Tokélaou État libre associé à la Nouvelle-Zélande |
Capitale: aucune
(Atafu, Nukunonu et Fakaofo) |
Les Tokelau (en français: Tokélaou) forment l'un des plus petits États du monde avec une superficie de seulement 10 km² ; seuls la principauté de Monaco et l'État du Vatican comptent une superficie plus réduite, soit respectivement 1,95 km² et 0,44 km². En fait, les Tokélaou constituent un archipel de trois îles polynésiennes, Fakaofo (2,6 km²), Nukunonu (5,4 km²) et Atafu (2,2 km²), qui s'étendent sur une distance de quelque 170 km dans le Pacifique-Sud, à mi-chemin entre Hawaï et la Nouvelle-Zélande. Les États voisins sont le Kiribati au nord, les Samoa occidentales et les Samoa américaines au sud, le Tuvalu à l'ouest (voir la carte détaillée du Pacifique-Sud). Pour se situer dans l'espace, Tokelau se trouve à quelque 480 kilomètres au nord des Samoa occidentales. L'archipel n'a pas de capitale, chacun des atolls ayant la responsabilité des «services de proximité». L'île la plus au sud, Fakaofo, est située à 65 km de Nukunono et à 105 km d'Atafu, l'île la plus au nord. |
L'administrateur des Tokélaou est chargé de l'administration du gouvernement exécutif des Tokélaou. Dans la pratique, l'administrateur joue un rôle clé dans le partenariat entre la Nouvelle-Zélande et les Tokélaou, et agit comme le principal contact entre les Tokélaou et la Nouvelle-Zélande.
- Le gouvernement
Tous les trois ans, ce sont les élections d'un Faipule («chef de village») et d'un Pulenuku («maire élu») qui dirigent les activités du village. Les membres du Fono général («Assemblée nationale») sont également élus tous les trois ans pour traiter des questions nationales. L'autorité du Fono général est accordée par le Taupulega («Conseil des anciens») qui reste la source ultime de l'autorité aux Tokélaou. Entre les réunions du Fono général, les trois Faipule et les trois Pulenuku (maires) se réunissent pour former le Conseil du gouvernement permanent des Tokélaou, qui fait le lien entre la structure gouvernementale traditionnelle du village et le gouvernement national.
Le Fono général se réunit trois à quatre fois par année pendant trois à quatre jours par session sur l’atoll où réside l’Ulu-o-Tokelau («chef du gouvernement»). Généralement, Nukunonu compte six membres; Fakaofo sept et Atafu sept, pour un total de 20 membres selon le cas, car le nombre de membres est basé sur les données du dernier recensement. Les Faipule et les Pulenuku deviennent automatiquement membres du Fono général.
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Le tableau ci-contre montre que les Tokélaou abritent une bien petite population dans chacun des atolls. Ceux-ci comptent plusieurs ethnies: les Tokélaouans (65,3%), les Tokélaouans-Samoans (8,7%), les Tokélaouans-Tuvaluans (6,9%), les Samoans (6,7%), les Tuvaluans (2,8%), les Anglo-Néo-Zélandais (1,0%), etc. La quasi-totalité des insulaires est d'origine austronésienne (polynésienne) dans une proportion d'au moins 97%. |
Les Tokélaouans parlent le tokélaouan; les Anglo-Néo-Zélandais, l'anglais et les Samoans, le samoan. Soulignons qu'au moins 65% des locuteurs du tokélaouans (environ 4500) vivent à l'extérieur de l'archipel, soit en Nouvelle-Zélande et aux Samoa américaines. Dans l'ensemble de la population des Tokélaou, le tokélaouan est parlé par 93,5% des locuteurs; l'anglais par 58,9%; le samoan par 45,5%; le tuvaluan par 11,6%.
En ce qui a trait à l'appartenance religieuse, les insulaires sont de confession chrétienne: 60% appartiennent à l'Église chrétienne congrégationnaliste (surtout à Atafu), 36% sont des catholiques romains (Nukunonu), alors que les autres appartiennent à d'autres confessions. L'île de Fakaofo abrite les deux confessions religieuses importantes.
En raison des ressources naturelles très limitées et de la surpopulation (145 pers./km²), les insulaires ont tendance à quitter l'archipel pour s'installer à la Nouvelle-Zélande. La migration vers la Nouvelle-Zélande a commencé dans les années 1950; elle s'est intensifiée la décennie suivante dans le cadre d'un programme gouvernemental de réinstallation motivé par la crainte d'une surpopulation et d'un cyclone tropical frappant les îles.
Nous ignorons l'histoire anciennes des populations de ce petit archipel du Pacifique-Sud. Nous pouvons présumer que la plupart des habitants des îles descendent de colons polynésiens venus par canoë de Tonga, des Samoa et des Fiji, il y a environ 1000 ans. Ces Polynésiens ont développé leur propre langue et leur culture. Bien que des preuves archéologiques indiquent que les atolls des Tokelau ont été occupés il y a environ 1 000 ans, les traditions orales et les généalogies reconstituées font remonter l’occupation à seulement quelques centaines d’années.
3.1 Les origines
L'histoire orale retrace les traditions locales et les généalogies remontant à plusieurs centaines d'années et détaille les origines de l'ordre social et politique en place au XIXe siècle. Selon des sources orales, les trois atolls fonctionnaient de manière largement indépendante tout en préservant leur cohésion sociale et linguistique. La société tokélaouane était gouvernée principalement par des clans, et il y avait occasionnellement des escarmouches et des guerres entre les atolls ainsi que des mariages mixtes. Historiquement, l'atoll Fakaofo dominait les atolls d'Atafu et de Nukunonu. La vie sur les atolls était basée sur la subsistance, avec une dépendance au poisson et à la noix de coco. Étant donné qu'il n'y a pas de terre arable aux Tokélaou, les légumes et les fruits qui fournissaient des aliments de base ailleurs dans le Pacifique n'étaient pas disponibles.
3.2 Les premières colonisations
Dans les années 1850, des missionnaires catholiques et protestants (de la London Missionary Society), introduisirent le christianisme qui fut adopté par tous les insulaires. Vers 1860, des navires péruviens cherchant de la main-d'œuvre à bon marché pour travailler dans les mines du Pérou, visitèrent les trois îles des Tokélaou. Les Péruviens forcèrent plus de 250 hommes valides à se rendre au Pérou, ce qui correspondait alors à la quasi-totalité de la population active masculine. Puis les maladies (variole et dysenterie) décimèrent ces travailleurs forcés. Peu d'entre eux ont pu revenir aux Tokélaou. Par la suite, les habitants des îles se reportèrent sur les conseils des anciens, les Taupulega, pour gouverner les îles. Sur chacune des trois îles, les familles étaient représentées individuellement au sein d'un Taupulega.
3.3 Les tutelles britannique et
néo-zélandaise
En 1877, l'archipel passa sous protectorat britannique en 1877, mais ce statut
ne devint officiel qu'en 1889 sous le nom de Union Islands («l'Union des îles»). Les îles furent annexées en 1916 et firent partie de la colonie des
îles Gilbert et Ellice. Le gouvernement britannique transféra le contrôle
administratif des Tokélaou à la Nouvelle-Zélande en 1925. Mais il n'y eut
jamais de présence administrative
officielle aux Tokélaou. La Loi de Tokélaou ("Tokelau Act") de 1948
officialisa la souveraineté de la Nouvelle-Zélande sur l'archipel en redonnant
le nom de Tokélaou. Dès cette époque, les lois de la Nouvelle-Zélande ne
s'appliquaient pas aux Tokélaou, sauf s'il en était expressément mentionné. Dans
la pratique, les lois néo-zélandaises ne s'appliquèrent qu'avec le consentement
des représentants de l'archipel. Les trois îles demeurèrent relativement
autonomes et purent conserver leur
culture, leur langue et leur statut particulier.
3.4 Vers l'autonomie
Depuis les trois dernières décennies, les Tokelau ont même augmenté leur autonomie.
Le Tokelau Amendment Act de 1996 a conféré à l'Assemblée générale locale
(le Fono général) et au Conseil exécutif une grande partie des pouvoirs
de la Nouvelle-Zélande, incluant celui de lever des impôts. Les fonctions de
l'Assemblée générale sont mises en œuvre par une délégation composée à partir
des trois Taupulega. Le 21 novembre 2003, le gouvernement néo-zélandais
et les représentants des Tokélaou signèrent une déclaration conjointe sur le
partenariat:
Joint
Statement of the Principles of Partnership 3
Language and Culture |
Déclaration conjointe
sur les principes de partenariat 3 Langue et culture 3.1 Les parties reconnaissent la valeur de la langue et de la culture uniques des Tokélaou en tant que source de force et d'identité et comme élément clé qui distingue les Tokélaouans des autres groupes. La Nouvelle-Zélande et les Tokélaou sont déterminées à garantir la préservation et le développement de la culture tokélaouane. Cet engagement sous-tendra tous les aspects du partenariat et sera pris en compte dans tous les efforts conjoints. |
Le document est de nature politique plutôt que juridique et aborde les responsabilités de chaque partie dans la gestion de leur partenariat étroit. En juin 2004, les pouvoirs de l'Assemble générale ont été transférés aux trois conseils villageois qui ont pris désormais en charge tous les services publics de leur île. L'archipel bénéficie également d'un système judiciaire local ainsi que de services publics distincts. Des navires et des télécommunications locales permettent à l'archipel d'être relié. Les communications avec la Nouvelle-Zélande sont quasi inexistantes.
Il n'existe ni dans la Constitution ni dans aucune une loi de disposition quelconque sur la question linguistique. En effet, la Constitution de 1948 modifiée en 1977 ne contient pas de disposition sur la langue. Dans les faits (de facto), le tokélaouan et l'anglais sont les langues officielles. Cela dit, il n'existe pas de politique linguistique officielles, c'est la non-intervention.
4.1 La législation
La législation et les systèmes judiciaires sont fondés sur
la loi des Tokélaou de 1948 et ses modifications. Un important projet de réforme
du droit se poursuit; son objectif est de garantir que les Tokélaou disposent
d'un ensemble de lois cohérentes qui répondent aux besoins actuels et
reconnaissent dûment les coutumes locales.
À moins qu'elle ne soit expressément étendue aux Tokélaou, la loi néo-zélandaise
ne s'applique pas au territoire. Dans la pratique, aucune législation
néo-zélandaise n'est étendue aux Tokélaou sans le consentement des Tokélaou. Les
villages ont le pouvoir statutaire de promulguer leurs propres lois régissant
les affaires du village. Les pactes internationaux relatifs aux droits
économiques, sociaux et culturels et aux droits civils et politiques, ratifiés
par la Nouvelle-Zélande en décembre 1978, s'appliquent aux Tokélaou.
Les élus locaux ne parlent que le tokélaouan , sauf lorsqu'ils doivent s'adresser au gouvernement de la Nouvelle-Zélande.
4.2 La justice
La juridiction civile et pénale est exercée par les commissaires et la Haute Cour de Nouvelle-Zélande. Il y a neuf policiers tokélaouans – trois chacun à Fakaofo, Nukunonu et Atafu. Ils sont responsables devant les autorités villageoises du maintien de l'ordre public et devant le service public de leurs diverses fonctions civiles. Il y a peu de criminalité en dehors des petits larcins et il n'y a pas de prison. La punition prend généralement la forme de réprimandes publiques, d'amendes ou de travaux forcés. Bref, la justice se déroule en tokélaouan.
4.3 L'administration
La fonction publique des Tokélaou emploie environ 200 personnes, parmi lesquelles beaucoup travaillent à l'extérieur, notamment aux Samoa occidentales. En réalité, le gouvernement local est pratiquement le seul employeur des Tokélaou et toutes les familles comptent au moins un de leur membres comme fonctionnaire.
Les Tokélaou sont dotés d'un administrateur désigné par la Nouvelle-Zélande. Voci des extraits du Règlement administratif des Tokélaou de 1993:
Tokelau Administration Regulations 1993 Section 3 Administrator of Tokelau 1)
The Minister may from time to time appoint such person as he or she
thinks fit to be the Administrator of Tokelau. Duties of Administrator 1)
The Administrator shall be charged with the
administration of the executive Government of Tokelau, and shall
have such other functions and powers as are conferred on the
Administrator by these regulations or any other enactment in force
in Tokelau. Section 5 Delegation of powers 1) Subject to this regulation and to regulation 6, the Administrator may, from time to time, delegate to the General Fono, or to such other person or persons as the Administrator thinks fit, all or any of the powers exercisable by the Administrator under any enactment, including any powers delegated to the Administrator under any enactment. |
Règlement administratif des Tokélaou de 1993 Article 3 L'administrateur des Tokélaou 1) Le ministre
peut occasionnellement nommer une personne qu'il juge appropriée
pour être l'administrateur des Tokélaou. Devoirs de l'administrateur 1)
L'administrateur sera chargé de l'administration du gouvernement
exécutif des Tokélaou et aura les autres fonctions et pouvoirs
conférés à l'administrateur par le présent règlement ou tout autre
texte en vigueur aux Tokélaou. Article 5 Délégation de pouvoirs 1) Sous réserve du présent règlement et du règlement 6, l'administrateur peut occasionnellement déléguer au Fono général, ou à toute autre personne que l'administrateur juge appropriée, en totalité ou en partie des pouvoirs qu’il peut exercer en vertu d’un texte législatif, y compris les pouvoirs qui lui sont délégués en vertu d’un texte législatif. |
Comme on le constate, le rôle de l'administrateur est d'aider le gouvernement des Tokélaou à fournir des services publics de qualité à la population des îles et d'aider à gérer les relations entre les autres pays. Toute la vie officielle ne se déroule qu'en tokélaouan, que ce soit dans les bureaux gouvernementaux ou les tribunaux. Beaucoup de gens ne parlent pas l'anglais et tous parlent le tokélaouan, ce qui explique que cette langue soit employée partout.
4.4 L'éducation
Le tokélaouan est également employé dans les trois écoles des îles, une dans chacune des îles. L'enseignement est donné dans la langue nationale, sauf pour les cours de langue seconde en anglais. La plupart des Tokélaouans poursuivent leurs études secondaires aux Samoa occidentales ou en Nouvelle-Zélande. Dès lors, il faut savoir l'anglais, ce qui est loin d'être le cas de tous les insulaires. Pour le postsecondaire, les jeunes ont le choix entre la Nouvelle-Zélande ou l'Université du Pacifique-Sud (University of the South Pacific) aux îles Fidji. Quant aux enseignants, ils sont généralement formés en anglais aux Samoa occidentales, mais parfois en Nouvelle-Zélande, dans des établissements spécialisés.
4.5 Les médias
Les Tokelau sont pauvres en médias. Il n'y a pas de journaux locaux, ni de stations de télévision. Chacune des trois îles dispose d'une petite station radiophonique diffusant des informations en tokélaouan portant sur la navigation et la météo. Il est possible de capter, par ondes courtes, des stations étrangères, notamment en provenance des Samoa occidentales.
Le petit archipel des Tokélaou abrite un peuple unique au monde, qui a réussi à tirer son épingle du jeu au point de vue linguistique en raison de son insularité et de son isolement continu. En réalité, c'est l'isolement qui a réussi à maintenir contre vents et marées cette minuscule société de quelque 1500 âmes. Le bilinguisme institutionnel n'est qu'une façade, car la plupart des Tokélaouans pouvent s'exprimer difficilement en anglais. L'avenir de cette société est pour le moment relativement assuré, tant et aussi longtemps qu'elle restera à l'écart du monde moderne.
Bibliographie
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