Val d'Aran |
Val d'AranVath d’Aran (aranais) (Catalogne) |
Le territoire du val d'Aran (Vath d'Aran en aranais signifiant «vallée de la vallée») est une région de montagnes et de forêts ne comptant que 620 km², ce qui constitue une assez petite région, puisque toute la Catalogne comprend 31 930 km² et l'Espagne entière, 504 748 km². Néanmoins, le val d'Aran a une superficie plus grande que la principauté d'Andorre (468 km²), le Liechtenstein (157 km²), la république de Saint-Marin (61 km²) et, bien sûr, la principauté de Monaco (2,5 km²). Le val d'Aran compte une petite communauté de quelque 7000 habitants dont la langue principale, l'aranais (plus de 4500 locuteurs), en fait une véritable enclave linguistique occitane. Cette région, située près de la frontière française et tout au nord-ouest de l'Espagne mais en Catalogne (dans la province de Lérida), est placée sous la juridiction de la Generalitat de Catalogne. |
Bref, si le val d'Aran est lié à l'Occitanie (la France) au point de vue géographique, linguistique et culturel, il fait partie politiquement de la Catalogne et de l'Espagne. Le val d'Aran s'est vu accorder une reconnaissance juridique tant par la Generalitat de Catalogne que par l'État espagnol.
La région constitue une entité administrative de premier niveau au sein de la Communauté autonome de Catalogne, dans la province de Lérida (Lleida). Le val d’Aran dispose d’un régime juridique spécial qui reconnaît la spécificité de son organisation institutionnelle et administrative, et en garantit l’autonomie à des fins de règlement et de gestion des affaires publiques dans sa juridiction territoriale. Le val d'Aran possède son propre drapeau inspiré par la croix occitane, dérivée des armoiries des comtes de Toulouse. La croix occitane est utilisée pour représenter la langue et la culture occitanes, notamment au val d'Aran, mais aussi par certaines communautés françaises, comme dans le Languedoc-Roussillon, le Midi-Pyrénées et les Hautes-Alpes. L’organisme de gouvernement du val d'Aran est le Conseil général, le Conselh Generau (en aranais), qui se compose du Syndic (Síndic), de l'Assemblée des conseillers généraux (Plen des Conselhèrs e Conselhères Generaus) et de la Commission des auditeurs des comptes (Comission d’Auditors de Compdes). Le Síndic est le plus haut représentant ordinaire de la Generalitat de Catalogne dans le val d’Aran. |
Il existe
neuf villages aranais: Arres, Bausen, Es Bòrdes, Bossòst,
Canejan, Les Naut Aran, Vielha e Mijaran ainsi que Vilamós.
C'est Vielha qui sert de capitale administrative et qui
compte près de la moitié des habitants de la vallée. Comme on
peut le constater sur la carte, le val d'Aran possède une frontière commune
importante avec la France.
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Lorsqu'on consulte la carte du val d'Aran, il faut se rendre compte la population demeure relativement concentrée autour des villes et villages, de sorte que le territoire n'est peuplé que sur un axe routier allant de Bausen au nord-ouest jusqu'à l'est de Naut Aran.
La majorité de la population (60 %) parle l'aranais, appelé aranés en aranais, mais gascon en France. Pour les linguistes, l'aranais est une variété locale ou pyrénéenne de l'occitan, plus précisément une variété de gascon. Voici le paragraphe 5 de l'article 6 du Statut d'autonomie de la Catalogne, en aranais, en catalan, en castillan et en français:
Article 6
(aranais)
La llengua pròpia i les llengües
oficials |
Article 6
(catalan)
La llengua pròpia i les llengües
oficials |
Artículo 6
(castillan) La lengua propia y las lenguas oficiales 5) La lengua occitana, denominada aranés en Arán, es la lengua propia de este territorio y es oficial en Cataluña, de acuerdo con lo establecido por el presente Estatuto y las leyes de normalización lingüística. |
Article 6 (français) La langue propre et les langues officielles 5) La langue occitane, qui porte le nom d’aranais en Aran, est la langue propre de ce territoire et c’est une langue officielle en Catalogne, conformément aux dispositions du présent Statut et des lois de normalisation linguistique. |
Il existe une certaine controverse à l'égard de l'affiliation linguistique de l'aranais (gascon) à l'occitan. Certains linguistes affirment que l'aranais est une forme d'occitan, alors que d'autres en font une langue aussi distincte que le catalan peut l'être des autres langues romanes. Autrement dit, l'aranais ne ferait pas plus partie de l'occitan que le catalan. Quoi qu'il en soit, on peut se rendre compte que l'aranais est plus près du catalan que du castillan (espagnol) et relativement éloigné du français, même s'il s'agit de langues romanes.
D'ailleurs, à un stade plus ancien, il n'était guère possible de différencier l'aranais (occitan) du catalan. En fait, qu'on l'appelle occitan, gascon ou aranais, cette langue a subi l'influence du castillan, du catalan et du français. Aujourd'hui, on a tendance à considérer l'aranais comme une variété de gascon pyrénéen propre au val d'Aran; il est classé dans le sous-groupe occitano-roman (avec le languedocien, le provençal, l'auvergnat, le limousin, l'alpin-dauphinois, etc.), alors que le catalan fait partie du sous-groupe ibéro-roman (avec le castillan et ses variétés, le portugais et ses variétés).
Selon un recensement datant d'il y a presque une vingtaine d'années — soit en 1991 —, quelque 92 % de la population (âgée de plus de deux ans) comprenaient l'aranais et plus de 60 % affirmaient pouvoir le parler. À ce moment, seulement 51 % des Aranais pouvaient lire cette langue et 18 % pouvaient l'écrire. Par ailleurs, toujours en 1991, tous les Aranais, sauf les très jeunes enfants, disaient connaître le castillan, alors que plus de 96 % comprenaient aussi le catalan et 73 % savaient le parler. Bref, les Aranais pratiquent depuis longtemps le trilinguisme aranais-catalan-castillan. Beaucoup connaissent aussi le français. De façon générale, le castillan sert de langue véhiculaire entre les Aranais et les Espagnols, les Catalans et les touristes. Si, dans l'ensemble de l'Occitanie française, le pourcentage des locuteurs sachant parler l'occitan se situe autour de 16 %, ce pourcentage est supérieur à 60 % au val d'Aran.
Beaucoup de commerçants peuvent aussi parler français avec les touristes. C'est que les frontaliers français sont nombreux à venir s'approvisionner, par exemple en alcool, et à passer le reste de la journée à faire des achats et à fréquenter les cafés, restaurants et hôtels. Comme le personnel est généralement quadrilingue, le français demeure une langue utile au point de vue économique. Notons aussi que, l'hiver, il y a les stations de ski qui voient affluer les touristes et que la ville de Toulouse est plus proche du val d'Aran que Barcelone!
Au cours de la dernière décennie, de nombreuses familles sont issues de mariages mixtes, dont l'un des parents parle l'aranais, l'autre le castillan ou le catalan. Dans ce cas, le castillan tend à occuper toute la place au sein de la famille, et l'aranais n'est généralement plus transmis aux enfants. Si la Catalogne n'avait pas pris des mesures de protection juridique pour sauvegarder ce patrimoine linguistique, l'aranais serait aujourd'hui en grand danger de disparition.
Les historiens croient que les plus anciennes populations d'avant notre ère étaient d'origine celte et basque. Vers 210 avant notre ère, la Catalogne fut conquise par les Romains, puis intégrée aux provinces romaines de l'Hispania et latinisée. Plus tard, dans son œuvre intitulée Géographie (Γεωγραφικά / Geôgraphiká), conçue comme un livre d'histoire, le géographe grec Strabon (né vers vers -57 et décédé entre +21 et +25) décrit les tribus gauloises qui habitaient le territoire aranais : il distingue les Convènes (Haut-Comminges), les Consorani (Couserans) et les Airenosi, ces derniers étant les Aranais, les habitants du val d'Aran. À cette époque, le val d'Aran avait pour capitale Vetula (Vielha).
3.1 La romanisation du val d'Aran
C'est aussi au cours de cette période que la romanisation aurait eu lieu au val d'Aran grâce notamment à la construction d'un réseau routier, encore utilisé aujourd'hui sous le nom de Camin reiau et allant de Toulouse jusqu'à Urgell et Esterri d'Àneu. Étant donné que l’Hispania était située à l’extrémité de l’Empire romain, donc plus isolée, le latin parlé dans ces provinces demeura généralement plus archaïsant et moins ouvert aux innovations linguistiques venues de Rome.
De plus, l’évolution du latin accusa une différence supplémentaire entre les parlers du Nord (au nord de l’Èbre) et ceux du Sud; certaines populations du Nord se latinisèrent parfois très tardivement, jusqu’à la fin du IIIe siècle. Mais les populations firent plus que se latiniser, car vers le IIe siècle de notre ère, elles se christianisèrent également.
Les différences linguistiques propres à l’Hispania s’accentuèrent avec les invasions germaniques qui commencèrent en 409 avec les Vandales, puis avec les Alains et les Suèves. En 412, les Wisigoths, devenus alliés des Romains, refoulèrent les Vandales en Bétique, les Alains en Lusitanie et les Suèves dans l’actuelle Galice.
3.2 La domination wisigothe
Au milieu du Ve
siècle, les Wisigoths occupaient déjà toute la péninsule
Ibérique ainsi que le sud-ouest de la France, soit de Gibraltar
jusqu’au sud de la Loire, avec Toulouse comme capitale. Ainsi, le
val d'Aran était sous domination wisigothe.
Dans la péninsule Ibérique, l’unification du territoire wisigoth fut assurée lorsque la capitale devint Tolède, beaucoup plus au sud. Ce sont les Wisigoths qui donnèrent son nom actuel à la Catalogne: Gotholonia (ou Gotolonia). Les Wisigoths, comme plusieurs peuples germaniques, ne purent imposer leur langue et adoptèrent plutôt celle du vaincu, une langue qui n’était plus le latin d’origine, car il s’était déjà transformé. Les Wisigoths se convertirent au catholicisme en 589 et se mélangèrent aux Ibéro-Romains, créant ainsi une sorte de fusion entre les envahisseurs et les peuples conquis. Mais le règne des Wisigoths ne dura qu’un peu plus d’un siècle. |
Le royaume wisigoth a pu exister jusqu'au début du VIIIe
siècle et persista même en partie durant le Haut Moyen Âge. En 711-712, le
royaume wisigoth, qui incluait la Catalogne, fut conquis par les Sarrasins, des
musulmans venus d'Afrique. Le val d'Aran fut livré au pillage à plusieurs
reprises par les Sarazins et les Maures, mais les Arabes ne s'installèrent
jamais nombreux dans la région. Le califat
de Cordoue (viiie-xe siècle),
fondé en 756, connut son apogée sous Abd al-Rahmān III (912-961). Les
chrétiens de la péninsule se réfugièrent dans les royaumes restés indépendants au nord
(les Asturies, le Léon, l'Aragon et les Pyrénées), tandis que la religion et la civilisation
musulmanes s’implantaient rapidement dans le reste de la péninsule. C'est
surtout dans le sud de l'Espagne que l'influence arabe s'est fait le plus sentir. En 781, l'empereur Charlemagne créa le royaume d'Aquitaine, qui comprenait les territoires s'étendant du Rhône à l'Atlantique, avec Toulouse comme capitale. Dans la péninsule Ibérique, la Catalogne fut l’un des premiers territoires à avoir été libéré des Arabes. En effet, c’est Charlemagne qui, vers 800, avait chassé les envahisseurs des terres au sud des Pyrénées. Au Xe siècle, les comtes catalans se rendirent indépendants et résistèrent avec succès à la poussée des Arabes. |
3.3 La domination arago-catalane
En 1036, le roi d'Aragon Ramire Ier épousa Gilberte de Foix, une descendante des comtes de Comminges et héritière du Couserans et de Foix. À partir de ce moment, la couronne d'Aragon exerça ses droits sur le Comminges (aujourd'hui le département français de Haute-Garonne) et le val d'Aran (aujourd'hui en Catalogne). Toutefois, les Aranais se défendirent contre les comtes de Comminges, parce qu'ils voulurent conserver leur autonomie qu'ils avaient acquise du roi d'Aragon. Le royaume d'Aquitaine fut divisé en comtés, dont ceux de Barcelone, d'Urgell, de Cerdagne, des Empúries, de Pallars, d'Ausone, du Roussillon et de Gérone. Ces comtés sont administrés par des comtes ou par des marquis, les quels étaient hiérarchiquement supérieurs aux comptes. À la fin du Xe siècle, le royaume d'Aquitaine fut fragmenté en deux duchés, un duché de Gascogne au sud de la Garonne et un duché d'Aquitaine (appelé Guyenne).
En 1058, les deux duchés de Gascogne et d'Aquitaine furent réunis. En 1137, Raimond Bérenger IV de Barcelone épousa Pétronille d'Aragon et réunit le royaume de Catalogne et celui d’Aragon. Le catalan devint, conjointement à l'aragonais, la langue officielle du royaume d'Aragon. En 1175, le traité de l'Emparança intégra le val d'Aran à la Catalogne. À partir de 1212, la Reconquête (appelée Reconquista) prit de l’expansion et les terres progressivement abandonnées par les musulmans furent colonisés par les gens venus du Nord.
La langue d’oc donna naissance au gascon (et à l'aranais), ainsi qu'au languedocien, au béarnais, etc., ainsi qu'au catalan qui leur est très apparenté. Vers le XIe siècle, on peut dire que, grosso modo, le centre de la péninsule Ibérique était castillanisé, l’est et le nord était catalanisé, sauf au Pays basque où la langue basque s’était maintenue contre vents et marées. Quant au nord-ouest, il s’était «galicianisé» et donnera plus tard naissance au portugais. En outre, certains idiomes issus du latin se sont développés dans les zones intermédiaires tels que le léonais, une sorte de «dialecte de transition» entre le galicien et le castillan, et l’aragonais, qui se situerait entre le castillan et le catalan. Jusqu’au milieu du Xe siècle, le castillan n’était pas une langue plus importante que les autres, c’était encore un obscur dialecte parlé dans le centre et le nord de la péninsule.
Au XIIe siècle, la Catalogne acquit aussi le statut de comté au sein du royaume d’Aragon tout en conservant une grande autonomie politique. Le catalan devint la langue co-officielle, avec l'aragonais, de la monarchie arago-catalane ainsi que dans tout leur empire méditerranéen, qui comprenait la Catalogne (Catalunya Nova), le pays de Valence (Païs Valenciana), les îles Baléares (Majorque, Ibiza et Menorca), la Sardaigne (ville d’Alguero), la Sicile et la Corse. La val d'Aran était passé de la Maison des comtes de Comminges, qui rendaient hommage au roi de France, à celle du roi d'Aragon, pour ensuite être livré à la Maison de Barcelone. En 1201, Pierre Ier d'Aragon donna le val d'Aran au comte Bernard de Comminges. Ainsi, le val d'Aran et Comminges furent de nouveau rattachés, mais en faisant partie de la couronne d'Aragon-Catalogne. Le 1er décembre 1249, le comte de Comminges jura fidélité au comte de Toulouse, c'est-à-dire au roi de France, mais le val d'Aran ne fut pas mentionné dans le traité; on peut croire qu'il fut dévolu au roi d'Aragon. À l'issue d'un vote populaire, par un privilège accordé en 1313, le roi Jacques II (ou Jaume II) de Catalogne et d'Aragon reconnut dans la Grande Charte (Era Querimònia) les usages et coutumes du val d'Aran, y compris ses institutions de gouvernement telles que le Conselh Generau et le Sindic. |
Durant tout le Moyen Âge, le catalan resta la langue véhiculaire des habitants du royaume d’Aragon (sauf en Aran), du nord des Pyrénées en passant par la Catalogne (devenue la Generalitat de Catalunya), le Pays valencien, les îles Baléares et la Sardaigne. Cette époque fut pour les Catalans une période de grand épanouissement économique, littéraire et artistique. En 1411, le val d'Aran s'intégra par pacte à la Catalogne.
En 1469, Ferdinand d’Aragon épousa Isabelle de Castille et leurs deux royaumes s’unirent. La dynastie catalane d’Aragon s’éteignit en 1516. Les Catalans supportèrent mal la nouvelle autorité castillane. Ce fut le début de la rude concurrence du catalan avec le castillan. L’Espagne unifiée imposa la castillanisation du royaume, bien que le catalan continuât de bénéficier de son statut de langue officielle dans les anciens comtés de la Catalogne. Néanmoins, s'amorça alors un long déclin de la langue catalane. La Castille occupa le val d'Aran en 1651, mais ne remit pas en causes l'autonomie aranaise.
Lors du traité des Pyrénées, les Catalans perdirent en 1659 la Catalogne du Nord au profit du royaume de France. Les catalanophones de France résistèrent aux nouvelles autorités et continuèrent à utiliser leur langue. Mais, dès 1682, la francisation commença jusqu’à ce que le catalan soit tout simplement interdit par Louis XIV en 1700 dans l’Administration et dans tous les actes officiels.
3.4 La castillanisation
Au sud des Pyrénées, après la guerre de Succession d’Espagne
(1705-1715), Philippe V (dynastie des Bourbons), occupa Barcelone, fit appliquer
les lois castillanes et abolit toutes les institutions gouvernementales qui
existaient en Catalogne (dont la Generalitat). Le castillan devint la seule
langue officielle de l’Administration publique, alors que le catalan restait
la langue de la majorité des habitants de cette région. Par la suite, la
castillanisation gagna du terrain en Catalogne, au Pays valencien, en Aragon et
même aux îles Baléares. Quant au val d'Aran, malgré les invasions et les
guerres, les Aranais purent conserver leur autonomie administrative.
Lors de la Révolution française, le val d'Aran dut, le 14 août 1793, accepter d'être rattaché à la France. Cette situation dura jusqu'au traité de Bâle du 22 juillet 1795, alors que la France restituait le val d'Aran aux Espagnols en échange d'avantages sur l'île de Saint-Domingue. Lors de la guerre d'Espagne déclarée en 1809, le val d'Aran fut à nouveau occupé par les Français, de 1808 à 1815. Un décret de Napoléon, daté du 26 janvier 1812, rattacha le val d'Aran à la Haute-Garonne française. Puis, le 20 juillet 1814, un traité entre la France et l'Espagne restitua les frontières du 1er janvier 1792.
3.5 Le catalan et l'aranais
Au cours du XIXe
siècle, le catalan connut une certaine renaissance — la Renaixença.
Celle-ci fut assez forte en Catalogne et aux Baléares, mais relativement faible
au Pays valencien et en Aragon, et inexistante en France et en Italie
(Sardaigne). La langue catalane redevint une langue de culture et une langue
scientifique, mais ne regagna pas son statut de langue officielle. L'essor
économique attira un grand nombre d'immigrants du reste de l'Espagne dans toute
la Catalogne, y compris dans le val d'Aran, qui se casillanisa. En 1834, le val
d'Aran fut incorporé à la province de Lleida et son gouvernement, le Conselh
Generau (Conseil général) fut dissout.
Néanmoins, les campagnes de promotion du catalan permirent la création en 1907 de l’Institut d’Estudis Catalans, qui élabora la codification de la langue, publia des grammaires et des dictionnaires. La proclamation de la Seconde République espagnole en 1931 permit de restaurer la Generalitat de Catalunya avec des compétences considérables et de récupérer le statut du catalan comme langue officielle (perdu au XVIIIe siècle). La Generalitat entreprit de restaurer l’usage du catalan dans l’enseignement, les médias, l’édition, etc. Cependant, la guerre civile espagnole (1936-1039) et la victoire du général Franco mirent fin à l’autonomie accordée. Non seulement le catalan fut interdit en public, mais aussi l'aranais, le basque et le galicien.
Entre 1940 et 1960, la construction du tunnel de Vielha (le plus long d'Espagne) et de divers barrages ouvrit une période d'expansion démographique marquée d'un rajeunissement de la population et d'une hausse de la natalité, mais aussi d'un afflux d'immigrants. Dans les années soixante-dix, le développement du tourisme entraîna une nouvelle croissance démographique, dont les effets se firent sentir dans les principales villes et les agglomérations à proximité des stations de sports d'hiver.
En 1978, la nouvelle Constitution espagnole de 1978 accorda à la Catalogne une autonomie politique et rétablit la Generalitat ainsi que le parlement de Barcelone. En 1979, le val d'Aran se vit reconnaître un statut d'autonomie. Grâce à la Loi 16/1990 sur le régime spécial du val d'Aran, le Conseil général d'Aran fut rétabli et, en 1994, l'aranais fut promu comme langue officielle au même titre que le catalan et le castillan. Ainsi, le val d'Aran demeure par l'aranais la seule entité territoriale d'Europe à utiliser officiellement la langue occitane. Le 22 septembre 2010, la Catalogne a adopté la Loi sur l'occitan, aranais en Aran (2010), qui rendait co-officiels le castillan, le catalan et l'aranais, partout sur le territoire de la Catalogne. La Catalogne est devenue ainsi la seule Communauté autonome de l'Espagne à voir trois langues officielles.
Le val d'Aran est trilingue, l'aranais étant co-officiel avec le catalan et le castillan. En conséquence, la plupart des dispositions concernant le catalan s'appliquent en principe également à l'aranais. Le texte le plus important date de 1990: il sagit de la Loi n° 16/1990 sur le régime spécial du val d'Aran. L'article 2 (aujourd'hui abrogé) déclarait que l'aranais est une langue officielle dans le val d'Aran:
Article 2
(abrogé) 1) L'aranais, variété de la langue occitane propre au val d'Aran, est officiel dans le val d'Aran. Sont aussi officiels le catalan et le castillan, conformément à l'article 3 du Statut d'autonomie de la Catalogne. 2) Conformément à l'article 3.4 du Statut d'autonomie de la Catalogne, l'aranais devra être enseigné et faire l'objet de respect spécial et de protection; on devra en garantir l'usage tant dans le système éducatif que dans les activités de l'administration de la Generalitat et des médias relevant de la CCRTV dans le territoire du val d'Aran. 3) La Generalitat et les institutions aranaises devront adopter les mesures nécessaires pour assurer la connaissance et l'usage normal de l'aranais et pour favoriser son aménagement linguistique. 4) La Generalitat et les institutions aranaises devront veiller à la conservation, promotion et diffusion de la culture aranaise. |
Puis, larticle 7 (aujourd'hui abrogé) de la Loi sur la politique linguistique du 7 janvier 1998 est venu préciser et confirmer lusage de laranais au val dAran. En vertu de la loi, laranais est reconnu comme la langue propre du val dAran et les dispositions de la loi ne devront jamais être interprétées «au détriment de lusage de laranais»:
Article 7
(abrogé) Reconnaissance et protection de l'aranais L'aranais, variété de la langue occitane propre au val d'Aran, est régi, en ce qui concerne son usage, par la loi 16/1990, du 13 juillet, sur le régime spécial du val d'Aran, et de manière complémentaire, par les préceptes de la présente loi, qui ne pourront jamais être interprétés au détriment de l'usage de l'aranais. |
L'article 6 du
Statut d'autonomie de
2006 précise que la langue occitane, qui porte le nom d’aranais en Aran,
est la langue propre de ce territoire et c’est aussi une langue
officielle en Catalogne:
Article 6
(aranais)
Era lengua pròpria e es lengües
oficiaus |
Article 6 (traduction) La langue propre et les langues officielles 5) La langue occitane, qui porte le nom d’aranais en Aran, est la langue propre de ce territoire et c’est une langue officielle en Catalogne, conformément aux dispositions du présent Statut et des lois de normalisation linguistique. |
Il existe d'autres articles à portée linguistique, et ils concernent le statut particulier du val d'Aran (voir le texte). En septembre 2010, le Parlement catalan a adopté une nouvelle loi sur l'aranais proclamant que l'aranais était une langue officielle dans toute la Catalogne (Loi sur l'occitan, aranais en Aran, 2010):
Article 2 (aranais) Lengua pròpria e lengües
oficiaus
4) Era lengua pròpria der Aran, coma lengua oficiau en Catalonha, pòt èster emplegada pes persones fisiques o juridiques en activitats publiques e privades sense que poguen patir cap discriminacion per aguest motiu. Es actes juridics hèts en aguesta lengua an plea validesa e eficacitat, sense perjudici des drets arreconeishudi as ciutadans damb relacion as autes lengües oficiaus. |
Article 2
(traduction) La langue propre et les langues officielles 1) L'aranais, le nom donné à la langue occitane en Aran est la langue propre de ce territoire. 2) Les citoyens de la Catalogne et ses institutions politiques reconnaissent, protègent et respectent la langue qui distingue le peuple aranais et reconnaît l'Aran comme une réalité dotée d'une identité culturelle, historique, géographique et linguistique. 3) L'aranais comme langue propre est :
4) L'aranais, comme langue officielle en Catalogne, peut être utilisé par les personnes physiques ou morales dans leurs activités publiques et privées sans discrimination. Les actes juridiques effectués en aranais ont, en ce qui concerne la langue, pleine validité et efficacité, sans préjudice des droits reconnus aux citoyens par rapport aux autres langues officielles. |
Ainsi, l'aranais est la cinquième langue constitutionnelle en l'Espagne avec le castillan, le catalan, le basque et le galicien. Le caractère officiel de l'aranais dans cette région catalane constitue un cas unique en Europe, car l'occitan y est une langue reconnue juridiquement, avec des droits. Beaucoup d'occitanophones de France, voire d'Italie, aimeraient bien bénéficier de tels droits. La situation juridique des Aranais suscite donc l'admiration de tous les occitanophones de France. Rappelons qu'en France l'État n'assure pas la promotion ni l'intégration de l'occitan dans la vie publique, sauf pour une petite place dans l'enseignement primaire à titre de langue étrangère facultative.
La politique linguistique du val d'Aran est entièrement définie par la Generalitat de Catalogne, mais le Conseil général (Conselh Generau) de la Vallée a été consulté et a pu exprimer ses désirs. Ce sont donc les lois de la Catalogne qui s'appliquent et elles sont relativement nombreuses. Toutefois, certaines d'entre elles ne s'appliquent qu'au val d'Aran ou concernent particulièrement cette région. En voici quelques-unes en guise d'exemples:
- Décret 362/1983 du 30 août sur l'application de la loi 7/1983 du 18 avril sur la normalisation linguistique en Catalogne dans le cadre de l'enseignement non universitaire;
- Décret 107/1987 du 13 mars réglementant l'usage des langues officielles dans l'administration de la Generalitat de Catalogne (art. 16);
- Circulaire du 24 avril 1989 concernant l'usage des langues officielles en Catalogne par l'administration de la Generalitat (art. 3);
- Loi 16/1990 sur le régime spécial du val d'Aran;
- Décret 78/1991 du 8 avril sur l'utilisation de la toponymie (art. 1-2);
- Loi 1/1998 du 7 janvier sur la politique linguistique (art. 1-7-18-25-26);
- Décret 208/1998 du 30 juillet réglementant l'accréditation de la modification linguistique des noms et prénoms (art.3);
- Décret 269/1998 du 21 octobre sur le régime juridique d'obtention pour la prestation des services de radiodiffusion (art. 6);
- Décret 15/2003 du 8 janvier réglementant le régime juridique transitoire des télévisions locales par ondes terrestres (art. 2);
- Décret 216/2005 du 11 octobre sur la structure organique du Secrétariat à la politique linguistique (art. 1.3-L).
- Loi no 12/2009 du 10 juillet sur l'éducation (art. 17);
- Loi sur l'occitan, aranais en Aran (2010).
Ajoutons aussi que plusieurs textes législatifs catalans concernant l'aranais ou le val d'Aran ont également une version officielle en aranais. Il en est ainsi de la Lei 16/1990, de 13 de junhsèga, sus eth règim especiau dera Val d'Aran.
5.1 Les services en aranais
Dans les services gouvernementaux, les Aranais peuvent obtenir, dans leurs localités, des services dans leur langue (à loral) si ceux-ci proviennent de la Generalitat de Catalogne. L'article 36 du Statut d'autonomie de 2006 accorde des droits précis à la langue aranaise:
Article 36
(aranais)
Drets amb relació a
l'aranès 2) Els ciutadans de l'Aran tenen el dret d'utilitzar l'aranès en llurs relacions amb la Generalitat. 3) S'han de determinar per llei els altres drets i deures lingüístics amb relació a l'aranès. |
Article 36 Droits relatifs à l'aranais 1) Dans l’Aran, toutes les personnes ont le droit de connaître et d’utiliser l’aranais et d’être servies â l’oral et à l’écrit dans cette langue, dans le cadre de leurs relations avec les administrations publiques et les organismes publics et privés qui en dépendent. 2) Les citoyens de l’Aran ont le droit d’utiliser l’aranais dans le cadre de leurs relations avec la Generalitat. 3) Les autres droits et devoirs linguistiques relatifs à l’aranais doivent être déterminés par loi. |
L'article 16 du Décret 107/1987 du 13 mars réglementant l'usage des langues officielles dans l'administration de la Generalitat de Catalogne précise que tous les dispositions linguistiques qui s'appliquent au catalan en Catalogne s'appliquent également à l'aranais au val d'Aran:
Article 16 Toute disposition qui émane de l'administration de la Generalitat et qui doit être obligatoirement publiée doit être rédigée dans les deux langues officielles. Les dispositions de la Generalitat qui s'appliquent spécifiquement au val d'Aran doivent également être publiées en aranais. |
L'article 3 de la Circulaire du 24 avril 1989 concernant l'usage des langues officielles en Catalogne par l'administration de la Generalitat impose aussi l'usage de l'aranais dans l'Administration catalane au val d'Aran:
Article 3 Relations institutionnelles 1) La langue utilisée doit être: - Le catalan pour les communications destinées aux administrations publiques du territoire de la Catalogne ou d'autres territoires dont la langue propre est le catalan: le Pays valencien, les îles Baléares, la principauté d'Andorre, etc. Les communications destinées aux organismes qui dépendent de l'Administration locale ou de la Generalitat au val d'Aran peuvent être faites en aranais. |
De plus, selon l'article 2 de la Loi 16/1990 sur le régime spécial du val d'Aran, l'aranais doit être utilisé dans les activités de l'administration de la Generalitat et des médias relevant de la CCRTV dans le territoire du val d'Aran:
Article 2
(aranais) 1) Er aranés, varietat dera lengua occitana e pròpia d'Aran, ei oficiau ena Val d'Aran. Tanben ne son eth catalan e eth castelhan, d'acòrd damb er article 3 der Estatut d'Autonomia de Catalonha. 2) Cossent damb er article 3.4 der Estatut d'Autonomia de Catalonha, er aranés a d'èster objècte d'ensenhament e d'especiau respècte e proteccion, e se n'a de garantir er us tant en sistèma educatiu, com ena actiuetat dera Administracion dera Generalitat de Catalonha e des mieis depenents dera CCRTV, en territòri d'Aran. 3) Era Generalitat e es institucions d'Aran an d'adoptar es mesures que s'an de besonh entà garantir eth coneishement e er us normau der aranés e entà possà-ne era sua normalisacion. 4) Era Generalitat e es institucions d'Aran an de velhar pera mantenença, era promocion e er espandiment dera cultura aranesa. |
Article 2
(abrogé) 1) L'aranais, variété de la langue occitane propre au val d'Aran, est officiel dans le val d'Aran. Sont aussi officiels le catalan et le castillan, conformément à l'article 3 du Statut d'autonomie de la Catalogne. 2) Conformément à l'article 3.4 du Statut d'autonomie de la Catalogne, l'aranais devra être enseigné et faire l'objet de respect spécial et de protection; on devra en garantir l'usage tant dans le système éducatif que dans les activités de l'administration de la Generalitat et des médias relevant de la CCRTV dans le territoire du val d'Aran. 3) La Generalitat et les institutions aranaises devront adopter les mesures nécessaires pour assurer la connaissance et l'usage normal de l'aranais et pour favoriser son aménagement linguistique. 4) La Generalitat et les institutions aranaises devront veiller à la conservation, la promotion et la diffusion de la culture aranaise. |
Cet article a été remplacé par d'autres dispositions dans la Loi sur l'occitan de septembre 2010. Ainsi, l'article 5 de cette loi prescrit l'emploi de l'aranais dans l'Administration:
Article 5 (aranais) Institucions e administracions publiques en Aran 1) Era lengua pròpria der Aran n’ei deth Conselh Generau d’Aran, dera Administracion dera Generalitat en encastre der Aran, dera Administracion locau, des autes corporacions publiques araneses, des institucions e es enterpreses que ne depenen e des concessionaris des sòns servicis. Correspon ath Conselh Generau d’Aran e as corporacions locaus regular-ne er usatge en encastre des competéncies respectives. |
Article 5 Les institutions et l'administration publique à Aran 1) La Conseil général d'Aran, les administrations locales aranaises et les organismes publics et privés qui en dépendent doivent normalement utiliser l'aranais dans leurs activités internes et dans les relations entre elles. Ils doivent aussi l'utiliser normalement dans les relations avec chacune des autres administrations publiques situées dans le territoire de la vallée d'Aran. Il appartient au Conseil général et aux collectivités locales de réglementer l'usage de l'aranais dans le domaine de leurs compétences respectives. |
Même la Generalitat de
Catalogne en Aran doit normalement utiliser l'aranais dans ses
relations avec les organismes et le public. Dans les formulaires et textes
administratifs d'usage fréquent à la portée du public en Aran, la
Generalitat, sans préjudice des dispositions prévues dans la législation en
ce qui concerne les autres langues officielles, doit utiliser l'aranais
et il lui accorder une position préférentielle.
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Le problème ne se pose pas pour les administrations municipales du
val dAran dans les communications orales; mais, à lexception de quelques rares
feuillets municipaux, laranais nest pas beaucoup utilisé à lécrit.
Il est vrai que la plupart des assemblées municipales se tiennent en aranais à
la condition qu'Il n'y ait pas trop d'unilingues castillanophones dans la salle. Les
services gouvernementaux de lÉtat espagnol ne sont offerts quen castillan
(oral et écrit).
Autrement dit, tous services confondus de la part de lÉtat, de la Catalogne et des municipalités, ces services sont en principe offerts en trois langues: en aranais, en catalan et en castillan pour les municipalités et le gouvernement catalan représenté dans le val dAran, en aranais, en catalan ou en castillan pour la Generalitat de Catalogne à lextérieur du val dAran, en castillan seulement pour le gouvernement central. Dans les municipalités, les panneaux indiquant les lieux sont généralement écrits en aranais seulement (voir l'illustration ci-contre), parce qu'il s'agit de la forme officielle. Les toponymes sont généralement rédigés en aranais (graphie occitane normalisée), alors qu'ils sont en catalan dans le reste de la Catalogne. |
Ce sont les articles 1 et 2 du
Décret 78/1991 du 8 avril sur l'utilisation de la toponymie,
qui régissent l'emploi des toponymes en Aran:
Article 1er Forme officielle
des toponymes Désignation
sur les voies urbaines et interurbaines 2.2 Lorsque,
dans la désignation des voies urbaines ou interurbaines, la
direction vers un lieu hors de la Catalogne est indiquée, le
toponyme correspondant doit figurer en catalan s'il a une forme
traditionnelle dans cette langue, sous réserve de ce qui peut aussi
figurer dans d'autres langues. Dans la Val d'Aran, cette règle doit
être appliquée par rapport à l'aranais dans le lieu catalan. |
L'article 11 de la Loi sur l'occitan de 2010 ne mentionne plus les formes catalanes, car dorénavant seules les formes aranaises seront autorisées:
Article 11
(aranais) Toponimia 1) Es toponims der Aran an coma soleta forma oficiau era aranesa. 2) Eth Conselh Generau d’Aran ei membre nat des organismes competents en matèria de toponimia en Catalonha. 3) Era determinacion dera denominacion des municipis aranesi se regís pera legislacion de regim locau, qu’a de preveir era participacion deth Conselh Generau d’Aran enes procediments corresponents. 4) Era determinacion deth nòm des vies urbanes e des nuclèus de poblacion de tota sòrta correspon as ajuntaments aranesi. Eth Conselh Generau d’Aran a de participar, d’acòrd damb era norma aplicabla, enes procediments relatius ara determinacion des nòms des vies interurbanes que transcorguen per Aran. |
Article 11
(traduction) La toponymie 1) Les toponymes d'Aran ont comme seule forme officielle ceux en aranais. 2) Le Conseil général est membre en droit des organismes compétents en matière de toponymie en Catalogne. 3) Le choix de la dénomination des municipalités aranaises est régi par la législation de régime local, qui doit prévoir la participation du Conseil général dans les procédures pertinentes. 4) Le choix du nom des voies urbaines et des milieux de population de tout type revient aux mairies aranaises. Le Conseil général doit prendre part aux procédures relatives au choix des noms des voies interurbaines situées complètement en Aran. |
De plus, selon le décret 216 du 11 octobre sur la structure organique du Secrétariat à la politique linguistique, le Secrétariat à la politique linguistique de la Catalogne a pour fonction de favoriser le soutien auprès du Conseil général d'Aran en matière de politique linguistique et de promotion de la variété aranaise de la langue occitane:
Article 1.3 l) Favoriser le soutien auprès du Conseil général, quand celui-ci le demande, en matière de politique linguistique et de promotion de la variété aranaise de la langue occitane. |
Dans le domaine de la justice, les Aranais ne pouvaient jusqu'à récemment bénéficier de procès en aranais, puisque les tribunaux ne fonctionnaient quen catalan et en castillan. Mais le Loi sur l'occitan de 2010 autorise dorénavant l'emploi de l'aranais sans nécessité de traduction:
Article 9
(aranais) Administracion de justícia 1) Es accions judiciaus oraus e escrites hètes en Aran en aranés son valides, per çò que hè ara lengua, sense besonh de revirada 2) Era coneishença der aranés s’avalore coma merit, dera manèra qu’establisquen es leis, entara provision de places de personau judiciau e de personau ath servici dera Administracion de justícia en Aran. |
Article 9 L'administration de la justice 1) Sont valides les procédures judiciaires, tant à l'oral qu'à l'écrit, celles effectuées en aranais en Aran, sans nécessité de traduction. 2) La connaissance de l'aranais peut être évaluée au mérite, selon les modalités prévues dans la législation, pour combler les postes du personnel judiciaire et du personnel au service de l'administration de la justice en Aran. |
Jusqu'ici, l'aranais avait tendance à demeurer une langue strictement orale que l'on utilisait en famille ou entre amis, et à l'église. Il faut espérer que le nouvelle loi inverse cette tendance.
5.2 L'éducation
À lécole, lintroduction de laranais a été progressive. Elle a commencé en 1975 en raison dune heure par semaine. En 1985, la Direction générale de lenseignement primaire du ministère catalan de lÉducation établissait un programme officiel comprenant deux heures daranais, neuf heures de catalan, et le reste en castillan. En 1990, un nouveau programme prévoyait deux heures daranais par semaine durant tout le primaire. Enfin, on en est venu à instituer obligatoirement 60 % de lenseignement en langue aranaise, mais le secteur secondaire en reste à deux heures/semaines. Les articles 13 et 14 de la Loi sur l'occitan de 2010 traitent de la question de l'enseignement en Aran:
Article 13
(aranais) Er aranés en ensenhament 1) Er aranés, coma lengua pròpria der Aran, ei era lengua veïculara e d’aprenedissatge abituau enes centres educatius der Aran, d’acòrd damb çò qu’establís era norma generau d’educacion. 2) Eth Govèrn a de garantir qu’era ordenacion curriculara dera educacion primària e segondària en Catalonha includisque era coneishença dera realitat lingüistica, istorica e culturau der Aran, e era sua connexion damb era lengua, era istòria e era cultura occitanes. |
Article 13
(traduction) L'aranais dans l'enseignement 1) L'aranais, comme langue propre d'Aran, est la langue véhiculaire et la langue d'apprentissage habituel dans les établissements d'enseignement situés en Aran, conformément avec la réglementation générale prévue en matière d'éducation. 2) Le gouvernement de la Generalitat doit s'assurer que le dispositif du programme d'enseignement de l'éducation primaire et secondaire en Catalogne comprenne la connaissance de la réalité linguistique, historique et culturelle d'Aran, et sa relation avec la langue, l'histoire et la culture occitanes. |
La loi prescrit l'usage de l'aranais comme langue habituelle d'enseignement, mais la connaissance du catalan et du castillan demeure obligatoire. En somme, la Generalitat de Catalogne impose un enseignement trilingue pour les élèves aranais. De nombreux manuels et ouvrages solaires sont actuellement disponibles, particulièrement au primaire; la situation semble moins favorable au secondaire.
De plus, l'article 17 de la Loi no 12 du 10 juillet sur l'éducation (2009) prévoit des dispositions particulières pour les écoles du val d'Aran:
Article 17 Régime linguistique dans les établissements d'enseignement d'Aran 1) L'occitan, appelé aranais en Aran, est la langue particulière de ce territoire, conformément à l'article 6.5 du Statut d'autonomie, et en tant que tel il est la langue véhiculaire et la langue d'apprentissage habituelle dans les établissements d'enseignent d'Aran. 2) Toutes les dispositions faites dans le présent titre concernant le catalan comme langue d'enseignement en Catalogne s'étendent à l'occitan dans les établissement d'enseignement en Aran. 3) Les projets linguistiques des établissements d'Aran doivent parallèlement assurer une représentation adéquate du catalan et des étudiants à acquérir la pleine maîtrise du catalan et du castillan à la fin de leur scolarité obligatoire. 4) Les dispositions relatives à la maîtrise linguistique des enseignants et des autres membres du personnel dans les écoles d'Aran s'étendent à l'occitan. 5) Les dispositions du présent titre concernant les programmes d'immersion linguistique, le soutien pédagogique individualisé à la langue de l'administration scolaire et à la langue de l'administration scolaire doivent s'adapter à la situation de la langue particulière du val d'Aran et de la langue officielle de la Catalogne que le Statut d'autonomie a attribuée à l'occitan. |
Cette loi, qui régit le régime linguistique dans les écoles de la Catalogne (titre II), prévoit que le catalan soit la langue normalement utilisée comme langue véhiculaire et comme langue d'apprentissage dans le système scolaire, alors que les programmes d'études doivent garantir la parfaite maîtrise des deux langues officielles (catalan et castillan) pour les fins de l'enseignement obligatoire. Toutefois, toutes les dispositions faites dans le présent titre concernant le catalan comme langue d'enseignement en Catalogne s'étendent à l'occitan dans les établissement d'enseignement en Aran.
5.3 Les médias
Dans les médias, seule une station de radio privée, Radio Aran, emploie l'aranais en raison de sept heures par semaine depuis 1988; les autres stations diffusent ou en castillan ou en catalan. De plus, Radio Catalunya diffuse sept heures d'aranais par semaine. Par ailleurs, la chaîne de télé TV3 diffuse des émissions en aranais en raison de 20 minutes par semaine. Cest la Corporació Catalana de Ràdio i Televisió qui doit garantir l'émission régulière de programmes radiophoniques et télévisés en aranais dans le val d'Aran. Il nexiste pas de journaux, mais la revue Aran publie 40 % de ses articles en aranais. Au point de vue juridique, l'article 50 du Statut d'autonomie de la Catalogne de 2006 prévoit la même protection à l'égard de l'aranais que du catalan:
Article 50 Encouragement et diffusion du catalan 1) Les pouvoirs publics doivent protéger le catalan dans tous les domaines et secteurs, ils doivent favoriser et encourager son emploi, sa diffusion et son enseignement. Ces principes sont également applicables à l’aranais. |
Dans le domaine spécifique des médias, le paragraphe 3 de l'article 25 de la Loi sur la politique linguistique précise que la Société catalane de radio et de télévision devra garantir l'émission régulière de programmes radiophoniques et télévisés en aranais dans le val d'Aran:
Article 25
La radiodiffusion et la télévision publiques 1) Sur les chaînes de radiodiffusion et de télévision gérées par la Generalitat et par les collectivités locales de Catalogne, la langue normalement utilisée devra être le catalan. Dans ce cadre, les médias dépendant des collectivités locales pourront tenir compte des caractéristiques de leur audience. 3) La Corporació Catalana de Ràdio i Televisió devra garantir l'émission régulière de programmes radiophoniques et télévisés en aranais dans le val d'Aran. |
L'article 19 de la Loi sur l'occitan garantit des émissions en aranais à la radio et à la télévision, sans fixer une proportion autre qu'une présence «adéquate»:
Article 19
(aranais) Mejans de radiodifusion e televisión 1) Eth Govèrn a de produsir a trauès des sòns mejans de comunicacion audiovisuau programes radiofonics e televisius en aranés entà Aran, d’acòrd damb era legislacion aplicabla e damb era planificacion en vigor der espèctre radioelectric e a de fomentar era collaboracion d’aguesti damb es mejans de comunicacion en occitan de dehòra de Catalonha. 2) Es prestadors de servicis de comunicacion audiovisuau qu’opèren ena empara d’ua licéncia ena demarcacion der Aran an de garantir era preséncia der aranés ena sua programacion, d’acòrd damb era legislacion aplicabla. 3) Es prestadors de servicis de comunicacion audiovisuau qu’emeten o distribuïssen en regim de licéncia en Aran an de garantir era preséncia der aranés ena sua programacion, d’acòrd damb era legislacion aplicabla. 4) Eth Govèrn a de hèr tecnicaments possible enes sòns mejans de comunicacion audiovisuau era preséncia der aranés laguens era programacion distribuïda entà Catalonha, en tot emplegar es mejans tecnics adequats, e a de hèr efectiu er usatge d’aguesti mejans d’acòrd damb es sues possibilitats pressupostàries e damb çò qu’establisquen es contractes programa. |
Article 19
(traduction) Moyens de radiodiffusion et de télévision 1) La Generalitat doit garantir dans ses moyens de communication audio-visuelle une programmation régulière d'émissions radiophoniques et télévisuelles en aranais en Aran, conformément à la législation actuelle et à la planification en vigueur du spectre radio-électrique. 2) Les prestataires de services en communication audiovisuelle, qui opèrent sous couvert d'une licence dans les limites d'Aran doivent garantir une présence de l'aranais dans leur programmation, selon les conditions prévues dans la législation en vigueur. 3) Les moyens de radiodiffusion et de télévision qui émettent ou distribuent sous couvert de licence en Aran doivent garantir une présence de l'aranais dans leur programmation, selon les conditions prévues dans la législation en vigueur. 4) La Generalitat doit garantir dans ses moyens de communication audiovisuelle une présence adéquate de l'aranais dans la programmation distribuée pour la Catalogne, par l'intermédiaire de l'utilisation des moyens techniques adéquats. |
Quant à l'affichage commercial, il demeure plus souvent en castillan qu'en catalan, rarement en aranais. L'article 23.4 de la Loi sur l'occitan de 2010 incite les publics à «favoriser la présence de l'aranais dans le paysage linguistique»:
Article 23
(aranais)
Era promocion en
encastre socioeconomic |
Article 23
(traduction) Les activités sociales et économiques 4) Les pouvoirs publics doivent favoriser la présence de l'aranais dans le paysage linguistique et, de manière spéciale, dans l'étiquetage de tout type d'établissements et d'organismes sociaux, culturels, commerciales ou centres de loisir et de son emploi dans la publicité sur la voie publique en Aran. |
En somme, on doit admettre que l'État espagnol et la Generalitat de Catalogne accordent tout de même des droits étendus à une si petite communauté (4500 personnes sur une population de 6000, soit 75 %). Par comparaison, la France en donne encore moins, même aux plus importantes de ses minorités historiques (alsacien, breton, occitan, etc.). Néanmoins, la politique linguistique menée en faveur de laranais ne doit pas faire trop illusion. La faiblesse numérique de la population aranaise ne permet pas dobtenir autre chose quun usage local et limité dont limportance nest pas perçue comme primordiale par les Aranais eux-mêmes. La plupart des Aranais sont trilingues (aranais, castilan, catalan) et les nécessités économiques font en sorte que le castillan, la langue nationale, est nécessaire, non laranais, la «langue du pays».
Dans ces conditions, on ne se surprendra pas que l'aranais subisse les pressions assimilatrices à la fois du castillan et du catalan, voire du français. Dailleurs, dans la vie de tous les jours, moins dun enfant sur quatre sexprime en aranais avec ses camarades. Une étude du Conseil général dAran a même révélé que lemploi de laranais recule constamment au val dAran. Les principales causes de ce recul semblent provenir de la présence du grand nombre des touristes et du peu de place que laranais occupe dans les médias. La situation peut changer, mais une loi ne peut que difficilement renverser une tendance pour une si petite population ne disposant pas d'une masse critique suffisante. Il n'en demeure pas moins que la législation catalane à l'égard de l'aranais demeure exemplaire à plus d'un titre.
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