|
Norvège3) Données historiques |
Les archéologues estiment que la Norvège était déjà habitée il y a 14 000 ans par un peuple de chasseurs paléolithiques qui gravèrent sur les roches des pétroglyphes, c'est-à-dire des dessins symboliques, dont certains représentaient de longs navires à avirons. Au néolithique apparaissent les éleveurs de rennes «Lapons» (ou Sames), puis dans l'Antiquité des paysans germaniques originaires du Danemark et de Suède qui s'établirent dans la région, autour des grands lacs et des fjords; ils parlaient une langue germanique, le vieux norrois, dont les langues scandinaves d’aujourd’hui sont toutes issues. Il existe de nombreux textes de cette époque du vieux norrois. Certains sont écrits avec des runes, mais la plupart sont écrits en alphabet latin. C'est l'arrivée du christianisme, qui a favorisé les mots latins et grecs, avec des mots tels altari > alter («autel») et biskup > biskop («évêque»). Le vieux norrois avait beaucoup plus de conjugaisons qu’en norvégien moderne et une conjugaison verbale plus compliquée. On compte aussi beaucoup de mots originaires du latin et du grec qui ont été importés à l’époque nordique.
C’est le vieux norrois qui a donné le mot Nordhrvegr (le «chemin du Nord») et son nom à la Norvège. L’arrivée des populations germaniques eut pour effet de repousser les Lapons (Sames) vers le Grand Nord. Sans défense et sans État, les Lapons/Sames furent obligés de payer de forts tributs aux rois norvégiens et aux marchands finlandais.
1.1 Les Vikings et les Norvégiens
Vers 800, les populations scandinaves, donc danoises, norroises et suédoises, construisirent des navires de guerre: ce fut l’ère des drakkars «à dragon» (ainsi appelés en raison de leurs figures de proue). Pour monter leurs expéditions de commerce ou de pillage, ils s'associèrent sous les noms de «Vikings» vers l'ouest et de «Varègues» (ou Vikings de Suède) vers l'est. Vers 875, ces guerriers du Nord, divisés en de multiples royaumes, fondèrent à l'ouest des colonies en Irlande, en Écosse, en Islande ainsi que dans les îles Féroé, les îles Orcades et les îles Shetland (Écosse). Au siècle suivant, vers 985, l’explorateur Erik le Rouge gagna les côtes de l’Islande, puis celles du Groenland (signifiant le «pays vert»). Son fils, Leif Eriksson, fut l'un des premiers Européens à explorer l'Amérique du Nord. |
À l'est, Rurik, Oleg, Igor et Harald Sigurdarsson fondèrent des «royaumes de rameurs» (Rodslagen, à l'origine du mot «Russies», qui seront unifiées plus tard par les souverains de Kiev, «princes de toutes les Russies»). En remplacement des caractères runiques liés à la religion scandinave (avec des dieux comme Thor, Odin ou Loki), les souverains christianisés introduisirent, à l'ouest, l'alphabet latin et, à l'est, l'alphabet cyrillique d'inspiration grecque, mais adapté aux langues slaves. À l'ouest, une langue écrite norvégienne distincte se développa au XIe siècle. Les Vikings norvégiens tentèrent de conquérir la Grande-Bretagne, mais ils échouèrent quelques jours avant le débarquement de Guillaume le Conquérant (1066). À l'est, les Scandinaves furent assimilés par les Slaves et c'est ainsi qu'émergea la civilisation russe («Rous de Kiev» ou «Russie Kiévienne», à l'origine des actuels peuples russe, biélorusse et ukrainien).
La Norvège connut son apogée sous le roi Haakon IV, qui régna de 1217 à 1263 à la tête d’un vaste empire s’étendant jusqu’en Islande et au Groenland. Puis, en 1266, la Norvège dut céder les colonies de l’île de Man et des îles Orcades et des Shetlands à l’Écosse. Ensuite, le déclin se poursuivit rapidement. Les vieilles familles nobles s’affaiblirent graduellement et la Norvège devint surtout une nation de paysans. En 1319, à la mort d'Haakon V, qui n'avait pas d'héritier mâle, le royaume échut à Magnus II de Suède. En 1380, Olav II, roi du Danemark, devint le roi Olav IV de Norvège. La langue norvégienne fut utilisée en Norvège entre 700 et 1350; elle était également employée dans les régions colonisées par la Norvège à cette époque, comme l'Islande, les îles Féroé, les îles Shetland et les îles Orcades.
1.2 La domination danoise
En 1397, l’union de Kalmar réunit les royaumes du Danemark, de Suède et de Norvège, une grande partie de la Finlande actuelle, ainsi que les colonies norvégiennes d’outre-mer comprenant l'Islande, le Groenland, les îles Féroé et les îles du nord des Orcades et des Shetlands. La Norvège devint une province du Danemark avec le luthéranisme comme religion officielle. La rupture de l’union de Kalmar en 1523 n’entraîna pas l’indépendance de la Norvège, mais la plaça sous la domination de fait du Danemark; elle dura trois siècles. La Norvège, en tant que province (lydrike) du Danemark, fut négligée par les rois scandinaves au profit de la Suède et du Danemark, plus étendus et plus riches.
Durant toute cette période, qui s’étendit de 1380 à 1814, l’influence de la langue danoise fut déterminante, car la seule langue écrite demeura le danois, ce qui signifie que le norvégien écrit cessa progressivement d'être employé. Le danois fut généralement parlé par les classes supérieures de la société norvégienne, tandis que les parlers locaux norvégiens, très différents du danois, continuaient d’être employés dans les régions rurales et, dans les villes, par la classe ouvrière et la bourgeoisie. |
En Norvège, on n'avait pas à ce moment-là une langue unifiée et de normes nationales. Alors que chez les paysans et les pêcheurs les parlers locaux étaient omniprésents, le danois dominait dans les centres urbains parce qu'il était considéré comme la langue cultivée et valorisée. Néanmoins, le danois parlé en Norvège était prononcé différemment du Danemark.
En réalité, la situation linguistique du royaume danois se caractérisait par le fait que les Danois, les Norvégiens, les Islandais, les habitants des îles Féroé et ceux de quelques provinces allemandes avaient tous une même langue officielle, le danois. Cette pratique valait même si tous, sauf pour les germanophones, avaient leurs propres langues particulières appartenant à la même racine linguistique nordique.
1.3 Les royaumes unis de Norvège et de Suède (1814-1905) À la suite de la défaite de Napoléon en 1814, le Danemark, allié de la France, fut obligé de signer le traité de Kiel du 14 janvier et de céder la Norvège à la Suède, pendant que la Russie récupérait la Finlande. Toutefois, les Norvégiens rejetèrent le traité et proclamèrent leur indépendance. Ils rédigèrent une constitution libérale et offrirent la couronne au prince héritier du Danemark, Christian Frédéric (le futur Christian VIII). Une courte guerre menée par Bernadotte obligea la Norvège à accepter un traité d'union avec la Suède, mais le roi suédois promit d'accepter la Constitution norvégienne, avec les changements rendus nécessaires par cette union. Le Storting norvégien accepta alors Charles XIII de Suède comme roi de Norvège. Ce fut le Traité établissant les rapports constitutionnels des royaumes de Norvège et de Suède du 6 août 1815. |
Voici les articles portant sur la langue de cette loi d'Union en version française non officielle :
Article 3 […] Un des commissaires dressera le procès-verbal du scrutin, en langue suédoise, si le président est Suédois, et en langue norvégienne, s'il est Norvégien. Ce procès-verbal sera vérifié aussitôt après la fin du dépouillement du scrutin, sur quoi il en sera fait deux exemplaires conformes, que toute la Commission d'élection signera avant de se séparer ; ils seront scellés en sa présence et expédiés le jour même, par le soin du président de chaque Commission, l'un aux États du Royaume de Suède, à l'adresse du maréchal de la noblesse et des présidents des ordres, l'autre au Storting à l'adresse de son président. Auprès du gouvernement intérimaire, les affaires suédoises seront rapportées par le rapporteur suédois compétent, et elles seront consignées au procès-verbal et expédiées en langue suédoise ; les affaires norvégiennes seront rapportées par le ministre d'État de Norvège, consignées au procès-verbal et expédiées en langue norvégienne. Les affaires qui concernent les deux Royaumes et qui, par leur nature, ne sont de la compétence d'aucun département spécial, seront rapportées par le ministre d'État et des Affaires étrangères, et elles seront expédiées pour chaque Royaume dans sa propre langue, en Suède par ledit rapporteur, et en Norvège par le ministre d'État de ce Royaume. Les affaires diplomatiques seront aussi rapportées par le ministre d'État et des affaires étrangères et consignées dans un procès-verbal séparé. Quant à l'éducation du roi mineur, il sera procédé conformément à l'article 8 de la constitution de Norvège. C'est un point fondamental que le roi mineur apprenne suffisamment la langue norvégienne. |
Bref, la Suède faisait des concessions à la Norvège en matière de langue, hormis le fait que la langue écrite norvégienne n'existait pas.
- La Constitution norvégienne
En échange de la signature du traité d'union, la Norvège réussit à conserver sa nouvelle constitution. La nouveauté la plus importante de la Constitution de novembre 1814 par rapport à la Constitution du 17 mai fut l’établissement d’une union entre la Norvège et la Suède en tant qu’États indépendants avec un souverain commun. La Norvège possédait ainsi sa propre armée, sa marine, ses services de douanes, son parlement et une certaine autonomie à l'intérieur de ses frontières.
En raison de son autonomie qui fut respectée par les Suédois, la langue suédoise n'eut par conséquent que fort peu d'influence directe en Norvège, car c'est le danois qui garda au contraire sa position déjà dominante. Néanmoins, dès sa demi-indépendance, le problème de la langue ne tarda point à se poser, car les Norvégiens n'avaient pas de langue écrite nationale.
La Constitution du 17 mai 1814, qui fut rédigée en danois, ne contenait pas vraiment de disposition linguistique, sauf à l'article 93 avec «la langue du pays»:
Artikel 93 [version danoise]
Til Embeder i Staten maa allene udnævnes de norske Borgere, som bekjende sig til den evangelisk-lutterske Religion, have svoret Constitutionen og Kongen Troskab, og tale Landets Sprog, samt
|
Article 93 [traduction française]
Seuls les citoyens norvégiens, qui professent la religion évangélique luthérienne, ont prêté allégeance à la Constitution et au roi et parlent la langue du pays doivent être nommés à des fonctions gouvernementales, ainsi que, selon le cas:
|
Le texte pouvait être ambigu, car la «langue du pays» n'était pas identifiée, alors qu'elle pouvait être le danois aussi bien que le norvégien. Mais la Constitution du 17 mai 1814 fut modifiée par la version du 4 novembre 1814.
Cette autre version de la Constitution norvégienne de novembre stipulait que les affaires de l'État devaient être faites «en langue norvégienne» (art. 33). L'art. 47 exigeait que le roi pendant sa minorité devait recevoir une instruction adéquate en norvégien. L'article 81 exigeait que toutes les lois soient rédigées en norvégien.
Kongeriget Norges Grundlov Version danoise du 4 novembre 1814 Artikel 33 Bestyrelsen af den umyndige Konges Opdragelse hør, hvis Hans Fader ei derom har efterladt nogen skriftlig Bestemmelse, fastsættes paa den i §. 7 og 43 foreskrevne Maade. Artikel 81. Alle Love udfærdiges i det Norske Sprog og (de i §. 79 undtagne) i Kongens Navn, under Norges Riges Segl, og i følgende Udtryk: «Vi N. N. gjøre vitterligt: at Os er bleven forelagt Storthingets Beslutning, af Dato saalydende: (her følger Beslutningen) Thi1 have Vi antaget og bekræftet, ligesom Vi herved antage og bekræfte samme som Lov, under Vor Haand og Rigets Segl.» Til Embeder i Staten maae alene udnævnes de Norske Borgere, som bekjende sig til den evangelisk-lutherske Religion, have svoret Constitutionen og Kongens Troskab, og tale Landets Sprog, samt
|
Constitution du Royaume de Norvège Version en traduction française Article 33 La direction de l'éducation du roi durant sa minorité, dans le cas où son père mourant n'aurait pas laissé des dispositions par écrit, sera réglée de la manière déterminée par les articles 7 et 43. Article 81 Toutes les lois (à l’exception de celles mentionnées à l’article 79) sont rédigées en langue norvégienne au nom du roi, sous le sceau du Royaume de Norvège, et dans les termes suivants : «Nous, X, faisons savoir publiquement que la décision du Storting selon la date indiquée nous a été soumise : (voici la décision). En conséquence, Nous avons consenti et confirmé, comme Nous consentons et confirmons par la présente la même chose que la loi sous Notre main et le sceau du Royaume.» Seuls les citoyens norvégiens, qui professent la religion évangélique luthérienne, ont prêté allégeance à la Constitution et au roi et parlent la langue du pays peuvent être nommés à des fonctions gouvernementales, ainsi que:
|
Ces dispositions, d'ailleurs rédigées en danois, demeuraient purement symboliques, car elles ne pouvaient être mises en pratique, étant donné que le norvégien n'était plus écrit depuis fort longtemps. Il fallait donc créer de toute pièce une nouvelle langue écrite pour répondre aux prescriptions des dispositions constitutionnelles. Quant à l'article 92 sur la «langue du pays», l'ambiguïté était levée en raison des termes "Norske Sprog", c'est-à-dire «langue norvégienne», employés dans les articles précédents.
- Deux écoles de pensée opposées
À partir de la décennie 1840-1850, les Norvégiens voulurent effectivement mettre en œuvre leur propre langue écrite qui pouvait constituer une nouvelle base pour la langue parlée.
C'est à ce moment-là que prirent naissance les deux positions opposées qui, par la suite, allaient provoquer les plus âpres débats. D'un côté, il y eut ceux qui voulaient modifier le danois et en faire la «langue nationale» (riksmål, plus tard appelée bokmål); il s'agissait surtout de la classe dirigeante des villes, pour qui le danois ne causait pas de problèmes. De l'autre côté, il y eut ceux qui voulaient recourir aux parlers locaux comme point de départ (landsmål, plus tard appelée nynorsk), ces derniers étant plus proches des racines culturelles de la population. Ce fut une période difficile, car les partisans et les adversaires du nynorsk ou du bokmål ont engagé des combats au couteau, des livres et des manuels scolaires ont été brûlés, etc. |
Pendant toute la période d'union avec la Suède, l'un des problèmes importants à l'ordre du jour fut effectivement la question d'une langue norvégienne prise en charge par deux écoles de pensée principales : soit norvégianiser le danois, soit créer une langue norvégienne entièrement nouvelle et basée sur les variétés dialectales parlées. Les Norvégiens devaient opter pour les deux solutions en adoptant le bokmål (bouk-môl) et le nynorsk (nu-norsk).
Le nationalisme norvégien s'intensifia et amena le Storting (Parlement norvégien) à se plaindre du traitement infligé à la Norvège par la Suède; ce traitement était jugé incompatible avec l'esprit de l'acte d'Union et contraire au principe d'égalité entre les nations.
2.1 La création des deux langues norvégiennes (1814-1909)
L'initiative du dirigisme linguistique en Norvège ne revient pas à l'État, mais à deux individus: Ivar Aasen (1813-1896) et Knud Knudsen (1812-1895). Dès les années 1830, de leur propre chef, Aasen et Knudsen se mirent à la tâche de créer la langue norvégienne écrite.
Aasen parcourut la Norvège pour écouter les différents dialectes locaux; en empruntant un peu à chacun d'eux; il examina aussi le développement de l'islandais qui avait largement échappé aux influences sous lesquelles le norvégien était tombé. Il appela son œuvre, qui a été publiée dans plusieurs livres de 1848 à 1873, Landsmål (lannds-môl), ce qui signifie «langue du pays». Le nom Landsmål est parfois interprété comme «langue rurale», mais ce n'était clairement pas le sens voulu par Aasen.
Quant à Knudsen, il voulut rendre la langue écrite danoise plus norvégienne; celle-ci a évolué en Norvège pour devenir ce qu’on appelle aujourd’hui le bokmål (bouk-môl). |
En fait, le résultat de ces deux linguistes norvégiens donna lieu à la naissance du landsmål (prononcer [lannd-smôl]), la «langue du pays», et du riksmål (prononcer [riks-môl]), la «langue du royaume». Bien que le terme landsmål soit resté, Aasen lui donna divers noms: «langue de notre peuple» (vort almuesprog), «vraie langue norvégienne» (det rette norske folksprog), «langue nationale (national sprog), «langue nationale norvégienne» (norske landsmål) et «norvégien» (norsk). Les partisans de Knud Knudsen se mobilisèrent au tour du mot riksmål, mot construit sur le modèle de l'allemand reichssprache.
Ce fut le début d'une longue lutte entre deux langues norvégiennes concurrentes: le landsmål (prononcer [lannd-smôl]) et le riksmål (prononcer [rik-smôl]), la campagne contre la ville. Le nom de la «langue danoise de Norvège» fut un sujet de vives controverses tout au long du XIXe siècle. Les partisans du riksmål affirmaient qu'il s'agissait d'une langue commune à la Norvège et au Danemark, et pas plus du danois que du norvégien. Les partisans du Landsmål pensaient qu'il ne fallait pas cacher le caractère danois de la langue.
Au XIXe siècle, la plupart des écrivains norvégiens adoptèrent une norme superficiellement danoise, mais celle-ci conservait une prononciation norvégienne et comportait de nombreux mots non danois. La norme parlée était un compromis dano-norvégien qui était employé dans le milieu bourgeois urbain. En 1885, la Norvège devint un État officiellement bilingue en reconnaissant le landsmål et le riksmål comme les langues nationales officielles du pays.
2.2 La tentative de fusionnement
En 1905, ce fut la rupture définitive de l’union avec la Suède. Le Storting proclama l'indépendance de la Norvège, le roi de Suède ayant cessé d’exercer ses fonctions. Au cours d’un plébiscite en août 1905, le peuple norvégien vota à une large majorité pour la séparation d'avec la Suède. Le Parlement suédois (le Riksdag) ratifia l'indépendance du pays en octobre. Par la suite, le mouvement nationaliste éveilla chez les Norvégiens le désir d'avoir une langue qui soit vraiment la leur en propre. Ce faisant, les divers gouvernements norvégiens pratiquèrent, par un effet d'entraînement, des politiques d'assimilation (ou de «norvégianisation») à l'égard de leurs minorités nationales.
En 1923, Knud Knudsen pouvait commenter ainsi la situation: «Deux réformes orthographiques hardies en une décennie avaient donné au riksmål norvégien un visage entièrement nouveau, qui pouvait difficilement la faire prendre pour du danois.»
Mais la politique linguistique n'était que partiellement atteinte. Si le premier objectif était de différencier nettement le riksmål du danois, il restait l'autre objectif : unifier linguistiquement la Norvège qui restait aux prises, d'une part, avec une classe dominante pratiquant une langue proche de la langue écrite (riksmål), d'autre part, avec une classe populaire pratiquant une forme proche des parlers locaux (landsmål). Au cours des années 1930, le Parti communiste norvégien en profitera pour répéter que la lutte pour la langue populaire faisait partie de la lutte des classes.
- Le nynorsk et le bokmål
En 1929, une loi du Parlement changea le nom des deux langues officielles: le landsmål devint le nynorsk (prononcer [nu-norsk] comme dans flûte), c'est-à-dire le «nouveau norvégien», et le riksmål s'appela le bokmål (prononcer [bouk-môl] comme dans bouc et pôle), c'est-à-dire la «langue des livres». D'autres tentatives se sont succédé afin de réunir les deux langues norvégiennes, mais elles se soldèrent toutes par des échecs.
Les réformes officielles de 1907, 1917 et 1938 ont rompu avec la tradition écrite danoise et ont adopté la prononciation et la grammaire autochtones comme base normative; la forme linguistique résultante s'appelait "riksmål" pour devenir le "bokmål". Par exemple, en 1938, un décret du gouvernement décida que les diphtongues du nynorsk devaient remplacer les monophtongues du bokmål dans les manuels scolaires (par exemple [ost] devait se prononcer [aust] et [sten] devait devenir [stein]).
On imagine la réaction des parents! Néanmoins, ces tentatives permirent l'expansion du nynorsk, dont le nombre de locuteurs passa, entre 1930 et 1949, de 20 % à 32 % de la population. Le 9 décembre 1938, les plaques de 300 rues de la ville d'Oslo avaient été changées afin de respecter la nouvelle orthographe; ce geste était pour la municipalité une façon symbolique d'affirmer son adhésion à la réforme orthographique. Cette réforme fut abolie en 1941, sous l'occupation allemande, parce que les communistes accusèrent les tenants de la réforme «d'introduire la dictature du prolétariat dans le domaine linguistique», mais elle fut rétablie en 1945 lors de la libération.
En 1946, un sondage Gallup destiné à déceler l'opinion des Norvégiens sur la question linguistique révéla que 80 % des Norvégiens étaient favorables à la fusion des deux langues et que 75 % croyaient que cette fusion devait s'appuyer sur le bokmål. Malgré les résistances des défenseurs du bokmål, le Parlement adopta la nouvelle réforme en 1959 sans être capable d'endiguer le radicalisme des tenants du nynorsk et du bokmål.
- Les échecs
Un comité gouvernemental décréta qu’il y aurait dorénavant des formes obligatoires (seules permises), des formes alternatives (libre choix) et des formes optionnelles (permises seulement par les enfants dans leurs compositions). Il n’est pas surprenant que de telles réformes soient restées lettres mortes. Loin de faire l’unanimité, les diverses réformes suscitèrent de vives réactions de la part des «traditionalistes» opposés à tout changement, tant dans la forme du nynorsk que dans celle du bokmål. Ce constat d'échec des politiques de fusionnement fut confirmé dans un rapport publié en 1966 par un nouveau comité linguistique qui préconisait d'abandonner la recherche de fusionnement et de préserver plutôt l'héritage culturel des langues officielles de la Norvège, à la ville comme à la campagne.
- Les emprunts aux autres langues
Comme la plupart des langues, le norvégien a puisé certaines ressources lexicales dans les langues étrangères.
Mots d'origine anglaise: nøytral < neutral (neutre); sersjant < sergeant > (sergent); kamelon < chameleon (caméléon); pedagog < pedagog (pédagogue); president < president (président); process < prosess (processus); sjampo < shampoo (shampoing); haik < hike (randonnée); handikap < handicap (handicap); licens < licence (licence); teip < tape (ruban adhésif); kjeks < cakes (gâteaux); tøff < tough (dur, difficile); skåre < score (score); kløtsj < clutch (embrayage); skanner < scanner (scanner ou scanneur); streit < straight (droit/droite); gaid < guide (guide); pøbb < pub (pub ou bistrot); etc.
Mots d'origine française: à la carte > à la carte; asjett < assiette; aversjon < aversion; bankett < banquet; bataljon < bataillon; brosjyre < brochure; croissant < croissant; fasade < façade; finans < finance; frisør < friseur; ekstraordinær < extraordinaire; eskorte < escorte; inspektør < inspecteur; konferanse < conférence; korporal < caporal; krokan < croquant; kandidatur < candidature; koalisjon < coalition; limonade < limonade; manuell < manuel; melodiøs < mélodieux; milliardær < milliardaire; pastill < pastille; perspektiv < perspective; seksuell < sexuel; sitron < citron; sjampinjong < champagne; terrasse < terrasse; vestibyle < vestibule; etc.
Bien sûr, le norvégien a emprunté à d'autres langues, dont le danois, l'allemand, le russe, etc.
2.3 La politique agressive d'assimilation des minorités
La politique de norvégianisation entraîna en même temps une politique d'assimilation des peuples autochtones, particulièrement envers les Sames et les Kvènes, surtout à partir de 1860.
- L'assimilation des Sames et des Kvènes
En 1889, les Sames et les Kvènes ne furent plus autorisés à employer leur langue maternelle à l'école; ils furent forcés d’apprendre à lire, à écrire et à parler le norvégien. Les écoles du Troms-et-Finnmark devinrent des instruments de norvégianisation. Voyant que les instituteurs du nord de la Norvège étaient contre cette interdiction totale de l’usage du same (alors appelé le lapon) et qu’ils n’appliquaient pas les directives à la lettre, le gouvernement les démit de leurs fonctions. Il embaucha des instituteurs plus rigides du sud de la Norvège et créa dans le Finnmark des internats pour accueillir les enfants sames dans le but de les éloigner le plus possible de leurs familles et d'en faire de bons Norvégiens. Ces nouveaux enseignants n'hésitèrent pas à punir les enfants et à les frapper s'ils étaient surpris à parler same (lapon). Isolés de leur famille pendant de longs mois, de fort nombreux enfants perdirent leur langue maternelle et leur culture sans pour autant apprendre ni le norvégien ni la culture scandinave. Analphabètes, ces enfants perdirent toute possibilité de faire partie de la société norvégienne.
On peut comprendre que la politique de norvégianisation soit liée à l’édification de la nation norvégienne, en partie inspirée par le romantisme allemand, qui prônait le rêve d'une nation dotée d'une culture commune, d'une langue commune et d'une histoire commune. À cette époque, des croyances nationalistes, évolutionnistes et racistes apparurent également, lesquelles dévalorisèrent les Sames. Dans de nombreux pays européens, on croyait que certains groupes ethniques avaient des qualités supérieures à d'autres et que, par conséquent, certains groupes de personnes étaient forcément inférieurs.
C'étaient là des idées à la mode que la plupart des gens acceptaient et qui ont servi à la fois comme défense et comme base de la politique de norvégianisation ou encore de sudéisation (suédois), de fennisation (finnois) ou de russification. Selon cette façon de penser, les Sames et les Kvènes de Norvège devaient abandonner leur langue, leur religion, leurs habitudes vestimentaires ou d’autres traits culturels s'ils voulaient survivre à la modernisation du pays.
En dépit de cette entreprise d'assimilation, de nombreux Sames, qui vivaient isolés à l’intérieur des régions du Finnmark, réussirent à conserver leur langue. Mais une loi foncière de 1902 — "Om Lov om afhændelse af Statens Jord og Grund i Finmarkens Amts Landdistrikt" («Loi sur la cession des terres et terrains de l'État dans le Landdistrikt du comté de Finmark») — qui concernait l’agriculture ("Jordsalgsloven"), interdit à toute personne qui ne parlait pas suffisamment le norvégien de posséder des terres. Selon cette loi, le nom des localités sames ne pouvait plus être employé comme appellation principale.
Tous les noms de propriétés devaient être inscrits en norvégien, conformément à l'article 3 de cette loi où il était souligné que la propriété concernée devait recevoir un nom norvégien avec une appellation laponne ou kvénienne éventuellement commune ajoutée entre parenthèses ("den oppmaalte Eiendom gives norsk Navn med det muligens gjængse lappiske eller kvænsk tilføiet i Parenthes"). Cela signifiait que les noms des propriétés et des établissements dans les régions sames étaient norvégianisés. Pour les noms de lieux naturels, c’est-à-dire les noms de montagnes, de fjords, de rivières et autres, la norvégianisation s’est poursuivie jusque dans les années 1930. Une analyse cartographique a montré comment les appellations sames ont été détournées, réécrites ou remplacées par des noms norvégiens nouveaux. En raison de cette politique linguistique publique, très peu de noms de lieux samis furent conservés sur les cartes pendant la période de norvégianisation.
En fait, selon cette fameuse loi de 1902, il était intentionnel que seuls les locuteurs du norvégien pouvaient être autorisés à acheter des terres. Les autorités voulaient une population dite «décente», capable de parler, de lire et d'écrire en norvégien, et d'employer cette langue au quotidien. Le requérant d'une nouvelle terre devait également indiquer sa nationalité, c'est-à-dire son origine ethnique. Les propriétés foncières devaient également recevoir des «noms norvégiens». Cette législation fut officiellement en vigueur jusqu'en 1965.
La politique de norvégianisation s’est poursuivie durant la première moitié du XXe siècle de sorte que la langue same disparut presque complètement des régions littorales du nord de la Norvège. Bien que, dans les années 1960, l’idée d’une norvégianisation par l’école soit en déclin, elle fut néanmoins pratiquée de diverses manières tant dans les salles de classe que dans les cours d’école.
- L'assimilation des Roms/Tsiganes
Cependant, un autre groupe linguistique dut subir une politique d'assimilation presque encore plus sévère: les Roms/Tsiganes. Beaucoup d'entre eux avaient un lien étroit avec la Norvège, et la plupart étaient des citoyens norvégiens ou suédois. La politique d’assimilation à l’égard des Roms avait un caractère biologique racial distinct : ils étaient considérés comme un peuple sous-développé qui avait besoin d’aide pour survivre. Ils parlaient une langue «exotique», le romani ou le romanès, des langues indo-iraniennes très différentes des langues scandinaves d'origine germanique, et de plus plusieurs Roms vivaient le long des routes de campagne en mendiant. Non seulement ces individus ne purent employer leur langue dans l'espace public, mais ils furent privés de leur citoyenneté. Pour ce faire, une ordonnance de prise en charge systématique fut menée pour les enfants issus de familles itinérantes; ils furent placés dans des orphelinats où ils devaient être norvégianisés. Finalement, le gouvernement norvégien expulsa le plus grand nombre de Roms tout en assimilant ceux qui restaient.
Au tournant du XXe siècle, la langue same fut officiellement interdite dans les établissements d’enseignement, et de nombreuses écoles, répétons-le, soumirent les enfants à des châtiments physiques s’ils conversaient en same. À cette époque, le gouvernement avait également commencé à introduire des noms de lieux norvégiens pour remplacer les noms sames, dans le but de priver ces régions de leur lien avec les personnes qui y avaient vécu bien avant que les frontières nationales n’existent. Dans tous les cas, que ce soit les Sames, les Kvènes ou les Roms, lorsqu'ils avaient la chance de recevoir une forme d’éducation, le moyen était de supprimer le same, le kvène et le romani ou le romanès comme langues d’enseignement afin de forcer leurs locuteurs à devenir plus norvégiens.
En 1997, le roi Harald V reconnut et déplora la politique de norvégianisation des peuples autochtones au nom des autorités norvégiennes. Dans le discours qu’il prononça devant le Parlement same, il déclara notamment ce qui suit :
Den norske stat er grunnlagt på territoriet til to folk – nordmenn og samer. Samisk historie er tett flettet sammen med norsk historie. I dag må vi beklage den urett den norske stat tidligere har påført det samiske folk gjennom en hard fornorskningspolitikk. | L’État norvégien est fondé sur le territoire de deux peuples – les Norvégiens et les Sames. L’histoire same est étroitement liée à l’histoire norvégienne. Aujourd’hui, nous devons regretter l’injustice que l’État norvégien a précédemment infligée au peuple same par le biais d’une politique de norvégianisation sévère. |
C’était la première fois qu'un souverain avançait de tels propos au nom des autorités norvégiennes. Le but de la politique d’assimilation de l’État norvégien envers les Sames, les Kvènes et les Roms était sans aucun doute d’éradiquer la culture, la langue, l’histoire et les traditions associées à l’expérience de l’identité de ces peuples.
Bref, cette période constitue le côté sombre de l'histoire de la Norvège en matière de politique linguistique. Pendant environ un siècle, soit à partir des années 1850, les autorités norvégiennes ont dénigré l'usage des autres langues que le norvégien sur leur territoire, surtout le same. Beaucoup de membres des minorités ont alors cessé de parler leur langue d'origine et ont opté pour le norvégien.
À la fin de la Seconde Guerre mondiale, la Norvège devint une démocratie sociale et un État-providence. Elle adhéra à la Charte des Nations unies (ONU) en 1945, puis à l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) en 1949. La Norvège devint en 1959 l’un des membres fondateurs de l'Association européenne de libre-échange (AELE). En 1970, la Norvège posa sa candidature pour adhérer à la Communauté européenne ou CEE (aujourd'hui appelée Union européenne), mais lors du référendum de 1972, les électeurs rejetèrent les recommandations du gouvernement. Le 4 mai 1994, le Parlement européen appuya à nouveau l'adhésion de la Norvège (en même temps que la Suède, la Finlande et l'Autriche à l'Union européenne. Cependant, au référendum des 27 et 28 novembre 1994, les Norvégiens rejetèrent l'adhésion à l'Union européenne pour la deuxième fois; la Norvège ne fait toujours pas partie de l'UE au moment où ces lignes sont écrites.
3.1 La non-intervention
Dès 1966, le gouvernement norvégien avait fait volte-face. Non seulement il avait abandonné sa politique de fusionnement, mais il avait renoncé à toute planification linguistique. Le moment où le gouvernement avait décidé de ne plus intervenir dans la langue norvégienne, la situation sociolinguistique était devenue radicalement différente de ce qu'elle avait été vingt ans auparavant. De 32% de la population, les locuteurs du nynorsk avaient chuté à 17,9%: l'industrialisation et l'urbanisation avaient favorisé le bokmål, variante traditionnellement parlée dans les villes, langue des intellectuels et des affaires par surcroît; c'était donc la langue de l'élite sociale de la Norvège. D'ailleurs, le nynorsk et le bokmål ont toujours eu des statuts très inégaux, tant par le nombre de leurs utilisateurs respectifs que par la valeur sociale accordée à chacune des langues.
Quoi qu'il en soit, la défense du nynorsk en Norvège demeure l’expression d’un nationalisme, mais un nationalisme régional qui ne concerne pas l’ensemble du pays. Il est aussi mené par une élite influente qui représente les régions. C'est depuis le XIXe siècle que le nynorsk est l'un des symboles du mouvement d’émancipation nationale norvégien. Étant donné que les populations des zones rurales n’ont jamais accepté pas la domination culturelle de la capitale, le mouvement est là pour rester.
Un effort officiel visant à fusionner le dano-norvégien et le nouveau norvégien en une seule langue (Samnorsk) fut définitivement abandonné en 2002. Aujourd'hui, le gouvernement norvégien croit que la langue écrite «norvégienne» doit être stabilisée, mais en évitant, autant que possible, les changements fréquents de l'orthographe. Il semble que des réformes plus complètes aient été préférées aux rajustements annuels portant sur des problèmes ponctuels.
En même temps, le gouvernement a changé de cap envers les minorités sames en autorisant en 1967 l'enseignement des langues sames dans les écoles primaires. C'est ainsi que le same devint à la fois une langue d'enseignement et une discipline enseignée dans les écoles secondaires. Le premier lycée de langue same a ouvert ses portes à Karasjok en 1969, et il fut suivi d'un établissement professionnel à Kautokeino. L'école professionnelle mit l'accent sur l'artisanat traditionnel same et la «modernisation» des métiers traditionnels, comme l'élevage et la commercialisation des rennes.
3.2 Le dualisme linguistique
En 2010, plus de 86% des élèves des écoles primaires et secondaires de Norvège recevaient un enseignement en bokmål, tandis que 13% recevaient un enseignement en nynorsk. À partir de la huitième année, les élèves doivent apprendre les deux variantes.
Sur les 431 municipalités norvégiennes (en 2010, mais 428 en 2023), 161 déclaraient vouloir communiquer avec les autorités centrales de Bokmål, 116 (représentant 12 % de la population) de Nynorsk, tandis que 156 étaient «neutres». Sur 4549 publications publiques en 2000, 8% étaient en nynorsk et 92% en bokmål. Les grands journaux nationaux (Aftenposten, Dagbladet et VG ) étaient publiés en bokmål ou en nynorsk. Certains grands journaux régionaux (dont Bergens Tidende et Stavanger Aftenblad), de nombreuses revues politiques et de nombreux journaux locaux utilisaient à la fois le bokmål et le nynorsk. |
Une tendance plus récente consiste à écrire en un dialecte local pour un usage informel. Lorsqu'ils rédigent un message, une mise à jour sur Facebook ou une note sur leur réfrigérateur, la plupart des jeunes écrivent comme ils parlent, plutôt que d'employer le bokmål ou le nynorsk. En 2021, le Parlement norvégien adopta la Loi sur les langues, qui entrait en vigueur le 1er janvier 2022. L'objectif principal de la loi était de renforcer la langue norvégienne, et en faire une langue commune de soutien à la communauté en Norvège. La loi contient également des dispositions sur la protection et le statut de plusieurs langues minoritaires, dont le kvène, le romani (et le romanès), les langues sames et la langue des signes norvégienne. La loi clarifie et établit le rôle du Conseil des langues en tant qu'organisme administratif de l'État en matière linguistique et administre les normes d'écriture officielles pour le bokmål et le nynorsk.
Par ailleurs, le gouvernement a signé la Convention relative aux peuples indigènes et tribaux (1989) de l’Organisation internationale du travail et le Parlement norvégien l’a ratifiée le 19 juin 1990. Le 1er mars 1998, la Norvège a également ratifié la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires et, le 1er juillet 1999, la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales). En février 1998, la ministre du Gouvernement local et du Développement régional, a présenté des excuses officielles au nom du gouvernement pour les injustices commises par les autorités norvégiennes dans le passé à l’égard des Roms et des autres minorités nationales (Kvènes, Skogfinn et Juifs) et pour la façon dont celles-ci ont été traitées.
Bref, nous pouvons néanmoins constater aujourd'hui que la paix linguistique tient bon en Norvège, grâce à d'importantes réformes législatives entreprises depuis longtemps. L'aboutissement de ce dualisme réside dans l'existence de deux langues norvégiennes officielles, le bokmål et le nynorsk, reconnus formellement comme égales, mais le problème n'est pas entièrement résolu pour les langues minoritaires pour lesquelles des obstacles administratifs réduisent la portée de la législation linguistique.
De fait, les communautés sames de la Norvège doivent encore se battre pour empêcher que d'immenses parcs éoliens d'occuper leur territoire traditionnel. Les parcs appartiennent généralement à des sociétés énergétiques norvégiennes, suisses ou allemandes; ils ont souvent été construits dans une zone de pâturage cruciale pour les éleveurs de rennes, ce qui menace ainsi les moyens de subsistance traditionnels et la culture des Sames. En 2021, la Cour suprême de Norvège a statué que certains parcs éoliens violaient les droits de l’homme des Sames et qu'ils étaient construits illégalement. Le gouvernement peine à donner suite à ce jugement. Ce pays est réputé pour ses avancées progressistes en matière des droits de l'homme, mais il y a parfois des ratés.
|
||
(5) Bibliographie |