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Pays-Bas(1) Situation
générale et
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Le royaume des Pays-Bas (en néerlandais: Koninkrijk der Nederlanden) est un pays d’Europe du Nord limité à l’est par l’Allemagne, au sud par la Belgique et au nord par la mer du Nord. La superficie des Pays-Bas est de 41 528 km², soit l'équivalent de la Suisse (Belgique: 32 545 km²; France: 547 030 km²; Allemagne: 357 021 km²). Le pays est souvent désigné à tort comme la «Hollande». Or, cette appellation désigne avant tout une ancienne province des Pays-Bas. En 1840, cette province fut divisée en deux régions distinctes (voir la carte détaillée): la Hollande du Nord (ou Hollande septentrionale) et la Hollande du Sud (ou Hollande méridionale). En raison de l'importance historique de la province appelée «Hollande», le mot s'est ensuite étendu à l'ensemble des Pays-Bas, bien que cette appellation soit non avenue et non officielle. C'est le même phénomène qui s'est produit pour le mot «Angleterre» (une province historique) appliqué à tort à tout le Royaume-Uni. En fait, les deux provinces appelées «Hollande méridionale» et «Hollande septentrionale» forment la «Hollande», mais les Pays-Bas sont formés de 12 provinces.
1.1 Les provinces
Les 12 provinces des Pays-Bas sont le
suivantes (voir
la carte détaillée): Groningue
(Groningen), Frise (Friesland),
Drenthe,
Flevoland, Hollande
du Nord (Noord-Holland), Overijssel,
Gueldre (Guelderland),
Hollande
du Sud (Zuid-Holland), Brabant du Nord
(Noord-Brabant), Zélande (Zeeland) et
Limbourg
(Limburg); la région insulaire de Wadden au nord fait
partie de la province du Friesland.
Depuis le 1er janvier
1997, le nom officiel de la province de la Frise (appellation en français) a été changé de
Friesland (appellation néerlandaise) en Fryslân
(appellation officielle en frison).
Les provinces les plus peuplées sont les suivantes: Gueldre, Brabant-du-Nord, Hollande-du-Nord et Hollande-du-Sud (voir le tableau ci-dessous).
Comparativement aux provinces du Canada ou aux États des États-Unis, les provinces néerlandaises ne disposent pas de pouvoirs très étendus, bien que chacune d'entre elles possède son assemblée locale; il s’agit de pouvoirs administratifs qui assurent la liaison entre l’État et les municipalités. En fait, l’essentiel des pouvoirs juridiques, politiques et financiers est exercé par le gouvernement central, et non par les gouvernements provinciaux. |
Province |
Appellation francisée |
Estimation 2010 | Pourcentage | Superficie (km²) |
Densité
de population (par km²) |
Capitale régionale | |
---|---|---|---|---|---|---|---|
1 | Drenthe | - | 511 046 | 3,1 % | 2 652,06 | 192,7 | Assen |
2 | Flevoland | - | 392 513 | 2,3 % | 1 425,66 | 275,3 | Lelystad |
3 | Fryslân (Friesland) | Frise | 636 062 | 3,8 % | 3 361,35 | 189,2 |
Leeuwarden (néerl.) Ljouwert (frison) |
4 | Gelderland | Gueldre | 1 886 718 | 11,4 % | 4 995,23 | 377,7 | Arnhem |
5 | Groningen | Groningue | 538 083 | 3,2 % | 2 344,14 | 229,5 | Groningen |
6 | Limburg | Limbourg | 1 156 702 | 7,0 % | 2 167,46 | 533,7 | Maastricht |
7 | Noord-Brabant |
Brabant-du-Nord Brabant septentrional |
2 514 578 | 15,2 % | 4 938,23 | 509,2 |
Bois-le-Duc (fr.) 's-Hertogenbosch (néerl.) |
8 | Noord-Holland |
Hollande-du-Nord Hollande septentrionale |
2 750 078 | 16,6 % | 2 659,78 | 1 034 | Haarlem |
9 | Overijssel | - | 1 174 607 | 7,1 % | 3 337,46 | 351,9 | Zwolle |
10 | Utrecht | - | 1 226 045 | 7,4 % | 1 356,11 | 904,1 | Utrecht |
11 | Zeeland | Zélande | 353 855 | 2,1 % | 1 791,95 | 197,5 | Middelburg |
12 | Zuid-Holland |
Hollande-du-Sud Hollande méridionale |
3 339 457 | 20,2 % | 2 859,51 | 1 168 |
La Haye (fr.) Den Haag (néerl.) |
Pays-Bas | 16 479 744 | 100,0 % | 41 526,16 | 396,9 | - |
Depuis le 10 octobre 2010, les îles antillaises de Bonaire, de Saint-Eustache et de Saba (appelées «îles BES», à statut particulier) font partie de la province de Hollande-du-Nord (Hollande septentrionale). Chaque province des Pays-Bas est gouvernée par un commissaire désigné par le souverain et par un corps législatif (les États provinciaux) élu par le peuple. Les municipalités, pour leur part, sont dirigées par un conseil élu par le peuple et un bourgmestre (maire) nommé par le souverain. La ville d’Amsterdam reste la capitale politique et économique du pays, mais le siège du gouvernement national est à La Haye.
1.2 Les Territoires néerlandais d'outre-mer
Le royaume comprend également les Territoires néerlandais d'outre-mer, des territoires insulaires autonomes situés dans les Caraïbes. Depuis la dissolution des Antilles néerlandaise le 10 octobre 2010, une nouvelle structure constitutionnelle a été adoptée et acceptée par référendum. Maintenant, Curaçao et Sint Maarten ont acquis le statut d'«État» dans le Royaume, à l'exemple d'Aruba dans les anciennes Antilles néerlandaises avant les modifications.
Île |
Statut |
Superficie |
Population (2009) |
% |
Capitale |
Aruba | État |
193 km2 |
106 523 |
34,7 % |
Oranjestad |
Bonaire (BES) | commune |
288 km2 |
12 877 |
4,2 % |
Kralendijk |
Curaçao | État |
444 km2 |
141 766 |
46,2 % |
Willemstad |
Saba (BES) | commune |
13 km2 |
1 601 |
0,5 % |
De Bottom |
Sint Eustatius (BES) | commune |
21 km2 |
2 768 |
0,9 % |
Oranjestad |
Sint Maarten | État |
34 km2 |
40 917 |
13,3 % |
Philipsburg |
306 452 |
100,0 % |
Ainsi, le Royaume se compose aujourd'hui de
quatre États autonomes (au lieu de trois): Aruba,
Curaçao, Sint Maarten
(Saint-Martin) et les
Pays-Bas. L'État d'Aruba, l'État de Curaçao et l'État de Sint Maarten ne constituent
pas des dépendances d'outre-mer du Royaume des Pays-Bas, car ce sont des partenaires autonomes
égaux
au sein du Royaume, au même titre que les Pays-Bas, et chaque entité possède une degré
élevé d'autonomie interne. Aruba conserve le statut d'État distinct qui est le
sien
depuis 1986. Les trois autres îles antillaises, soit Bonaire, Saint-Eustatius et Saba, sont appelées «îles BES» (en néerlandais: BES eilanden), un acronyme pour Bonaire + Eustatius + Saba. Les habitants de ces îles ont voté en faveur des liens directs avec les Pays-Bas et elles font maintenant partie intégrante des Pays-Bas, en tant que «communes à statut particulier» et constituant ainsi «la partie des Caraïbes des Pays-Bas». |
Dans ce pays de 16,6 millions d'habitants (2010), le nombre de groupes ethniques est impressionnant. Il faut d'abord relever le groupe majoritaire constitué des Néerlandais qui comprennent à la fois les Hollandais, les Brabants, les Zélandais, les Flamands, les Limbourgeois, etc., ce qui correspond à 74 % de la population.
Viennent ensuite les Bas-Saxons (Drente, Groningue, Twente, Stellingwerf et Salland): de nombreuses variantes du bas-saxon sont employées dans les provinces de Groningue, Drenthe et Overijssel, dans les municipalités d'Ooststellingwerf et de Weststellingwerf (sud-est de la province de Frise) et dans les régions d'Achterhoek et de Veluwe (province de Gueldre). Les principales différences se trouvent dans la province de Drenthe, dans la province d'Overijssel entre les parties orientale (Twente) et occidentale (Salland), dans la province de Gueldre entre les parties orientale (Achterhoek) et occidentale (Veluwe) et dans la province de Groningue entre les parties nord-ouest et sud-est. La variante stellingwerf est parlée dans les municipalités d'Ooststellingwerf et de Weststellingwerf dans le sud-est de la province de Frise et dans les parties adjacentes de la Drenthe et du nord-ouest de l'Overijssel. Tous ces groupes linguistiques sont considérés comme faisant partie de la majorité néerlandophone.
Les Frisons du Fryslân (Frise), pour leur part, sont considérés comme la minorité autochtone du pays, ainsi que les Tsiganes. Tous les autres groupes proviennent de populations immigrantes, soit des communautés issues de l'ancien empire colonial des Pays-Bas (Indonésiens, Surinamiens, Indiens, Malais, Antillais, Javanais, etc.), soit des réfugiés économiques (Suisses, Turcs, Arabes, Berbères, Portugais, Italiens, etc.).
Groupe ethnique | Langue maternelle | Locuteurs | Pourcentage |
Affiliation linguistique |
Néerlandais (Hollandais) | néerlandais | 12 354 000 | 74,1 % | groupe germanique |
Frisons | frison de l'Ouest | 841 000 | 5,0 % | groupe germanique |
Groningois | groningois | 610 000 | 3,6 % | groupe germanique |
Turcs | turc | 385 000 | 2,3 % | famille altaïque |
Arabes marocains | arabe marocain | 348 000 | 2,0 % | famille chamito-sémitique |
Surinamiens (créoles) | sranan tongo | 348 000 | 2,0 % | créole |
Berbères rifains | berbère rifain | 153 000 | 0,9 % | famille chamito-sémitique |
Indonésiens | indonésien | 132 000 | 0,7 % | famille austronésienne |
Flamands | flamand | 129 000 | 0,7 % | groupe germanique |
Antillais (créoles) | papiamentu | 128 000 | 0,7 % | créole |
Indiens sarnami | hindustani | 115 000 | 0,6 % | groupe indo-iranien |
Berbères arabisés | arabe algérien | 87 000 | 0,5 % | famille chamito-sémitique |
Arabes tunisiens | arabe tunisien | 83 000 | 0,5 % | famille chamito-sémitique |
Chinois mandarins | chinois mandarin | 76 000 | 0,4 % | famille sino-tibétaine |
Kurdes kurmanji (du Nord) | kurde du Nord | 72 000 | 0,4 % | groupe indo-iranien |
Eurasiens (Euronésiens) | néerlandais | 66 000 | 0,3 % | groupe germanique |
Malais ambonais | malais ambonais | 49 000 | 0,2 % | famille austronésienne |
Britanniques | anglais | 45 000 | 0,2 % | groupe germanique |
Arabes irakiens | arabe irakien | 40 000 | 0,2 % | famille chamito-sémitique |
Javanais | javanais | 33 000 | 0,1 % | famille austronésienne |
Juifs hollandais | néerlandais | 31 000 | 0,1 % | groupe germanique |
Polonais | polonais | 31 000 | 0,1 % | groupe slave |
Iraniens | persan (farsi) | 30 000 | 0,1 % | groupe indo-iranien |
Tsiganes hollandais | néerlandais | 22 000 | 0,1 % | groupe germanique |
Capverdiens | capverdien | 20 000 | 0,1 % | créole |
Tamouls | tamoul | 20 000 | 0,1 % | famille dravidienne |
Africains noirs | néerlandais | 18 000 | 0,1 % | groupe germanique |
Espagnols | espagnol | 18 000 | 0,1 % | langue romane |
Akans | akan | 18 000 | 0,1 % | famille nigéro-congolaise |
Américains | anglais | 17 000 | 0,1 % | groupe germanique |
Italiens | italien | 17 000 | 0,1 % | langue romane |
Français | français | 17 000 | 0,1 % | langue romane |
Arabes égyptiens | arabe égyptien | 16 000 | 0,1 % | famille chamito-sémitique |
Portugais | portugais | 16 000 | 0,1 % | langue romane |
Somaliens | somali | 15 000 | 0,0 % | famille chamito-sémitique |
Afrikaners | afrikaans | 14 000 | 0,0 % | groupe germanique |
Anglo-Australiens | anglais | 13 000 | 0,0 % | groupe germanique |
Crioulo de Haute-Guinée | crioulo de Haute-Guinée | 13 000 | 0,0 % | créole |
Macédoniens | macédonien | 13 000 | 0,0 % | groupe slave |
Hongrois | hongrois | 12 000 | 0,0 % | famille ouralienne |
Philippins | filipino | 11 000 | 0,0 % | famille austronésienne |
Javanais des Caraïbes | javanais | 8 300 | 0,0 % | famille austronésienne |
Vietnamiens | vietnamien | 8 300 | 0,0 % | famille austro-asiatique |
Wallons | français | 8 300 | 0,0 % | langue romane |
Grecs | grec | 5 000 | 0,0 % | groupe grec |
Russes | russe | 5 000 | 0,0 % | groupe slave |
Chinois wu | chinois wu | 3 800 | 0,0 % | famille sino-tibétaine |
Arabes syriens | arabe syrien | 3 300 | 0,0 % | famille chamito-sémitique |
Coréens | coréen | 3 300 | 0,0 % | famille coréenne |
Rwandais (Hutus) | français | 1 600 | 0,0 % | langue romane |
Arabes soudanais | arabe soudanais | 1 300 | 0,0 % | famille chamito-sémitique |
Tsiganes des Sintes | tsigane des Sintes | 1 300 | 0,0 % | groupe indo-iranien |
Arméniens | arménien | 1 100 | 0,0 % | famille indo-européenne |
Chaldéens | néo-araméen | 1 100 | 0,0 % | famille chamito-sémitique |
Autres langues | - | 125 500 | 0,7 % | - |
Total 2010 | 16 653 000 | 100 % |
Le néerlandais est la langue maternelle de la majorité des habitants des Pays-Bas (74 %), mais les statistiques laissent croire que les néerlandophones atteignent au moins les 87 %. En réalité, il n’est pas tout à fait exact de dire que 87,5 % des Néerlandais emploient le néerlandais comme langue maternelle, car beaucoup de locuteurs de cette langue utilisent une variété dialectale du néerlandais ou du bas-saxon dans leur vie quotidienne, tout en ayant concurremment recours au néerlandais standard.
Par ailleurs, le néerlandais est une langue parlée par au moins 22 millions de locuteurs (langue maternelle) dans le monde, dont 16 millions aux Pays-Bas et 5,5 millions en Belgique. Les autres locuteurs du néerlandais vivent surtout en France (80 000) et en Allemagne (100 000), mais il en existe aussi au Brésil, en Afrique du Sud, au Canada, aux États-Unis, etc. Le néerlandais est employé comme langue seconde dans toutes les Territoires néerlandais d'outre-mer et au Surinam. Mais il est difficile de cumuler par des chiffres les deux types de locuteurs, les statistiques sur les langues secondes n'étant que très rarement prises en compte.
2.1 Les variétés dialectales du néerlandais
Sur un plan strictement technique, on distingue deux grandes familles dialectales aux Pays-Bas: les dialectes franciques et les dialectes saxons. Plus précisément, on parle des dialectes bas-franciques (au sud et à l'ouest) et des dialectes bas-saxons. (au nord-est).
Les dialectes sous la colonne Frankisch par des éléments communs issus du francique, une ancienne langue germanique parlée par les Francs qui ont conquis les Romains en Gaule. Linguistiquement parlant, les Néerlandais des Pays-Bas et les Flamands vivant actuellement en Belgique sont des descendants des Francs. Quant aux idiomes Saksisch (saxon), ils forment un ensemble de dialectes parlés au nord des Pays-Bas (Groningen, Friesland, Drenthe, Overisel)... et de l'Allemagne. Ils constituent ensemble la langue du bas-allemand appelé Niederdeutsch (Niedersächsisch et Sächsisch) basé sur le vieux-saxon, qui était un parent assez proche du vieux-francique. |
Malgré son évolution dans le temps, le bas-allemand est demeuré très près du néerlandais et de ses variétés dialectales (voir les dialectes allemands).
La carte ci-dessous distingue les dialectes du Sud-Ouest (zélandais/flamand occidental), du Nord-Ouest (hollandais/néerlandais), du Nord-Est (bas-saxon), du Centre-Nord, du Centre-Sud et du Sud-Est. Les dialectes marqués d'une astérisque sont considérés comme des dialectes néerlandais, mais avec des influences frisonnes importantes.
|
Tous les néerlandophones qui parlent leur dialecte local à la maison ou entre amis ne le considèrent généralement pas comme une langue distincte du néerlandais standard. Ils se disent fiers de parler leur «dialecte» et considèrent le néerlandais comme leur «langue mère». Bref, ils n’ont pas l’impression de parler deux langues différentes, mais deux variantes d’une même langue (d’où la notion de dialecte). Aux Pays-Bas, l’expression utilisée pour désigner le néerlandais standard est ''Algemeen Nederlands'', c'est-à-dire la langue commune officielle de tous les citoyens dont la langue maternelle est le néerlandais ou l’une de ses variantes.
En effet, dans la vie de tous les jours, plusieurs variétés dialectales coexistent avec cette langue commune officielle: le flamand, le brabançon, le hollandais, le groningue, le twente, le limbourgeois, etc. L'Algemeen Nederlands est basé surtout sur le flamand, le brabant et le hollandais, alors que les autres variétés dialectales ont exercé une influence beaucoup moins grande. Depuis quelques années, des mesures ont été prises aux Pays-Bas pour sauvegarder les différents dialectes néerlandais. Ainsi, les universités de Gand, de Nimègue et d’Anvers publient des dictionnaires régionaux (déjà plus de quarante volumes). Il existe de nettes différences de vocabulaire entre les parles flamands et les parlers néerlandais. Il n'existe pas non plus une prononciation flamande standard, mais bien des dizaines de variantes dans lesquelles on peut distinguer plusieurs points communs. C'est pourquoi on arrive à distinguer assez facilement les Flamands et les Néerlandais selon leur prononciation.
De façon plus particulière, le limbourgeois parlé dans la province du Limbourg serait parlé par environ 75 % des locuteurs de la province, soit quelque 770 000 locuteurs. Il existe trois principales variantes de la langue, correspondant respectivement au nord, au centre-sud et au sud-est de la province.
À l'instar de l’allemand et de l’anglais, le néerlandais fait partie des langues germaniques de la famille indo-européenne. appartenant à la branche germanique. Le néerlandais a pour origine le francique que les conquérants francs ont introduit dans cette région (Pays-Bas, Belgique, Luxembourg et nord de la France) à la suite du déclin de l'Empire romain, soit en l’an 406 de notre ère.
Il faut noter que ces variétés dialectales du néerlandais sont parlées non seulement aux Pays-Bas, mais aussi en Belgique et en France (voir la carte linguistique). On peut constater que les frontières politiques entre la Belgique et les Pays-Bas sont artificielles lorsqu’on observe l’aire linguistique de ces parlers. Par exemple, le flamand est parlé en Belgique et aux Pays-Bas (l'enclave entre la Meuse et la Belgique), le brabançon est parlé en Belgique (voir la carte linguistique de la Belgique) et aux Pays-Bas (Brabant du Nord), le limbourgeois est parlé à l'est de la Belgique (voir la carte linguistique belge) et au sud-est des Pays-Bas (l'ancienne province du Limbourg est plus ou moins divisée en deux par la frontière politique actuelle).
En ce qui a trait à l’utilisation des mots dialecte et langue, il faut remarquer que ces termes peuvent correspondre à des notions différentes en français et en néerlandais. Ainsi, en néerlandais, le nom particulier pour dialecte est streektaal (streek = région; taal = langue), c’est-à-dire «langue régionale». Évidemment, une traduction littérale de ces mots pourrait provoquer des malentendus, car une «langue régionale» en français et en anglais («regional language») réfère à une langue bien différente de la langue officielle, mais pas en néerlandais. En néerlandais, on peut dire:
Onze taal is het Nederlands en de Nederlandse streektalen zijn Vlaams, Brabants, Hollands, Limburgs en Saksisch. |
Une traduction littérale, mais légèrement «fautive», serait la suivante:
Notre langue est le néerlandais, et les langues régionales (néerlandaises) sont le flamand, le brabant, le hollandais, le limbourgeois et le saxon. |
Une traduction correcte serait plutôt :
Notre langue est le néerlandais, et les dialectes néerlandais sont le flamand, le brabant, le hollandais, le limbourgeois et le saxon. |
Aux Pays-Bas, lorsqu’on parle de «langue régionale», on utilise le terme ''Minderheidstaal'', littéralement «la langue de la minorité». À ce propos, la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires de 1992 ne fait jamais mention du mot dialecte, mais simplement de «langue régionale». Même si on a décidé de reconnaître le limbourgeois comme un «langue régionale», ce statut n’entraîne pas les mêmes conséquences que pour le frison, car le limbourgeois est considéré comme un dialecte, tandis que le frison est reconnu comme une langue bien distincte du néerlandais. Enfin, le néerlandais et le saxon (bas-allemand) constituent des langues distinctes, ce qui ne va pas de pair avec l'identité linguistique. Les locuteurs du bas-allemand aux Pays-Bas se considèrent comme des Néerlandais, alors que ceux de l'Allemagne s'identifient comme des Allemands.
2.2 Le bas-saxon
Les aires linguistiques du bas-saxon comprennent les provinces de Groningen, de Drenthe, d'Overijssel, ainsi que des municipalités tels que les Stellingwerf du Friesland du Sud-Est et les districts d'Achterhoek et de Veluwe dans la province de Gelderland. Il existe des différences importantes entre le bas-saxon de la province de Drenthe, d'Overijssel et les districts d'Achterhoek et de Veluwe (Gelderland). De plus, dans le Friesland même, les variétés peuvent être encore plus considérables.
Le nombre des locuteurs du bas-saxon demeure peu connu, car aucune enquête sérieuse n'a pu être réalisée jusqu'ici. Les évaluations varient énormément et elles se situent entre deux et dix millions de locuteurs pour l'Allemagne et les Pays-Bas, dont entre un million et demi et deux millions pour les seuls Pays-Bas. La province de Drenthe compte 457 347 habitants, la province de Groningen 557 951; la province d'Overijssel 1 057 186; les zones bas-saxonnes du Gelderland, un total de 873 414; les municipalités de Stellingwerf-Oriental et Stellingwerf-Occidental, un total de 50 000. Une enquête générale menée il y a quelques années par la station de radio régionale de Groningen a démontré qu'environ de 65 % des habitants de la province de Groningen parlent le bas-saxon. Si nous estimons que 60 % de la population puisse parle cette langue, nous parvenons au nombre de 1 797 539 locuteurs. D'après les estimations du gouvernement néerlandais, environ 1,8 million de locuteurs parleraient le bas-saxon dans la zone basse-saxonne des Pays-Bas. On sait aussi que le nombre des locuteurs du bas-saxon tend à diminuer de décennie en décennie.
2.3 Le frison
Le frison est parlé aux
Pays-Bas et en Allemagne, ce qui
comprend l'archipel des Wadden
dont les îles sont soit néerlandaises (Texel,
Terschelling, Ameland et
Schiermonnikoog),
soit allemandes (Borkum,
Juist, Norderney, Baltrum, Langeoog, Spiekeroog, Wangerooge,
Nordstrand, Pellworm, Amrum, Föhr et Sylt),
soit danoises (Jordsand, Rømø, Mandø et Fanø).
Le frison est une langue germanique demeurée assez proche de l’anglais. Toutefois, ce n’est pas une langue uniformisée, puisque les frison prend en effet des formes différentes selon qu’il est parlé dans la province de la Frise (Fryslân), dans la province de Groningue (le Westerkwartier) ou en Allemagne, soit dans les îles de Sylt, Förh, Amrum et Heligoland, qui font partie du Land de Schleswig-Holstein (9000), soit dans les municipalités de Ramsloh, de Strücklingen et de Scharrel dans le district de Cloppenburg (2000 locuteurs) en Basse-Saxe (Niedersachsen en allemand). La capitale de la province de la Frise est Leeuwarden ou (en frison). Le frison est connu localement sous son nom néerlandais Fries ou son appellation frisonne de Frysk. Il est parlé par quelque 480 000 personnes dans la province néerlandaise de la Frise qui, au total, compte une population d’environ 636 000 habitants. Le frison des Pays-Bas est appelé le frison de l’Ouest («Ost-Fries»), alors qu’on parle du frison du Nord dans le Land de Schleswig-Holstein et du frison de l’Est en Basse-Saxe (Niedersachsen). En réalité, le frison parlé dans la province de la Frise demeure la seule variété normalisée dans son orthographe et sa prononciation. On peut comparer les formes de frison en consultant deux versions frisonnes du Notre Père avec l’anglais (une langue assez proche du frison). |
Les documents les plus anciens écrits (alphabet latin) en frison datent du XIIe siècle. En 1579, la Frise perdit son autonomie et devint une province des Pays-Bas. Comme le pays était gouverné par les Hollandais, le frison fut simplement interdit dans sa forme écrite pour être remplacé par le néerlandais. Certains poètes et romanciers frisons n’ont recommencé à écrire dans leur langue maternelle qu’au XIXe siècle lors de la montée des différents nationalismes linguistiques en Europe. Vers les années 1830, on commença la codification et la normalisation de l’écriture frisonne, mais celle-ci ne fut terminée qu’en 1879. La dernière réforme de l'orthographe acceptée par les autorités provinciales de la Frise eut lieu en 1980.
Les linguistes ont émis l'hypothèse selon laquelle le frison ancien et le vieil anglais proviendraient d'une même langue appelée «anglo-frison». Toutefois, pendant que l'anglais a subi une influence considérable de la part du français, le frison n'a pas subi cette influence, car il a plutôt été marqué par le néerlandais, ce qui n'a pas été le cas de l'anglais. C'est pourquoi l'évolution du frison et de l'anglais s'est faite différemment. Voici quelques exemples qui témoignent des ressemblances entre, d'une part, le frison et l'anglais, d'autre part, entre le néerlandais et l'allemand (à l'écrit seulement):
Traduction | Frison | Anglais | Néerlandais | Allemand |
jour pluie chemin/manière clou église fromage dormir mouton nous |
dei rein wei neil tsjerke tsiis sliepe skiep ús |
day rain way nail church cheese sleep sheep us |
dag regen weg nagel kerk kaas slapen schaap ons |
Tag Regen Weg Nagel Kirche Käse schlafen Schaf uns |
La province de la Frise comptait plus de
636 000 citoyens en 2014. Cependant, il est difficile de connaître avec
précision la proportion des locuteurs qui parlent le frison. On estime
que ce nombre oscillerait entre 340 000 et 480 000, soit une proportion
variant entre 53,4 % et 75,4 %. Un organisme
frison du nom de "Taalonderzoek Provinsje Fryslân" (en anglais:
"Language Research Province of Fryslan" ou en français : "Recherche
linguistique de la province de la Frise")
de 2014 a élaboré une carte des 23 municipalités continentales de la
Frise, les quatre municipalités insulaires n'ayant pas été analysées dans
l'enquête parce que ce n'est pas le frison qui est parlé dans les îles, mais
un parler mixte contenant des éléments à la fois frisons et néerlandais.
Il en ressort que la plupart des municipalités,
c'est-à-dire 12, comptent une
population majoritairement frisonne à plus de 63 %. Deux
municipalités (Leeuwarderadeel et Smallunggerland) font aussi partie
des localités majoritairement frisonnes, mais avec moins de 62 % de
locuteurs. Cinq municipalités (Het Bildt, Franekeradee, Súdwest-Fryslân,
Lemsterland et Heerenveen) sont à la limite de la majorité, ce qui
fait un total de 19 municipalités à majorité frisonne. Il ne reste
que les municipalités minoritaires de Harlingen, de Leeuwarden
(capitale), de Weststellingwerf et d'Ooststellingwerf.
Terschelling, Ameland et Schiermonnikoog) |
L'île de Vlieland (320 km² + 1140 hab.) n'a plus de locuteurs du frison, car tous parlent en principe le néerlandais standard. Dans les trois autres îles frisonnes, les locuteurs parlent soit le néerlandais soit un dialecte local mixte, résultat d'une symbiose du néerlandais et du frison.
Les locuteurs de l'île de Terschelling (674 km² + 4700 hab.) peuvent parler le schylge, un dialecte local fait de frison et de néerlandais. Dans l'île d'Ameland (273 km² + 3480 hab.), les locuteurs utilisent leur dialecte local frison/néerlandais dans une proportion de plus de 85 % (en 2004). Quant aux locuteurs de l'île de Schiermonnikoog (191 km² + 960 hab.), le dialecte frison diffère totalement de celui parlé sur le continent, car beaucoup d'éléments uniques du frison ancien ont survécu chez ces insulaires. Les îles frisonnes des Wadden, c'est-à-dire Vlieland, Terschelling, Ameland et Schiermonnikoog, sont accessibles par des bacs depuis le ville de Harlingen (Frise) vers l'île de Vlieland et vers l'île de Terschelling depuis la ville de Holwerd (Frise) vers l'île d'Ameland et depuis la ville de Lauwersoog (Groningue) vers l'île de Schiermonnikoog.
Par ailleurs, des études entreprises en 1995 par les linguistes Durk Gorter et Reitze Jonkman ont démontré que 94 % de la population de la province de la Frise (sans l'archipel des Wadden) comprenaient le frison («connaissance passive»), que 74 % le parlaient («connaissance active»), que 64,5 % le lisaient et que seulement 17 % l’écrivaient. Le reste de la population parlerait soit le néerlandais standard soit un dialecte néerlandais, particulièrement dans le sud de la province. Voici ce qu'écrit Durk Gorter dans "A Frisian Update of Reversing Language Shift" à ce sujet :
The claim
about the absolute number of speakers also partially answers
the main question of this article. On the surface things
have not really changed in the position of the Frisian
language over the last 25 years.
The basic percentages of people who have the ability to understand (94%), speak (74%), read (67%) or write (17%) Frisian have remained more or less the same. Those four percentages have only changed a little between the first general sociolinguistic survey of 1967 (Pietersen, 1969) and the most recent one of 1994. Gorter and Jonkman (1995b: 55) concluded that the preliminary results of their survey, in terms of language ability, usage in intimate and more public settings and language attitudes, point to a stable situation for the Frisian language. |
[L'allégation concernant le nombre absolu de
locuteurs répond également partiellement à la question
principale de cet article.
En surface, les choses n'ont pas vraiment changé dans la
position de la langue frisonne au cours des 25 dernières
années.
Les pourcentages de base des personnes qui ont la capacité de comprendre (94%), de parler (74%), de lire (67%) ou d'écrire (17%) le frison sont restés plus ou moins les mêmes. Ces quatre pourcentages ont seulement un peu changé entre la première enquête sociolinguistique de 1967 (Pietersen, 1969) et la plus récente de 1994. Celle de Gorter et Jonkman (1995b: 55) a conclu que les résultats préliminaires de leur étude, en termes d'aptitude linguistique, d'emploi dans des environnements intimes et davantage publics, ainsi que les attitudes linguistiques, indiquent une situation stable pour la langue frisonne.] |
Ce que les études de D. Gorter et
de R. Jonkman ne mentionnent pas, c'est que le frison parlé dans la
province de la Frise est partout présent dans les régions
rurales à l'exception du Sud, mais il est beaucoup moins employé dans les zones
urbaines, que ce soit dans la capitale, Leeuwarden, ou dans
les municipalités de Harlingen, de Dokkum, de Franeker, de
Drashten, de Bolsward, de Sneek, de Heerenveen et de
Stavoren. Dans les quelque 300 villages de la Frise, la
lange frisonne se porte bien et elle est parlée ou comprise
par la plupart des locuteurs.
Cependant, le frison entre en concurrence non seulement avec le néerlandais, la langue officielle du royaume des Pays-Bas, mais aussi avec les langues des immigrants qui s'établissent en Frise. Dans la capitale de Leeuwarden / Ljouwert (90 000 hab.), plus de 50 langues maternelles différentes sont parlées dans les écoles primaires. Les cinq langues maternelles étrangères les plus répandues sont l'anglais, l'arabe, le kurde, l'hindi et le berbère. Les locuteurs de ces cinq langues représentaient en 2014 plus de 50 % de tous les locuteurs d'une langue étrangère. Or, ce sont les centres urbains qui attirent les immigrants. Bien que le frison occupe une place non négligeable comme langue parlée dans la vie quotidienne, il demeure encore sous-utilisé comme langue écrite. On peut consulter une page Web portant sur l'histoire et la langue des Frisons en cliquant ICI, s.v.p. |
2.4 Les langues territoriales et non territoriales
Au sens de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, les Pays-Bas distinguent les langues territoriales et les langues non territoriales. Les langues territoriales protégées par la Charte comprennent le frison, le bas-saxon et le limbourgeois. Les dispositions de la Charte sont entrées en vigueur aux Pays-Bas le 1er mars 1998; du point de vue du Royaume, elles ne s’appliquent qu’au territoire métropolitain, pas aux Territoires néerlandais d'outre-mer (Aruba, Curaçao, Sint Maarten, Bonaire, Saba et Sint Estatius).
Les langues non territoriales des Pays-Bas sont le romani, parlé par les populations rom et sinti, ainsi que le yiddish. Les autorités néerlandaises estiment que près de 4500 locuteurs aux Pays-Bas peuvent être classés comme des Sintis et 750 comme des Roms. Les Sintis résident principalement dans les provinces du Limbourg et du Brabant du Nord. L'Organisation nationale pour les Sintis aux Pays-Bas (National Organisation for Sinti in the Netherlands) affirment que plus de 90 % des Sintis parlent le romani.
En ce qui a trait au groupe des Roms (Tsiganes), il est probable que les données numériques communiqués par les autorités néerlandaises soient inférieurs au nombre réel de Roms aux Pays-Bas, car de nombreux Roms ont émigré d'Europe de l'Est vers les Pays-Bas, au cour des dix dernières années. On croit que le groupe rom aux Pays-Bas représenterait quelque 6000 personnes.
Enfin, le yiddish serait parlé par quelques centaines de personnes aux Pays-Bas; la plupart résident dans la région d'Amsterdam.
2.5 Les langues immigrantes
Les Pays-Bas reçoivent depuis plusieurs
décennies des milliers d'immigrants. Le tableau de gauche illustre
la proportion des immigrants aux Pays-Bas depuis 1960 jusqu'à 2008;
cette proportion atteint maintenant près de 12 % de la population. Si certains
groupes sont de véritables minorités ethniques, tels les Moluquois,
les Surinamais, les Arubais et autres Antillais, les Turcs ou les
Marocains, d'autres sont originaires de l'étranger: les Tamouls, les
Vietnamiens, les Cambodgiens, les Afghans, les Chiliens, les
Iraniens, les Chinois, les Indonésiens, les Japonais, etc. Tous ces
gens parlent une grand éventail de langues: indonésien, papiamento,
arabe, chinois, kurde, malais, javanais, polonais, anglais, somali,
afrikaans, persan, filipino, vietnamien, grec, russe, coréen,
arménien, etc.
Après la France, les Pays-Bas semblent être le pays qui détient le plus fort taux de musulmans au sein de l’Union européenne : près de 6 %. Or, la plupart de ces nouveaux venus ne parlent pas le néerlandais et encore moins le frison. |
Selon une étude gouvernementale, les quatre principales villes du pays (Amsterdam, Rotterdam, La Haye et Utrecht) devraient bientôt compter une population à majorité musulmane, ce qui rendra l'intégration plus difficile. ll y aurait aux Pays-Bas plus de 800 000 immigrants qui ne maîtriseraient pas la langue néerlandaise.
Ces dernières années, l’intégration des immigrants a fait l'objet d’un vif débat au sein de la société néerlandaise. Jusqu’à présent, le débat portait essentiellement sur le retard socio-économique des populations immigrantes et sur la nécessité de mettre en place des politiques d’intégration sociale afin que les travailleurs immigrants et leurs familles rattrapent le retard par rapport à la population néerlandaise. Depuis quelques années, le débat public porte surtout sur les aspects socioculturels de cette intégration, ce qui signifie qu'il s'est fixé sur la capacité pour les immigrants de culture musulmane de s’intégrer à la société néerlandaise. Des efforts considérables ont été déployés ces dernières années pour promouvoir ce qu’il est convenu d’appeler «l’intégration civique». L’intégration sur le marché du travail n'étant pas l’objectif premier de cette «intégration civique», celle-ci consiste principalement en la maîtrise de la langue néerlandaise et la connaissance de la société et de la culture néerlandaises.
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(1) Situation générale |