République irakienne |
Irak
3)
La politique linguistique |
1 La
Constitution de 2005 et le bilinguisme
Déjà, sous
l'occupation américaine, les élèves des écoles avaient cessé subitement
d'entonner des hymnes à la gloire du «grand dirigeant». Beaucoup d'enfants
furent
déconcertés d'autant plus que les enseignants n'expliquaient pas toujours
pourquoi le rituel avait changé. Le soldats américains sont venus dans les écoles
pour demander aux professeurs de retirer les portraits du dictateur, qui
étaient accrochés dans toutes les classes et figuraient à la première page
de tous les manuels scolaires. La nouvelle administration, sous contrôle
américain, a exigé le retrait des cours d'éducation physique, qui étaient
des outils de propagande en faveur du Parti Bass et désignaient les trois
«ennemis éternels» de l'Irak: Israël, les États-Unis et l'Iran.
Les électeurs irakiens ont ratifié, par près de 79 % des voix, le projet de
Constitution qui dotait leur pays d'un régime parlementaire et fédéral, mais des
responsables sunnites ont qualifié de frauduleux les résultats du référendum du
15 octobre 2005. Sur l'ensemble du territoire, le «oui» l'a emporté avec 78,5 %
des suffrages, contre 21,4 % pour le «non», ont annoncé les responsables de la
commission électorale. L'issue du référendum a été jugée digne de foi par une
représentante des Nations unies en Irak et par les responsables de la commission
électorale. Plusieurs provinces chiites et kurdes ont approuvé le texte à plus
de 95 %. Toutefois, dans la province d'Anbar, où les sunnites sont majoritaires,
le texte qui instaure le fédéralisme a été rejeté par
près de 97 % des voix. Certains Irakiens sunnites estiment que la nouvelle
Constitution, d'inspiration américaine, est imposée par une occupation militaire
étrangère et sont contre le fédéralisme.
De façon générale, les sunnites craignent que le
fédéralisme ne leur laisse que des régions pauvres en pétrole. C'est pourquoi
ils privilégient un État au pouvoir centralisé, avec un contrôle direct sur les
réserves de pétrole dans tout le pays. De plus, les sunnites craignent que
l'Irak soit façonné sur le modèle de l’Iran à majorité chiite.
Ces disparités illustrent certainement le caractère
multi-ethnique et multiconfessionnel de l'Irak.
1.1 L'islam comme
religion d'État
Au plan religieux, l’Irak est multiforme. Cette
réalité est aujourd'hui inscrite dans la
Constitution,
dont l’article 3 proclame que «l’Irak est un pays aux
multiples ethnies, religions et confessions»:
Article 3 L'Irak est un pays aux
multiples ethnies, religions et confessions. Il est un membre
fondateur et actif de la
Ligue arabe ; il applique sa charte, et il
fait partie du monde islamique. |
L'article 2.2 de la Constitution déclare que l'État garantit pleinement
les droits religieux à la liberté de croyance et de
culte religieux de tous les individus comme les chrétiens, les
yézidis, et les mandéens-sabéens:
Article 2
2) La présente Constitution garantit
l'identité islamique de la majorité du peuple irakien et elle
garantit pleinement les droits religieux à la liberté de croyance et
de culte religieux de tous les individus comme les chrétiens, les yézidis, et les
mandéens-sabéens. |
Par voie de conséquence, tout Irakien est
libre de croire ou de ne pas croire, de choisir
une religion et de la pratiquer sans restriction
de la part de l’État. Toutefois, la portée de
ces dispositions est tempérée par le statut
prépondérant reconnu à l’islam comme «religion
officielle de l’État et l'une des sources de la
législation»:
Article 2
1) L'islam est la religion officielle de l'État et
l'une des sources de la législation :
a. Il est interdit de de promulguer
des lois contraires aux préceptes
établies de l'islam. b. Il est interdit de de promulguer des lois contraires aux principes de
la démocratie. c. Il est interdit de de promulguer des lois contraires aux droits et aux libertés fondamentales énoncés par
la présente Constitution
|
L'Irak n'est pas un État laïc qui se
tiendrait à égale distance de toutes les
religions et n’en encouragerait officiellement
aucune. Tout en reconnaissant la liberté
religieuse, l'État privilégie et protège l'islam
qui, de plus, est «l'une des sources de la
législation». Cela signifie que la loi
islamique, la Charia, établit une
hiérarchisation dans les normes juridiques et
leur élaboration par l'État. En d’autres termes,
le pouvoir législatif doit s’assurer de la
prééminence des sources islamiques dans
l'élaboration des lois et de leur conformité à
l’islam.
Malgré la liberté de religion, la conversion
d’un musulman à une autre religion demeure
interdite. Mais un non musulman peut changer
librement de religion, que ce soit vers l’islam
ou vers l’une des nombreuses autres religions.
1.2 Les
dispositions linguistiques
Les nouvelles dispositions sur la question linguistique ne peuvent qu'être
plus positives pour l'ensemble des communautés qui habitent ce pays. L'article 4
de la Constitution de 2005 édicte ce qui suit:
Article 4
1) L'arabe et le kurde sont les deux langues officielles de
l'Irak. Le droit des Irakiens d'instruire leurs enfants dans leur langue
maternelle est garanti, comme le turkmène, le syriaque et l'arménien, dans
des établissements d'enseignement publics, conformément aux directives
éducatives, ou en toute autre langue dans des établissements
d'enseignement privés.
2) La portée du terme de langue officielle et les moyens
d'appliquer les dispositions du présent article seront définis
conformément à la loi qui doit inclure :
a) La publication du Journal officiel en deux langues;
b) Les discours, communications et manifestations dans leurs formes
officielles, telles que le Conseil des représentants, le Conseil des
ministres, les tribunaux et les conférences officielles, dans chacune des
deux langues;
c) La reconnaissance et la publication des documents et correspondances
officiels en deux langues;
d) Les écoles publiques qui enseignent les deux langues, conformément
aux directives d'enseignement;
e) L'usage des deux langues dans toute disposition décrétée en vertu du
principe de l'égalité comme les billets de banque, les passeports et les
timbres.
3) Les institutions et agences fédérales dans la région
du Kurdistan doivent employer l'arabe et le kurde.
4) Le turkmène et le syriaque sont deux autres langues
officielles dans les unités administratives au sein desquelles elles
représentent une densité d'occupation.
5) Chaque région ou gouvernorat peut adopter une autre
langue locale comme une langue officielle complémentaire si la majorité de
sa population en décide lors d'un référendum général. |
L’arabe et le kurde sont maintenant les deux
langues officielles de l’Irak. Il en résulte que le kurde est devenu la
cinquième langue officielle au
Proche-Orient, après l'arabe, le farsi (iranien
ou persan), le turc et l’hébreu.
De plus, les autres minorités (chaldo-assyrienne et
turkmène) ont le droit d’utiliser leur langue dans leurs établissements
d'enseignement et les entités administratives locales.
Les sunnites avaient demandé que seul l'arabe soit la langue
officielle de l'Irak et le kurde, la langue officielle pour le Kurdistan, ce que
refusaient les Kurdes. De plus, les Kurdes ont réussi à obtenir que soient
mentionnées les autres langues, telles que le turkmène et le syriaque, et le
droit de ces minorités de faire instruire leurs enfants dans leur langue
maternelle.
Quant à l'article 125, il garantit des droits administratifs,
politiques, culturels et éducatifs aux diverses nationalités, telles que les
Turkmènes, les Chaldéens, les Assyriens et tous les autres composants du pays:
Article 125 :
La présente Constitution garantit les droits administratifs,
politiques, culturels et éducatifs aux diverses nationalités, telles que
les Turkmènes, les Chaldéens, les Assyriens et toutes les autres composantes
du pays. Il en sera prévu ainsi conformément à la loi. |
Le Kurdistan conserve son statut
d'autonomie dans le cadre d'une fédération, alors que les autres provinces du
pays pourront élaborer un éventuel gouvernement local, en attendant que cette
question soit réglée par un gouvernement dûment élu.
L'islam continue d'être la religion
officielle de l’État et l’une des sources de législation, tout en garantissant
la liberté totale de toutes les autres religions et de leurs pratiques.
2 Les
problèmes dans l'emploi
des langues
Rappelons qu'en vertu de la
Constitution de 2005 l'Irak est
devenu officiellement bilingue sur tout le territoire,
non seulement au Kurdistan. Au Parlement fédéral,
l'arabe et le kurde sont utilisés lors des débats
parlementaires et dans la rédaction et la promulgation
des lois. Ainsi, la publication du Journal officiel
est assurée dans les deux langues, de même que
l'examen et la publication des documents officiels. Au
sein du gouvernement, les deux langue sont également
admises. L’administration et la justice doivent utiliser
les deux langues dans leur fonctionnement. C'est
pourquoi les billets de banque, les passeports et les
timbres doivent être en arabe et en kurde.
Toute
région ou
tout
gouvernorat
peut
adopter
une autre
langue
locale
comme
langue officielle
supplémentaire, si
la
majorité
de la
population
en décide
ainsi
lors d'un
référendum
général.
Par le fait même, la
Loi n° 64 sur la
préservation de l'intégrité de la langue arabe
de 1977 n'est plus appliquée, bien qu'elle soit encore en vigueur. À cette
époque, le gouvernement croyait que
l'arabe devait être l'affirmation de la personnalité de la nation et
de ses représentations, et devenir un facteur de son unité. C'est
sur cette base que l'Académie scientifique irakienne devait jouer un
rôle important. Les articles 1 et 4 portaient sur les obligations
des ministères et des organismes publics d'employer l'arabe ou d'ajouter une
traduction en arabe:
Article 1er
Les ministères et leurs départements, leurs institutions, leurs intérêts
et leurs organismes publics officiels et semi-officiels, ainsi que les
associations, les syndicats et les organisations populaires, s’engagent
à préserver l’intégrité de la langue arabe et à l’adopter dans leurs
documents et leurs transactions en rendant la langue arabe
adaptée à ses objectifs nationaux et culturels.
Article 4
Les documents suivants doivent être
rédigés en arabe:
Premièrement: documents,
mémorandums, correspondance et autres documents soumis aux services
officiels et semi-officiels, y compris les services publics, les
institutions et les organismes, et si ces documents sont rédigés
dans une langue étrangère leur
traduction arabe doit y être jointe.
Deuxièmement : dossiers, procès-verbaux
et autres documents que les représentants du gouvernement et des
institutions ont le droit de consulter et d’inspecter
conformément aux lois et aux règlements.
Troisièmement: les contrats, les reçus
et les correspondances échangés entre des institutions, des
associations ou des entreprises publiques ou entre elles et des
particuliers, peuvent être accompagnés d’une traduction dans une
langue étrangère si nécessaire.
Quatrièmement: les panneaux placés
par les institutions et les entreprises commerciales ou
industrielles sur les façades de leurs magasins, et cela peut être
écrit en cas de besoin, dans une langue étrangère
aux autorités de langue arabe, à la condition
que l’écriture en arabe soit plus grande et plus visible en place.
|
Les articles 5 et 6 de la
Loi n° 64 sur la
préservation de l'intégrité de la langue arabe
imposaient l'arabe dans les appellations commerciales ainsi que sur les
étiquettes:
Article 5
Les marques, les données commerciales,
les brevets et les modèles qui prennent une forme distinctive,
tels que les noms, les signatures, les mots, les lettres, les
chiffres, les adresses de magasins, les sceaux et les
bas-reliefs, doivent être rédigés
en arabe.
Il n’est pas permis d’enregistrer une
marque qui prend l’une de ces formes
à moins qu’elle ne soit rédigée en arabe.
Toutefois, cela n’empêche pas le commerçant d’enregistrer une
marque écrite dans une langue étrangère autre que la langue
arabe, à la condition que la langue arabe soit plus grande et
que la présentation en soit mis en évidence.
En ce qui concerne les marques commerciales qui ont été
enregistrées avant l’entrée en vigueur de la présente loi et qui
ne répondent pas aux prescriptions du présent article, le
propriétaire de celles-ci doit présenter une nouvelle demande
d’enregistrement après les avoir modifiées et rédigées en arabe
dans les six mois suivant la date d’entrée en vigueur de la
présente loi.
Article 6
Doivent être rédigées en arabe les
données commerciales relatives à toute marchandise produite en
Irak et l'étiquette en arabe doit
être apposée sur les produits et marchandises importés de
l’étranger, y compris les données commerciales relatives à la
détermination de leur valeur, et ils peuvent être rédigés dans
une langue étrangère en plus de la langue arabe en ce qui
concerne les marchandises importées de l’étranger ou destinées à
être exportées à l'extérieur de l'Irak.
|
Quant à l'article 2, il obligeait les établissements
d'enseignement à employer l'arabe:
Article 2
Les établissements d’enseignement à
tous les stades d’études doivent
adopter la langue arabe comme langue d’enseignement,
et ils doivent assurer son intégrité orale et écrite, et former
les étudiants à l’exprimer et à y réfléchir, ainsi qu'à réaliser
ses avantages et sa fierté.
|
Il faut ajouter que la
Loi n° 64 sur la
préservation de l'intégrité de la langue arabe avait pour but
réel d'interdire l'emploi de la langue kurde. En 1987, Saddam
Hussein apporta des modifications à l'article 11 (voir
les modifications). Évidemment, la loi est demeurée plus ou
moins appliquée, faute de mécanismes exécutifs pour en assurer la
mise en vigueur.
Abstraction faite que les portraits de Saddam Hussein
soient disparus, l'État irakien n'est pas encore parvenu à
appliquer le bilinguisme officiellement reconnu par la
Constitution. Depuis 2005, aucune des dispositions sur
le bilinguisme n’as été mise en œuvre,
à l'exception de la Région autonome du Kurdistan. Les
tribunaux ne sont pas accessibles en une autre langue
que l'arabe, sauf dans la région autonome du Kurdistan.
Les décisions de la Cour suprême fédérale irakienne et
les débats parlementaires ne se font qu'en arabe.
La
politique de
la double
attribution des toponymes, soit en arabe et en kurde,
n'est
appliquée
que dans
les trois
provinces
d'Erbil,
de
Souleimaniyeh et de
Dohouk.
Quoi qu'il en soit,
il n'existe
aucun organisme pour créer pour normaliser
les
toponymes
ou noms
géographiques
au niveau
national.
La monnaie et les timbres n'apparaissent qu'en arabe et,
lorsqu'ils sont bilingues, c'est en anglais.
Cette inadéquation entre les
préceptes de la Constitution et la réalité n'est pas
étrangère au fait que les minorités ne participent pas à
la vie politique du pays. Non seulement les sunnites ont
été écartés du pouvoir au profit des chiites, mais
également toutes les minorités nationales. Les nouvelles
autorités fédérales semblent ignorer que l'Irak
est un pays
multi-ethnique
et
multiconfessionnel.
Or, le partage des pouvoirs et le respect des droits des
minorités constituent
l'une des
composantes
essentielles pour
construire et
développer un
pays.
Toute politique linguistique qui ne tient pas compte de
cette réalité est vouée à l'échec.
LIrak a toujours été un pays unilingue arabe dirigé de main de maître, sauf dans la région
kurde laissée à elle-même depuis la guerre du Golfe de 1991. La reconnaissance des
langues des minorités nationales nest restée que formelle dans la Constitution,
sauf pour le kurde dans leur région autonome, mais les petites langues telles lazéri, le syriaque, le farsi, le
turkmène, larménien, etc., attendent encore leur tour. Même avec la
Constitution qui reconnaît deux langues officielles,
l'arabe est resté bien ancrée dans les mœurs, y compris
dans la région kurde. La figure ci-dessous illustre que
l'arabe et le kurde et/ou l'anglais sont parfois apposés
sur des inscriptions routières bilingues, mais les
inscriptions unilingues arabes ou avec l'anglais sont
monnaie courante en Irak.
3 Le système d'éducation irakien
L’actuel système d’éducation en
Irak a été mis sur pied par les Britanniques dans les années 1920. Peu d'enfants
fréquentaient alors les écoles publiques. Lorsque l’Irak est devenu une
république en 1958, seule 20 % de la population pouvait lire et écrire. Ce
pourcentage a certes beaucoup augmenté depuis, grâce aux efforts du gouvernement
qui a fait construire des écoles et encouragé les études. Entre 1976 et 1986, le
nombre d'élèves du primaire a
augmenté de 30 %, alors que le nombre d'enseignants du primaire a augmenté de 40
% au cours de cette même période. Au niveau secondaire, le nombre d'élèves a
augmenté de 46 %. Le nombre des élèves inscrits dans les écoles primaires et
secondaires en Irak était la plus élevée dans cette région du
Proche-Orient.
Avant la guerre, le gouvernement avait fait des progrès considérables dans la
réduction de l'extrême concentration des établissements d'enseignement primaire
et secondaire dans les principales villes, notamment à Bagdad. L'enseignement
professionnel, qui avait été notoirement insuffisantes en Irak, a reçu une
attention considérable officielle dans les années 1980. En même temps, le nombre
d'étudiants qui désiraient poursuivre des études supérieures dans les années
1980 avait aussi considérablement augmenté. Sous le régime de Saddam Hussein,
l'enseignement n'était offert qu'en arabe, sauf dans les régions kurdes.
3.1 La situation
actuelle
Une étude de 2010 sur la portée du système
d'éducation en Irak indiquait que, malgré des améliorations considérables depuis
2003, l'ensemble du système d'éducation nécessitait des investissements
substantiels pour surmonter l'héritage du conflit irakien. Non seulement, l'Irak
manque d'écoles en nombre considérable, mais environ 70 % des écoles existantes
manquent d'eau potable et de latrines. Les équipements concernant les
laboratoires de sciences, les bibliothèques, etc., sont dans un état de
délabrement ou sont non fonctionnels. Toutes les écoles situées dans les zones
dangereuses sont fermées. L'absentéisme des enseignants et celle des filles a
atteint un niveau élevé, en raison de la menace à la sécurité des enfants. Plus
de 20 000 enseignants ont été déplacés pour des raisons de sécurité. Bref, le
système d'éducation en Irak est dans un état de délabrement avancé. Malgré les
défis quotidiens sans fin, le système d'éducation continue néanmoins de
fonctionner.
En Irak, le système d’éducation est placée
sous le contrôle de l’État fédéral et demeure très centralisé. Le processus de
décision relève de trois juridictions: d'une part, les autorités locales qui sont
responsables de la maternelle et de l’enseignement primaire, d'autre part, le
ministère de l’Éducation qui est chargé de l’enseignement secondaire, ainsi
que de la formation générale, professionnelle et enseignante. Il faut ajouter
aussi le ministère de l’Éducation supérieure et de la Recherche scientifique,
lequel est responsable de l'administration des universités.
Le degré d'alphabétisation était de 79 % en
2012. En 2010, plus de 78 % des enfants avaient terminé leur école primaire,
mais ce taux tombe à 61,3 % pour le secondaire.
3.2 L'enseignement
primaire
L’enseignement préscolaire est
d'une durée de deux ans et scolarise les enfants à partir de l’âge
de quatre ans.
Matières
|
Nombre de séquences hebdomadaires
par année
|
|
1re |
2e
|
3e
|
4e
|
5e
|
6e
|
Éducation
islamique |
4 |
4 |
4 |
4 |
4 |
4 |
Arabe et
calligraphie |
11 |
11 |
11 |
11 |
7 |
7 |
Anglais
|
- |
- |
- |
- |
4 |
4 |
Mathématiques
|
6 |
6 |
6 |
6 |
5 |
5 |
Instruction civique
|
- |
- |
- |
3 |
1 |
1 |
Histoire |
- |
- |
- |
- |
2 |
2 |
Géographie
|
- |
- |
- |
- |
2 |
2 |
Éthique et éducation sociale
|
1 |
1 |
1 |
1 |
- |
- |
Science |
4 |
4 |
4 |
3 |
3 |
3 |
Éducation agricole
|
- |
- |
- |
1 |
1 |
1 |
Éducation technique
|
2 |
2 |
2 |
2 |
1 |
1 |
Éducation physique
|
3 |
3 |
3 |
2 |
2 |
2 |
Musique et chants patriotiques
|
1 |
1 |
1 |
1 |
1 |
1 |
Éducation familiale
|
- |
- |
- |
- |
1 |
1 |
Nombre total de séquences
hebdomadaires
|
32
|
32
|
32
|
34
|
34
|
34
|
|
L’enseignement primaire dure six ans et compte deux cycles : le
cycle intermédiaire et le cycle préparatoire. Le cycle intermédiaire
dure trois ans, pour les élèves âgés de 12 à 14 ans. Le cycle
préparatoire est également d'une durée de trois ans; il est conçu
pour préparer les élèves au marché du travail ou à l’université.
Comme l'indique la tableau ci-dessous, l'arabe est enseigné au
primaire à tous les enfants, y compris aux membres des minorités
nationales, en tant que langue d'enseignement et l'anglais comme
langue étrangère à partir de la 5e
année. On constate que l'enseignement de l'arabe, avant la 5e
année, occupe une grande part de l'enseignement hebdomadaire avec 11
heures sur 32. Le programme diffère quelque peu au Kurdistan.
Conformément à
l'article 4
de la
Constitution de 2005,
l'arabe et le kurde
sont identifiés comme
les
deux
langues officielles
de l'Irak. |
En outre, les
autres langues, comme le
turkmène,
le syriaque
et
l'arménien,
sont en principe assurées d'être
enseignées dans les
établissements scolaires
publics, mais pour le moment aucune école n'enseigne dans ces langues
minoritaires.
3.3 L'enseignement secondaire
Le cycle intermédiaire de l’éducation
secondaire dure trois ans. À ce stade, une place importante est accordée à
l’enrichissement de la langue et à la formation générale à raison de 6h/semaine
pour l'arabe et au moins 5 h/semaine pour l'anglais. Au secondaire, les
élèves suivent aussi des cours d'éducation scientifique, de mathématiques, de
chimie, de physique, de biologie, y compris un entraînement militaire. Tous les
élèves suivent le même programme d’études. L’enseignement professionnel
préparatoire a comme mission de préparer les élèves à exercer des professions ou
à étudier à l’université.
Il n’existe pas
d’établissement d'enseignement privé aux niveaux primaire et secondaire.
La durée de la
scolarisation universitaire dans laquelle les étudiants sont admis à la fin de
leurs études secondaires s’échelonne entre trois et six ans.
3.4 L'enseignement supérieur
La durée de l’enseignement universitaire, dans laquelle les étudiants sont
admis à la fin de leurs études secondaires, peut s’échelonner entre trois et six
ans. Les étudiants sont admis dans des collèges et dans des universités afin de
poursuivre leurs études dans divers domaines de spécialisation tels les arts,
les sciences, la médecine, l’ingénierie, etc. Certains programmes de cinq ans
conduisent à un baccalauréat en architecture, en chirurgie dentaire, en
pharmacie, en médecine et en chirurgie vétérinaire. Les programmes qui mènent au
baccalauréat en médecine ou en chirurgie sont d’une durée obligatoire de six
ans.
Dans toutes les universités du pays, plus
d'une vingtaine, les cours ne sont offerts qu'en arabe et en anglais.
3.5 Les écoles «ethniques»
L'un des problèmes les plus importants en éducation concerne les écoles
«ethniques», celles destinées aux minorités nationales.
Ces minorités
sont
soumises à des restrictions
linguistiques
graves
qui ont nécessairement un impact
de leurs
droits à la liberté
d'expression.
Les Turkmènes,
par exemple, l'une des plus
importantes minorités, ne peuvent recevoir une
enseignement dans leur
langue dans les écoles
malgré les garanties
constitutionnelles (art. 125).
Il en est ainsi des
Chaldéens et des Assyriens.
Dans la plupart des cas,
le déni des droits
linguistiques
a un effet
néfaste sur
la survie des petites
langues minoritaires.
Toutes ces langues risquent de se
voir inscrire dans les langues en voie de disparition par l'Unesco.
Or, il faudrait que le
ministère de l'Éducation prépare de nouveaux programmes dans toutes les matières
pour chacune des langues «ethnique» dans les écoles primaires, qu'il élabore des
programmes pour apprendre l'arabe comme langue seconde au secondaire,
qu'il révise les programmes d'enseignement de l'histoire
et de la religion afin d'encourager la promotion du pluralisme et l'acceptation
des autres, qu'il ouvre de nouvelles écoles et facilite l'ouverture d'écoles
ethniques privées, notamment au secondaire.
Les autorités centrales ne
semblent pas prêtes à adopter des mesures pour redresser la situation. Quand on
sait que le gouvernement fédéral interdit de poser des enseignes commerciales en
d'autres langues que l'arabe, il faut admettre que,
pour le
moment, les droits constitutionnels des petites minorités ne sont guère
respectés.
Rappelons que les anciennes lois discriminatoires à l'égard des minorités,
qui ont été adoptées sous l'ancien régime, sont demeurées en vigueur. Afin
d'abroger ces lois, il est devenu nécessaire d'en adopter de nouvelles afin de
mieux protéger les minorités. Dans l'état actuel, le Parlement est incapable
d'adopter quoi que ce soit. C'est pourquoi la situation des minorités se
détériore de jour en jour en Irak, parce que celles-ci ne bénéficient pas d'une
protection juridique adéquate. Ainsi, le nombre de ceux qui émigrent à
l'étranger augmente continuellement.
4 La situation des médias
Sous le régime de Saddam Hussein, les médias étaient limités et entièrement
contrôlés par l'État. Il existait un réseau de nouvelles appelé «Agence
irakienne de nouvelles», qui fonctionnait uniquement comme porte-parole du
régime. Tout support autre que ce réseau était formellement interdit, alors que
les antennes paraboliques étaient illégales, bien que certains individus ou
organismes aient pu parfois contourner cet interdit. À l'époque, il n'y avait
que cinq journaux, une chaîne de télévision et quatre stations de radio
appartenant au gouvernement irakien.
Après l'occupation américaine de 2003, l'interdiction des antennes
paraboliques fut levée et, dès le mois de juin, étaient apparus, selon un
rapport de la BBC, 20 stations de radio, 15 à 17 stations de télévision et plus
de 200 journaux irakiens. L'Agence irakienne de nouvelles a continué à
fonctionner, mais est devenue un organisme indépendant, en concurrence avec
l'agence Aswat al-Iraq, l'Anadolu Ajansi de Turquie, l'Associated Press des
États-Unis, la Deutsche Presse-Agentur d'allemagne, l'Informatsionnoye
Telegrafnoye Agenstvo Rossii–Telegrafnoye Agenstvo Suverennykh Stran (ITAR-TASS)
de la Russie, Reuters de la Grande-Bretagne et la Xinhua News Agency de la
Chine.
Du côté de la presse écrite, les quotidiens ayant le plus grand tirage sont
tous publiés à Bagdad en arabe: Al Mada, Al Mutamar, Al Sabah et Al Zaman.
Il existe au total plus d'une trentaine de journaux, dont quelques-uns au
Kurdistan: Rozhnama, The Hewler Globe (Erbil), Hawlati, Awene, Xebat, Shock
Magazine, Mangish, etc.
Les stations de radio sont nombreuses et la plupart diffusent en arabe, mais
quelques-unes le font en kurde, en anglais ou dans ces deux langues, et une
seule diffuse en arabe et français (Radio Monte Carlo Doualiya). Pour la
télévision, on compte au moins 25 stations qui diffusent surtout en arabe, mais
l'anglais et le kurde sont aussi très présents. Des émissions sont diffusées en
assyrien et en turkmène.
5 Le monde des affaires
En Irak comme ailleurs dans le monde, l'anglais est perçu comme la langue de
la modernité, beaucoup plus que l'arabe ou le kurde. On peut affirmer que, pour
les petits commerçants et les affaires locales, l'arabe et le kurde sont
normalement employés. Ainsi, l'article 12 du
Règlement d'accréditation des entités politiques (2008) impose
la publication des accréditation des entités politiques dans au moins deux
langues, l'arabe et le kurde:
Article 12
1) La IHEC (Haute Commission électorale indépendante) informera
l'entité politique que la IHEC a accepté sa demande en publiant sur
le site électronique de l'IHEC puis en apposant sur le tableau
d'affichage
du bureau électoral, pour qui la présentation a été produite, ainsi
si que sur le tableau d'affichage du Bureau national électoral à Bagdad.
2) En cas de refus, IHEC informera l'entité politique à ce sujet
par la publication de la décision sur le site électronique de l'IHEC
et dans trois quotidiens pendant trois jours au moins et dans les
deux langues, l'arabe et le kurde. |
Par contre, l'article 8 du
Règlement d'exécution des
contrats administratifs (2008) oblige que ceux-ci soient rédigés
en arabe, en kurde et en anglais si c'est possible:
Article 8
Préparation de l'élaboration du contrat :
1) Tous les ministères et les organismes
qui ne sont pas affiliés à un
ministère doivent organiser leurs contrats en coordination avec les
services techniques et financiers, et les organismes
bénéficiaires; ces contrats doivent comporter des dispositions reliées aux conditions
ou aux invitations
d'appel d'offres en précisant que des conditions
supplémentaires convenues entre les parties garantissent la
sécurité de mise en œuvre selon les modèles de contrats émanant du
service des contrats publics du ministère de la Planification et
de la Coopération au développement.
7) A. Les contrats doivent être
rédigés en arabe, en kurde et en
anglais si c'est possible.
B. Le document d'appel d'offres détermine la version qui prévaut en
cas de divergence d'interprétation. |
Depuis l'intervention américaine, l'anglais est de plus en
plus utilisé dans le domaine des affaires.
L'Irak a été en état de guerre
durant plus de vingt-deux ans, sans répit : guerre contre l'Iran de 1980 à 1988, guerre
économique contre le Koweït de 1988 à 1990, guerre menée par les États-Unis
pour l'expulser du Koweït en 1990-1991, et guerre de sanctions de l'ONU depuis
1990. Dans ces conditions, le patriotisme est de rigueur. La guerre de la part
des États-Unis n'a pas arrangé les choses, d'autant plus que les
Arabes irakiens estimaient qu'il s'agissait d'une «guerre injuste».
Pourtant, dans le passé,
Washington n'a jamais eu le moindre scrupule à soutenir Saddam Hussein (dans les
années 1980) et d'autres dictateurs tels que Marcos aux Philippines,
Suharto en Indonésie, le shah en Iran, Somoza au Nicaragua, Batista à Cuba,
Trujillo à Saint-Domingue, Pinochet au Chili, Mobutu au Congo-Kinshasa, etc.
Dans certaines circonstances, les
États-Unis s'accommodent très bien des dictateurs quand cela les arrange!
Ceux qui croient que les États-Unis voulaient intervenir en Irak pour restaurer la démocratie sont bien naïfs. Certains
stratèges sont plutôt convaincus que l'objectif était plutôt de perpétuer la domination
des USA dans le monde en contrôlant
le plus longtemps possible à leur profit les réserves de pétrole irakiennes.
De plus, les
Irakiens ont bien d'autre préoccupations que la protection des minorités.
Au nord, les
Kurdes, bien armés, vivent dans une
quasi-indépendance. Ils ont développé leur propre autonomie aussi loin
qu’ils le pouvaient tout en gérant leurs abondantes ressources pétrolières pour
leur profit. Si l'on en croit les rumeurs, les Kurdes ne tiennent pas à participer au
pouvoir à Bagad; leur participation se limiterait à des activités
parlementaires.
Depuis leur quasi-indépendance de 1991 et la constitution de l'État fédéral en
2005, les Kurdes
se sont prêtés au jeu; ils
ont participé non seulement
à la création
de l'État fédéral, mais
aussi à son fonctionnement. Aujourd'hui, rien ne va plus, les Kurdes étant à
bout de patience, car rien ne bouge au Parlement fédéral. Il n'est pas certain
que le Kurdistan irakien soit prêt à sauver
l'Irak de la désintégration.
Pour le moment, les Kurdes,
profitant de l'affaiblissement du gouvernement de Bagdad, se positionnent afin
de garantir l'intégrité de leur État et de leur souveraineté.
Dans l'ouest du pays, la
minorité sunnite
milite pour ne plus être exclue au sein de l'appareil de l'État et de l'armée,
tout en écoutant les représentants les plus extrémistes du groupe armé État islamique.
Ils risquent de vivre des jours sombres dans leur portion la plus démunie du
pays, car ce sont les djihadistes de l'EI qui prendraient le pouvoir pas les
sunnites irakiens.
Les
minorités
ethniques (Turkmènes, Arméniens, etc.) et religieuses (chrétiens, yézidis, etc.)
revendiquent une représentation politique, tant au point de vue local que
nationale.
Les
chiites ont repris les rênes du
pouvoir, mais ils sont plus ou moins apparentés à la révolution
islamique iranienne. À Bagdad et dans
le Sud, les imans de la majorité chiite, longtemps réprimée et exclue du
pouvoir, prennent déjà le contrôle des communautés. En fait, les
chiites, majoritaires ont entrepris de coloniser à leur profit l'État central
redevenu autoritaire. En même temps, les chiites craignent la prise du pouvoir
par les djihadistes de l'EI, financés par les monarchies du Golfe, qui veulent
la restauration du Califat.
Dans le futur, sans reconnaissance de la spécificité des chiites
comme des sunnites, mais aussi des Kurdes, des Turkmènes et des Assyriens, sans
tout cela, il n'y aura jamais de coexistence pacifique dans ce pays miné par les
guerres et les conflits ethniques. Le régime de Saddam Hussein avait
contenu les velléités des différentes communautés ethno-confessionnelles par son
autoritarisme, tout en poursuivant pendant des années des discriminations et des
répressions, engendrant des haines confessionnelles qui s'imposent violemment
aujourd'hui. On dirait que la mosaïque irakienne semble se développer sur fond
de «guerre sainte». Il s'agit aussi d’une crise politique profonde qui a poussé
les communautés exclues du pouvoir à privilégier des solutions militaires.
Dernière mise à jour:
22 déc. 2023
Irak
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