de l'identité et d'autorité de la police


4) Le paragraphe 1 ne doit pas empêcher le commissaire de prévoir (en plus de la preuve exigée par le présent paragraphe qui doit être fournie) des formules supplémentaires de preuve d'identité, d'autorité ou les deux, pour les agents d'une police particulière, les agents de police d'un signalement particulier ou tous les agents de police; et toute formule de preuve fournie:

(a) peut indiquer une information (que ce soit ou non exigé ou prescrit par le paragraphe 1);

(b) peut contenir (par exemple, en ayant une micro-puce incorporée dans celle-ci) des renseignements;

(c) peut apporter des informations dans une langue autre que l'anglais;

 Il en est ainsi pour les élections. Le fait de ne connaître que le maori (ce qui demeure exceptionnel) est considéré comme un «handicap» et un bulletin de vote particulier peut être prévu à l'article 34 du Règlement sur les élections locales (2001):

Article 34

Difficultés particulière à voter

1) Un bulletin de vote ou un document particulier à voter peut être marqué selon la manière décrite au paragraphe 2 si l'électeur:

(a) est physiquement handicapé; ou

(b) est incapable de lire ou d'écrire; ou

(c) n'est pas suffisamment familier sans aide avec une langue ou les langues utilisées dans le bulletin de vote.

En somme, l'usage d'une autre langue que l'anglais, par exemple le maori, demeure un fait exceptionnel. Ce n'est pas réellement un droit normal. Pourtant, le Commissariat à la langue maorie, qui a pour fonction de promouvoir l'usage du maori dans tous les services gouvernementaux, fait de nombreux efforts pour encourager les Maoris à demander des services dans leur langue.  Or, il semble que beaucoup de Maoris eux-mêmes hésitent à le faire parce qu'ils auraient alors l'impression de solliciter un privilège. En réalité, comme l'offre ne précède pas la demande, il faut que les Maoris exigent expressément le bilinguisme pour se voir offrir un service dans leur langue, ce qui, semble-t-il, demanderait beaucoup de courage dans la mesure où les ressources humaines en langue maorie sont limitées. Toutefois, dans les quelques municipalités où les Maoris sont concentrés, les services bilingues sont moins difficiles à obtenir.

Soulignons que la prestation des services publics aux Maoris n’est pas assurée par des ministères particuliers, mais par des organismes qui desservent l’ensemble de la population indigène. Cette approche, appelée mainstreaming (ou «intégration»), se révèle très différente des politiques antérieures, alors qu’on avait eu recours à des organismes distincts de service maoris. Le rôle du ministère du Développement maori consiste à présenter les problèmes des Maoris aux organismes de prestation des services gouvernementaux. Le Ministère collabore avec les iwi, les hapu et d'autres organisations maories afin de déterminer les besoins particuliers et de formuler des recommandations.

8 Les langues d'enseignement

Fondé sur le modèle britannique, la Nouvelle-Zélande dispose d'un système d'enseignement de qualité reconnue à travers le monde, notamment pour ses lycées et universités. Cette réputation est confirmée par le fait que des milliers d'étudiants internationaux viennent de nombreux pays du Sud-Est asiatique, de l'Asie du Nord, du Japon, de l'Amérique du Sud, de l'Australie, de l'Inde, etc. Les exigences linguistiques en anglais sont très strictes dans la plupart des établissements d'enseignement. La scolarité est obligatoire pour tous les enfants âgés de 5 à 16 ans. Le pays est doté d'écoles publiques et privées. Toutes les deux sont payantes, mais les écoles privées sont beaucoup plus coûteuses et destinées aux plus riches

Dans le domaine de l'enseignement, l'anglais est obligatoire de la maternelle à l'université. Les Maoris peuvent recevoir un enseignement dans leur langue à la maternelle et au premier cycle du primaire (trois premières années) seulement, mais les écoles maories sont rares et disponibles seulement dans les régions où la minorité est concentrée. Malgré les grandes réussites de ces trois dernières décennies dans la revalorisation de la langue maori aux générations plus jeunes, la revitalisation du maori ne semble constituer qu'un succès mitigé. De façon générale, les Kura Kaupapa Māori (écoles primaires d'immersion) forment de bons locuteurs du maori, mais son usage n’est que peu répandu en dehors des salles de classe. D'ailleurs, l'anglais demeure incontournable puisque les cours de mathématiques et les cours d'anglais sont dispensés uniquement dans cette langue. De plus, la pénurie du matériel pédagogique en maori et le manque de professeurs (seulement 4 % sont maoris) capables d'enseigner le maori rendent son enseignement peu accessible. En 2011, selon le ministère néo-zélandais de l’Éducation, seuls 14 % des élèves maori (soit 24 805 jeunes) reçoivent un enseignement en maori sous une forme ou une autre. En réalité, le système d'éducation semble moins à assurer la protection et le transmission de la langue et de la culture maorie qu'à favoriser un enseignement bilingue transitoire pour que les Maoris puissent s'intégrer à la majorité anglophone.

Pourtant, l'article 155 de la Loi sur l'éducation (1989) prévoit bel et bien des écoles dans lesquelles le Te reo Maori (langue maorie) est la principale langue d'enseignement, mais il faut au moins 21 personnes qui en font la demande:

Article 155

Kura Kaupapa Māori

1) Lors de l'établissement d'une école publique, le ministre peut, par un avis dans le Journal officiel, désigner une école en vertu du présent article.

2) Le ministre a le pouvoir discrétionnaire absolu de refuser d'ouvrir une école en vertu du présent article.

3) Le ministre ne peut établir une école vertu du présent article que s'il est convaincu que:

(a) les parents d'au moins 21 personnes qui, si l'école était implantée, auraient le droit de s'inscrire gratuitement lorsqu'ils désirent mettre ne place une telle école:

(i) dans laquelle le Te reo Maori (langue maorie) est la principale langue d'enseignement; et
(ii) dans laquelle la charte scolaire exige de l'école fonctionne conformément à au Te Aho Matua (tel que défini à l'article 155A); et
(iii) qui a des caractéristiques particulières (le cas échéant) énoncés dans sa charte qui donne à l'école un caractère particulier (appelé dans le présent article «caractéristiques particulières»);

7) Le conseil d'une école créée en vertu du présent article doit veiller à ce que:

(a) le Te reo Maori soit la langue principale d'enseignement à l'école; et

(b) l'école fonctionne selon le Te Aho Matua.

Les élèves dont la langue maternelle est l'une des langues polynésiennes ou une langue d'une autre communauté linguistique ont également les mêmes possibilités d'utiliser leur propre langue dans le cadre de leur scolarité.

Au secondaire, il n'y a ni écoles ni cours en langue maorie; les professeurs sont libres toutefois de donner des cours sur la culture et l'histoire maorie. Le ministère de l'Éducation prépare du matériel pédagogique qu'il distribue dans les écoles afin de favoriser ce type d'enseignement. Mais le Ministère veut également promouvoir le caractère multiculturel de la Nouvelle-Zélande; il en résulte que les éléments reliés à la culture maorie sont souvent noyés dans les contenus propres aux cultures européennes, polynésiennes et asiatiques. Bref, le système établi en Nouvelle-Zélande vise moins à assurer la survivance de la langue et de la culture maorie qu'à promouvoir une éducation bilingue transitoire afin que les Maoris puissent s'intégrer à la majorité anglophone du pays.

9 Le domaine du travail

Dans le monde du travail, particulièrement le monde des affaires, l'anglais est presque exclusivement utilisé. La visibilité du maori est marginale, on ne le perçoit que dans l'affichage administratif, surtout dans les municipalités maories, au ministère des Affaires étrangères et à la Bibliothèque nationale. La signalisation routière est en anglais seulement. La plupart des noms de lieu de la Nouvelle-Zélande portent des noms maoris. Le National Geographic Board, qui détient une autorité absolue sur l'usage officiel des noms de lieu, n'accepte pas le principe d'une toponymie bilingue. Sur les plaques odonymiques (noms de rues), beaucoup de dénominations spécifiques sont en langue maorie, mais le terme générique est toujours en anglais (p. ex., Kowhai Road). Les enseignes et la publicité commerciale ne paraissent qu'en anglais, à l'exception des boutiques à vocation touristique où le japonais et le chinois sont présents. Enfin, si les règlements ponctuels et les consignes relatives à la sécurité ne paraissent qu'en anglais, certaines agences gouvernementales publient assez souvent des dépliants destinés au grand public non seulement en maori, mais également en samoan, en niuan (île Niue), en tokelauan (île Tokelau), etc.

Le degré de satisfaction des groupes minoritaires est plutôt élevé dans le cas des immigrants, souvent trop heureux de s'intégrer à la majorité anglophone du pays. Par contre, les Maoris se déclarent tout à fait insatisfaits des droits qui leur sont reconnus. Ils revendiquent beaucoup plus de services dans leur langue, particulièrement dans l'administration, la justice, l'enseignement et le milieu de travail. Plusieurs demandent une nouvelle loi sur la langue maori qui transposerait leurs droits dans les faits et les étendrait dans diverses domaines, particulièrement à l'école. 

De plus, les Maoris ne veulent plus que leurs droits ne leur soient concédés que seulement s'il y a une demande expresse. Les leaders de la communauté maorie désirent que l'usage du maori soit étendu à tout le système scolaire et disponible à tout élève maori, que plus de ressources humaines soient consacrées à la formation des professeurs et que le ministère de l'Éducation prévoit des programmes complets en langue maorie. Enfin, on demande une extension des émissions de radio et de télévision en maori (consulter à nouveau la Loi sur la langue maorie).

Dans le domaine de l'affichage, la langue maorie est pratiquement inexistante. Toutes les affiches, tous les panneaux publicitaires et TOUS les panneaux routiers n'apparaissent qu'en anglais, sauf dans de rarissimes exceptions. Or, la Nouvelle-Zélande est un pays officiellement bilingue, mais l'une des langues est manifestement plus visible que l'autre.  

PHOTOS: Jean-Pierre PORRET-BLANC

Dans l'état actuel des choses, on peut estimer que les droits reconnus aux Maoris sont tellement restreints qu'ils deviennent presque symboliques, à l'instar des discours politiques qui commencent toujours par quelques mots en maori. Ces droits ne sont pas suivis d'une véritable politique de promotion de leur langue ancestrale. De plus en plus de Maoris veulent apprendre celle-ci pour retrouver leur identité. Étant donné que le nationalisme maori est en hausse constante depuis quelques années, le gouvernement néo-zélandais serait mal venu d'ignorer ces demandes, puisqu'elles s'avèrent des plus légitimes. Le statut de langue officielle du maori ne se vérifie pas dans les faits, puisqu'il correspond plutôt à celui des droits nettement différenciés en faveur de l'anglais. 

Il semble, en définitive, que le maori soit devenu plus un symbole qu'une question d'égalité entre citoyens. Les stratégies de marketing et de promotion du tourisme néo-zélandais se réclament toutes des traditions maories, mais en autant que tout reste dans le domaine du folklore (visages tatoués et danses maories).     
 

Dernière mise à jour: 19 déc. 2023  

Bibliographie

LECLERC, Jacques. Langue et société, Laval, Mondia Éditeur, coll. «Synthèse», 1992, 708 p.

LECLERC, Jacques et Jacques MAURAIS. Recueil des législations linguistiques dans le monde, tome V: «Algérie, Autriche, Chine, Danemark, Finlande, Hongrie, Malte, Maroc, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Royaume-Uni, Tunisie, Turquie, ex-URSS», Québec, Les Presses de l'Université Laval, CIRAL, 1994, 223 p.

MOHI, John H. La gestion de la diversité culturelle en Nouvelle-Zélande, Bangkok (Thaïlande), conférence de l’International Federation of Library Associations and Institutions, 20-28 août 1999,
[http://www.ifla.org/IV/ifla65/papers/095-106f.htm].

Île Cook - Île Niue - Île Tokelau


Le Pacifique

Accueil: aménagement linguistique dans le monde