Royaume de Norvège

Norvège

4) La politique linguistique
à l'égard des minorités

1 Les minorités nationales

En Norvège, la notion de «minorités nationales» correspond aux groupes minoritaires qui entretiennent des «liens durables» avec le pays. Ces groupes doivent appartenir à une minorité et occuper une «position non dominante» dans la société; ils doivent également présenter des caractéristiques ethniques, linguistiques, culturelles et/ou religieuses distinctes, ce qui les différencie du reste de la population norvégienne. De plus, outre le fait d'être de nationalité norvégienne, les personnes concernées doivent avoir la volonté commune de préserver et de développer leur identité culturelle.

1.1 La minorité same

La Norvège compte une minorité same de quelque 30 000 locuteurs. Aujourd'hui, les Sames jouissent des mêmes droits et des mêmes possibilités que les autres citoyens norvégiens. Au siècle dernier, la Norvège avait pratiqué une politique d'assimilation intensive. C'est pourquoi le gouvernement norvégien a cru nécessaire de se doter d'instruments juridiques spéciaux et d'adopter des mesures économiques spécifiques pour permettre au peuple same de sauvegarder et de développer sa culture, sa langue et ses traditions.

Au point de vue linguistique, rappelons que les Sames de Norvège se répartissent en trois grands groupes linguistiques (le groupe central, le groupe oriental et le groupe méridional) et cinq sous-groupes au total (voir les explications et la carte détaillées), dont deux variétés (same de Pite et same d'Um), sont pratiquement éteints :

1) le same du Nord  (groupe central): env. 15 000 en Norvège.
2) le same de Skolt
(groupe oriental) : env. 100 locuteurs en Norvège.
3) le same de Lule (groupe central): env. 500 locuteurs en Norvège.
4) le same de Pite (groupe central): considéré comme éteint en Norvège.
5) le same d'Um (groupe méridional): considéré comme éteint en Norvège.
6) le same du Sud (groupe méridional): env. 300 locuteurs en Norvège.

Au point de vue de la législation, ces diverses variétés dialectales sont considérées comme formant une seule et même langue minoritaire, le same. Il est relativement aisé pour les Sames appartenant à un même groupe (central ou méridional) de se comprendre, chacun parlant sa variété linguistique. Mais c'est plus difficile entre, par exemple, le same du Nord et le same du Sud. La langue same est reconnue localement par les autorités norvégiennes, notamment dans la Constitution et dans la loi du 12 juin 1987 relative au Parlement same. Rappelons que la Norvège a également ratifié la Convention relative aux peuples indigènes et tribaux de l’Organisation internationale du travail, ainsi que la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires et la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales.  

1.2 Les autres minorités

Selon ces critères présentés précédemment, les autres «minorités nationales sont les Juifs, les Kvènes, les Roms et les «Romani/Voyageurs» et les Skogfinns, qui possèdent tous une longue histoire dans le pays, car certains groupes y sont présents depuis les XVIe et XVIIe siècles. Toutefois, rappelons-le, l'expression «minorité nationale» n’est pas employée dans la législation norvégienne. Il n’existe donc pas de définition juridique de ce terme ni de liste recensant les groupes considérés comme des minorités nationales dans la législation norvégienne.

Dans la proposition n° 80 (1997-1998) au Storting relative au consentement à la ratification de la Convention-cadre du Conseil de l’Europe du 1er février 1995, les autorités norvégiennes ont conclu que les Sames, les Kvènes, les Skogfinns, les Romani/Voyageurs, les Roms/Tsiganes et les Juifs remplissaient les conditions requises pour être considérés comme des «minorités nationales». En somme, les langues concernées sont le kvène, le finnois, le romani et le romanès.  

2 Le statut des langues sames

Le statut juridique des Sames et de leurs langues est reconnu, depuis avril 1988, lors d’une modification de la Constitution de 1814 :

Article 108

Il incombe aux autorités de l’État de créer les conditions permettant
au peuple same de sauvegarder et de développer sa langue, sa culture et sa société.

L'article 5 de la Loi sur les langues (1922) reconnaît que les langues sames et le norvégien sont des langues de valeur égale:

Article 5

Langues sames

1) Les langues sames sont des langues autochtones en Norvège.

2)
Les langues sames et le norvégien sont des langues de valeur égale. Elles ont un statut égal en vertu due l'article 3 de la Loi same.

Ainsi, l'État norvégien est tenu de reconnaître des droits linguistiques aux Sames du pays, notamment dans le Finnmark. C'est pourquoi le gouvernement norvégien a fait adopter en 1987 la Loi same, dont les dernières modifications ont été apportées en 2023:

Article 1-5

Langues sames

Les langues sames et norvégiennes sont des langues de valeur égale. Les Sames du Sud, les Sames de Lule et les Sames du Nord sont sur un pied d’égalité avec les Norvégiens, conformément aux dispositions de l'article 3.

La Loi same précise en plus que les Sames du Sud, les Sames de Lule et les Sames du Nord sont sur un pied d’égalité avec les Norvégiens. Ces dispositions signifient dans les faits que les langues sames sont co-officielles dans les localités sames, donc celles situées dans le Finnmark, c’est-à-dire dans les sept municipalités sames suivantes: Kautokeino, Karasjok, Porsanger, Tana, Nesseby, Kåfjord et Tysfjord. Le same du Nord est parlé dans six de ces municipalités.  

3 Le Parlement same

En octobre 1989, le Parlement norvégien, le Storting, a statué que la langue et la culture sames devaient recevoir des traitements égaux à ceux accordés à la langue et la culture norvégiennes. Du fait que la minorité same a été considérée comme une composante propre de l’État norvégien, au même titre que les Norvégiens, le Parlement national a créé un instrument adapté afin que les Sames puissent agir eux-mêmes dans les domaines de la langue, de la culture, de l’industrie et de l’éducation. Il s'agit du Parlement same de Norvège (en norvégien : Sametinget; en same du Nord : Sámediggi), une assemblée élue siégeant à Karasjok en Laponie (en same : Sápmi) et mise en place pour représenter et traiter des affaires concernant les Sames de Norvège. Siégeant quatre fois l’an, l'Assemblée législative compte 39 représentants élus.

L'article 2-1 de la Loi same décrit ici le champ de juridiction ou domaines d'activités du Parlement same:

Article 2-1

Travaux et pouvoirs du Parlement same (au 1er janvier 2024)

1) Le domaine d’activité du Parlement same comprend toutes les questions qui, de l’avis du Parlement, touchent particulièrement la communauté des Sames.

2) Le Parlement same peut, de sa propre initiative, soulever et émettre un avis sur toutes les questions relevant de ses domaines d’activité. Il peut également, de sa propre initiative, présenter des cas aux autorités publiques et aux institutions privées, etc.

3) Le Parlement same peut se voir déléguer le pouvoir d’administrer les crédits alloués aux fins sames sur le budget annuel de l’État. Le Ministère établit des règles de gestion financière du Parlement same.

4) Le Parlement same dispose d'un pouvoir de décision lorsque celui-ci découle d'autres dispositions de la loi ou est prévu d'une autre manière.

Les domaines d’activités du Parlement same sont axés sur les industries traditionnelles sames telles que la pêche, le "duodji" («artisanat same)), l’agriculture et l’élevage du renne.

L'article 2-12 Loi same soulève la question de l'organisation des travaux et du personnel:

Article 2-12 (au 1er janvier 2024)

L’administration, l’organisation et le traitement des affaires du Parlement same

1) Le Parlement same possède sa propre administration. Le personnel de l’administration est employé par le Parlement same.

2) Le personnel employé par le Parlement same est soumis, dans la mesure du possible, à la législation applicable aux fonctionnaires de l’État.

3) Le Parlement same peut créer les commissions, les conseils ou les comités qu'il juge appropriés et, sauf indication contraire, leur déléguer des pouvoirs.

4) Le pouvoir décisionnel prévu aux articles 2-9, 2-10 et 2-14 ne peut être délégué.

5) Les décisions individuelles prises par une commission, un conseil ou un comité nommé par le Parlement same peuvent, conformément aux dispositions de la Loi sur l’administration publique, faire l’objet d’un recours devant le Parlement same ou d'une commission de recours spéciale nommée par le Parlement same.

Bien sûr, les langues des délibérations sont le same ou le norvégien:

Article 2-13

Langue des délibérations

Pendant les assemblées du Parlement same, chacun a le droit de parler same ou norvégien, comme il l’entend.

En principe, le same et le norvégien sont employés par les membres du Parlement same, mais le norvégien tend à prendre le pas sur le same. 

Cet article 3-2 de la Loi same oblige que les lois et règlements soient traduits dans les langues où elles sont parlées dans les localités:

Article 3-2 (au 1er janvier 2024)

Traduction des règles. Annonces et formulaire

1)
Les lois et les règlements présentant un intérêt particulier en totalité ou en partie pour la population same doivent être traduits en langue same par le ministère responsable de la loi ou du règlement. Les municipalités et les conseils de comté sont chargés de traduire en langue same les réglementations locales présentant un intérêt particulier en totalité ou en partie pour la population same.

2) Les avis des organismes publics qui s'adressent particulièrement en totalité ou en partie à la population de la zone administrative pour les langues sames doivent être faits en same et en norvégien. La responsabilité incombe à l'organisme qui publie l'avis.

3) Les formulaires papier et numériques à employer auprès d'un organisme public dans la zone administrative pour les langues sames doivent être disponibles en same et en norvégien. Toutefois, cela ne s'applique pas aux organismes nationaux. La responsabilité incombe à l'organisme qui prépare le formulaire.

4) L'organisme public doit évaluer dans quelle(s) langue(s) il doit être traduit. Lors de l’évaluation, il convient de prendre en compte à qui s’adresse l’information et sur quoi elle porte.

L'institution du Parlement same pratique une forme de bilinguisme dont le norvégien assure la prédominance. Il faut des lois antidiscriminatoires pour assurer une présence convenable au same. 

De plus, le gouvernement norvégien a l’obligation de rendre disponibles en same les textes législatifs nationaux qui concernent spécifiquement les locuteurs de langue same. En effet, l'article 3-2 de la Loi same prévoit que tous les textes et règlements «présentant un intérêt particulier» pour toute la population same ou partie seront traduits en same. De plus, le ministère de la Justice et de la Police ainsi que la municipalité de Tana ont mis en place un programme commun visant à enrichir la terminologie juridique same.

Le ministère norvégien de l'Environnement а entrepris la traduction en same de plusieurs lois secondaires concernant la protection de la nature dans le comté de Finnmark. Ces documents ne sont pas nécessairement disponibles en format papier, ils peuvent être consultés sur les sites Internet du Ministère. De même, la Loi sur le patrimoine culturel а été traduite en same et elle est disponible à la fois en format papier et en format numérique. Il est également prévu de traduire en same la Loi sur l'aménagement du territoire et la construction. Compte tenu des élections locales et régionales, le ministère norvégien de l'Autonomie locale et du Développement régional a traduit en same du Nord et en Same de Lule la brochure électorale distribuée dans chaque foyer.

4 Les tribunaux en same

La langue judiciaire des tribunaux norvégiens est, en règle générale, le norvégien (avec ses deux variantes), mais le droit d'employer le same est limité à certains tribunaux. Il découle de l'article 89 de la Constitution que les tribunaux norvégiens ont à la fois le droit et l'obligation de vérifier la constitutionnalité des lois formelles, des décisions plénières du Storting et des décisions administratives. Cette disposition, qui est une codification du droit constitutionnel coutumier antérieur, est entrée dans la Constitution dans le cadre de la réforme constitutionnelle de 2014 et se lit comme suit :

Article 89

Dans les affaires portées devant les tribunaux, ceux-ci ont le droit et l'obligation de vérifier s'il est contraire à la Constitution de s'appuyer sur une disposition législative et s'il est contraire à la Constitution ou aux lois du pays de s'appuyer sur d'autres décisions rendues par les pouvoirs publics.

Or, l'article 108 de la Constitution, répétons-le, oblige les autorités de l’État de «créer les conditions permettant au peuple same de sauvegarder et de développer sa langue, sa culture et sa société».

De plus, le droit de recourir au same est réglementé par l'article 136a de la Loi sur les tribunaux, lequel s'appuie sur les articles 3 et 4 de la Loi same. Les articles 3 et 4 de la Loi same accordent un droit étendu d'employer le same, même lorsque cela n'est pas nécessaire en raison de problèmes de langue ou de communication:

Article 3-4 (au 1er janvier 2024)

Tribunaux

Pour les tribunaux dont les districts officiels incluent entièrement ou partiellement la zone administrative des langues sames, les règles suivantes concernant l'usage du same s'appliquent également :

1. Quiconque a le droit de soumettre des plaidoiries accompagnées de pièces jointes, des preuves écrites ou d'autres demandes écrites en same. Si le tribunal doit transmettre l'enquête à une partie adverse, il fera en sorte qu'elle soit traduite en norvégien. La traduction peut être omise si l’autre partie est d’accord.

2. Quiconque a le droit de s'adresser oralement au tribunal en same si la réglementation sur la procédure autorise l'accès à des enquêtes orales plutôt qu'écrites. Si le tribunal est tenu d'enregistrer l'enquête, la personne qui enquête peut exiger que l'enregistrement soit fait en same. Une telle réclamation ne doit entraîner aucun délai. Les deuxième et troisième phrases du premier paragraphe s'appliquent en conséquence.

3. Quiconque a le droit de s'exprimer en same lors des audiences du tribunal. Si une personne ne parlant pas le same participe aux pourparlers, un interprète désigné ou agréé par le tribunal sera embauché.

4. Lorsqu'une partie le demande, le président du tribunal peut décider que la langue des pourparlers sera le same. La deuxième phrase du paragraphe 3 s'applique en conséquence.

5. Si la langue de la procédure est le same, le président du tribunal peut décider que le dossier judiciaire doit également être tenu en same. La cour fournit une traduction en norvégien.

6. La cour veille à ce que les dossiers judiciaires rédigés en norvégien soient traduits en same lorsqu'une partie le demande. Une telle réclamation ne doit entraîner aucun délai.

Dans les faits, une partie same, qui comprend ou parle le norvégien, peut demander si elle le souhaite de s'exprimer en same au tribunal; il se peut alors que ce soit le tribunal qui ait besoin d'un interprète et non la partie. C'est pourquoi il est important de se demander quelle langue sera utilisée au tribunal et de ne pas se poser la question suivante: «Votre client a-t-il besoin d'un interprète?» Par conséquent, il résulte de la loi sur les frais de justice, lorsque le tribunal estime nécessaire de procéder à des traductions, que les frais sont couverts par l'État.

Cependant, pour avoir le droit d'employer le same sur un pied d'égalité avec le norvégien, il faut normalement que ce doit soit exercé dans les districts judiciaires qui font partie de la zone administrative de la langue same. On compte six tribunaux de district couvrant plus de 80 localités, deux cours d'appel et deux tribunaux de transferts fonciers. Pour les tribunaux qui ne sont pas couverts par les articles 3 et 4 de la Loi same, la règle principale est que la langue de la cour est alors le norvégien. Toutefois, l'État est tenu de veiller à ce que la langue same soit également employée à l'extérieur de la zone administrative. Il est mal venu, à la lumière de l'obligation constitutionnelle énoncée à l'article 108, de refuser un interprète same ou une traduction en same, parce que le tribunal n'est pas couvert par les articles 3-4 de la Loi same. Dans la plupart des tribunaux de la zone administrative, il y a un interprète ou un traducteur, ce qui constitue la manière dont le droit des Sames d'employer le same traité dans les tribunaux. En effet, seul un petit nombre de juges et de personnel administratif des tribunaux parlent le same. En pratique, les tribunaux fonctionnement généralement en norvégien avec l'assistance d'interprètes pour les citoyens qui veulent recourir au same.

Par ailleurs, l'administration des tribunaux nationaux se charge de traduire en same du Nord les modèles utilisés par le système de traitement électronique des dossiers dans les tribunaux. La décision émane de son conseil de direction qui а déclaré que l'administration des tribunaux nationaux devait s'efforcer de traduire en same du Nord autant de modèles que possible. Cette tache s'avère néanmoins difficile dans la mesure où cette langue ne dispose pas de la terminologie judiciaire et juridique employée dans les modèles.

En somme, les tribunaux et l'administration judiciaire doivent contribuer à sauvegarder le statut juridique des Sames en tant que peuple autochtone et minorité ethnique en Norvège. L’un des objectifs importants est que tout citoyen norvégien de langue same ait un niveau élevé de confiance dans les tribunaux qui traitent et tranchent les litiges de façon adéquate. C'est de cette façon que les tribunaux contribueront collectivement à garantir que la langue, la culture et la vie sociale sames soient sécurisées et développées dans le cadre de l’État de droit norvégien.

5 Les services administratifs en same

Les services administratifs offerts en langue same ne couvrent pas toute la Norvège, mais uniquement ce qu'on appelle la «zone administrative pour la langue same» (en norvégien: "forvaltningsområdet for samiske språk"). L'article 3-1 de la Loi same définit ainsi la «zone administrative pour les langues sames», qui se distinguent en trois catégories différentes: 

Article 3-1 (au 1er janvier 2024)

Définitions

Pour l’application du présent article, on entend par:

a) «zone administrative pour les langues sames» : les municipalités divisées en municipalités de développement linguistique, en municipalités de revitalisation linguistique et en municipalités de stimulation linguistique, et en municipalités de comté, que le roi a déterminées par règlement comme faisant partie de la zone administrative pour les langues sames,

b. «organisme public» : tout organisme de l'État et de la municipalité dont la zone de service comprend entièrement ou partiellement l'une des municipalités de la zone administrative pour les langues sames, ainsi que les autorités de comté que le roi a déterminées par règlement à inclure dans la zone administrative pour les langues sames.

5.1 La zone administrative same

Les règles linguistiques de la Loi same et la réglementation associée ont été conçues pour s'adapter à la situation de la langue same dans les municipalités initialement couvertes par la zone administrative. Il s'agissait de municipalités relativement petites, où l'on une proportion importante de la population parlait same. L'évolution démographique montre que de nombreux Sames ont aujourd'hui quitté les zones d'implantation traditionnelles sames pour s'installer dans des villes plus grandes. Il a semblé important que des dispositions soient prises pour que la langue et la culture sames soient préservées et développées également dans les grandes villes et les villages comptant de nombreux habitants sames. Il a paru également important de renforcer la langue same dans les petites municipalités, au sein des zones traditionnelles sames, où les Sames constituent une minorité, et de veiller à ce que les locuteurs de la langue same dans ces régions aient la possibilité de parler et d'écrire le same.

Lorsque les municipalités demandent à entrer dans la zone administrative des langues sames, elles doivent indiquer dans quelle catégorie elles souhaitent appartenir. Ainsi, les municipalités peuvent largement décider elles-mêmes du niveau de droits linguistiques qu'elles souhaitent appliquer. Il sera également possible de changer de catégorie si la situation linguistique dans la municipalité change de sorte qu'il sera possible de donner à la population plus de droits et d'offres au fil du temps.

Le Règlement du 16 juin sur la zone administrative pour la langue same (2023) énumère toutes les municipalités qui en font partie:

Article unique

La zone administrative pour les langues sames comprend toutes les municipalités de développement linguistique, les municipalités de revitalisation linguistique et les municipalités de stimulation linguistique. Karasjok, Kautokeino, Nesseby et Tana sont des municipalités de développement linguistique. Porsanger, Kåfjord, Lavangen, Tjeldsund, Hattfjelldal, Hamarøy, Røyrvik, Røros et Snåsa sont des municipalités de revitalisation linguistique.

La zone administrative pour les langues sames comprend également la municipalité du comté de Troms, la municipalité du comté de Finnmark, la municipalité du comté de Nordland et la municipalité du comté de Trøndelag.

L'article 3-2 de la Loi same oblige certains organismes publics à traduire les lois et les règlements présentant à un intérêt particulier pour les Sames: 

Article 3-2 (au 1er janvier 2024)

Traduction des règles. Annonces et formulaire

1)
Les lois et les règlements présentant un intérêt particulier en totalité ou en partie pour la population same doivent être traduits en langue same par le ministère responsable de la loi ou du règlement.
Les municipalités et les conseils de comté sont chargés de traduire en langue same les réglementations locales présentant un intérêt particulier en totalité ou en partie pour la population same.

2)
Les avis des organismes publics qui s'adressent particulièrement en totalité ou en partie à la population de la zone administrative pour les langues sames doivent être faits en same et en norvégien. La responsabilité incombe à l'organisme qui publie l'avis.

3) Les formulaires papier et les formulaires numériques à employer auprès d'un organisme public dans la zone administrative pour les langues sames
doivent être disponibles en same et en norvégien. Toutefois, cela ne s'applique pas aux organismes nationaux. La responsabilité incombe à l'organisme qui prépare le formulaire.

4) L'organisme public doit évaluer dans quelle(s) langue(s) il doit être traduit. Lors de l’évaluation, il convient de prendre en compte à qui s’adresse l’information et sur quoi elle porte.

L'article 3-3 de la Loi same énonce ainsi le droit de réponse en same soit à l'écrit soit à l'oral, en fonction de la catégorie de classification:

Article 3-3 (au 1er janvier 2024)

Droit de réponse en same

1) Quiconque présente une demande écrite en same auprès d'une municipalité de développement linguistique, d'une municipalité de revitalisation linguistique ou d'une municipalité de comté située dans la zone administrative des langues sames a le droit à une réponse écrite en same. Il en va de même pour les demandes écrites adressées à un organisme public qui compte dans sa zone de desserte une municipalité de développement linguistique ou une municipalité de revitalisation linguistique.

2) Quiconque s'adresse oralement en same à une
municipalité de développement linguistique a droit en même temps à une réponse orale en same. Il en va de même pour les demandes orales en same adressées à une clinique dentaire d'une municipalité de comté ou à un organisme gouvernemental local qui dispose d'une zone de service dans une municipalité de développement linguistique. Ce droit ne s'applique toutefois pas aux enquêtes orales auprès des fonctionnaires qui exercent des tâches en dehors du bureau de l'organisme.

3) Quiconque s'adresse oralement en same dans
une municipalité de revitalisation linguistique a droit à une réponse orale en same. Il en va de même pour les demandes orales en same adressées à une clinique dentaire d'une municipalité de comté ou à un organisme gouvernemental local qui dispose d'une zone de service dans une municipalité de revitalisation linguistique. Ce droit ne s'applique toutefois pas aux enquêtes orales auprès des fonctionnaires qui exercent des tâches en dehors du bureau de l'organisme.

4) Quiconque a droit à une réponse en same dans la ou les langues sames en usage et qui a un lien géographique traditionnel avec la zone de service d'un organisme public.

5) Le droit de réponse en same ne s'applique pas aux organismes publics à l'échelle nationale, sauf disposition contraire des règlements édictés par le roi.

- Les municipalités de développement linguistique ("språkutviklingskommuner")

Cette catégorie est celle où les municipalités ont les obligations les plus importantes. Ce sont les suivantes: Kautokeino, Karasjok, Nesseby et Tana. Dans les municipalités de développement linguistique, le same doit être sur un pied d'égalité avec le norvégien au sein de l'administration municipale et du conseil municipal, ce qui est nouveau, car auparavant, c'était facultatif. Les droits sont les suivants:

- le droit à une réponse orale simultanée en same;
- le droit à une réponse écrite en same;
- le droit d'employer le same (à la fois écrit et parlé) devant les tribunaux et devant la commission des litiges en matière de loyers;
- le droit d’employer le same oralement devant la police et les autorités judiciaires;
- le droit d'employer le same dans les établissements pénitentiaires;
- le droit d'être servi en same dans les établissements publics de santé et de soins, ainsi que dans les institutions de protection de l'enfance;
- le droit aux services en langue same de la part des congrégations de l'Église de Norvège.

- Les municipalités de revitalisation linguistique ("språkvitaliseringskommuner")

Dans cette catégorie, il n'y a pas de droit à une réponse orale simultanée en same, outre le fait qu'il n'y a aucune obligation d'usage interne du same dans les municipalités suivantes: Porsanger, Kåfjord, Lavangen, Tjeldsund, Hattfjelldal, Hamarøy, Røyrvik, Røros et Snåsa. Les droits linguistiques se présentent ainsi:

- le droit à une réponse orale en same, mais pas simultanée si cela n'est pas possible;
- le droit à une réponse écrite en same;
- le droit d'employer le same (à la fois écrit et parlé) devant les tribunaux et devant la commission des litiges en matière de loyers;
- le droit d’employer le same oralement devant la police et les autorités judiciaires;
- le droit d'employer le same dans les établissements pénitentiaires;
- le droit d'être servi en same dans les établissements publics de santé et de soins, ainsi que dans les organismes de protection de l'enfance;
- le droit aux services en langue same de la part des congrégations de l'Église de Norvège.

La municipalité peut choisir si elle souhaite que les Sames soient sur un pied d'égalité avec les Norvégiens au sein de l'administration municipale et du conseil municipal. La municipalité doit discuter des défis des langues sames dans la stratégie de planification de la municipalité qui doit fixer des objectifs généraux pour la gestion de la langue same.

- Les municipalités de stimulation linguistique ("språkstimuleringskommuner")

Les municipalités de stimulation linguistique doivent fournir des services linguistiques et culturels en same aux enfants, aux jeunes et aux personnes âgées. Les droits se résument ainsi:

- le droit d'employer le same (à la fois écrit et parlé) devant les tribunaux et devant la commission des litiges en matière de loyers;
- le droit d’employer le same oralement devant la police et les autorités judiciaires;
- le droit d'employer le same dans les établissements pénitentiaires;

La municipalité doit discuter des défis des langues sames dans la stratégie de planification de la municipalité qui doit fixer des objectifs généraux pour la gestion de la langue same dans la municipalité.

- Les municipalités de comté ("fylkeskommuner")

La zone administrative pour les langues sames comprend également la municipalité du comté de Troms, la municipalité du comté de Finnmark, la municipalité du comté de Nordland et la municipalité du comté de Trøndelag. Les tâches les plus importantes de la municipalité de comté sont l'enseignement secondaire, la santé dentaire publique, les activités sportives et les activités de plein air, la gestion du patrimoine culturel et le fonctionnement d'un certain nombre d'institutions culturelles, ainsi que les tâches techniques liées aux routes, à la production d'électricité, au développement des affaires et, surtout, à la gestion de l'environnement.

De plus, d'après la Loi same, les employés d'un organisme public local ou régional dans la zone administrative ont droit à un congé payé pour acquérir des connaissances en same lorsque l'organisme en a besoin:

Article 3-7

Droit au congé-éducation

Les employés des organismes publics ont droit à un congé payé pour acquérir des connaissances en same si l'organisme en a besoin. Ce droit peut être subordonné à l'engagement du salarié à travailler pour l'organisme pendant une certaine période après sa formation.

- Les plaintes

Les efforts et les problèmes liés à la survie des langues sames et d'autres langues minoritaires comme le kvène, le skogfinn ou le «finnois des forêts» semblent un thème commun mentionné par plusieurs représentants des minorités. Bien que le droit de préserver leurs langues soit garanti par la loi et le droit international adopté par la Norvège, de nombreux représentants ont exprimé leur inquiétude quant au fait que la mise en œuvre pratique en réalités est souvent très en retard par rapport à la loi. Une préoccupation semble unir presque tous les représentants des minorités: l'ignorance et parfois l'arrogance des administrateurs, des fonctionnaires et des bureaucrates norvégiens, qui créent constamment des obstacles pour restreindre les doits linguistiques des Sames, des Kvènes, ses Skogfinn et ses Norvégiens finnophones, qu'il s'agisse de créer des musées, de veiller à ce que les enfants reçoivent un enseignement dans leur langue maternelle ou de poursuivre l'élevage traditionnel de rennes. Ce genre de plaintes concerne aussi bien l'administration de l'État que les municipalités locales dans la zone administrative pour les Sames.

5.2 Les toponymes

Le same a un statut officiel et est employé comme langue officielle en plus du norvégien dans plusieurs municipalités du nord de la Norvège; il a également le statut de «langue autochtone. Les noms géographiques sames sont étendus sur une vaste zone, aussi loin au sud que le comté d'Innlandet jusqu'au comté de Troms-et-Finnmark au nord. En raison de la politique de norvégianisation qui a eu lieu aux XIXe et XXe siècles, le nombre de locuteurs sames en Norvège a considérablement diminué. Pourtant, il existe aujourd'hui de nombreuses traces qui prouvent qu'il y a eu et qu'il y a toujours une présence same dans ces régions, tels les noms de lieux.

Étant donné que la langue same est une langue finno-ougrienne de la famille ouralienne et que le norvégien est une langue germanique appartenant à la famille des langues indo-européennes, les noms de lieux en same sont linguistiquement différents des toponymes norvégiens. Dans les cas où les toponymes sames et norvégiens «se ressemblent», par exemple en termes d'orthographe, il arrive souvent qu'une adaptation linguistique de l'une des formes de l'appellation ait été réalisée (le plus souvent une adaptation de la forme du nom same).

La Loi sur les toponymes (1991-2021) a pour but de protéger les noms géographiques en tant que patrimoine culturel, leur donner forme écrite qui soit pratique et utile, et de promouvoir la connaissance et l'emploi actif des noms, y compris toponymes sames et kvènes: 

Article 1er

Objet et champ d'application

1) Le but de la présente loi est de protéger les noms géographiques en tant que patrimoine culturel, leur donner forme écrite qui soit pratique et utile, et de promouvoir la connaissance et l'emploi actif des noms.

2) La loi doit garantir la prise en compte des toponymes sames et kvènes, en conformité avec la législation nationale et les conventions et traités internationaux.

L'article 4 de la loi prescrit l'usage traditionnel local de l'appellation, que ce soit pour le same, le kvène ou le norvégien:

Article 4

Règles sur l'orthographe

1) Sauf disposition contraire prévue par la présente loi, le choix de l'orthographe des toponymes repose sur la prononciation traditionnelle locale de l'appellation. L'orthographe doit respecter les principes actuels de l'orthographe pour le norvégien et le same. Pour les toponymes kvènes, l'orthographe doit respecter les principes actuels de l'orthographe en finnois. Les toponymes finnois dans l'Est norvégien peuvent être ajustés aux principes orthographiques du norvégien.

2) Si l'orthographe est employée depuis longtemps et qu'elle est bien connue et intégrée, il est possible de céder la place à l'orthographe et au principe orthographique dominants.

L'article 11 de la Loi sur les toponymes oblige l'emploi des toponymes sames et kvènes employés par les résidents qui y vivent de manière permanente :

Article 11

Emploi des toponymes

1) Lorsque l'orthographe d'un toponyme a été décidée conformément à la présente loi et inscrite au Registre des toponymes, elle doit être employée par les personnes mentionnées au paragraphe 3 de l'article 1er, de leur propre initiative.

2)
Les toponymes sames et kvènes employés par les résidents qui y vivent de manière permanente ou y ont un lien commercial doivent normalement être employés par les autorités publiques sur les cartes, les panneaux et dans le registre, avec une appellation norvégienne.

3) Les organismes publics et autres mentionnés au paragraphe 3 de l'article 1 doivent continuer à employer les formes écrites employées par le public lors de l'entrée en vigueur de la loi, jusqu'à ce qu'une décision de modification soit prise, le cas échéant.

L'article 4 du Règlement sur les toponymes (2017-2022) explicite les règles concernant les toponymes sames:

Article 4

Informations sur les toponymes sames

1) Pour les toponymes sames, la prononciation héritée localement doit être prise comme point de départ. L'orthographe doit respecter l'orthographe actuelle en same du Nord, en same de Lule, en same de Skolt ou en same du Sud.

2) Les textes juridiques en same du Nord doivent être employés dans le Finnmark, le Troms et le Nordland jusqu'à la municipalité de Tysfjord. Les toponymes en same de Skolt de la municipalité de Sør-Varanger peuvent toujours respecter l'orthographe du same de Skolt. L'orthographe en same de Lule doit être employée à partir de la municipalité de Tysfjord et vers le sud jusqu'à la municipalité de Meløy. À partir de la municipalité de Rana et vers le sud, l'orthographe en same du Sud doit être employée. Dans les zones frontalières des différentes zones linguistiques, on peut employer l’orthographe qui correspond le mieux à la prononciation héritée localement. Des formes d'assemblage régionales peuvent également être choisies. Les formes dialectales locales peuvent être adoptées lorsque des raisons particulières le justifient.

3) Si plusieurs noms sames ont été utilisés pour le même lieu nommé, le nom le plus ancien sera employé par les autorités publiques. Dans des cas particuliers, des exceptions à cette règle peuvent être prévues.

4) En tenant compte de différentes considérations, l'accent doit être mis sur l'orthographe unique des toponymes dans les différentes régions linguistiques sames.

Pour les appellations kvènes, la prononciation héritée localement doit être prise comme point de départ. Des formes régionales d'assemblage peuvent encore être choisies. Les formes dialectales locales peuvent être choisies lorsque des raisons particulières le justifient. L'article 7 du règlement prévoit l'agencement des appellations multilingues sur les panneaux ou les cartes: 

Article 7

Emploi des appellations multilingues

1) Si un lieu porte une appellation same ou suédoise en plus d'une forme en norvégien et que les formes d'appellation sont employées par des personnes qui vivent de manière permanente dans la localité ou ont un lien économique avec celle-ci, les deux ou toutes les appellations doivent être employées.

2) Dans un texte cohérent, le public doit employer le nom de la langue dans laquelle le texte est rédigé.

3) Sur des panneaux ou des cartes, etc., lorsque plus d'une appellation est employée, la municipalité doit déterminer l'ordre des appellations. Une fois l'ordre des appellations établi, il faut tenir compte de l'emploi de la langue du lieu.
Dans la zone administrative de langue same, l'ordre est successivement le same, le norvégien et le suédois.

4) Lorsque, pour des raisons pratiques, il est particulièrement difficile d'employer plusieurs appellations, lors du choix entre le norvégien, le same et le suédois, il convient de mettre l'accent sur
celle qui a la plus longue tradition et est la mieux connue localement. Il n'est pas nécessaire d'inclure l'appellation norvégienne s'il s'agit d'une forme phonétiquement adaptée d'une appellation same ou kvène, si elle en diffère peu et si elle n'est pas couramment employée dans la forme norvégienne.

L'Agence nationale des cartes sur les noms de lieux sames en Norvège, où les noms de lieux sames sont standardisés dans trois langues sames différentes : le same du Sud, le same de Lule et le same du Nord. Les noms de lieux sames sont bien sûr répandus dans toute la zone d’implantation same. La documentation des noms de lieux sames et l'enregistrement des appellations sont inscrits dans le registre des noms de lieux norvégien, voire l'autorité cartographique.

La carte ci-contre provient de la Statens kartverk, l'Agence nationale des cartes; elle illustre la répartition des toponymes dans trois langues sames différentes: le same du Nord (en rouge), le same de Lule (en vert) et le same du Sud (en bleu). La langue same du Nord a la plus grande répartition géographique et le plus grand nombre de locuteurs de la langue. C'est également dans cette zone que l'on trouve le plus grand nombre de toponymes sames enregistrés, traités et adoptés par le Sentralt stedsnavnregister (SSR), le Registre central des noms de lieux. Les appellations en same du Nord apparaissent à la fois dans les comtés de Nordland et de Troms-et-Finnmark, la plus grande proportion étant clairement située dans le Finnmark. Dans l'ensemble de la zone où les toponymes en same du Nord sont enregistrés, ceux-ci représentent environ 12% du nombre total des orthographes approuvées par le Registre central des noms de lieux. En comparaison, les toponymes en same de Lule représentent environ 1,5% et les toponymes en same du Sud, moins de 0,1% du nombre total des orthographes approuvée dans les zones concernées.

Dans certaines régions, il existe respectivement des appellations en same du Nord et en kvène, d'autres en same du Nord et en same de Lule ou en same de Lule et en same du Sud respectivement.

La loi norvégienne sur les toponymes décrète que les appellations dans les langues sames doivent être employées sur les cartes, les panneaux indicateurs et tout autre document officiel, conformément à l'usage local traditionnel. Lorsqu'une entité a une appellation en same ainsi qu'en norvégien et/ou en kvène, toutes les appellations pertinentes doivent être employées sur les cartes, les panneaux routiers, etc. Depuis 1978, de nouvelles orthographes des toponymes sames ont été introduites. La Norvège, la Suède et la Finlande ont convenu d'une politique commune à cet égard.

5.3 L'affichage commercial

L’affichage commercial n’est pas réglementé, mais les commerçants sames faisant affaire dans les localités à majorité same peuvent afficher en same, sinon à la fois en same et en norvégien, mais en pratique c'est cette dernière langue qui domine. En ce qui a trait aux panneaux indicateurs des municipalités, l'affichage est réglementé, mais de curieuse façon, selon le cas.

Le modèle (1) présente l'appellation d'une commune en norvégien (Nordreisa kommune), en same du Nord (Ráissa suohkan) et en kvène (Raisin komuuni).

En (2), on trouve le nom en norvégien (Guovdageaidnu) et en same (Kautokeino).

En (3), c'est un panneau indiquant la distance pour les municipalités norvégiennes de Tana bru (en same: Deanušaldi) et de Levajok (en same: Leavvajohka).

Le panneau (4) est bilingue: en same (Kárášjohka) et en norvégien (Karasjok), mais la distance (5) est uniquement en norvégien (Karasjok).

En (6), on trouve trois appellations unilingues norvégiennes de Snekkernes (Snihkkárnjárga, en same), de Karleboth (Stuorravuonna, en same) et de Starbbursnes (Rávttošnjárga, en same).

En (7), le musée Skoltesamisk est désigné en norvégien (Skoltesamisk museum), en same  (Ä'vv saa'mi mu'zei) et en kvène (Kolttasaamelainen museo).

En (8), cette municipalité est présentée en norvégien (Karigasniemi) et en same du Nord (Gáregasnjárga).

En (9), un panneau routier affichant les noms en norvégien (Vadsø), en same (Čáhcesuolu) et en kvène (Vesisaari) dans l'une des plus grandes villes du Finnmark.

En (10), un panneau en same du Nord (Romssa suohkan) et en norvégien (Tromsø kommune).

En (11), on trouve une exception désignant une rue du centre d'Oslo: Kirkegata en norvégien avec l'alphabet latin et l'alphabet cyrillique (Киркегата).

Finalement, la commune de Tysfjord (12) est indiquée en same (Divtasvuona suohkan) et en norvégien (Tysfjord kommune).

5.4 L’éducation same

Le système d'éducation norvégien comprend tous les niveaux, depuis la maternelle jusqu’à l’université et aux écoles supérieures. Le cycle scolaire obligatoire dure dix ans et s’adresse à tous. La plupart des enfants sont scolarisés dans une école publique. L’école secondaire supérieure (ou lycée) n’est pas obligatoire, mais elle est fréquentée par la plupart des jeunes après le cycle scolaire obligatoire. Les écoles publiques sont gratuites en Norvège, y compris les écoles secondaires supérieures et les établissements d’enseignement supérieur (universités et écoles supérieures).

Dans les municipalités de la zone administrative same, la Loi same, la Loi sur l'éducation et la Loi sur la maternelle imposent des exigences particulières. Les représentants des communautés sames sont convaincus qu'il est impossible d’enseigner la culture et les langues sames par l’intermédiaire de la langue et du système d’éducation norvégiens. Il faut recommencer à enseigner la culture et les langues sames. En vertu de la Loi same, les citoyens sames ont le droit de recevoir leur instruction en same:

Article 3-8 (au 1er janvier 2024)

Droit à l’éducation en same

1) Toute personne a droit à l’éducation en same. Le roi peut fixer d’autres modalités d’application de la présente disposition.

2) Pour l’enseignement de la langue same et en same, les dispositions de la Loi sur l’enseignement primaire et secondaire du premier cycle et à la formation (Loi sur l’éducation) s’appliquent.

- La maternelle

De nombreux enfants sames sont confrontés à un système conçu pour les enfants norvégiens et à une perspective norvégienne. Certains fréquentent des jardins d’enfants sames dans les grandes villes et en dehors des principales zones administratives sames. D’autres grandissent dans un environnement fortement same. Ce sont les municipalités qui constituent l'autorité locale des écoles maternelles. L'article 10 de la Loi sur la maternelle (2005-2022) impose aux municipalités de la zone administrative same d'offrir des écoles maternelles pour les enfants sames :
 

Article 10

Responsabilité des autorités à la maternelle

1)
La municipalité est l’autorité locale de la maternelle. Elle fournit des conseils et veille à ce que les écoles maternelles soient exploitées conformément aux dispositions de la présente loi et des règlements, à l’exception des dispositions du chapitre V et des règlements.

2) La municipalité est tenue
d’offrir des places dans les écoles maternelles aux enfants n’ayant pas atteint l’âge de la scolarité obligatoire qui résident dans la municipalité. Les modes de développement et les modes de fonctionnement doivent être adaptés aux conditions et aux besoins locaux.

3) La municipalité est chargée de veiller à ce que
les services des écoles maternelles pour les enfants sames dans les districts sames soient fondés sur la langue et la culture sames. Dans d’autres municipalités, il faut créer les conditions nécessaires pour que les enfants sames puissent sauvegarder et développer leur langue et leur culture.

En Norvège, il existe près d'une soixantaine d'écoles maternelles avec une offre en langue same, dont la moitié environ sont des maternelles purement sames ou disposent d'une division administrative pour les enfants sames. Ces statistiques sont tirées du rapport "Samiske talll tell", n° 13, de 2019. Au total, 850 enfants bénéficient d'une offre en same à l'école maternelle et la majorité d'entre eux, soit 740 enfants, fréquentent des maternelles entièrement sames. Les autres enfants sont dispersés dans toute la Norvège, mais les enfants sames ont droit à une formation linguistique gratuite dans les maternelles là où ils vivent. Ce n'est pas toujours possible, car le pays souffre d'une pénurie importante d'enseignants qualifiée en same.

Selon l'article 27 de la Loi sur la maternelle, pour être employés de manière permanente ou temporaire dans une école maternelle, les enseignants dont la première langue est n'est pas le norvégien ou le same doivent avoir réussi un examen de norvégien et atteindre le niveau A2 à l'examen de présentation écrite et le niveau B1 à l'examen de compréhension écrite, de compréhension orale et de communication orale. Les niveaux A2 et B1 doivent correspondre aux niveaux décrits dans le Cadre européen commun pour les langues. En vertu de l'article 28, afin d'être employées de manière permanente ou temporaire en tant que directeurs ou responsables pédagogiques, les personnes possédant des qualifications professionnelles étrangères doivent justifier de leurs compétences linguistiques norvégiennes.

Cependant, le manque de personnel parlant le same constitue le plus grand défi pour le renforcement et le développement de la langue et de l’identité sames dans les jardins d’enfants et les écoles. Trop peu d’enseignants en langue same sont formés pour l’enseignement préscolaire et l’éducation de base, et il existe une forte demande pour ceux qui bénéficient d’une telle éducation. Le Parlement same considère que cette situation est critique. Afin de remédier à ce problème, le Parlement same estime que des mesures doivent être prises pour inciter davantage de locuteurs sames à choisir une formation d'enseignant de maternelle.

- L'enseignement primaire et secondaire

 Les Sames en âge d'aller à l'école primaire ont droit à une éducation en same, quel que soit l'endroit où ils vivent dans le pays. Tous les élèves du primaire habitant dans l'une des municipalités administratives de langue same ont le droit à un enseignement du same et en same. Ils ont également le droit de suivre une formation dans d’autres matières en same. L'article 6-2 de la Loi sur l'enseignement primaire et secondaire (Loi sur l'éducation) (1998-2022) précise ainsi les modalités de l'éducation en same:

Article 6-2

L'éducation des Sames à l'école primaire

1) Dans les districts sames, toute personne en âge d’aller à l’école primaire a droit à une éducation du same et en same.

2) En dehors des districts sames,
au moins dix élèves d'une municipalité qui souhaitent recevoir une formation du same et en same ont droit à une telle éducation à la condition qu'il reste au moins six élèves dans le groupe.

3) La municipalité peut décider d'ajouter un enseignement en same à une ou plusieurs écoles de la municipalité.

4) La municipalité peut émettre des règlements selon lesquels toute personne en âge d'aller à l'école primaire dans les districts sames doit recevoir une éducation en same.

5) En dehors des districts sames,
les Sames en âge d'aller à l'école primaire ont droit à une éducation en same. Le Ministère peut édicter des réglementations sur des formes alternatives de formation lorsque celle-ci ne peut pas être offerte par le personnel enseignant de l'école.

6) Les élèves décident eux-mêmes s'ils souhaitent poursuivre une éducation en same et du same à partir de la 8e année incluse après la première, la deuxième et la cinquième session.

Tous les élèves situés en dehors des municipalités administratives sames ont également droit à l'éducation en same. Lorsqu'au moins 10 élèves d'une municipalité souhaitent recevoir leur instruction en same, ils doivent recevoir l'instruction dans cette langue. À partir de la 8e année, les élèves peuvent décider eux-mêmes s'ils souhaitent poursuivre leur formation en same.

Selon la Direction norvégienne de l'éducation, plus de 830 élèves de l'école primaire reçoivent l'intégralité de l'enseignement en same au cours d'une année scolaire; près de 900 élèves ont le same du Nord comme première langue et 1276 élèves ont le same du Nord comme deuxième langue, alors que 26 élèves ont le same du Sud comme première langue et 85 comme deuxième langue; finalement, 34 élèves ont le same de Lule comme première langue et 81 comme deuxième langue.

L'article 6-3 de la Loi sur l'éducation traite également de l'enseignement secondaire en same:
 

Article 6-3

Enseignement secondaire same

1) Les Sames de l’enseignement secondaire ont droit à l’éducation en same. Le Ministère peut édicter des réglementations sur des formes alternatives d'éducation lorsque celle-ci ne peut pas être offerte par le personnel enseignant de l'école.

2) Le Ministère peut édicter des règlements selon lesquels certaines écoles doivent proposer une éducation en same ou dans des matières sames distinctes de l'enseignement secondaire dans le cadre de certains cours ou pour certains groupes. La municipalité de comté peut également proposer une telle éducation.

C'est la municipalité qui peut décider quelles seront les écoles pouvant offrir un enseignement en same. Les responsables d'une école sont chargés de veiller à ce que ceux qui ont droit à une éducation en same la reçoivent. Si l’école ne dispose pas elle-même d’enseignants sames, elle doit proposer un enseignement alternatif, par exemple l’enseignement à distance. Les élèves choisissent dans lesquelles des trois langues sames (same du Nord, same de Lule ou same du Sud) ils souhaitent recevoir leur instruction.

Les élèves dont le same est la première ou la deuxième langue sont exemptés de la formation et de l'évaluation dans la langue secondaire norvégienne. Ils sont également exemptés des exigences d' immersion linguistique et de formation en langues étrangères.

L'article 9-4 de la Loi sur l'éducation oblige les écoles à offrir en same et en norvégien les supports pédagogiques numériques correspondants utilisés à l'école doivent être conformes à l'orthographe officielle:

Article 9-4

Manuels scolaires et autres supports pédagogiques

2) Les manuels scolaires en norvégien et en same et les supports pédagogiques numériques correspondants utilisés à l'école doivent être conformes à l'orthographe officielle. Par manuels scolaires, on entend ici tous les supports pédagogiques imprimés que les élèves utilisent régulièrement pour atteindre les parties essentielles des objectifs de compétence dans une matière.

Aujourd’hui, il n’existe pas de matériel pédagogique same dans toutes les matières et à tous les niveaux scolaires. La portée des supports pédagogiques numériques en same est également très limitée et leur préparation est coûteuse. Le manque de matériel pédagogique en same peut donner aux élèves l’impression que la langue, la culture et la vie sociale sames ont un statut inférieur à celui du norvégien. Cette pénurie menace également le droit des enfants sames à une offre pédagogique de qualité. La même Loi sur l'éducation précise le contenu de l'enseignement pour les Sames dont des instructions sur la communauté du peuple same et sur la langue, la culture et la vie sociale de cette communauté en relation avec les différents domaines:
 

Article 6-4

Le contenu de l'éducation

1) Les règlements sur les programmes d'études conformément aux art. 2-3 et 3-4 doivent fournir des instructions pour l'éducation sur la communauté du peuple same et sur la langue, la culture et la vie sociale de cette communauté en relation avec les différents domaines. Dans le cadre fixé par le Ministère, le Parlement same édicte des règlements sur le contenu de cette formation.

2) Le Parlement same édicte des règlements sur les programmes d'éducation en langue same à l'école primaire et dans l'enseignement secondaire, ainsi que pour les programmes de matières spécifiques sames dans l'enseignement secondaire. Les règlements doivent respecter la portée et les limites des ressources établies par le Ministère.

3) Le Ministère édicte des règlements sur d'autres programmes particuliers pour l'enseignement primaire dans les districts sames et pour les élèves qui reçoivent par ailleurs un enseignement same à l'école primaire et secondaire. Le Parlement same doit rédiger ces règlements en consultation avec le Ministère.

Les élèves sames du deuxième cycle de l’enseignement secondaire ont droit à un enseignement en langue same, quel que soit l’endroit où ils vivent dans le pays. Cela s'applique même si l'élève n'a pas appris le same à l'école primaire. Si l’école ne dispose pas de personnel adéquat, elle doit proposer un enseignement alternatif, comme l’enseignement à distance. Les élèves qui souhaitent poursuivre une formation en same doivent se présenter à leur école. Dans une année scolaire normale, plus de 200 élèves du secondaire supérieur ont le same comme langue maternelle. Parmi eux, 200 ont le same du Nord et 5 ont le same du Sud. Un peu moins de 300 élèves du secondaire supérieur ont le same comme deuxième langue, dont 14 le same de Lule, 248 le same du Nord et 11 le same du Sud. Toutefois, le Parlement same estime que la législation actuelle signifie que les enfants sames situés en dehors de la zone administrative de langue same ne bénéficient pas d'une offre de maternelle basée sur la langue et la culture sames de leurs enfants.

Les parents peuvent demander que leurs enfants reçoivent une éducation bilingue (same-bokmål), mais cet enseignement n’est offert qu’en bokmål. Pour ce faire, il faut qu’au moins trois enfants (leurs parents ou tuteurs) parlant le same en fassent la demande. Là où il n'y a pas d'enseignants disponibles en langue same, les élèves peuvent recevoir un enseignement à distance. Il convient de préciser également que tous les élèves sames doivent apprendre le norvégien comme langue seconde et l'anglais. L'enseignement dans d'autres langues étrangères est également possible.

L’école reste un endroit privilégié pour la mise en œuvre des politiques linguistiques en faveur des Sames. Un grand nombre de facteurs indiquent que les directives prescrites dans les conventions internationales ne sont pas toujours appliquées dans les écoles norvégiennes de langue same. Les manuels scolaires, les programmes d’études et les méthodes pédagogiques ne garantissent en rien un enseignement égalitaire pour les élèves sames. Les statistiques révèlent qu’un enfant sur trois abandonne l’enseignement same dans les écoles, si bien que le norvégien devient la principale langue. Or, l’éducation same doit être un droit à part entière et faire partie intégrante de l’éducation de chaque enfant same, quel que soit le nombre d’autres enfants de la municipalité qui prétendent à la même éducation.

- L'enseignement supérieur

La recherche et l’enseignement supérieur sont essentiels au développement et à l’acquisition d’une meilleure connaissance de la langue, de la culture et de la vie sociale des Sames. C'est pourquoi l'enseignement supérieur same est aujourd'hui offert dans certaines matières importantes et porteuses de culture telles que le "duodji", l'élevage du renne, le journalisme, la langue, la littérature et la formation des enseignants.

Trois établissements d'enseignement supérieur proposent actuellement un enseignement en same. Le Sami College/Sámi allaskuvla et l'Université de Tromsø ainsi que L'Université arctique de Norvège (UiT) offrent un enseignement en same du Nord, tandis que l'Université du Nord propose un enseignement en same de Lule et en same du Sud. L'UiT a la responsabilité nationale de la recherche, de l'éducation et de la diffusion liées aux peuples autochtones et propose une formation de maîtrise en études autochtones ainsi qu'en gestion et entrepreneuriat dans les régions du Nord et les zones autochtones. Cette dernière a pour objectif de contribuer au développement des affaires. L'Université same est la seule institution où la recherche et l'enseignement supérieur se déroulent en same. Ces trois institutions collaborent par le biais de l'Unité stratégique thématique du Conseil des universités et collèges pour l'enseignement supérieur et la recherche same (UHR Sami).

Cela dit, on compte peu d’étudiants sames. Les données du Centre norvégien de données de recherche montrent qu'au cours de la période 2016-2018 de nombreux étudiants suivent des cours de façon individuelle dans les matières sames, mais peu d'entre eux obtiennent un diplôme en same. En 2018, il y avait un total de 30 étudiants poursuivant diverses études en same du Nord, et un seul étudiant en baccalauréat en same du Nord comme langue étrangère. En outre, à l'UiT, on comptait une trentaine d'étudiants aux études en same du Nord.

6 Les médias

En Norvège, la communauté same dispose d’une station de radio diffusant seulement en same. En réalité, les Sames de Norvège bénéficient d’émissions radiophoniques dans leur langue depuis 1946. La Norsk Rikskringkasting (NRK), la Société norvégienne de radiotélévision, diffuse par le canal Radio-Same des émissions en same. Radio-Same diffuse en moyenne 1360 heures d’émission en cette langue. La NRK diffuse en moyenne une trentaine d'heures d'émissions télévisées en same.

L'article 2-19 de la Loi sur la radiodiffusion (1992-2020) ne traitre que des personnes handicapées:

Articles 2-19

Facilités pour les personnes handicapées

1) La NRK facilite les programmes de radiodiffusion et de commande audiovisuelle destinés aux personnes handicapées par le sous-titrage, l’interprétation en langue des signes, la description sonore, le texte audio ou d’autres techniques.

2) Les chaînes nationales de télévision commerciale représentant plus de 5% du total des téléspectateurs doivent faciliter les programmes destinés aux personnes handicapées par le sous-titrage, l’interprétation en langue des signes, la description sonore, le texte audio ou d’autres techniques.

3) Le roi peut édicter des règlements sur les adaptations pour les personnes handicapées dans les émissions de la NRK et dans les chaînes de télévision commerciales nationales.

Des journaux publient des articles en same depuis 1870. Le journal Sami Aigi, fondé à Karasjok, a publié son premier numéro en 1979. Le gouvernement a prévu un financement public pour les organismes de presse en same. Les grands quotidiens nationaux sont publiés en bokmål: Aftenposten, Dagbladet et VG. Quelques quotidiens régionaux, par exemple Bergens Tidende et Stavanger Aftenblad, ainsi que plusieurs journaux locaux utilisent les deux langues norvégiennes. Conformément aux lois et réglementations en vigueur, des subventions sont accordées aux journaux qui s'adressent à la population same de Norvège. Leur montant dépend du nombre annuel de numéros et de pages publiés.

7 Les droits linguistiques des autres minorités

En plus des Sames qui constituent la minorité nationale la plus importante, il faut mentionner aussi les Kvènes, les Skogfinns, les Juifs et les Roms/Tsiganes. Les paragraphes qui suivent ne concernent que les Kvènes, les Skogfinns et parfois les Roms/Tsiganes

7.1 La question des tribunaux

Il n’existe pas de réglementation particulière pour les minorités nationales de la Norvège, notamment pour le finnois et le romani/romanès. Selon la Loi sur la procédure pénale (1981-2023), les accusés sont informés de la nature des accusations qui pèsent contre eux:

Article 304

3) Si l'accusé ne comprend pas la langue norvégienne ou s'il est malentendant, les allégations formulées par le procureur et la défense doivent au moins être portées à la connaissance de l'accusé.

Cette disposition doit être interprétée dans le sens que ces informations doivent être données «dans une langue comprise par les accusés». De plus, l'article 135 de la Loi sur les tribunaux (1927-2022) énonce que, si un justiciable qui ne connaît pas le norvégien doit participer au débat, il est fait appel à un interprète désigné ou approuvé par le tribunal, alors que le procès-verbal doit se faire en norvégien:

Article 135

1) Si un justiciable qui ne connaît pas le norvégien doit participer au débat, il est fait appel à un interprète désigné ou approuvé par le tribunal. Le procès-verbal se fait en norvégien. Lorsque l’importance de la cause l’exige, le tribunal peut ordonner que le procès-verbal soit également effectué dans une langue étrangère, soit dans le procès-verbal du tribunal, soit séparément en annexe, et qu’il soit soumis pour adoption.

2) Un interprète n'est pas nécessaire lorsque le tribunal et les témoins ainsi que les parties connaissent la langue étrangère. Dans les matières autres que pénales, il en va de même lorsque les membres du tribunal connaissent la langue et que les parties renoncent à faire appel à un interprète.

3) Lors d’une enquête pénale, un interprète n’est pas nécessaire lorsque le juge connaît lui-même la langue étrangère.

4) Si des témoins qui ne parlent pas le norvégien comparaissent devant le tribunal, la procédure judiciaire et les ajouts au procès verbal doivent, dans la mesure du possible, être introduits pour eux au moyen d'un interprète.

Autrement dit, la législation norvégienne ne prévoit que les services de traduction et d'interprétariat pour les membres des minorités nationales. Ceux-ci ont le droit d'utiliser leur langue maternelle, mais ne peuvent exiger d'être compris dans cette même langue par le juge. Il est vrai que ces minorités sont tellement petites qu'il serait plus difficile de former des juges, surtout pour le romani et le romanès; pour le finnois, ce serait déjà plus aisé. Pour résumer, toute personne qui ne connaît pas la langue normale de la cour a le droit de recourir à un interprète.

 7.2 Les services publics

En vertu de la législation norvégienne, tout ce qui n’est pas explicitement interdit est autorisé. Ainsi, il n'existe aucune interdiction portant sur l’usage des langues minoritaires dans quelque contexte que ce soit. Cependant, si les individus parlant une langue minoritaire peuvent légalement employer leur langue maternelle auprès des services gouvernementaux, les fonctionnaires ou les représentants de l'État ne sont pas tenus de comprendre ces langues ou d'offrir des services dans l'une ou l'autre de ces langues (finnois et romani/romanès, en l'occurrence).

Comme il n'existe pas de statistiques sur l'origine ethnique des personnes employées dans les services gouvernementaux ou municipaux, notamment en éducation, en santé et dans les services sociaux, il est difficile de se faire une idée du nombre des représentants des minorités dans ces postes. On sait seulement qu'en éducation le nombre des enseignants appartenant aux minorités est peu nombreux et que dans les secteurs de la santé et des services sociaux les quotas de recrutement d'étudiants des groupes minoritaires ne sont guère appliqués.

7.3 L'éducation minoritaire

Les autorités norvégiennes reconnaissent à chacun le droit d’apprendre sa langue maternelle, fût-elle minoritaire. Mais le gouvernement n’a pas l’obligation d’offrir un enseignement à toutes les personnes appartenant à une minorité linguistique ni à celles appartenant à une minorité immigrante. Selon l'article 2-8 de la Loi sur l'éducation, la municipalité doit offrir un enseignement dans la langue maternelle, puis un enseignement bilingue dans les matières du programme scolaire et ensuite un enseignement spécial en norvégien jusqu’à ce que leur connaissance de cette langue soit suffisante pour leur permettre de suivre le programme normal:

Article 2-8

Formation linguistique spéciale pour les élèves issus des minorités linguistiques

1) Les élèves de l'école primaire dont la langue maternelle est autre que le norvégien et le same ont droit à un enseignement spécial en norvégien jusqu'à ce qu'ils maîtrisent suffisamment le norvégien pour poursuivre l'enseignement normal à l'école. S'il est nécessaire, ces élèves ont également droit à une formation dans leur langue maternelle, à une formation professionnelle bilingue ou aux deux.

2) L'enseignement
en langue maternelle peut être attribué à une école différente de celle que fréquente habituellement l'élève.

3) Lorsque
l'enseignement dans la langue maternelle et l'enseignement bilingue ne peuvent être assurés par son propre personnel enseignant, la municipalité doit, dans la mesure du possible, faciliter d'autres formations adaptées aux besoins des élèves.

4)
La municipalité doit évaluer les compétences des élèves en norvégien avant de décider d'une formation linguistique spéciale. Une telle évaluation doit également être effectuée au cours de l'enseignement pour les élèves qui reçoivent une formation linguistique spéciale, conformément aux instructions, afin de déterminer si les élèves maîtrisent suffisamment le norvégien pour poursuivre l'enseignement normal à l'école.

L'article 2-7 de la Loi sur l'éducation traite de l'apprentissage du kvène et du norvégien-finnois: 

Article 2-7

Apprentissage du kvène ou du finnois pour les élèves d'origine kvène/norvégienne-finlandaise

1) Lorsqu'au moins trois élèves d'origine kvène/norvégienne-finnoise des écoles primaires de Troms et du Finnmark l'exigent, les élèves ont droit à un enseignement en kvène ou en finnois. L'étendue de la formation dans le temps et le contenu de la formation sont déterminés par règlement conformément aux articles 2-2 et 2-3 de la présente loi. À partir de la 8e année, les élèves décident s'ils souhaitent bénéficier d'une telle formation.

2) Le Ministère peut publier des règlements concernant d'autres variantes de cours, conformément au paragraphe 1, lorsque les enseignants de l'école n'ont pas les connaissances pour offrir ces cours.

Les élèves d'origine kvène-finnoise fréquentant les écoles primaires et secondaires du comté de Troms-et-Finnmark ont ​​droit à un enseignement en finnois comme deuxième langue. Les élèves dont la langue maternelle n'est ni le norvégien ni le same ont droit à un enseignement dans leur première langue, à une formation professionnelle bilingue ou aux deux, jusqu'à ce qu'ils maîtrisent suffisamment la langue norvégienne.

Au cours de l'année scolaire 2019/2020, certains élèves ont reçu un enseignement en romani ou en romanès. Le droit à l'éducation en romani/romanès est inscrit dans plusieurs conventions internationales ratifiées par la Norvège, notamment dans la Charte linguistique, mais n'est pas mis en œuvre dans la loi sur l'éducation.

Quant aux élèves malentendants, ils ont droit à un enseignement dans la langue des signes dans l'éducation primaire et secondaire inférieure.

Toutefois, le gouvernement norvégien admet qu'il subsiste certains problèmes dans l'enseignement du finnois, notamment au sujet de la formation des enseignants et l’accès aux manuels. Le nombre de maîtres qualifiés pour enseigner le finnois paraît insuffisant dans la mesure où les autorités se contentent souvent de recruter des enseignants en Finlande. Présentement, les étudiants d’origine kvène qui suivent un programme de formation des maîtres sont exemptés de l’examen obligatoire portant sur les deux formes du norvégien (le bokmål et le nynorsk) pour la matière norvégienne obligatoire du programme général, s’ils choisissent le finnois comme matière facultative. 

Dans l'enseignement supérieur, l’Institut finlandais de l’université de Tromsø offre un programme complet d’études de langue et de culture finnoises allant jusqu’au doctorat. Les étudiants de maîtrise peuvent faire porter leurs recherches sur la langue et la culture kvène. Depuis 1998, l’université propose parfois un cours de kvène sans condition d’accès et réservé en priorité aux étudiants kvène. Cette matière ne serait pas offerte systématiquement parce que l’université manquerait des ressources nécessaires et aussi parce que le nombre d’étudiants inscrits serait trop faible. L'université d’Oslo offre également un programme complet d’études finnoises.

La langue des Roms/Tsiganes n’est pas enseignée dans les écoles norvégiennes. Il semble qu'aucune demande n’ait été exprimée à cet égard. Dans son rapport de 1999 au Storting concernant la politique à l’égard des minorités nationales, le gouvernement avait annoncé qu’il allait étudier la possibilité d’adapter aux besoins éducatifs des Roms/Tsiganes et des Romani/Voyageurs (lesquels se déplacent pendant une partie de l’année scolaire) les technologies de l’information et de la communication en les associant à des réseaux de contacts établis au sein des écoles dans les régions concernées. Mais cela ne s'est pas traduit dans la réalité.

7.4 Les médias

Les petites minorités nationales de Norvège ne disposent que de faibles ressources financières pour disposer de médias dans leur langue. Heureusement, le gouvernement norvégien alloue des fonds pour venir en aide à ces communautés. Le bureau régional de la Norsk Rikskringkasting (NRK), la Société norvégienne de radiotélévision, diffuse à partir de Troms une émission hebdomadaire de quelques minutes en kvène: nouvelles, reportages et programmes musicaux et culturels. Dans son rapport 1999, le Conseil de la radiotélévision de service public a déclaré que la NRK devrait envisager de prolonger cette émission et de la diffuser sur tout le territoire national. Depuis l'année 2003, les radiodiffuseurs ont produit environ 10 500 heures d'émission de radio locale, dans 21 langues minoritaires.

Dans les médias écrits, les autorités gouvernementales subventionnent le journal kvène Ruijan Kaiku. Ce journal est publié toutes les deux ou trois semaines. Depuis 1995, Ruijan Kaiku a reçu 250 000 couronnes norvégiennes (équivalant à 30 000 $US) sur le budget du ministère des Affaires culturelles. Ce journal constitue un instrument important pour diffuser des commentaires, informations et débats au sein de la communauté kvène. La petite minorité kvène ne dispose pas d'émissions radiophoniques ou télévisées dans sa langue.

Cela dit, la Norvège a été l’un des premiers pays de l’Europe à avoir signé, le 5 novembre 1992, la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, traité qui veut favoriser l'emploi des langues régionales ou minoritaires dans la vie publique, notamment l'enseignement, la justice, les autorités administratives et les services publics, les médias, les activités et équipements culturels, la vie économique et sociale et les échanges transfrontaliers. Dans sa déclaration consignée au Conseil de l’Europe en date du 10 novembre 1993, le royaume de Norvège mentionnait que les locuteurs de la langue same devaient bénéficier des mesures du traité dont l’entrée en vigueur était prévue pour le 1er mars 1998.

Dans le cas de la politique concernant la minorité autochtone same, les mesures prévues à cet effet semblent tout à fait convenables et respectent les standards européens en la matière. Il ne faut pas oublier que la minorité same ne compte que 30 000 à 40 000 individus. Quant aux autres minorités nationales, les Juifs, les Kvènes, les Tsiganes (Rom et «Romani/Voyageurs» et les Skogfinn, qui possèdent toutes une longue histoire dans le pays, elles ne bénéficient que fort peu de protection. De plus, les représentants des minorités affirment que leurs membres sont victimes de discrimination, laquelle peut varier d'une communauté à une autre. Les rapports émanant des organisations de minorités nationales et du Centre de lutte contre la discrimination ethnique signalent que les personnes appartenant aux minorités nationales perçoivent la discrimination comme un problème. Mais il n'existe pas de statistiques officielles complètes sur les cas de discrimination raciale en Norvège. Quant aux minorités immigrantes, il s'agit pour la Norvège d'une politique d'intégration, comme on en voit ailleurs dans le monde.

Dernière révision: 19 février 2024


(1) Situation générale
 


(2) Données historiques
 


(3) La politique de bilinguisme institutionnel
 


(4) La politique à l'égard des minorités nationales

 

Norvège
 

(5) Bibliographie
 

L'Europe

Accueil: aménagement linguistique dans le monde