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États-Unis
d'Amérique |
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La politique linguistique
fédérale
américaine
Présentation générale
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Capitale:
Washington
Population: 281,4 millions (2000)
Langues officielles: anglais (de facto)
Groupe majoritaire:
anglais (82,1
%)
Groupes minoritaires: espagnol
(10,7 %), chinois, français, allemand, tagalog (filipino),
vietnamien, italien, coréen, russe, polonais, arabe, portugais,
japonais, + env. 160 langues dont 50 sont parlées par plus de 30 000
de locuteurs
Système politique:
république
fédérale de 50 États et d'un
district fédéral
Articles constitutionnels (langue):
aucune disposition constitutionnelle
Lois linguistiques:
Loi sur les droits civils
(1964);
Loi sur l'éducation
bilingue (1965, ABROGÉE);
Loi sur le droit
de vote (Nécessité du bilinguisme dans les élections)
(1965-2006) ;
Loi sur l'égalité des chances
en éducation (1974);
Loi sur les
interprètes judiciaires (1978);
Loi sur
l'éducation bilingue (1994, ABROGÉE) ;
Projet de loi
Emerson pour promouvoir la langue anglaise (1996,
NON ADOPTÉ) ;
Décret présidentiel no
13166 du 11 août 2000 (accès aux services bilingues);
Loi du «aucun
enfant laissé pour compte» - No Child Left Behind Act (2001);
Loi sur les langues
amérindiennes de 1990;
Loi sur les langues
amérindiennes de 1992;
Loi
modifiant la Loi sur les langues amérindiennes de 2001;
Loi sur la revitalisation des
langues amérindiennes du Sud-Ouest de 2003.
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1
Une politique linguistique restrictive
Il n’est pas dû au hasard que la Constitution américaine de1787 (toujours
en vigueur, mais plusieurs fois modifiée depuis) ne contienne aucune
disposition linguistique pour rendre
l’anglais langue officielle du
pays. Souvenons-nous qu'à cette époque la population américaine était
issue de différents pays et parlait différentes langues (comme aujourd'hui). En fait, les «pères fondateurs»
refusèrent de faire de l'anglais la langue officielle, car ils croyaient qu'il
s'imposerait de lui-même, sans appui officiel. Ce n’est certes pas un
oubli de la part des législateurs de l’époque, mais bien une volonté délibérée
de ne pas intervenir politiquement. En fait, la plupart des hommes politiques
américains associaient l'interventionnisme linguistique à une «pratique
monarchiste» qu'ils abhorraient. Pour eux, les académies sur la langue,
comme il en existait en France, en Espagne ou en Italie, étaient perçues comme
des institutions royalistes.
Dans les premières années de l'Union, le Congrès américain
publia plusieurs documents en français, en allemand et en espagnol dans le but de mieux les
diffuser dans certaines régions. En réalité, les
États-Unis ont appliqué, depuis le début de leur histoire, une politique
linguistique jacobine, c'est-à-dire d’imposition
linguistique avec des résultats qui feraient l’envie de nombreux pays. Cette
politique est celle des États forts de la fin du XVIIIe siècle,
tels que la Grande-Bretagne et la France: à un pays doivent correspondre une
langue et une nation («One Language, One Nation»). En somme, c'est la vieille
idée de l'État-Nation développée par la Révolution française. En témoigne
cette déclaration de Bertrand Barère (1755-1841), membre du Comité de salut
public, qui déclencha l'offensive en faveur de l'existence d'une
langue
nationale:
La monarchie avait des raisons de ressembler à la tour de Babel; dans la
démocratie, laisser les citoyens ignorants de la langue nationale, incapables
de contrôler le pouvoir, c'est trahir la patrie... Chez un peuple libre, la
langue doit être une et la même pour tous.
|
Quant aux États-Unis, le linguiste D. F. Marshall
déclarait, en 1986, dans un article du International Journal of the Sociology of
Language, ce qui
suit:
Il ressort de notre
analyse de l'histoire américaine que le fait de ne pas avoir de langue
officielle n'est pas dû à un oubli de la part des auteurs de la
Constitution, mais résulte d'une volonté délibérée de planification
linguistique. |
Il faut toujours se rappeler que le non-intervention
constitue une véritable politique linguistique. Malgré l'absence de prescription constitutionnelle
relative à une langue officielle, des millions d'immigrants et d'autochtones
parlant d'autres langues ont été anglicisés. Le gouvernement fédéral américain a toujours favorisé
l'anglais et, pour ce faire, il a pratiqué des politiques linguistiques expansives
pour l'anglais, mais restrictives pour les autres langues. Pourtant, il
n'existe pas aux États-Unis une politique sociale officielle qui aurait pour
objectif d'intégrer les immigrants ou de les aider à s'intégrer dans le courant
dominant («mainstream»). Il n'existe ni au niveau fédéral ni dans les États des
structures destinées à jouer un rôle dans l'intégration ou l'immigration. Il
n'existe pas au gouvernement fédéral américain un «secrétaire d'État à
l'Immigration». Historiquement, l'État se tient loin de toute intervention en
cette matière. Toute cette approche du processus d'intégration relève
exclusivement de la «société civile».
Dans les faits, l'anglais a toujours
été la seule langue utilisée par l'administration fédérale américaine, que
ce soit au Parlement, dans les cours de justice, les services publics,
l'affichage, etc. Il y a eu quelques rares exceptions; par exemple, à
l'occasion des deux derniers conflits mondiaux (1914-1918 et 1939-1945), alors
que certains messages ont été publiés en une vingtaine de langues. Cette
pratique expansive pour l'anglais a toujours été présente aux États-Unis et elle ne disparaîtra pas
de sitôt, surtout que la «menace hispanique» (le «péril latino») risque de la renforcer encore
davantage, surtout lorsque les présidents sont conservateurs comme George W.
Bush.
En matière de langue, en 1919,
Franklin Roosevelt, qui devait être président des États-Unis de 1932-1945, fit un
jour cette déclaration:
We have room but for one language
here, and that is the English
language,
for we intend to see that the crucible turns our people out as Americans, of
American nationality, and not as dwellers in a polyglot boarding-house. |
[Il n’y a de place ici que pour une
seule langue,
et c’est la langue anglaise, parce que nous entendons voir le creuset
transformer la population en Américains, de nationalité américaine, et non
en pensionnaires d’une auberge polyglotte.]
|
Toutefois, un arrêt de la Cour suprême des États-Unis est
venu en 1923 semer un certain doute en déclarant :
The
protection of the Constitution extends to all, to those who speak other
languages as well as to those born with English on the tongue. Perhaps it
would be highly advantageous if all had ready understanding of our
ordinary speech, but this cannot be coerced by methods which conflict with
the with the Constitution, — a desirable end cannot be promoted by
prohibited means. |
[La
protection de la Constitution s'étend à tous, à ceux qui parlent d'autres
langues, comme à ceux qui sont nés avec l'anglais comme langue maternelle.
Il serait peut-être fort avantageux si tous avaient la compréhension
rapide de notre langage ordinaire, mais cela ne peut pas être forcé par
des méthodes qui sont en conflit avec la Constitution — une fin désirable
ne peut pas être encouragée par des moyens interdits.] |
Le calme est revenu et les États-Unis ont continué de pratiquer une
politique linguistique qui a tellement réussi qu'aujourd'hui l'unilinguisme
anglais règne de façon quasi incontestée dans l'administration fédérale. Pourtant, certaines administrations américaines ont assoupli leur politique et
permis une forme de bilinguisme. Rappelons qu'en août 2000 le président
Clinton a signé un décret (EO 13166) intitulé
Improving access for people
of limited English proficiency («Amélioration
de l'accès aux services pour les personnes dont les compétences sont limitées en
anglais»). Ce décret obligeait tous les organismes
fédéraux à s'adresser aux non-anglophones dans leur langue. La raison
invoquée était que les non-anglophones avaient droit aux mêmes services que
les anglophones. Évidemment, le respect de ce décret du président Clinton
s'est fait de façon très inégale, car certains organismes, comme le U.S.
Department of Education (département de l'Éducation), ont totalement ignoré ces
prescriptions.
Soulignons qu'à l'origine les Anglo-Saxons, qui
deviendront successivement les Yankees,
les White Anglo-Saxon
Protestants (WASP), puis les White
ethnics, dominaient
partout dans les Treize Colonies qui ont donné naissance à la fédération
américaine, car aucune d'entre elles n'étant la patrie d'une minorité nationale.
L'adoption du système fédéral n'a donc pas eu à tenir compte des différences
ethniques, mais plutôt à introduire une forme supplémentaire de séparation des
pouvoirs étatiques et à protéger les libertés individuelles. Toutefois, le
problème des minorités a commencé à se poser du moment où les États-Unis se sont
étendus territorialement, que ce soit par la colonisation, l'achat ou la
conquête. Ces nouveaux territoires abritaient des peuples distincts du point de
vue ethnique: peuples autochtones et populations hispaniques (Chicanos ou
Latinos) de
l'ouest et du sud-ouest, francophones de la Louisiane, Inuits de l'Alaska,
Aléoutes, Hawaïens, Portoricains, etc. Ce sont là les véritables «minorités
nationales» aux États-Unis!
Évidemment, le système fédéral aurait pu permettre à ces
groupes de bénéficier d'une certaine autonomie politique à base territoriale.
Mais cette solution a été délibérément écartée, même dans les territoires
achetés (Louisiane et Alaska) ou annexés (Floride, Texas, Californie,
Nouveau-Mexique, Hawaï). Les autorités américaines ont
toujours réussi à empêcher qu'une minorité nationale ne prenne le contrôle
politique d'un État américain (pensons à la Louisiane!) et ne bénéficie de cette
façon d'une importante autonomie gouvernementale. Cela dit, certains petits
peuples autochtones des États-Unis exercent aujourd'hui une forme d'autonomie
gouvernementale à base territoriale.
2
Les pratiques du multilinguisme fédéral
Dans les faits, seulement quelques documents gouvernementaux sont autorisés
par la législation fédérale à être publiés dans une autre langue que
l’anglais. Il a fallu l'intervention d'un Bill Clinton pour en arriver à
certaines pratiques. Il s’agit des cas suivants:
1) Les procédures d'immigration
Les interprètes doivent être disponibles pendant l'examen mental et
physique d'immigrants cherchant l'entrée aux États-Unis (8 USC 1224).
2) Les procès reconnus légalement
Des interprètes doivent être disponibles lors des procès fédéraux, au
civil et au criminel, quand ceux-ci n’impliquent pas des personnes morales
ou quand ce sont des individus affirmant ne pas connaître la langue anglaise
(28 USC 1827).
3) Les soins médicaux des immigrants
Du personnel bilingue doit être prévu dans les centres fédéraux de
santé et les programmes d’abus d’alcool, qui desservent une population
significative de non-anglophones ( 42 USC 254b(f)(3)(J), 245c, 4577b).
4) Le droit de vote
De l'information bilingue doit être dispensée aux électeurs ainsi que
dans les bureaux de scrutin dans des juridictions où des locuteurs d’origine
amérindienne, hispanique ou asiatique dépassant 5 % de la population ou dont
le nombre excède plus que 10 000 personnes. (42 USC 1973aa-1a).
5) Les écoles
La loi fédérale des droits civils oblige les écoles à prendre «des
mesures appropriées pour surmonter les barrières de langue», qui ferment
l'accès aux cours des enfants ayant des connaissances limitées en anglais
(20 USC 1703 f).
Quand une agence fédérale choisit de servir le public dans une autre langue
que l’anglais, elle doit généralement faciliter des opérations efficaces,
telles que:
- informer des membres du public de leurs droits et leurs responsabilités;
- appliquer les diverses lois fédérales;
- sauvegarder la sécurité et la santé publique;
- rassembler l'information, p. ex. lors des recensements décennaux;
- soutenir des programmes éducatifs, incluant les programmes qui enseignent
la langue anglaise;
- fournir l’accès au gouvernement et à toute procédure politique.
Le décret présidentiel EO-13166 (l'Improving access for people
of limited English proficiency) de Bill Clinton donne une certaine idées
de ces services. Quoi qu'il en soit, un rapport du General Accounting Office
montre que, entre 1990 et 1994, moins de 1 % (exactement 0,065 % d'après le
104e Congress Report du 30 juillet 1996) des
documents du gouvernement fédéral ont été rédigés (traduits) dans d'autres langues
que l'anglais. C'est pourquoi Edward M. Chen, membre de l'American
Civil Liberties Union of Northern California, pouvait dire en 1995: "If anything... language minorities are vastly under-served" («Rien du tout... les
minorités linguistiques sont immensément sous-employées»).
L'une des caractéristiques des droits linguistiques
exercés aux États-Unis, c'est que ces droits sont définis comme des composantes
des libertés et droits civils, assurant à tout citoyen de ne pas subir de
discrimination en raison de l'origine nationale, dont la langue fait partie.
C'est dans cette perspective qu'a été adoptée en 1974 la loi intitulée
Equal Educational Opportunity Act
ou EEOA, c'est-à-dire en français: Loi sur l'égalité
des chances en éducation). Cette loi fédérale adoptée sous
l'administration de
Richard Nixon,
interdit la discrimination à l'égard des professeurs, du personnel et des
élèves, notamment sur la base de la race, de la couleur ou de l'origine nationale,
ce qui inclut la langue parlée par un individu. La même loi oblige les districts
scolaires à prendre des mesures pour surmonter les obstacles freinant une
participation égale des élèves à l'éducation. De
plus, les droits linguistiques sont toujours accordés sur une base individuelle,
jamais sur une base collective. Ce sont donc des droits personnels, non des
droits collectifs, car ils sont plus facilement révocables lorsque les
circonstance s'y prêtent moins.
3
Les lois sur l’enseignement bilingue
Sous la pression de personnalités hispanophones, le
Congrès américain a fini par adopter
quelques lois en matière linguistique. Elles portent toutes sur
l'éducation ou l'enseignement bilingue, à part les mesures prévues pour le droit
de vote. À la fin des années soixante, les membres du Congrès
désiraient tenir compte des besoins d’un nombre croissant d’élèves qui, du fait
de leur connaissance limitée, sinon inexistante de l’anglais, se trouvaient
perpétuellement en situation d’échec scolaire; ils étaient également
désavantagés par rapport aux enfants anglophones. Cette législation s'inscrivait
à la suite des revendications des Noirs américains et de l'adoption de la Loi
sur
les droits civils (Civil Rights Act of 1964). Parallèlement, les faits révélaient que
les élèves hispanophones abandonnaient massivement leurs études en cours de
scolarité, tandis que leur nombre augmentait sans cesse dans certains États tels
que le Nouveau-Mexique, l'Arizona, le Texas, la Floride et même dans les États
de New York et de la Nouvelle-Angleterre.
Mentionnons la
Loi sur l'éducation
bilingue (Bilingual Education Act, 1965), la Loi
d'urgence d'assistance aux écoles (Emergency School Aid Act,
1972), la Loi sur l'éducation aux autochtones (Indian
Education Act, 1972) et le Programme sur l'héritage ethnique
(Ethnic Heritage Program, 1972). Cette politique d'éducation
bilingue était destinée aux enfants dont la connaissance
de l'anglais est limitée. Ces lois s’inscrivent, répétons-le, dans la suite du Civil Rights
Act de 1964 qu’avaient obtenu les partisans du mouvement pour les droits
civiques des Africains américains. À cette époque, les élèves hispanophones
abandonnaient massivement leurs études en cours de scolarité, alors que leur
nombre augmentait par suite de l’exil des Cubains en Floride, des Mexicains dans
les états limitrophes du Mexique et de Portoricains dans les États de New York
et de la Nouvelle-Angleterre.
3.1 Les lois sur l'enseignement bilingue
La loi
la plus importante sur cette question fut sans contredit la
Bilingual Education Act
(Loi sur l'éducation bilingue) de 1965 instaurée sous la présidence de
Lyndon B. Johnson. La Bilingual Education Act
est la façon brève (dit titre court) d'appeler la loi de 1965 dont le nom était
officiellement l’Elementary and Secondary Education Act (Loi
sur l'enseignement primaire et secondaire) ou plus simplement l'ESEA. La loi de 1968 a
été modifiée de nombreuses fois, mais en 1994 elle fut appelée l'Improving America's Schools Act
(Loi améliorant les lois scolaires d'Amérique), alors que le
titre court demeurait encore
Bilingual Education Act. Bien que
la loi sur l'éducation bilingue de 1994 soit aujourd'hui abrogée, elle a servi de modèle aux États-Unis
durant de longues années.
En vertu de cette politique
d'ouverture, le gouvernement
fédéral avait prévu des subventions aux États dont
les écoles désiraient dispenser un enseignement bilingue. Malgré la complexité du
système éducatif américain, les États ont profité d'énormes subventions fédérales
à travers les dispositions du ESEA Act, en vertu du Titre VII (428
millions de dollars par an exclusivement affectés aux programmes «bilingues») ou
du Titre I (8,6 milliards de dollars), dont 75 % peuvent, de façon
discrétionnaire, être affectés à des programmes impliquant une autre langue que
l’anglais. Sur quelque 3,5 millions d’élèves bénéficiant
de cet enseignement, 65 % seraient des hispanophones, les autres se répartissant
environ entre 150 et 300 autres langues, surtout des minorités asiatiques,
amérindiennes ou françaises (Louisiane, Maine). Selon des statistiques de 1990,
quelque 72 % des élèves dont les compétences sont limitées en anglais (LEP) se
trouveraient dans six États : la Californie, la Floride, l’Illinois, le New
Jersey, New York et le Texas. Selon le paragraphe
702 de la Loi sur l'éducation bilingue, voici comment est
définie cette politique:
Section 702.
(a) Recognizing —
(1) that there are large numbers of
children of limited English-speaking ability;
(2) that many of such children have a
cultural heritage which differs from that of English-speaking persons;
(3) that the use of a child's language and
cultural heritage is the primary means by which a child learns; and
(4) that, therefore, large numbers of
children of limited English-speaking ability have educational needs which
can be met by the use of bilingual educational methods and techniques; and
(5) that, in addition, all children
benefit through the fullest utilization of multiple language and cultural
resources,
Congress hereby declares it to be the
policy of the United States to
(1) encourage the establishment and
operation of educational programs using bilingual educational methods and
techniques and
(2) for that purpose, provide financial
assistance to local educational agences in order to enable such agencies
to carry out such programs in elementary, including preschool and
secondary schools which are designed to meet the educational needs of such
children.
|
Paragraphe 702
[traduction]
(a) Reconnaissant:
(1) qu'il existe un grand nombre d'enfants dont les habiletés en anglais
sont limitées;
(2) que beaucoup de ces enfants ont un héritage culturel qui diffère de
celui des anglophones;
(3) que l'usage de la langue d'un enfant et son héritage culturel sont des
moyens fondamentaux par lesquels un enfant fait son apprentissage; et
(4) que, étant donné le grand nombre d'enfants dont les habiletés en
anglais sont limitées, ces derniers ont des besoins éducatifs qui peuvent être
satisfaits par le recours aux méthodes et aux techniques d'enseignement
bilingue; et
(5) que, de plus, tous les enfants bénéficient de l'usage maximum des
ressources linguistiques et culturelles diverses,
Le Congrès déclare par la présente la politique des États-Unis pour:
(1) encourager l'établissement et le fonctionnement des programmes
éducatifs employant des méthodes et techniques bilingues éducatives et
(2) à cette fin fournissent l'aide financière aux agences éducatives
locales pour permettre à ces agences de mettre en application les programmes au
primaire, dont les écoles maternelles et secondaires, conçus pour
répondre aux besoins éducatifs de ces enfants. |
Par ailleurs, le paragraphe 7801 du chapitre 70 du US
Code donne les définitions suivantes de l'expression ''Limited English Proficient''
(ou LEP), c'est-à-dire les connaissances limitées en anglais:
US Code
TITLE 20, CHAPTER 70
§ 7801.
Definitions
(25) Limited English proficient
The term “limited English proficient”, when used with respect to an
individual, means an individual—
(A) who is aged 3 through 21;
(B) who is enrolled or preparing to enroll in an elementary school or
secondary school;
(C)
(i) who was not born in the United States or whose native language is
a language other than English;
(ii)
(I) who is a Native American or Alaska Native, or a native resident
of the outlying areas; and
(II) who comes from an environment where a language other than English
has had a significant impact on the individual’s level of English
language proficiency; or
(iii) who is migratory, whose native language is a language other
than English, and who comes from an environment where a language other
than English is dominant; and
(D) whose difficulties in speaking, reading, writing, or understanding
the English language may be sufficient to deny the individual—
(i) the ability to meet the State’s proficient level of achievement
on State assessments described in section 6311 (b)(3) of this title;
(ii) the ability to successfully achieve in classrooms where the
language of instruction is English; or
(iii) the opportunity to participate fully in society.
|
Code des États-Unis
[traduction]
TITRE 20, CHAPITRE 70
§ 7801
Définitions
(25) Connaissance limitée en anglais
L'expression "connaissance limitée en anglais", lorsqu'elle est
employée en ce qui concerne un individu, désigne quelqu'un :
(A) qui âgé entre 3 et 21;
(B) qui est inscrit ou en voie de s'inscrire dans une école primaire ou
une école secondaire général;
(C)
(i) qui n'est pas né aux États-Unis ou dont la langue maternelle
est une autre langue que l'anglais;
(ii)
(I) qui est un Indien d'Amérique ou l'Indigène de l'Alaska, ou
un résidant natal des secteurs périphériques; et
(II) qui vient d'un milieu où une autre langue que l'anglais a eu un
impact significatif sur le niveau de l'individu dans ses connaissance
de l'anglais; ou
(iii) qui est un immigrant dont la langue maternelle est une autre
langue que l'anglais et qui vient d'un milieu où une autre langue que
l'anglais est dominante; et
(D) dont les difficultés dans la conversation, la lecture,
l'écriture ou la compréhension de l'anglais peuvent être suffisantes pour
nier un individu:
(i) dans sa capacité de satisfaire au niveau de connaissance de
l'État relativement aux évaluations nationales décrites au paragraphe
6311 (b) (3) du présent titre;
(ii) dans sa capacité de réussir avec succès dans des salles de classe
dans lesquelles la langue d'enseignement est l'anglais; ou
(iii) dans ses possibilités de s'intégrer entièrement à la société.
|
Afin de bénéficier de l'enseignement bilingue, un enfant
devait en principe venir d'une famille dont les revenus n'excédaient pas
3000 $, ce qui désignait avant tout les familles pauvres, voire très pauvres. On peut dire qu'il
s'agissait d'une mesure sociale destinée à aider les immigrants à très faible
revenu. La dimension linguistique paraissait secondaire, mais il n'était pas
question de favoriser au départ la langue maternelle des immigrants. Bien que
présentée en 1965, la loi ne fut adoptée qu'en 1968 et appliquée pour la
première fois en 1971 dans l'État du Massachusetts. Il faudra même attendre en
1974 pour la loi puisse s'étendre à travers tout le pays.
Cette politique a donné lieu à de nombreuses poursuites
judiciaires de la
part des citoyens, groupes ou États, qui n'acceptaient pas que le gouvernement
fédéral s'ingère dans le domaine de l'éducation et de la langue grâce à son
pouvoir de dépenser. Finalement, de nombreux Américains ont dû se résigner
lorsque la Cour suprême des États-Unis a donné raison au gouvernement fédéral.
C'est que l'arrêt de la Cour suprême Lau c. Nichols de 1974 fut
interprétée comme recommandant le recours à la langue maternelle de l'enfant en
tant que
langue d'enseignement. Lorsque les enfants arrivent à l'école avec une faible
connaissance de l'anglais, sinon aucune, le choix entre l'«enseignement du lavabo
ou de la piscine» ("sink or swim") constitue une violation de leurs droits
civils, selon la Cour suprême américaine. La plus haute cour a suggéré que des
aménagements pourraient consister en des cours préparatoires d'anglais ou en un
enseignement bilingue dans lequel la langue minoritaire servirait, parallèlement à
l'anglais, de langue d'enseignement durant les premières années de la
scolarité; cette deuxième solution a été adoptée par un certain nombre
d'administrations scolaires.
L'arrêt Lau c. Nichols demeure le précédent le plus
important quant aux droits en éducation chez les minorités linguistiques, bien que la
Cour se soit fondée uniquement sur la loi (le Titre VI de la Loi sur les droits
civils de 1964), plutôt que sur la Constitution américaine. La question était de
savoir si les administrateurs scolaires pouvaient répondre à leurs obligations
de dispenser l'enseignement avec des chances égales en traitant simplement tous
les enfants de la même manière ou s'ils doivent leur accorder une aide
particulière afin de favoriser l'apprentissage de l'anglais. Cet arrêt a ouvert une nouvelle ère
dans l'application des droits civils fédéraux en vertu des «Lau Remedies» («les
compensations Lau»). L'arrêt fut du plus haut tribunal du pays fut rendu le 21 janvier 1974. Par la suite,
l'enseignement bilingue est devenu un droit des familles et une responsabilité des
États, car à partir de ce moment tout district scolaire à l'intérieur duquel
habite un minimum de vingt élèves appartenant à un même groupe minoritaire fut
tenu d'organiser un enseignement parallèle à leur intention.
3.2 Les méthodes d'enseignement
bilingue
Retenons que, selon la loi de 1968,
l'enseignement de la langue maternelle ne devait pas excéder trois ans. Il
restait donc une phase transitoire, strictement temporaire. Dans les faits, cet
enseignement dans la langue maternelle de l'enfant s'est prolongé indéfiniment,
du moins dans certaines écoles. De plus, bien que la loi n'aie jamais précisé
les méthodes pédagogiques devant être utilisées, il est possible de les résumer
de la façon suivante.
1) Un enseignement bilingue
transitoire (TBE: Transitional Bilingual Education)
correspondant à un enseignement dans la langue maternelle de l'enfant pour une
période ne dépassant pas trois ans, avant de passer définitivement à l'anglais.
2) Un enseignement bilingue
proprement dit, qui développe et maintient la langue maternelle de
l'enfant tout en dispensant un enseignement de l'anglais langue seconde (ESL:
English as a Second Language). L'une des variantes de cette méthode consiste
offrir des programmes d'immersion bilatéraux (appelés Two-Way Immersion)
intégrant des élèves de la minorité linguistique et des élèves de la majorité
linguistique, dispensant un enseignement tantôt en anglais tantôt dans l'autre
langue. Le système du «Two-Way» semble surtout être en vigueur dans les milieux
anglophones économiquement favorisés.
3) Un
enseignement en immersion anglaise (SEI:
Structured English Immersion) avec différentes modalités de
soutien.
Durant de nombreuses années (trois décennies),
l'enseignement dit TBE fut la plus répandu à travers tous les États-Unis; on
estime que plus de 70 % des enfants non anglophones recevaient ce type
d'enseignement. Il correspondait davantage à ce que souhaitait la majorité
blanche anglophone. Seulement quelque 11 % des enfants recevaient un
enseignement selon la formule ESL, et très peu selon la variante «two-way» (et
limitée pour l'essentiel à l'espagnol). Quelque 20 % des enfants d'immigrants
recevaient leur instruction sous la forme de l'immersion SEI. Enfin, seulement 1
% des parents immigrants refusait l'enseignement bilingue pour leurs enfants.
Quoi qu'il en soit, n'oublions pas que l'éducation aux États-Unis relève des
compétences des États, et non de celles du gouvernement fédéral. Toutefois, par
son pouvoir de dépenser, il peut s'ingérer dans le domaine de l'éducation.
3.3 L'intégration contre la
conservation
De façon pratique, ce système
d'éducation bilingue prévoit qu'on enseigne d'abord la langue minoritaire (en
général l'espagnol), puis l'anglais est introduit progressivement jusqu'à ce
qu'il devienne l'unique langue d'enseignement. On part du principe que les non-anglophones doivent finir par s'intégrer à la société
américaine et maîtriser l'anglais comme langue principale.
L'éducation bilingue permet en principe aux enfants d'une
minorité linguistique de conserver leur langue. Au fil des années,
l'éducation bilingue s'est considérablement développée
au point où elle semble définitivement faire partie du système
scolaire américain. On estime que le nombre d'élèves
se situe à environ un million et demi, dont plus de 40 % dans le seul État de la
Californie. Ceux-ci proviennent surtout de groupes
linguistiques minoritaires de niveau socio-économique généralement
faible, mais majoritairement de la communauté hispanophone.
Toutefois, la politique d'éducation
bilingue a donné lieu à deux conceptions opposées ou deux modèles extrêmes:
l'éducation favorisant l'intégration (c'est-à-dire l'assimilation
par l'anglicisation)
et celle privilégiant la conservation, donc
le maintien de la langue maternelle. Autrement dit, on a affaire, d'une part, au
modèle assimilateur se caractérisant par un abandon rapide de la langue
minoritaire, et ce, même si cette dernière est enseignée, d'autre part, au
modèle pluraliste dont l'effet est certainement plus positif pour le maintien et
le développement de la langue des non-anglophones. Selon une enquête menée par
R. Kjolseth au US Department of Education à partir des rapports annuels
des programmes bilingues, il est démontré que 80 % des programmes dans
l'ensemble des États américains correspondent au modèle d'intégration ou
d'assimilation.
La controverse demeure
toujours très vive entre partisans de l'intégration et partisans
de la conservation, mais les premiers ont réussi à obtenir la ferveur populaire.
D'ailleurs, l'ancien président des États-Unis,
Ronald Reagan, déclarait
déjà en 1981 qu'«il est absolument mauvais et contraire à
l'idée américaine d'avoir un programme bilingue ouvertement
destiné à préserver la langue maternelle des immigrants».
Il n'est pas surprenant qu'en 1986 le gouvernement fédéral
faisait adopter la «loi Simpson-Mazzoli» (la ''Simpson-Mazzoli Act'' ou plus
officiellement l'Immigration Reform and Control Act) dont le but était de freiner
le flot d'immigrants en provenance du Mexique. La loi a été ainsi justifiée par
le sénateur républicain du Wyoming, Alan Kooi Simpson, au moment de présenter le projet de loi :
When differences introduced by the language and
the culture become too important, unity and political stability of a country are
in game. A common language as well as a culture of basic reference characterize
us clearly as Americans.
|
[Lorsque les différences
introduites par la langue et la culture deviennent trop importantes, l'unité
et la stabilité politique d'un pays sont en jeu. Une langue commune
ainsi qu'une culture de référence de base nous caractérisent
distinctement comme Américains.] |
Le même sénateur Alan Simpson déclarait
aussi:
If language and cultural separatism rise above a certain
level, the unity and political stability of the Nation will - in time - be
seriously eroded. Pluralism within a united American nation has been our
greatest strength. The unity comes from a common language and a core
public culture of certain shared values, beliefs, and customs, which make
us distinctly 'Americans.' |
[Si le séparatisme linguistique et
culturel s'élèvent au-dessus d'un certain niveau, l'unité et la stabilité politique de
la nation — par la suite — sont sérieusement érodées. Le
pluralisme au sein d'une nation américaine unie a été
notre plus grande force. L'unité vient d'une langue
commune et d'un noyau culturel public de certaines
valeurs, croyances et coutumes, qui nous
font distinctement des «Américains».] |
En bon républicain, Alan Simpson semblait avoir
grand peur des immigrants; c'est pourquoi il croyait à leur nécessaire
assimilation. Le 6 août 1992, Simpson déclarait ce qui suit lors du débat sur le
projet de loi HR 4312 portant sur l'emploi du bilinguisme sur les bulletins de
vote:
But in my mind the surest way to encourage xenophobia and ethnic
prejudice is to encourage the growth of enclaves in the United
States where English is not the common language, wich is the
language of commerce, the language of Government, and the language
of jobs. The language of employment is English. |
[Mais dans mon esprit, le meilleur moyen pour encourager la
xénophobie et les préjugés ethniques, c'est d'encourager la
croissance des enclaves aux États-Unis, là où l'anglais n'est pas la
langue commune, alors qu'il est la langue du commerce, la langue du
gouvernement et la langue des emplois. La langue du travail est
anglais.] |
Le 14 juin 1995, le
sénateur Simpson, alors qu'il sera président de la sous-commission des lois du
Sénat en charge de l’immigration, proposera l’augmentation des patrouilles de
contrôle des frontières, l’accroissement des sanctions à l’encontre des
fraudeurs et, pour financer ces actions, la création d’un péage à l’entrée des
États-Unis. Mais, le 22 juin, la sous-commission compétente de la Chambre des
représentants adoptera une version quelque peu différente de la proposition
sénatoriale, en y ajoutant la réduction de 25 % du quota annuel d’immigration
légale. Cependant, ce ne sont pas tous les Américains adhéraient à l'idéologie
du sénateur Alan Simpson. Ainsi, Barbara Jordan, présidente de la Commission de
la réforme sur l'immigration, estimait que l'américanisation ne signifiait pas
«conformité» («The Americanization Ideal», The New York
Times, 11 septembre 1995):
There is a word
for this process: Americanization. That word
earned a bad reputation when it was stolen by
racists and xenophobes in the 1920's. But it is
our word, and we are taking it back.
Americanization means becoming a part of the
polity -- becoming one of us. But that does not
mean conformity. We are more than a melting pot;
we are a kaleidoscope, where every turn of
history refracts new light on the old promise.
Immigration
imposes mutual obligations. Those who choose to
come here must embrace the common core of
American civic culture. We must assist them in
learning our common language: American English.
We must renew civic education in the teaching of
American history for all Americans. We must
vigorously enforce the laws against hate crimes
and discrimination. We must remind ourselves, as
we illustrate for newcomers, what makes us
America.
|
[ll y a un
mot pour ce processus : l'américanisation. Ce mot a mérité une mauvaise
réputation quand il a été subtilisé par des racistes et des xénophobes
dans les années vingt. Mais c'est notre mot, et nous le prenons.
L'américanisation désigne une partie du système social... devenu une
part de nous-mêmes. Mais cela ne signifie pas conformité. Nous sommes
plus qu'un melting pot; nous sommes un kaléidoscope dans lequel chaque
tournant de notre histoire reflète une nouvelle lumière sur la vieille
promesse.
L'immigration impose des obligations
mutuelles. Ceux qui choisissent de venir ici doivent adopter un fonds
commun de la culture civique américaine. Nous devons les aider à
acquérir notre langue commune : l'anglais américain. Nous devons
renouveler l'éducation civique par l'enseignement de l'histoire
américaine à tous les Américains. Nous devons appliquer rigoureusement
les lois contre les crimes haineux et la discrimination. Nous devons
nous rappeler, comme nous le montrons aux nouveaux arrivants, ce qui
fait de nous l'Amérique.] |
La question de l'immigration souleva une levée de boucliers,
surtout dans les six États qui accueillent
70 % des nouveaux immigrants: la Californie, l'État de New York, le Texas, la
Floride, le New Jersey et l'Illinois. Le
sénateur Simpson a dû accepter de retirer la réforme de l’immigration légale de
l’ordre du jour. Mais, en 1996, il a réussi à faire adopter par le Wyoming une
nouvelle constitution qui rendait l'anglais la langue
officielle de l'État : «English shall be designated as the official language of
Wyoming.»
Aujourd'hui, les programmes d'éducation bilingue continuent
d'être controversés. Ils ont même été partiellement suspendus en Californie
et en Arizona et en Alaska. La plupart des opposants s’appuient sur l’inadéquation des
programmes fédéraux coûteux qui y sont consacrés, sur l’inefficacité du système
en cours et sur l’évolution des besoins en fonction des évolutions
démographiques les plus récentes.
En réalité, la controverse sur l'éducation bilingue vient du
fait que la majorité anglo-protestante blanche, les WASP ou
White Anglo-Saxon Protestants de la
vieille Amérique, voient le contrôle de leur pays en voie de leur échapper
éventuellement en raison des changements démographiques favorisant les Noirs et
les Hispaniques. Par ailleurs, aucune étude n'est venue appuyer les avantages ou
les inconvénients relatifs à l'enseignement bilingue. Pour la plupart des
Américains, l'affaire est classée: l'enseignement bilingue nuirait à
l'apprentissage de l'anglais, sans qu'il ne soit nécessaire de le prouver. Par
ailleurs, tout enseignement de la langue maternelle autre que l'anglais est
perçu comme inutile, justement parce que cette langue est parlée par une
minorité, c'est-à-dire une race inférieure.
3.4 La loi sur l'enseignement
primaire et secondaire de 2001
C'est pourquoi les lois sur l'éducation bilingue ont fini par
perdre une certaine considération, surtout que la presse américaine vilipendait
ouvertement cette pratique. La Bilingual Education Act ou l’Elementary
and Secondary Education Act (Loi sur l'enseignement primaire et
secondaire) fut modifiée en 1994 en s'appelant l'Improving America's
Schools Act (Loi améliorant les lois scolaires d'Amérique).
Finalement, cette dernière loi a été à son tour abrogée le 8 janvier 2002, alors
que le président George W. Bush a signé
et rebaptisé une nouvelle loi scolaire portant le nom de NCLB: la
No Child Left Behind
Act of 2001, ce qui peut se traduire par Loi du «aucun enfant laissé pour compte»
ou encore Loi sur l'éducation pour qu'aucun enfant ne soit laissé pour
compte. Tous les ans, des évaluations en lecture, en anglais et en
mathématiques doivent être menées auprès des élèves de la troisième à la
huitième année. De plus, un guide d'évaluation —
Standards and Assessments Peer Review Guidance: Information and Examples for
Meeting Requirements of the No Child Left Behind Act of 2001 ou
"Instructions sur les normes et les évaluation pour le contrôle par les pairs:
informations et exemples d'exigences concernant la Loi du aucun enfant laissé
pour compte de 2001"—
a été destiné aux enseignants: il précise notamment la réglementation fédérale
en matière d'évaluation. Mais, dorénavant, le financement des écoles est
tributaire de la réussite des élèves.
Cette loi, qui est entrée en vigueur dans tous les États américains, a
supprimé toute allusion au bilinguisme, le mot «bilingual» ("bilingue") y étant banni. Au nom de l’efficacité, la
loi de 2001 impose une limitation de
trois ans à la durée de la présence d'enfants dans les «programmes bilingues»
appelés maintenant des «programs of English language
development for limited English proficient children», c'est-à-dire des
programmes de développement de l'anglais destinés aux enfants dont les
compétences en anglais sont limitées.
Le paragraphe le plus important de la
loi de 2001 semble être le
suivant (no 3102) sur les objectifs visant l'apprentissage de l'anglais:
SECTION 3102.
PURPOSES.
The purposes of this part are —
(1) to help ensure that children who are limited English proficient,
including immigrant children and youth, attain English proficiency,
develop high levels of academic attainment in English, and meet the same
challenging State academic content and student academic achievement
standards as all children are expected to meet;
(2) to assist all limited English proficient children, including immigrant
children and youth, to achieve at high levels in the core academic
subjects so that those children can meet the same challenging State
academic content and student academic achievement standards as all
children are expected to meet, consistent with section 1111(b)(1);
(3) to develop high-quality language instruction educational programs
designed to assist State educational agencies, local educational agencies,
and schools in teaching limited English proficient children and serving
immigrant children and youth;
(4) to assist State educational agencies and local educational agencies to
develop and enhance their capacity to provide high-quality instructional
programs designed to prepare limited English proficient children,
including immigrant children and youth, to enter all-English instruction
settings;
(5) to assist State educational agencies, local educational agencies, and
schools to build their capacity to establish, implement, and sustain
language instruction educational programs and programs of English language
development for limited English proficient children;
(6) to promote parental and community participation in language
instruction educational programs for the parents and communities of
limited English proficient children;
(7) to streamline language instruction educational programs into a program
carried out through formula grants to State educational agencies and local
educational agencies to help limited English proficient children,
including immigrant children and youth, develop proficiency in English,
while meeting challenging State academic content and student academic
achievement standards;
(8) to hold State educational agencies, local educational agencies, and
schools accountable for increases in English proficiency and core academic
content knowledge of limited English proficient children by requiring —
(a) demonstrated improvements in the English proficiency of limited
English proficient children each fiscal year; and
(b) adequate yearly progress for limited English proficient children,
including immigrant children and youth, as described in section
1111(b)(2)(b); and
(9) to provide State educational agencies and local educational agencies
with the flexibility to implement language instruction educational
programs, based on scientifically based research on teaching limited
English proficient children, that the agencies believe to be the most
effective for teaching English.
|
PARAGRAPHE 3102
[traduction]
OBJECTIFS
Les objectifs de la présente partie sont:
(1)
D'aider à s'assurer que les jeunes et les enfants dont les compétences
sont limitées en anglais, notamment chez les immigrants, acquièrent ces
compétences, atteignent un haut niveau d'instruction en anglais et
respectent les mêmes normes nationales rigoureuses quant au contenu et au
rendement scolaires, conformément à ce que l'on attend de tous les
enfants;
(2) D'aider tous les jeunes et les enfants dont les compétences sont
limitées en anglais, notamment chez es immigrants, à atteindre de hauts
niveaux dans les disciplines scolaires fondamentales afin qu'ils respectent les
mêmes normes nationales rigoureuses quant au contenu et au rendement
scolaires, conformément à ce que l'on attend de tous les enfants, ainsi
qu'au paragraphe 1111 (b) (1);
(3) De développer des programmes pédagogiques linguistiques de haute
qualité conçus dans le but d'aider les organismes scolaires nationaux et les écoles dans l'enseignement
dispensé aux enfants et aux jeunes immigrants dont les compétences en anglais sont
limitées;
(4) D'aider les organismes scolaires nationaux et locaux afin de développer et
d'améliorer leur capacité à dispenser des
programmes d'enseignement de haute qualité et conçus pour préparer les enfants
dont les compétences sont limitées en anglais, notamment les enfants et
les jeunes
immigrants, et pour atteindre les normes d'un enseignement tout-anglais;
(5) D'aider les organismes scolaires nationaux et locaux ainsi que les écoles à
développer leur capacité pour établir, mettre en œuvre
et soutenir un enseignement de la langue par des programmes scolaires et des
programmes de développement de l'anglais destinés aux enfants dont les
compétences en anglais sont limitées;
(6) De promouvoir la participation parentale et communautaire dans
l'enseignement de la langue par des programmes scolaires destinés aux parents et
aux communautés
dont les enfants
ont des compétences limitées en anglais;
(7) De simplifier l'enseignement de la langue dans les programmes
scolaires
gérés par des modalités de subventions à l'intention des organismes
scolaires nationaux et locaux; le but est d'aider les
enfants et les jeunes dont les compétences sont limitées en anglais,
notamment les immigrants, pour qu'ils développent leur maîtrise en anglais, en
répondant aux mêmes normes nationales rigoureuses quant au contenu et
au rendement scolaires;
(8) De tenir les organismes scolaires nationaux et locaux ainsi que
les écoles responsables de l'augmentation de la maîtrise en anglais et du contenu national des connaissances scolaires chez les
enfants dont les compétences en anglais sont limitées en exigeant :
(a) des améliorations éprouvées de la
maîtrise en anglais chez les
enfants dont les compétences sont limitées en anglais pour chaque exercice
financier; et
(b) un progrès annuel adéquat pour les enfants et les jeunes dont les compétences sont
limitées en anglais, notamment chez les immigrants, tel qu'il est décrit
au paragraphe
1111 (b) (2) (B); et
(9) De permettre aux organismes scolaires nationaux et locaux
de mettre en œuvre avec flexibilité un enseignement
de la langue par des programmes pédagogiques basés sur la recherche scientifique
et destinés à un enseignement pour les enfants dont les compétences en
anglais sont
limitées; les
organismes croient que ces programmes sont parmi les plus efficaces pour l'enseignement de
l'anglais.
|
Dorénavant, la NCLB repose sur quatre principes de base: une
responsabilisation accrue de la part des élèves et des enseignants, une plus
grande flexibilité, un contrôle local élargi avec des «options» plus étendues
pour les parents et un accent mis sur les méthodes d'enseignement efficaces. Il
faut surtout retenir que la loi
No Child Left Behind Act exige désormais
le développement des standards et de l'évaluation des progrès des élèves en anglais,
de publier des «bulletins scolaires» sur les écoles, de s'assurer que les
enseignants soient hautement qualifiés et intervenir lorsque les écoles sont «en
danger» ou ne font pas suffisamment de progrès scolaire en anglais. Cette loi
suppose des modifications très importantes dans les écoles primaires des États,
car elle introduit des normes comptables portant sur la comparaison des résultats. Ainsi, les
parents pourront enlever leurs enfants des écoles peu ou pas performantes pour
les envoyer dans une école qu'ils estiment meilleure.
En novembre 2000, le président des États-Unis, George W. Bush,
déclarait à la presse que la clé du succès pour les immigrants reposait sur la
connaissance de l'anglais et que les programmes d'immersion et d'éducation
bilingue seraient maintenus s'ils correspondaient à cet objectif, le tout dans
une atmosphère où chaque héritage collectif est respecté et honoré:
Q: Should English be made
the country’s official language?
A: The ability to
speak English is the key to success in America. I support a concept I call
English-plus, insisting on English proficiency but recognizing the
invaluable richness that other languages and cultures brings to our nation
of immigrants. In Texas, the Spanish language enhances and helps define
our state’s history. My fundamental priority is results. Whether a school
uses an immersion program or a bilingual program, whichever effectively
teaches children to read and comprehend English as quickly as possible, I
will support. The standard is English literacy and the goal is equal
opportunity - all in an atmosphere where every heritage is respected and
celebrated.
Source: Associated Press Nov 1, 2000 |
Q: L'anglais doit-il être
proclamé la langue officielle du pays ?
[traduction] R:
La capacité de parler l'anglais
est la clef du succès en Amérique. Je soutiens un concept que j'appelle
«l'anglais plus», en insistant sur la connaissance de l'anglais, mais la
reconnaissance de la richesse inestimable des autres langues et cultures
est bénéfique à notre nation d'immigrants. Au Texas, la langue espagnole
est en hausse et contribue à définir l'histoire de notre État. Ma priorité
fondamentale repose sur les résultats. Si une école emploie un programme
d'immersion ou un programme bilingue, tout ce qui fait apprendre aux
enfants de façon efficace à lire et comprendre l'anglais aussi rapidement
que possible, je le soutiendrai. Le standard est l'alphabétisation en
anglais et les chances égales constituent l'objectif - le tout dans une
atmosphère où chaque héritage est respecté et honoré.
Source : Associated Press, le 1er novembre 2000 . |
Tout en exaltant la «grande tradition américaine du melting
pot» (creuset) et en assurant que l'Amérique pouvait «être à la fois une société régie
par la loi et une société accueillante», le président George W. Bush a dépêché
6000 membres de la Garde nationale à la frontière mexicaine afin de freiner
l'afflux des immigrants clandestins. Pour obtenir leur citoyenneté, les immigrés
illégaux devraient payer une amende «significative», acquitter leurs impôts,
apprendre l'anglais et avoir un travail pendant plusieurs années. Seulement
après, ils pourraient demander de devenir des citoyens américains.
Pour beaucoup d'enseignants américains, la Loi du «aucun
enfant laissé pour compte» est aussi le signe d’un début de changement de la
politique linguistique fédérale pour une politique résolument tournée vers le
«tout-anglais». Cette loi a été très controversée au moment de son adoption; le
nouveau président des États-Unis, Barack Obama, a promis de la réformer. Le
«plan Obama» est destiné à mettre en place une évaluation des écoles moins
«punitive» en offrant des «récompenses financières» aux établissements
d'enseignement les plus performants, plutôt que de mettre l'accent sur les
«écoles défaillantes» ("failling schools"). En mars 2010, le président Obama
déclarait:
Under these
guidelines, schools that achieve excellence or show real progress
will be rewarded, and local districts will be encouraged to commit
to change in schools that are clearly letting their students down.” |
Selon ces directives, les écoles qui permettent d'atteindre
l'excellence ou de témoigner des progrès réels seront récompensées,
et les districts locaux seront encouragés à s'engager à changer dans
les écoles celles qui nivellent manifestement leurs élèves vers le
bas. |
La réforme viserait aussi à réduire le décalage entre les
taux de réussite des élèves blancs et celui des élèves qui ne le sont pas. Les
enseignants devraient aussi être évalués davantage sur la réussite scolaire et
la progression de leurs étudiants.
3.5 La vague d'unilinguisme anglais
Il s'agit de rappeler ici le fait que certaines organisations, comme US
English et English Only, ont toujours cru que la fameuse éducation bilingue
(destinée surtout aux hispanophones) n'aboutisse à des «schismes
linguistiques». C'est pourquoi on assiste à une vague d'unilinguisme
anglais qui balaie les États-Unis. En voici quelques manifestations
dignes de mention:
- En 1985, au Texas,
une radio de langue espagnole a été l'objet d'une pétition
auprès de la Commission de réglementation des télécommunications
(FCC) en vue de sa suppression. Quelques années plus tard, un juge a même
interdit à une mère de parler espagnol à son enfant, sous le
prétexte qu'il s'agissait d'un cas de mauvais traitement («child
abuse»).
- Au Colorado, en 1986,
un chauffeur d'autobus scolaire a ordonné aux élèves hispanophones
de ne parler qu'anglais quand ils étaient dans son autobus.
- En 1988, un employé
de restaurant (hispanique) est congédié par son patron pour
avoir traduit en espagnol le menu à l'un de ses clients.
- En 1988, à Coral
Gables, en Floride, un employé a été licencié pour avoir parlé
espagnol sur son lieu de travail.
- En 1988, à Huntington
Beach, en Californie, les tribunaux ont interdit brusquement aux interprètes
d'utiliser l'espagnol dans leurs conversations privées. À Monterey Park, la
Ville s'est aussi servie d'un règlement municipal contre le bilinguisme pour
interdire aux bibliothèques publiques d'acheter des livres en langues
étrangères.
- En 1988, la modification constitutionnelle de l'Arizona a eu
comme conséquence d'interdire aux employés de l'État de communiquer
avec les administrés en espagnol ou en navajo.
- Michael Dukakis a fait
campagne pour la présidence des États-Unis contre George
Bush; il prononça plusieurs discours en espagnol dans des villes du Sud
où vivaient une majorité d'hispanophones. Non seulement les
membres de son propre parti (démocrate) condamnèrent cette attitude,
mais la majorité des commentateurs politiques attribuèrent sa défaite
électorale à cet «écart de langage».
- En 1995, un juge texan a condamné une femme parce qu'elle parlait espagnol à son enfant en
précisant qu'il faudrait retirer l'enfant à sa mère
si elle persistait dans cette pratique.
|
Pour une organisation telle que English Only, la diversité des langues
conduit forcément au conflit linguistique, à la haine ethnique et au
séparatisme politique «à la Québec»: «Language diversity inevitably leads to language
conflict, ethnic hostility, and
political separatism à la Québec.»
Bref, la diversité linguistique est généralement très mal perçue au
États-Unis, et le cas du Québec au Canada constitue un exemple à ne pas
suivre. L'enseignement bilingue est de plus en plus perçu comme une façon de
légitimer et d'officialiser le statut des minorités linguistiques. D'où le refus
d'accorder un droit à une minorité abusivement reconnue comme hispanophone par
le gouvernement fédéral. Pour les tenants du English Only, par exemple,
il est temps de mettre fin aux politiques d'éducation bilingue, car la Nation
américaine n'a pas à s'adapter aux nouveaux venus, et peut et doit recourir à des
mesures qui la menacent en défendant son identité et imposer l'assimilation
comme unique mode d'intégration.
3.6 L'espagnol
Le retrait du contenu espagnol du site Web de la Maison-Blanche après l'investiture de Donald Trump en tant que président américain a
suscité la controverse.
C'est l'une des multiples sections de la page qui ont été retirées, comme celle qui fait référence aux droits de la communauté LGTB.
Interrogé à ce sujet, le porte-parole du président Trump, Sean Spicer, avait déclaré
que l'absence de la version espagnole sur le site Web de la Maison-Blanche
était due au fait que cette page était «en construction» après l'arrivée du nouveau
gouvernement. Toutefois, le retrait de cette section a éveillé les soupçons des groupes de défense des
immigrants aux États-Unis, compte tenu de la rhétorique hostile que Trump a
utilisée pendant sa campagne électorale contre les Mexicains.
Alors qu'il était toujours candidat à l'investiture républicaine, le nouveau
président américain, alors Donald Trump, avait attaqué son rival Jeb Bush pour le fait que, lors de
certaines de ses apparitions publiques devant la presse, il parlait en espagnol.
Avec cela, Trump avait relancé le débat sur la possibilité de faire de l'anglais la
langue officielle des États-Unis, ce qui ne s'est pas produit.
Ni la Constitution américaine ni aucune loi fédérale n'établit l'officialité de
l'anglais.
Malgré le fait que l'anglais n'est pas la langue officielle au niveau fédéral,
les statistiques indiquent que plus de 95% de la population a une connaissance
adéquate de cette langue, qui demeure un outil d'intégration essentiel pour les
nouveaux arrivants.
4 La
législation fédérale et les autochtones
Les débuts de la formation des États-Unis
n'ont pas été tendres à l'égard des autochtones. ces derniers furent spoliés de leurs
terres et exclus de toute décision politique. À la suite de l'indépendance, leur
sort fut même aggravé. Considérés comme «sauvages», ils furent implicitement traités
comme des «nations étrangères» par la Constitution de 1787 et tenus pour hostiles
par les politiciens américains qui attribuèrent alors les relations avec les «Indiens» au
secrétaire à la Guerre (War Secretary). De nombreux traités furent signés, mais aucun ne fut
respecté dans la mesure où l'on considérait les autochtones comme des «nations
vaincues». De façon générale, tous les traités eurent pour objet principal la cession des
terres indiennes au gouvernement des États-Unis. Les
premiers présidents américains refusèrent
systématiquement la «solution de l'État indien» et adoptèrent une politique qui
consistait à faire reconnaître la suprématie du gouvernement des États-Unis sur
les autochtones. Ceux-ci durent abandonner leur mode de vie pour s'américaniser. Ce
fut la logique du président Thomas Jefferson (1743-1826), le troisième
président, dans ses nombreux discours aux
nations autochtones: «Vendez vos terres, adoptez l'économie agrarienne,
défaites-vous de vos coutumes tribales et vous pourrez devenir citoyens
américains.» Dans le cas contraire, les autochtones devaient se résigner à vivre à
l'écart des Blancs dans une sorte de partition du continent.
Tous les gouvernements américains
pratiquèrent une politique de liquidation, pour ne pas dire une politique
génocidaire à l'égard des autochtones. De quelque 25 millions avant l'arrivée des Blancs en Amérique du
Nord, la population autochtone compte aujourd'hui
environ 800 000 Amérindiens habitant les
États-Unis (après avoir été 350 000 vers 1920). Ils sont répartis surtout dans
une quinzaine d'État, notamment l'Oklahoma, Californie, Arizona,
Nouveau-Mexique, Alaska, etc. La Loi sur l'éducation aux autochtones (Indian
Education Act) de 1972 correspondait encore à cette politique qui consistait
à rendre les autochtones bilingues en espérant leur assimilation.
À la fin des années quatre-vingt, la
politique américaine commença à changer. Certains politiciens voulurent
reconnaître les droits linguistiques des Amérindiens, notamment les autochtones
de l'Alaska, les indigènes d'Hawaï et les insulaires du Pacifique. Quelques lois
furent adoptées: la Native American Languages Act of 1990 (ou Loi
sur les langues amérindiennes de 1990), la
Native American Languages Act of 1992 (ou Loi sur les langues
amérindiennes de 1992), la Native American Languages Act Amendments Act
of 2001 (ou Loi de 2001 modifiant la Loi sur les langues
amérindiennes) et la Southwest Native American Language Revitalization
Act of 2003 (ou Loi de 2003 sur la revitalisation des langues
amérindiennes du Sud-Ouest).
Ces lois n'autorisent aucun nouveau programme
pour les autochtones américains, ni ne permettent un financement supplémentaire,
mais proposent des moyens incitatifs pour préserver les langues amérindiennes en
usage aux États-Unis. Ces dispositions législatives fédérales concernent les
droits linguistiques des «Indiens américains» (Americans Indians), des
autochtones d'Alaska (Alaska Natives), des autochtones d'Hawaï (Native
Hawaiians) et des insulaires du Pacifique (Pacific Islanders),
c'est-à-dire les autochtones vivant dans les possessions ou territoires
américains du Pacifique.
Les paragraphes 1 à 5 de l'article 102 de la
Loi sur les langues amérindiennes de 1990 (Native American Languages
Act) déclarent ce qui suit:
Section 102
The Congress finds that--
(1) the status of the cultures and languages of native Americans is
unique and the United States has the responsibility to act together with
Native Americans to ensure the survival of these unique cultures and
languages;
(2) special status is accorded Native Americans in the United States, a
status that recognizes distinct cultural and political rights, including
the right to continue separate identities;
(3) the traditional languages of native Americans are an integral part
of their cultures and identities and form the basic medium for the
transmission, and thus survival, of Native American cultures, literatures,
histories, religions, political institutions, and values;
(4) there is a widespread practice of treating Native Americans
languages as if they were anachronisms;
(5) there is a lack of clear, comprehensive, and consistent Federal
policy on treatment of Native American languages which has often resulted
in acts of suppression and extermination of Native American languages and
cultures;
|
Paragraphe 102
[traduction]
Le Congrès considère que :
(1)
Le statut des langues et des cultures amérindiennes est
unique et que les États-Unis ont la responsabilité d'agir de concert avec des
Amérindiens pour assurer la survie de ces langues et cultures uniques;
(2) Il est accordé aux Amérindiens un statut spécial aux États-Unis,
un statut qui reconnaît des droits culturels et politiques distincts,
incluant le droit de constituer des identités séparées;
(3) Les langues traditionnelles amérindiennes constituent une partie
intégrante de leurs cultures et de leurs identités, et forment le moyen de base pour
la transmission et la survie des cultures amérindiennes, de leurs
littératures, leur histoire, leurs religions, leurs institutions politiques
et leurs valeurs;
(4) Il est une pratique
généralisée qui consiste à traiter les langues amérindiennes comme si elles étaient des anachronismes;
(5)
Il y a un manque de politique fédérale claire,
complète et cohérente quant au traitement des langues
amérindiennes qui ont souvent abouti à des actes de suppression et
à l'extermination des cultures et des langues amérindiennes;
|
La loi reconnaît ainsi le tort que les États-Unis ont causé
aux nations amérindiennes et le manque de politique claire et cohérente quant au
traitement des langues amérindiennes. L'article 104 de la
Loi sur les langues amérindiennes de 1990 déclare que la politique des
États-Unis est de préserver, sauvegarder et promouvoir les droits et libertés des
Amérindiens afin d'employer, pratiquer et développer les langues
amérindiennes:
Section 104
It is the policy of the United States to--
(1) preserve, protect, and promote the rights and freedom of Native
Americans to use, practice, and develop Native American languages;
|
Paragraphe 104
[traduction]
La politique des États-Unis
est de:
(1) Préserver, sauvegarder et promouvoir les droits et libertés des
Amérindiens afin d'employer, pratiquer et développer les langues
amérindiennes;
|
La loi (alinéas 5 et 6 du paragraphe) veut reconnaître
le droit aux autochtones d'employer leurs langues dans toutes les écoles
financées par le Secrétariat à l'Intérieur et de prendre des mesures pour
accorder le statut officiel à leurs langues:
Section 104
(5) recognize the right of Indian tribes and other Native American
governing bodies to use the Native American languages as a medium of
instruction in all schools funded by the Secretary of the Interior;
(6) fully recognize the inherent right of Indian tribes and other
Native American governing bodies, States, territories, and possessions of
the United States to take action on, and give official status to, their
Native American languages for the purpose of conducting their own
business;
|
Paragraphe 104
[traduction]
(5) Reconnaître le droit des tribus indiennes et d'autres
Amérindiens administrant des organismes d'employer les langues amérindiennes
comme moyen d'instruction dans toutes les écoles financées
par le secrétaire de l'Intérieur;
(6) Reconnaître entièrement le droit inhérent des tribus indiennes et
d'autres Amérindiens administrant des organismes, des États, des territoires
et possessions des États-Unis de prendre des mesures et d'accorder le
statut officiel à leurs langues amérindiennes dans le but de conduire
leurs propres affaires;
|
L'alinéa 8 du même paragraphe (de la
Loi sur les langues amérindiennes de 1990) encourage tous les établissements d'enseignement
primaire, secondaire et supérieur
d'inclure, en cas de nécessité, des langues
amérindiennes dans leurs programmes d'études, de la même manière que les
langues étrangères, et d'accorder pour la compétence en langues amérindiennes les
mêmes crédits universitaires que pour la compétence en langues étrangères:
(8) Encourage all institutions of elementary, secondary and higher
education, where appropriate, to include Native American languages in the
curriculum in the same manner as foreign languages and to grant
proficiency in Native American languages the same full academic credit as
proficiency in foreign languages. |
(8) Encourager tous les établissements d'enseignement
primaire, secondaire et supérieur
d'inclure, en cas de nécessité, des langues
amérindiennes dans les programmes d'études, de la même manière que les
langues étrangères, et d'accorder pour la compétence en langues amérindiennes les
mêmes crédits universitaires que pour la compétence en langues étrangères.
|
Enfin, le paragraphe 107 précise que «rien dans cette loi ne sera interprété comme
excluant l'usage de fonds fédéraux pour apprendre l'anglais aux Amérindiens».
Pour sa part, la Loi sur les langues amérindiennes de 1992
a été adoptée pour accorder des programmes de subvention permettant
d'assurer la survie et la vitalité des langues amérindiennes. Les buts pour
lesquels le gouvernement américain veut attribuer des subventions consistent à
faciliter et encourager le transfert des habiletés langagières amérindiennes
d'une génération à un autre, de former des interprètes ou des traducteurs pour
ces langues, de développer du matériel pédagogique dans l'enseignement, de
favoriser la production d'émissions de radio et de télévision en langues
amérindiennes, d'enregistrer, compiler et analyser des témoignages oraux dans
ces langues et enfin de permettre l'achat d'équipements audiovisuels,
d'ordinateurs et de logiciels afin de produire des documents en langues
amérindiennes. Les subventions prévoient couvrir plus de 80 % des coûts des
projets soumis pour les langues amérindiennes.
La loi de 2001 modifiant la
Loi sur les langues
amérindiennes prévoit favoriser les écoles de survie en langue amérindienne
(Native American Language Survival Schools). Selon le paragraphe 2, les
objectifs de cette loi visent notamment à encourager et soutenir le
développement d'écoles de survie en langue amérindienne
(Native American Language Survival Schools) comme des moyens
innovateurs de réparer les effets de discrimination passée contre les locuteurs
des langues amérindiennes et de soutenir la revitalisation de ces langues par
l'éducation en langues amérindiennes et par l'instruction dans d'autres matières
scolaires soumises à l'emploi des langues amérindiennes comme un moyen
d'instruction, compatible avec la politique des États-Unis, telle qu'exprimée
dans la Loi sur les langues amérindiennes. La
loi de 2001 prétend également
démontrer les effets positifs des écoles de survie en langue amérindienne sur le
succès scolaire d'élèves ou d'étudiants amérindiens, ainsi que leur maîtrise en
anglais standard.
Section 2
The purposes of this Act are to--
(1) encourage and support the development of Native American Language
Survival Schools as innovative means of addressing the effects of past
discrimination against Native American language speakers and to support
the revitalization of such languages through education in Native
American languages and through instruction in other academic subjects
using Native American languages as an instructional medium, consistent
with United States policy as expressed in the Native American
Languages Act (25 U.S.C. 2901 et seq.);
(2) demonstrate the positive effects of Native American Language
Survival Schools on the academic success of Native American students and
their mastery of standard English; [...] |
Paragraphe 2
[traduction]
Les objectifs de la présente loi sont:
(1) D'encourager et soutenir le développement d'écoles de survie en
langue amérindienne comme des moyens innovateurs de réparer les effets
de discrimination passée contre les locuteurs des langues amérindiennes
et de soutenir la revitalisation de ces langues par l'enseignement dans
les
langues amérindiennes et par l'instruction dans d'autres matières
scolaires soumises à l'emploi des langues amérindiennes comme moyen
d'enseignement, conformément avec la politique des États-Unis telle
qu'elle est prévue dans la Loi sur les langues amérindiennes (25 USC
2901 et suiv.);
(2) De démontrer les effets positifs des écoles de survie en langue
amérindienne sur la réussite scolaire des élèves amérindiens et
leur maîtrise en anglais standard; [...] |
En vertu des dispositions de cette loi, il est prévu de
dispenser l'instruction et la protection chez les enfants dans une langue
amérindienne pour un groupe d'au moins 10 enfants âgés de sept ans pour au moins
700 heures annuelles. Le secrétaire à l'Éducation est autorisé à fournir des
fonds pour les organisations éducatives, les écoles et collèges en langues
amérindiennes, les administrations indiennes tribales (Indian tribal
governments) afin de faire fonctionner, étendre et augmenter les écoles de
survie en langue amérindienne, partout aux États-Unis et dans leurs territoires,
pour des enfants amérindiens parlant ou non une langue amérindienne. Toute école
de survie en langue amérindienne peut bénéficier des fonds prévus par la loi et
accordera pas moins de 700 heures d'instruction en langue amérindienne par
élève, pour un groupe d'au moins 15 personnes pour lesquelles une école de
survie en langue amérindienne est leur lieu principal d'éducation.
Le problème principal de ces lois est qu'elles arrivent trop
tard, alors que de nombreuses langues autochtones (amérindiennes ou insulaires)
sont moribondes. D'ailleurs, la législation parlent de «survie» ou de "survival
schools" (Native
American Language Survival School), pas tellement de promotion. On peut
aussi se demander s'il ne s'agit pas, encore une fois, une autre façon de mieux
enseigner l'anglais en tant que langue seconde en attendant qu'elle devienne la
première langue. En tous cas, ce n'est pas avec ce genre de loi qu'on fera
renaître, par exemple, la langue hawaïenne.
5
L'officialisation ratée de l'anglais
Même si 80 % des Américains
parlent l'anglais comme langue maternelle (1994 US Census Bureau),
certaines organisations craignent les méfaits du bilinguisme au
sein de la société américaine. De plus, beaucoup de
politiciens américains redoutent d'être envahis d'immigrants
exigeant le bilinguisme dans les services publics. C'est pourquoi la vague
d'unilinguisme qui balaie les États-Unis depuis une dizaine d'années
connaît une popularité croissante.
La présence de fortes minorités
hispanophones (dépassant les 22 millions de locuteurs) dans des
agglomérations importantes, sans compter les groupes asiatiques,
a conduit plusieurs États à adopter des lois et des règlements
décrétant l'unilinguisme anglais. C'est pourquoi des organismes
tels que US English et English Only ont entrepris un véritable
combat politique pour promouvoir l'unilinguisme officiel dans les États.
Selon ces organismes, l'anglais est en danger aux États-Unis. Ainsi,
par la voix du Wall Street Journal, un représentant d'US
English déclarait: «L'anglais
est menacé aux États-Unis [...] par des chefs de minorités
ethniques dynamiques et puissants qui sont financés en bonne partie
par notre propre gouvernement fédéral.» Et beaucoup
d'Américains croient en la véracité de ces propos.
La guerre entreprise par US English et English Only a sûrement
porté fruit, car plusieurs États ont modifié leur
constitution pour «protéger l'anglais».
Même les
analystes américains s'entendent pour décrire le phénomène English Only
comme un mouvement de droite anti-immigrants. Le fondateur de US English,
l'ophtalmologue du Michigan John Tanton, s'est longtemps intéressé par les
restrictions sur l'immigration aux États-Unis, en particulier dans le sud du
pays à la frontière; les rapports financiers d'US English ont révélé que
l'organisation avait reçu 680 000 $ entre 1982 et 1989 du Pionner Fund, une
organisation consacrée à «l'amélioration de la race» par eugénisme. Avant de
fonder US English, John Tanton avait fondé la FAIR, la Federation for American
Immigration Reform, qui militait en faveur des restrictions sur l'immigration.
Pour ce qui est de English First, qui se voulait à l'origine un projet du
Committee to Protect the Family, il fut fondé par Larry Pratt, le président du
groupe Gun Owners of America («Les propriétaires d'armes à feu de l'Amérique»).
Déjà, en août 1996, sous les pressions de US
English, la Chambre des représentants a adopté (259 voix
contre 169) un projet de loi faisant de langlais la langue officielle
du gouvernement fédéral des États-Unis. Le projet
de loi H.R. 123 portait le titre suivant:
The Bill Emerson English Language Empowerment Act of 1996. Il était décrit par ses instigateurs
comme un mécanisme de défense de la société
américaine contre lassaut dun multiculturalisme indésirable.
Ce projet de loi pourrait être appelé en français
Loi de 1996 pour promouvoir la langue anglaise.
Au paragraphe 161, le texte déclare que «la langue officielle
de l'administration fédérale est langlais». En vertu de
la section 162, les représentants du gouvernement fédéral
auront lobligation de préserver et de promouvoir le rôle
de langlais comme langue officielle du gouvernement fédéral.
Une telle obligation devrait entraîner des circonstances plus favorables
aux individus pour apprendre la langue anglaise. De plus, les représentants
du gouvernement fédéral doivent mener les activités officielles
en anglais. Par ailleurs, le projet énonce que nul ne sera privé, directement ou indirectement,
de services, d'assistance ou de facilités fournis par le gouvernement
fédéral uniquement parce quune personne communique en anglais
(paragraphe 163). Toute personne aux États-Unis est autorisée
à communiquer avec des représentants du gouvernement fédéral
en anglais, à en recevoir des informations ou à être
informée par des textes officiels en anglais.
Quiconque est offensé
par une violation de cette partie de la loi peut obtenir un dédommagement
en matière civile. Selon le paragraphe 165, lobtention de la citoyenneté
est facilitée par la connaissance de langlais qui est le moyen
par excellence de conquérir leur place légitime dans la société
américaine. Cest pourquoi les fonctionnaires autorisés devront
conduire toutes les cérémonies de naturalisation entièrement
en anglais. Daprès la section 167, rien dans la loi ne sera interprété
pour interdire à un membre du Congrès ou à un fonctionnaire
du gouvernement fédéral, durant lexercice de ses fonctions,
de communiquer oralement avec une autre personne dans une langue autre
que langlais; pour discriminer ou limiter les droits de tout individu
dans le pays; et pour décourager ou empêcher l'emploi dune
langue autre que langlais dans toute fonction non officielle.
On peut consulter quelques extraits (en français et en
anglais) de ce projet de loi de 1996 pour promouvoir la langue anglaise (The
Bill Emerson English Language Empowerment Act of 1996).
Cependant, le projet de loi na pas été adopté
au Sénat. Les partisans de l'unilinguisme anglais ont fini par abandonner tout
projet d'intervenir à nouveau au niveau fédéral. Depuis, US English et English First
continuent de protester contre le maintien de
services «en langue étrangère» par les agences fédérales. Ils s'offusquent
encore plus lorsqu'un élu s'exprime publiquement en espagnol, comme ce fut le
cas de George W. Bush, le 5 mai 2001,
jour de la fête nationale des Mexicains, alors que le président s'était
adressé en public en espagnol (qu'il appelle lui-même le mexicain). À
titre de président, il ne convient pas de parler une autre langue que l'anglais.
Même le candidat démocrate au élections de novembre 2000, John Kerry, qui
parlait pourtant l'espagnol, le français et l'allemand, n'a jamais, au cours de
la campagne électorale présidentielle, osé s'exprimer en une autre que
l'anglais. Il se serait mis à dos tous les WASP.
Certes, l'anglais n'est pas menacé aux États-Unis en tant
langue nationale, mais il pourrait bien, un jour, dans certains États, être
concurrencé dans une dominance qu'il n'a jamais partagée jusqu'ici. Il est donc
possible que, dans certains États, on soit obligé de remettre en question la
préséance absolue de l’anglais et faire cesser cette attitude pragmatique qui
consiste à temporiser et à faire patienter les minorités, en attendant de les
intégrer, c’est-à-dire les assimiler à la société américaine.
Signalons enfin que les causes des organismes tels que US English et
English First ne sont pas toujours exemptes d'erreurs. Parfois, il
s'agit de véritables faussetés répandues sciemment. En témoigne cet exemple
rapporté par English First sur la situation linguistique du Québec, par ailleurs
fort mal perçue aux États-Unis:
Look what happened in Canada,
where radical bilingualists have held power in Quebec. It is now a
criminal offense for companies not to give French equal billing with
English. It's doubled the paperwork load, driven up the cost of doing
business and forced businesses out of the province. |
[Regardons ce qui est arrivé au
Canada, où les «bilingualistes» radicaux ont exercé le pouvoir au Québec.
C'est maintenant une infraction criminelle pour les compagnies qui ne donnent
pas de facturation en français de façon égale à l'anglais. Elles ont
doublé la paperasserie, augmenté le coût de gestion des affaires et
restreint les affaires de la province.] |
On se demande d'où proviennent ces informations loufoques,
car il n'y a jamais eu de partisans radicaux du bilinguisme qui ont pris le pouvoir à
Québec. De plus, quel Américain accepterait de recevoir une facture dans une
autre langue que celle de la majorité (l'anglais), alors que c'est ce qui est
demandé au Québec pour la majorité francophone? Voici un extrait d'un article
de Mauro E. Mujica (de US English) intitulé «Are we creating an American
Quebec? (''Allons-nous créer un Québec américain?'')». Cet article, paru dans le Human Events du 11 juillet 2003,
insiste sur les dangers de séparatisme linguistique et ethnique dans les
politiques de multilinguisme (bilinguisme?) officiel telles qu'elles sont
appliquées au Canada:
Are we creating an American Quebec?
We need only look to Canada to see the problems a multilingual society can
bring. America’s northern neighbor faces a severe crisis over the issue of
language. [...]
Battles over language rage
across the globe . However, since Canada is so similar, it offers the most
instructive warning for the United States. While the policy of official
multilingualism has led to disunity, resentment and near secession, it is
also very costly. Canada's dual-language requirement costs
approximately $4 billion each year. Canada has one-tenth the
population of the United States and spent that amount accommodating only
two languages. A similar language policy would cost the United States much
more than $4 billion a year as we have a greater population and many more
languages to accommodate.
Unless the United States changes course, we are clearly on the road to a
Canadian style system of linguistic enclaves, wasteful government expenses,
language battles that fuel ethnic resentments and, in the long run,
serious ethnic and linguistic separatist movements. [...] |
[Allons-nous créer un Québec
américain?
Nous devons seulement
observer le Canada pour voir les problèmes que peut apporter une société
multilingue. Notre voisin du nord de l'Amérique fait face à une sévère
crise sur la question linguistique. [...]
Les batailles linguistiques
font rage à travers le globe. Cependant, puisque le Canada nous est si
semblable, il présente un avertissement des plus instructifs pour les
États-Unis. Non seulement la politique de multilinguisme officiel a
entraîné la désunion, le ressentiment et la quasi-sécession, mais elle est
également très coûteuse. Les exigences d'application du bilinguisme au
Canada coûtent approximativement quatre milliards de dollars par année.
La population du Canada équivaut à un dixième de celle des États-Unis
et ce pays dépense une fortune pour accommoder seulement deux langues. Une
politique linguistique semblable aux États-Unis coûterait beaucoup plus
que quatre milliards par année, étant donné que nous avons une population
plus élevée et beaucoup plus de langues à accommoder.
À moins que les
États-Unis ne changent de cap, nous nous acheminons clairement vers
la voie d'un système de style canadien fait d'enclaves linguistiques, de
dépenses gouvernementales dispendieuses, de batailles linguistiques qui
alimentent les ressentiments ethniques et, à long terme, qui susciteront de
sérieux mouvements séparatiste ethniques et linguistiques.] |
Ce point de vue de US English
est répandu partout aux États-Unis. En somme, les Américains ne veulent pas
que le modèle du bilinguisme canadien se transpose dans leur propre pays.
Évidemment, les gens n'ont pas fini d'entendre de telles énormités qui n'offrent
aucune prise à commentaire puisqu'on ignore précisément de quoi les Américains
peuvent bien parler. Est-ce que les quatre milliards de dollars dont parle US
English comprennent les coûts de formation linguistique des fonctionnaires
fédéraux? la traduction des documents publics? les frais d'impression dans les
deux langues? et quoi encore... les coûts des programmes des gouvernements
provinciaux? Or, au plan fédéral, une certaine compilation a été effectuée par
le Conseil du Trésor jusqu'en 1996-1997. En voici les paramètres:
Pour l'année 1996-1997, les
dépenses occasionnées par l'offre de services dans les deux langues
officielles au sein des institutions fédérales (notamment au titre de la
formation linguistique, de la traduction, des primes au bilinguisme et des
frais d'administration) se sont élevées à quelque 260 millions de dollars.
Ceci revient à environ 0,20 $ par tranche de 100 $ consacrée aux services
offerts à la population, soit environ 0,03 $ par
jour par Canadien. |
On est bien loin des quatre milliards de
US English, car 260 millions de dollars sur un budget de quelque 192
milliards de dollars ne représente qu'une bien maigre dépense. Autrement dit, si
le coût du bilinguisme représente 0,03 $ par citoyen par jour, cela signifie
10,95 $ par année. Compte tenu que cette dépense permet de conserver le Canada
dans son entité politique, c'est, peut-on dire, un coût fort acceptable! C'est
peut-être même un très bon investissement pour assurer la paix sociale!
Enfin, contrairement à ce que croient les Américains, la
Charte de la langue française du Québec
n'interdit pas aux individus ni aux sociétés d'utiliser l'anglais. La loi les
oblige plutôt à utiliser le français lorsqu'ils communiquent avec les citoyens
francophones de la province de Québec, ce qui semble bien normal. Quoi qu'il en soit, les objectifs poursuivis par les promoteurs
des lois déclarant l'anglais comme langue officielle aux États-Unis sont les
mêmes que ceux du Québec: assurer la reconnaissance de langue de la majorité. On aurait
donc intérêt à consulter les chapitres sur ce site
consacrés à l'histoire sociolinguistique des États-Unis
en cliquant
ICI, s.v.p.
6 Linternationalisation de la langue anglaise
Comme toute grande puissance au faîte de sa renommée, les
États-Unis pratiquent inévitablement une politique dexpansion
et dinternationalisation de leur langue. Toutefois, contrairement à
des pays comme la France ou le Portugal, aucun texte juridique ne vient
confirmer cette politique. Il sagit, dans le cas des États-Unis,
de méthodes officieuses mais formidablement bien orchestrées
et utilisées autant par les agences gouvernementales fédérales
et autres que par les universités, les comités scientifiques
et les firmes multinationales américaines.
Lexpansion de langlais
est un objectif réel et poursuivi de façon à discréditer
les langues concurrentes en les faisant passer pour des langues «régionales»,
«dépassées», voire «archaïques». Mais le grand «défaut»
des autres langues est leur non-universalité. En réalité,
pour la majorité des Américains, la multiplicité de
langues est considérée comme un mal et une source de conflit.
Il suffit de décrire quelques faits qui, considérés
dans leur ensemble, donnent une curieuse impression de «plan machiavélique»
américain.
6.1 La langue de laviation civile
LOACI (Organisation aéronautique civile internationale) a été
fondée à Chicago, le 7 décembre 1944 par les représentants
de 47 pays, alors que la seule industrie aéronautique civile vraiment
opérationnelle était américaine. Peu après,
sous la pression du gouvernement fédéral américain,
lOACI décida dadopter langlais comme deuxième langue officielle
de tous les aéroports internationaux des pays non anglophones. Cette
politique a incité les non-anglophones à utiliser langlais
non seulement dans les annonces faites durant les vols internationaux,
mais aussi sur les lignes aériennes nationales et jusque dans laffichage
des aéroports du monde.
6.2 Langlais dans les organismes internationaux
Langlais na pas toujours été une langue officielle dans
les organismes internationaux. Ainsi, à la Commission européenne,
langlais na fait son apparition que lors de ladmission de la Grande-Bretagne
en 1972. Il en a été ainsi à lAgence spatiale européenne,
mais depuis que langlais est une langue officielle avec le français,
celui-ci est devenu une simple langue de traduction. À lUnion postale
internationale dont le siège social est à Berne (Suisse),
le français est encore la seule langue officielle. On assiste actuellement
à une offensive américaine afin d’y imposer l’anglais.
Le problème, c'est qu'une fois que l’anglais est admis
comme langue officielle au sein d’une organisation internationale, les
Américains, généralement aidés des Britanniques, font tous les efforts
nécessaires pour éliminer les autres langues qui ne deviennent que des véhicules
de traduction.
6.3 Les communications scientifiques
Depuis les années soixante, les Américains ont toujours
refusé de publier des articles scientifiques rédigés dans une autre
langue que langlais. Cette imposition dune langue unique dans toutes
les communications scientifiques internationales sest faite essentiellement
sous la pression des universitaires et chercheurs américains.
Or,
limmense majorité des chercheurs américains ne parle que
langlais. Les comités universitaires américains ignorent
systématiquement les publications rédigées dans une autre langue. Les Américains
se retrouvent dans la position où ils jouent à la fois le
rôle dacteur et de jury, tout en accaparant, avec la bénédiction
des autres pays, le monde de lédition scientifique internationale.
Cest pourquoi la plupart des Américains croient que toutes les
découvertes scientifiques sont américaines et quelles ne
sont possibles quen anglais. Pire, ils croient que fermement que la
plupart des scientifiques vivants sont américains.
6.4 Lautoroute de linformation
Les Américains présentent les technologies de linforoute
comme étant exclusivement dorigine américaine. Comme par
hasard, cette perception quasi universelle favorise considérablement
la pénétration commerciale américaine dans le secteur
informatique et celui des télécommunications. Les premières
machines et les premiers logiciels, il est vrai, furent conçus pour
traiter des textes en anglais. Au début, on ne pouvait transmettre
que des messages électroniques codés en Ascii l'acronyme
de cette norme américaine de codage des caractères à
sept bits. Ce système n'intègre qu'une gamme limitée
de caractères, celle nécessaire à la langue anglaise
et, accessoirement, au français, à lespagnol, au swahili,
etc. Le code Ascii est, en effet, constitué de jeux de caractères
à sept bits (et non, classiquement, de huit), et les outils qui
l'utilisent ont encore tendance à éliminer un bit sur huit
pour les jeux de caractères autres que ceux de l'anglais. D'où,
par exemple, avec ce code, la disparition, à l'affichage, des signes
diacritiques du français: accents, trémas, cédille.
Or, rien dans l'architecture informatique du réseau ne s'oppose
à l'usage de quelque langue que ce soit. Tout est affaire de protocoles
d'utilisation de cette «quincaillerie», donc d'élaboration de normes
universelles et, tout aussi important, de moyens pour les mettre en place.
Les Américains nont donc aucun intérêt à changer
ce système qui les favorise grandement. Mais ils ont la complicité des autres
nations qui ne protestent que fort peu.
6.5 La langue de larmée américaine
Les Américains ont implanté dimportantes troupes militaires
dans plusieurs pays du monde. De ce fait, il existe une relation entre la présence
des Forces armées américaines et la popularité de
la langue anglaise où elles se trouvent. Par exemple, on se rend
compte que le véhicule de communication imposé avec les fournisseurs
locaux est exclusivement langlais qui acquiert alors un statut privilégié
dans le pays hôte. Le cas est particulièrement flagrant en
Allemagne, au Japon, en Corée, au Panama, en Islande, au Groenland,
aux Philippines, etc. Étant donné
que larmée américaine est présente, dune façon
ou dune autre, dans quelque 110 pays dans le monde, on peut comprendre
limpact dune telle politique dunilinguisme décidé
unilatéralement. Évidemment, si un quelconque pays
utilisait les mêmes tactiques à l'égard des Américains, ce serait le
tollé!
6.6 La langue des succursales américaines à létranger
Dans toutes les multinationales américaines basées à
létranger, langlais sert de véhicule obligatoire dans lutilisation
des méthodes comptables pour les rapports de fin dexercice. Ainsi,
de plus en plus de comptables, de banquiers, et autres gens daffaires
ont recours uniquement à langlais pour la rédaction des
rapports quils rédigent. Dans la plupart des cas, les compagnies
américaines fournissent maintenant à leurs succursales des
logiciels made in USA qui accompagnent la même documentation
que celle disponible aux États-Unis. Manifestement, les Américains
ignorent la «plus-value» de la langue du pays lorsquils y font affaire.
Cest lancien chancelier de lAllemagne, Willy Brandt, en visite à
Londres qui déclarait:
I sell you some thing,
I speak your language. If I buy, dann müssen sie Deutsch
sprechen. |
Ce qui signifie (dans le texte en anglais): «Je vous vends quelque chose, je parle votre langue. Si
jachète, alors, vous devez parler allemand»
(texte en allemand).
6.7
La langue des programmes de coopération bilatérale
Pour tous les stagiaires américains, la langue des programmes
de coopération bilatérale est langlais, car peu importe
le pays où ils se trouvent à lexception des pays dAmérique
latine ils comptent toujours sur leurs hôtes pour parler anglais.
Subrepticement, langlais simpose comme langue véhiculaire dans
tous les programmes de coopération et la langue nationale du pays
hôte est toujours secondaire.
Il faut dire que les universités
américaines nexigent aucune connaissance des langues étrangères
depuis au moins trente ans, alors que dans le reste du monde, particulièrement
en Europe, en Asie et en Afrique, la connaissance dune langue étrangère
est obligatoire pour obtenir un diplôme de second ou de troisième
cycle. Inévitablement, les Américains détiennent probablement
le record mondial dincompétence en la matière, mais cest
là une stratégie efficace destinée à rendre langlais
incontournable, le tout avec la complicité des autres nations.
6.8 La propagande américaine dans les
médias
La plupart des journaux américains ne
ratent jamais une occasion de signaler les succès de l'anglais dans le monde et,
conséquemment, de diminuer ou ridiculiser les tentatives de résistance des
autres langues, notamment le français. Outre le New York Times et US
Today, le journal The Economist demeure l'un
des plus fervents propagandistes américains de la réussite de l'anglais dans le
monde. Le journal a même publié en décembre 2001 un article expliquant les
causes qui expliquent The Triumph of English («Le triomphe de l'anglais») sur toute
la planète. Au besoin, on n'hésite pas à railler tous les États, notamment la
France et le Québec, qui tentent de stopper par une législation l'envahissement
de l'anglais. Bref, pour la plupart des journalistes américains, seules les
petites langues en danger méritent qu'on les protègent... surtout à l'extérieur
des États-Unis.
Les informations véhiculées par les chaînes américaines
concourent toutes à une sorte de propagande destinée à
donner à leur auditoire limpression que le monde entier parle langlais.
Que ce soit en France, en Inde ou en Indonésie, la caméra
doit toujours fixer une affiche en anglais. Lorsquil existe des affiches
bilingues, comme en Inde, le cameraman se doit de ne montrer que linscription
anglaise. Dans la plupart des pays non anglophones, certains journalistes
nhésitent même pas à trafiquer des séquences
montrant des affiches anglaises inexistantes, ou plutôt créées pour la
circonstance. Évidemment, les journalistes
américains sorganisent toujours pour que les personnes interviewées
parlent anglais, de telle sorte que les téléspectateurs de leur pays croient
vraiment que le monde entier parle leur langue.
De plus, la promotion publicitaire de la langue anglaise est courante
dans les médias tant écrits quélectroniques. Ainsi,
on apprend quil faut parler anglais parce que cest une «force unificatrice
entre les peuples» qui «bannira les guerres une fois pour toutes», pas les
autres langues. Il faut
aussi parler anglais pour les «échanges économiques planétaires»,
ce qui réduira les risques de conflit ou dagressivité entre les peuples.
Évidemment, langlais est toujours la «langue de lavenir»,
jamais
les autres langues. Tous ces messages
sont affirmés sans possibilités de réplique sous la
forme de promotion publicitaire du genre: «Notre produit est le meilleur.»
En
fait, beaucoup d’Américains ne comprennent pas pourquoi les autres peuples
ne veulent pas s’assimiler à l’anglais, ce qui, à leurs yeux, serait
tellement plus simple et éviterait tant de conflits. S'il n'en tenait qu'à
eux, qu'à leurs seules valeurs et à leur démocratie, le monde entier
croulerait sous la paix. C'est pourquoi il est difficile pour l'Américain moyen
de comprendre, après l'attaque terroriste du 11 septembre 2001, que d'autres
pouvaient ne pas envier ces valeurs universelles et cette langue qui l'est tout
autant. La plupart des Américains ne peuvent pas comprendre que de nombreux
pays tentent d'adopter des mesures visant à protéger leur langue officielle (ou
nationale) de l’envahissement de l’anglais, malgré la compréhension généralement
admise de l’utilité de son apprentissage par leurs citoyens, alors que, au même
moment, près d'une trentaine d'États des États-Unis officialisent l'anglais sur
leur territoire. Pendant que les politiques linguistiques américaines visent
l'isolationnisme, les politiques des autres pays tendent vers le multilinguisme.
Tandis que beaucoup d'États du monde s'ouvrent vers les autres langues et les
autres cultures, l'Amérique favorise l'unilinguisme anglais et la fermeture aux
autres.
On aurait intérêt à consulter les
chapitres sur ce site consacrés à la section portant sur l'histoire
sociolinguistique des États-Unis, intitulée
«La superpuissance
et l'expansion de l'anglais»
en cliquant ICI,
s.v.p.
Sans quil ne soit nécessaire de le préciser dans
des textes juridiques, le gouvernement fédéral américain
a toujours favorisé l'anglais et a toujours pratiqué des
politiques linguistiques expansives pour l'anglais, mais restrictives pour
les autres langues. Les pratique administratives passées et actuelles
illustrent ce procédé, de même que la politique déducation
bilingue destinée à intégrer les immigrants à
la société américaine. Quant aux politiques dinternationalisation
de l'anglais, il sagit de pratiques officieuses et bien planifiées
de la part des intervenants gouvernementaux, militaires, financiers, industriels,
etc. Les Américains sont devenus en ce domaine les apôtres
les plus zélés du mouvement dinternationalisation de langlais
et essayent den propager la doctrine aux quatre coins du monde. Ils semblent
avoir compris que lexpansion culturelle et linguistique favorise, en général,
lexpansion économique.
Cet effort américain pour répandre
langlais et la culture américaine na probablement pas son équivalent
ailleurs dans le monde. Les politiques linguistiques américaines
correspondent à celles dun grand État puissant qui ne sen
laisse pas imposer à l'extérieur, mais recourt à des pressions juridiques à
l'intérieur de ses propres frontières,
bien quil dispose de moyens autrement plus efficaces. Il est peut-être
malaisé de prétendre hors de tout doute que la domination de l’anglais dans
le monde ait été délibérément voulue, organisée et soutenue par les
États-Unis ou par tout autre État anglo-saxon, parallèlement à leurs
démarches sur l’échiquier politique ou à la pénétration de leurs firmes
internationales sur le marché économique. Mais la politique linguistique
d'expansion de la langue existe bel et bien. Certes, la «guerre des langues»
n'a jamais, nulle part dans le monde, été réellement déclarée.
Néanmoins, il ne faut pas oublier que, à la différence des empires romain ou
britannique, l'impérialisme américain en est un de démocratie et de liberté,
qui exclut en principe la conquête de territoires ou la colonisation, mais qui
constitue tout de même une réelle domination mondiale, que celle-ci soit
militaire, économique, culturelle, linguistique, etc.
Dernière mise à jour:
23 déc. 2023
Amérique du Nord