Province de la Frontière
du Nord-Ouest

Khyber Pakhtunkhwa

Province de Khyber Pakhtunkhwa
 
Capitale: Peshawar
Population: 20,2 millions (2008)
Langue officielle: ourdou
Groupe majoritaire: pachtou (60
%)
Groupes minoritaires:
hindko, seraiki, balti, kohistani, shina, bourouchaski, pahari-potwari, bateri, gawri, kashmiri, khowar, torwali, dameli, etc.
Système politique: l’une des quatre provinces de la République islamique du Pakistan
Articles constitutionnels (langue): art. 28, 251 et 255 de la Constitution fédérale de 1973
Lois linguistiques: 
Ordonnance sur l'administration locale de la Frontière-du-Nord-Ouest (2001); Khyber Pakhtunkhwa Local Government Act, 2013.

1 Situation géopolitique

La province de la Frontière-du-Nord-Ouest (en anglais: North-West Frontier Province ou NWFP ou PFNO en français) ou Khyber Pakhtunkhwa fait partie de l’une des quatre provinces de la République islamique du Pakistan. Cette province de 74 521 km², la plus petite du pays (Pakistan: 803 940 km²), est située au nord-ouest du pays. La province de la Frontière-du-Nord / Khyber Pakhtunkhwa est bornée au sud par la province du Baloutchistan, à l'est par la province du Panjab et le territoire de l'Azad-Cachemire, au nord par l'Afghanistan et les territoires du Nord (voir la carte). Sa capitale est Peshawar (1,3 million d'habitants). La NWFP est souvent appelé Sarhad par les Pachtounes. Même dans les textes de loi, on trouve comme appellation «North-West Frontier Province Sarhad».

Le Pakistan forme une république fédérale islamique divisée en quatre provinces avec chacune son Chief Minister («ministre en chef») et son assemblée législative: le Baloutchistan (frontière sud-ouest avec l’Iran et l’Afghanistan), la province de la Frontière du Nord-Ouest («North-West Frontier»: à la frontière nord-ouest avec l’Afghanistan), le Panjab (frontière nord-est avec l’Inde) et le Sind (frontière sud-est avec la mer d’Oman et l’Inde). Depuis le 19 avril 2010, la province Frontière-du-Nord-Ouest était dorénavant appelée Khyber Pakhtunkhwa.

Le nom de Pakistan a été formé en 1940 à partir des initiales (en ourdou) des provinces de l'époque dont on souhaitait la séparation d'avec l'Inde: Penjab, Afghania, Kashemire, Sind, Balouchistan. Quatre de ces cinq régions sont aujourd'hui des provinces pakistanaises, le Cachemire restant un territoire disputé entre l'Inde et le Pakistan, alors que l'Afghania correspond à la province de la Frontière du Nord-Ouest.

Le gouvernement provincial, présentement dirigé par une coalition de partis islamistes fondamentalistes, réclame depuis 2007 auprès du gouvernement pakistanais un nouveau nom pour la province afin d'affirmer davantage l'identité pachtoune et signaler ainsi la volonté du gouvernement local à une plus grande autonomie. Ce sont les colonisateurs britanniques qui ont désigné cette région après l'avoir annexée au XIXe siècle à la suite de violents combats avec les tribus pachtounes de l'Afghanistan. Le gouvernement de la province de la Frontière du Nord-Ouest a créé une commission pour choisir un nouveau nom: Afghania l'a emporté sur Pukhtoonistan («Pachtounistan»), Pukhtoonkhwa, Khyber et Sarhad. Cependant, pour modifier le nom d'une province, il faut modifier la Constitution nationale en requérant aussi une majorité des deux tiers des membres du Parlement national.

2 Données démolinguistiques

Dans cette province de quelque 20 millions d'habitants, la principale ethnie est constituée des Pachtounes, qui se répartissent d'ailleurs entre le Pakistan (Baloutchistan Frontière-du-Nord-Ouest) et l’Afghanistan. Le pachtou est la première langue en importance au point de vue numérique, car elle est parlée par au moins 60 % des locuteurs. C'est pourquoi les Pachtounes appellent souvent cette province Pakhtunkhwa, ce qui signifie «terre des Pachtounes» en pachtou; d'autres Pakistanais l'appellent aussi Sarhad, en ourdou.

Selon le Frontier Language Institute (2004), l'Institut des langues de la Frontière, il existe près de 70 langues au Pakistan, dont 27 parlées dans la province de la Frontière-du-Nord-Ouest et 12 langues seulement dans le district de Chitral, un territoire possédant l'une des plus grandes diversités linguistique au monde. Citons le hindko, le seraiki, le balti, le kohistani, le shina, le bourouchaski, le pahari-potwari, le bateri, le gawri, le kashmiri, le khowar (ou chitrali), le torwali, le dameli, etc. Le tableau ci-dessous présente la liste complètes de ces langues.

 
Langue Locuteurs Localisation Affiliation linguistique
Pachtou 12 400 000 tous les districts branche iranienne (indo-iranienne)
Hindko 2 000 000 Peshawar, Kohat, Haripur branche indienne (indo-iranienne)
Seraiki 800 000 Dera Ismail Khan branche indienne (indo-iranienne)
Balti 270 000 Chitral, Gilgit famille sino-tibétaine
Kohistani 200 000 Kohistan branche indienne (indo-iranienne)
Shina 200 000 Kohistan, Gilgit branche indienne (indo-iranienne)
Bourouchaski 58 000 Chitral, Swat, Kohistan, Gilgit isolat linguistique
Pahari-potwari 50 000 Haripur, Abbottabad branche indienne (indo-iranienne)
Bateri 30 000 Kohistan branche indienne (indo-iranienne)
Gawri 20 000 Swat, Dir branche indienne (indo-iranienne)
Kashmiri 20 000 Mansehra, Abbottabad branche indienne (indo-iranienne)
Khowar (ou chitrali) 20 000 Chitral, Swat, Gilgit branche indienne (indo-iranienne)
Torwali 20 000 Swat branche indienne (indo-iranienne)
Dameli   5 000 Chitral branche indienne (indo-iranienne)
Chilisso   2 000 Kohistan branche indienne (indo-iranienne)
Kalasha   2 000 Chitral branche indienne (indo-iranienne)
Kalkoti   2 000 Dir, Kohistan branche indienne (indo-iranienne)
Palula   2 000 Chitral branche indienne (indo-iranienne)
Wakhi   2 000 Chitral branche iranienne (indo-iranienne)
Yidgha   2 000 Chitral branche iranienne (indo-iranienne)
Kamviri   2 000 Chitral langue indo-iranienne (nuristanie)
Gawar-bati   1 000 Chitral branche indienne (indo-iranienne)
Domaaki     200 (Gilgit) branche indienne (indo-iranienne)
Gowro     200 Kohistan branche indienne (indo-iranienne)
Gojri     200 toute la province branche indienne (indo-iranienne)
Kundal     200 Mansehra, Abbottabad branche indienne (indo-iranienne)
Ushojo     200 Swat branche iranienne (indo-iranienne)
Source: Frontier Language Institute, 2004      
Dans cette liste de langues du tableau ci-haut, on constatera que 25 langues sur 27 appartiennent à la famille indo-européenne.

La plupart de ces langues font partie de la branche indienne ou aryenne du groupe indo-iranien; elles sont aussi qualifiées de «langues dardiques»: dameli, gawar-bati, kalasha, kashmiri, khowar (chitrali), kohistani, palura, sawi, etc.

Le balti est une langue de la famille sino-tibétaine, alors que le bouroushaski est un isolat linguistique n'appartenant à aucune famille. 

Si plusieurs langues numériquement plus faibles (chilisso, kalasha, kalkoti, palula, wakhi, yidgha, kamviri, gawar-bati, domaaki, gowro, etc.) sont concentrées dans certains districts de la province, il n'en est pas ainsi du pachtou (branche iranienne) qui est répandu dans presque tous les districts de la province.

Au risque de simplifier un peu la situation, on peut dire que le tiers des locuteurs de cette province fait partie d'une minorité linguistique, notamment le hindko, le seraiki, le balti, le kohistani et le shina, qui sont parlés par 200 000 locuteurs ou plus. Il existe d'autres langues non répertoriées par le Frontier Language Institute (Institut des langues de la Frontière), dont le gujjar, le kirghiz, le persan (tadjik).

3 L’ourdou comme langue officielle de la fédération

Étant donné que le Pakistan est aux prises avec de multiples tensions sécessionnistes découlant des nombreuses ethnies composant le pays, la tâche principale des gouvernements pakistanais, par ailleurs souvent contrôlés par les Ourdous, les Sindhis et les Panjabis, a toujours été de promouvoir l’unité nationale constamment menacée. C’est pour cette raison que l’ourdou a été choisi comme instrument de l’unité nationale, d’autant plus que cette langue jouissait d’un grand prestige (avec l’hindi), qui lui venait de son statut en Inde, et possédait une tradition écrite très développée. En fait, l’ourdou était déjà, au moment de la partition (avec l’Inde), une langue supra-ethnique et un véhicule linguistique perfectionné et développé.

En 1947, il était impensable de songer à un multilinguisme officiel au Pakistan étant donné le grand nombre de langues alors qu’aucune n’était majoritaire à l’échelle du pays. De plus, il était impossible de «venir à bout» des langues nationales parlées par des millions de locuteurs. La solution la plus sage a semblé de conserver l’anglais comme langue officielle, statut dont cette langue s’était fort bien acquitté jusque là. C’est pourquoi la Constitution fédérale de 1973, suspendue puis restaurée en 1985 (puis suspendue à nouveau en 2001), semble permettre le multilinguisme. En effet, l’article 28 de la Constitution fédérale déclare ce qui suit:

Article 28

Préservation de la langue, de l'écriture et de la culture

Sous réserve de l'article 251, tout groupe de citoyens ayant une langue, une écriture ou une culture distinctes a le droit de les préserver et d'en faire la promotion et, sous réserve de la loi, de fonder des établissements à ces fins.

Cependant, deux langues seulement sont prévues pour être utilisées à des fins officielles au plan national: l’ourdou, parlé par seulement 7,5 % de la population, et l’anglais, la langue de l’ancien colonisateur. Autrement dit, de toutes les langues nationales du pays, c’est l’ourdou qui a été choisi à des fins officielles. Ainsi, on peut lire à l’article 251.3 de la Constitution fédérale:

Article 251

Langue nationale

1) La langue nationale du Pakistan est l'ourdou, et des dispositions seront prises pour qu'elle soit utilisée aux fins officielles et à d'autres fins dans les quinze années qui suivent la date de la promulgation.

2) Sous réserve du paragraphe 1, la langue anglaise pourra être utilisée à des fins officielles jusqu'à ce que les dispositions nécessaires aient été prises pour qu'elle soit remplacée par l'ourdou.

3) Sans qu'il ne soit porté atteinte au statut de la langue nationale, une assemblée provinciale peut, par une loi, prendre des dispositions pour enseigner, promouvoir et utiliser une langue provinciale en plus de la langue nationale.

On constate que le paragraphe 3 laisse entendre qu’il est possible de rendre co-officielle une autre langue en plus de l’ourdou dans une province. Pour le moment, seule la province du Sind dans le Sud-Est a pu se prévaloir de cette disposition, puisque l’ourdou et le sindhi sont les langues co-officielles de cet État. Dans les autres provinces, l’ourdou est demeuré la seule langue officielle, bien que l’anglais ait conservé un statut non officiel plutôt enviable.

4 Données historiques

Le territoire de l’actuelle province de la Frontière-du-Nord-Ouest est situé au carrefour d'une région stratégique en raison de ses cols reliant l'Asie centrale à l'Inde. D'ailleurs, la région de Peshawar devint, dès le VIe siècle avant notre ère, une importante cité sur la route de la Soie. Le région fut aussi la cible d’invasions successives : Alexandre le Grand (vers 328 avant notre ère, Séleucides, Scythes, Parthes de Perse, Kouchans d’Asie centrale, etc. À la suite de l’invasion musulmane, les tribus pachtounes envahissent aussi la région; ils purent résister à la pénétration mongole jusqu’à la victoire du Moghol Babur (XVIe siècle).

Au XVIIIe siècle, la région fit partie du royaume afghan des Dorrani, puis, un siècle plus tard, passa sous le contrôle des sikhs, au sein du royaume de Lahore à partir du Panjab. Après la victoire des Britanniques sur les sikhs, en 1849, la région fut annexée à l’Inde britannique et forma avec le Panjab une seule entité administrative. En 1901, les deux entités furent séparées, ce qui créait la province de la Frontière-du-Nord-Ouest. En 1933, les Pachtounes ont voulu changer le nom de «Frontière-du-Nord-Ouest» par
Afghania, alors que d'autres noms ont aussi été proposés tels Pakhtunkhwa, Pachtounistan, Pakhtunistan, Pathanistan, Gandhara, Sarhad, Abasin, Khyber ou une combinaison de ces mots, mais aucun ne fut retenu par les autorités britanniques. En 1947, lors de la partition de l’Inde et du Pakistan, la province dite de la «Frontière-du-Nord-Ouest» fut incorporée au nouvel État pakistanais.

En 1956, la province fut intégrée par le gouvernement fédéral aux autres provinces de l’ouest du pays dans la province du Pakistan-Occidental. En 1970, la région redevient une province autonome du Pakistan, avec une Assemblée élue, un gouverneur nommé par le président de la République, etc. Les années 1980 ont vu arriver près de trois millions de réfugiés afghans, surtout à Peshawar, la capitale. C'est depuis ce moment qu'on parle de «talibanisation» de cette province pakistanaise.

Depuis octobre 2002, la province est dirigée par un gouvernement de coalition fondamentaliste élu démocratiquement. L'Assemblée législative de la province a adopté le texte appelé "Shariat Bill", c'est-à-dire la Loi sur la Charia, faisant ainsi de la province pakistanaise la première à adopter cette loi islamique. Après un vote sans opposition, le vote fut accueilli par les membres de l'Assemblée par un cri de triomphe: «Allah est grand! Allah est grand!» Il serait inutile de préciser que la province de la Frontière-du-Nord-Ouest est devenue le foyer traditionnel du fondamentalisme religieux musulman. L'instauration de la Charia réduit de beaucoup les libertés individuelles et crée un système juridique parallèle basé sur la religion.

Puis, en quelques mois, le Parlement bannissait l'alcool, interdisait la musique dans les édifices publics et les autobus, changeait les uniformes des écoles de garçons en remplaçant chemises et pantalons «occidentaux» par la kurta traditionnelle; les filles furent obligées de se couvrir la tête. La loi devint pleinement opérationnelle en 2009 lorsque le président du Pakistan, Asif Ali Zardari, l'a signée. Le ministre provincial de l'Information, Mian Iftikhar Hussain, a précisé: «Toutes les lois contraires à la Charia seront abolies et la justice sera appliquée en vertu de la Charia.» Par la suite, des centaines d'avocats de la province ont perdu leur emploi, les ONG n'ont plus eu le droit de travailler normalement, les vaccins contre la poliomyélite ont été supprimés, les Talibans emprisonnés ont été libérés et la violence contre les femmes est montée en flèche. Un médecin ne peut plus soigner les femmes; les hommes ne peuvent plus regarder les compétitions sportives féminines.

En juillet 2005, l’Assemblée législative de la province a adopté la loi Hisba ("Hisba Bill"): la "North-West Frontier Province Hisba Act, 2005", une loi qui a prééminence sur toutes les autres lois en vigueur. Certaines observateurs y voient une réplique du fameux Département du Vice et de la Vertu des talibans, ce qui accentue ainsi le règne du «fascisme» islamique. Par exemple, l'espionnage et la délation anonyme sont encouragés : tout citoyen peut porter plainte contre une personne auprès du «mohtasib»(mollah) pour non-respect des «valeurs islamiques» (art. 10). Le «mohtasib» est une sorte de «protecteur du citoyen» nommé pour surveiller si les affaires publiques sont en conformité avec la loi de la Charia. Par le fait même, une censure des médias est instaurée pour assurer que ceux-ci fassent «la promotion des valeurs islamiques dans la société» (art. 10-c). La police Hisba est tenue de suivre les ordres du mohtasib et est responsable uniquement devant lui et non devant le chef de la police provinciale (art. 26).

Section 10.

Power and duties of Mohtasib

The Mohtasib shall, on a written or oral complaint of any person, or on reference from the High Court, the Supreme Court or the Provincial Assembly, or suo moto, shall have the authority to-

(a) Enquiries into the allegations of maladministration against any agency or its employees;
(b) Protect/watch the Islamic values and etiquettes;
(c) Watch the media established by Government or working under the administrative control of Government to ensure that its publications are useful to the purpose of upholding Islamic values;
(d) Forbid persons, agencies and authorities working under the administrative control of government to act against Shariah and to guide them to good governance;
(e) Formulate such directives and principles which may help in making the conduct of authorities working under this section to be effective and purposeful;

Article 10

Pouvoir et obligations du mohtasib

Le mohtasib doit, sur une plainte écrite ou orale de la part d'une personne ou sur la référence de la Haute Cour, de la Cour suprême ou de l'Assemblée provinciale, ou de son propre chef, pouvoir :

(a) enquêter sur les allégations de mauvaise administration contre toute agence ou ses employés;
(b) protéger et surveiller les valeurs islamiques et ses règles;
(c) surveiller les médias mis en place par le gouvernement ou travailler sous le contrôle administratif du gouvernement pour s'assurer que ses publications sont utiles dans le but de faire respecter les valeurs islamiques;
(d) interdire les personnes, les organismes et les autorités travaillant sous le contrôle administratif du gouvernement d'agir contre la Charia et les guider dans la bonne gouvernance;
(e) formuler des directives et des principes qui peuvent aider à rendre efficace et utile la conduite des autorités travaillant vertu du présent article;

En principe, la loi visait à éradiquer les pratiques contraires à l’islam par la persuasion douce et la prédication, mais les opposants ont plutôt cru que la loi instaurait la «dictature des religieux». En août 2005, la Cour suprême du Pakistan  a statué sur certaines dispositions de la loi Hasba (articles 10, 12, 23, 25 et 28), notamment sur le fait que l'«ombudsman» religieux n'aurait pas à répondre de ses actes devant les tribunaux. Devant ce fait, la coalition de partis fondamentalistes qui dirige la province de la Frontière-du-Nord-Ouest a proposé une nouvelle version de la loi Hasba, qui prend en compte les recommandations de la Cour suprême. Comme il arrive souvent au Pakistan, le droit du plus fort prime sur la force du droit.

Le 19 avril 2010, la province de la Frontière-du-Nord-Ouest a changé de nom pour Khyber Pakhtunkhwa : Khyber + Pakhtun + khwa. Le mot Khyber reprend un élément géographique important dans la province, le col de Khyber, un col stratégique entre l'Afghanistan et le Pakistan. Le mot Pakhtun désigne les Pachtounes, l'ethnie majoritaire de la province. Quant au mot khwa, il signifie «coeur» en pachtou, ce qui renvoie à «territoire» c'est-à-dire «territoire des Pachtounes».

Constitution (Eighteenth Amendment) Act, 2010

April 19, 2010

Section 1.

Short title and commencement:

1)
This Act may be called the Constitution (Eighteenth Amendment) Act, 2010

2) It shall come into force at once, save as otherwise provided in this Act.

Section 3.

Amendment of Article 1 of the Constitution

In the Constitution of the Islamic Republic of Pakistan, hereinafter referred to as the Constitution, in Article 1, in clause (2), in paragraph (a), for the word "Baluchistan" the word "Balochistan", for the words "North West Frontier" the words "Khyber Pakhtunkhwa", and for the word "Sind" the word "Sindh", shall be substituted.

Section 91.

Amendment of Article 246 of the Constitution.

In the Constitution, in Article 246, in paragraph (a),-

(a) in sub-paragraph (i), for the word "Baluchistan" the word "Balochistan" and for the words "North West Frontier" the words "Khyber Pakhtunkhwa" shall be substituted and the word "and" at the end shall be omitted; and

Loi constitutionnelle de 2010 (18e amendement)

Le 19 avril 2010

Article 1er

Titre abrégé et début

1) La présente loi peut être désignée comme la Loi constitutionnelle de 2010 (18e amendement).

2) Elle entre en vigueur immédiatement, sauf dispositions contraires de la présente loi.

Article 3

Modification de l'article 1er de la Constitution

Dans la Constitution de la République islamique du Pakistan, ci-après dénommée «la Constitution», à l'article 1, paragraphe 2, alinéa a), le mot «Baloutchistan» est remplacé par le mot «Balotchistan», les mots «Frontière-du-Nord-Ouest» par «Khyber Pakhtunkhwa» et le mot «Sind» par le mot «Sindh».

Article 91

Modification de l'article 246 de la Constitution

Dans la Constitution, à l'article 246, paragraphe a),

(a) à l'alinéa i), le mot «Baloutchistan» est remplacé par «Balotchistan», les mots «Frontière-du-Nord-Ouest» par «Khyber Pakhtunkhwa» et le mot «et» doit être omis à la fin;

Des nationalistes pachtounes prétendent que Pakhtunkhwa serait l'ancien nom du territoire habité par les Pachtounes. En fait, le chef pachtoune Khan Abdul Ghaffar Khan (1890-1988) a proposé ce nom en 1978 comme alternative à Pakhtunistan (Pachtounistan) au dictateur militaire Muhammad Zia-ul-Haq (1924-1988), président du Pakistan de 1978 à 1988, lorsque ce dernier a refusé le nom de Pachtounistan pour privilégier celle de la colonisation britannique «Frontière-du-Nord-Ouest». On remarquera aussi que la graphie de Baloutchistan a été remplacée par Balotchistan et Sind par le Sindh. Comme on pouvait s'y attendre, le changement de nom de la province de Frontière-du-Nord-Ouest» a été massivement rejeté par certaines des minorités ethniques, dont les Hindko, les Hazara (Hazaragi), les Chitrali et les Seraiki. 

5 La politique linguistique de la province

La langue officielle du la province de la Frontière-du-Nord-Ouest est l'ourdou, bien qu'il ne soit parlé, comme langue maternelle, que par à peu près personne. Lors que le Parlement provincial n'est pas suspendu, deux langues sont généralement utilisées: l'ourdou (écrit) et le pachtou (oral). Les lois sont discutées en pachtou, mais rédigées en ourdou, sinon en anglais.

L'un des rares textes juridiques faisant allusion à la langue est l'Ordonnance du gouvernent local de la Frontière-du-Nord-Ouest (2001). L'article 41 énonce que l'administration locale peut «encourager les langues nationales et régionales», sans n'en mentionner aucune en particulier. Les articles 52 et 55 mentionnent l'ourdou, ou toute autre langue locale, qui peut être employé dans les marchés ou abattoirs publics:  

Article 41

Culture

L'administration locale concernée peut :

a) établir et maintenir des centres d'information pour la promotion de l'éducation civique et la diffusion de l'information sur des sujets comme le développement communautaire et d'autres questions d'intérêt public;

b) fournir et maintenir des salles publiques et des centres communautaires;

c) célébrer les événements nationaux;

d)
encourager les langues nationales et régionales;

[...]

Article 52

Frais, loyers, redevances, etc., devant être diffusés


Un exemplaire de la table des frais, des loyers et des redevances, le cas échéant, pouvant être perçus par règlement dans tout abattoir ou marché public, en vertu de la présente ordonnance aux fins de réglementation dans l'usage d'un tel abattoir ou marché,
le tout imprimé en ourdou et dans toute autre langue que le conseil local peut choisir, doit être placé dans un endroit visible au marché ou à l'abattoir.

Article 55

Interdiction de maintenir un marché public ou un abattoir sans permis

1)
Nul ne peut garder ouvert pour usage public un marché ou un abattoir lorsqu'un permis est suspendu ou après qu'il ait été annulé.

2) Lorsqu'un permis pour ouvrir un marché public ou un abattoir privé est sous le coup d'une suspension ou d'une annulation, l'administration locale concernée doit placer un avis de l'émission, du refus, de la suspension ou de l'annulation
en ourdou ou dans une autre langue, selon ce qui est jugé nécessaire, dans un endroit visible tout près l'entrée du lieu visé par l'avis.

La version de 2013 de la Khyber Pakhtunkhwa Local Government Act, 2013 ne comporte aucune disposition d'ordre linguistique.

Dans les tribunaux, l’ourdou et l’anglais sont les langues les plus couramment employées, mais en cas de force majeure (une personne ne parlant pas l’ourdou ou l'anglais), d'autres langues peut être utilisées par le recours aux interprètes ou traducteurs. Les documents judiciaires écrits préparés par la cour sont toujours en ourdou.

Dans l’administration publique provinciale, les communications orales se déroulent généralement ourdou, mais aussi en pachtou. Dans certains districts, d'autres langues peuvent être employées à l'oral: le hindko, le seraiki, le balti, le kohistani, le shina, etc. Les documents officiels destinés à l’ensemble de la population sont en ourdou. L'emploi de toute autre langue que l'ourdou n'est pas interdit, mais il n'est jamais encouragé et encore moins reconnu.

En éducation, la situation semble peu positive, car les citoyens de la province habitent dans des villages dispersés, sans route pavée, sans électricité ni téléphone. À cela s'ajoute une gestion financière déficiente et un détournement généralisé des fonds publics. Par ailleurs, les filles sont deux fois moins scolarisés que les garçons, sinon bien davantage dans les campagnes (jusqu'à dix fois). Comme au Baloutchistan, la plupart des enseignants ne possèdent qu'une formation minimale pour enseigner l'écriture et la langue ourdoue. Comme partout au Pakistan (sauf dans la province de Sind), les langues régionales ne sont pas enseignées. C'est l'ourdou qui sert de langue d'enseignement. Pourtant, l'article 251.3 de la Constitution pakistanaise prévoit qu'il est possible d'enseigner, en plus de l'ourdou, une autre langue locale:

Article 251

Langue nationale

1) La langue nationale du Pakistan est l'ourdou, et des dispositions seront prises pour qu'elle soit utilisée aux fins officielles et à d'autres fins dans les 15 années qui suivent la date de la promulgation.

2)
Sous réserve du paragraphe 1, la langue anglaise pourra être utilisée à des fins officielles jusqu'à ce que les dispositions nécessaires aient été prises pour qu'elle soit remplacée par l'ourdou.

3)
Sans qu'il ne soit porté atteinte au statut de la langue nationale, une assemblée provinciale peut, par une loi, prendre des dispositions pour enseigner, promouvoir et utiliser une langue provinciale en plus de la langue nationale.

Quoi qu'il en soit, le langue d'enseignement n'intéresse pas les dirigeants de la province, qui sont davantage préoccupés par l'observance stricte aux préceptes du Coran. Dans certains districts, le port du voile pour les filles ne suffit pas: la burqa est souvent de rigueur.

Dans les universités de la province (une douzaine), les seules langues d'enseignement sont l'ourdou, l'anglais et l'arabe (pour les études religieuses). 

Le pachtou et les autres langues vernaculaires sont réservés aux communications informelles. Dans les mosquées, l'arabe est la langue de la récitation et de l'adoration, tandis que les prêches des imans sont donnés normalement dans les langues locales pour des fins de compréhension dans les communautés concernées. 

La situation est différente dans les médias électroniques, surtout à la radio. Les stations de radio diffusent des émissions quotidiennes en pachtou, mais les émissions télévisées sont plus rares dans cette langue, l'ourdou ayant tendance à dominer. Il existe quelques magazines en pachtou et en anglais, mais en général les journaux sont en ourdou (la grande majorité). 

Le gouvernement provincial de la province de la Frontière-du-Nord-Ouest n'a pas vraiment de politique linguistique, car il est davantage uniquement préoccupé par des questions religieuses. Seul l'ourdou occupe toute la place, à l'exception de l'arabe dans l'enseignement du Coran. L'anglais demeure aussi une langue incontournable, mais l'ourdou est privilégié puisqu'il est associé à l'islam. Dans cette province, la langue numériquement la plus importante, le pachtou, a été reléguée aux communications informelles et privées. Il n'existe aucun statut à l'égard du pachtou, pas plus que pour le hindko ou le seraiki. Il n'existe aucune intention de la part du gouvernement local de valoriser une quelconque langue locale. Beaucoup de Pakistanais n'ont pas une haute opinion de ce qu'ils appellent cette «province du Far West».

Ainsi, la politique d'assimilation du gouvernement fédéral semble avoir réussi également dans la province de la Frontière-du-Nord-Ouest. Depuis que le Pakistan existe, l'État fédéral a violé à maintes reprises les droits des citoyens, à plus forte raison lorsqu’ils sont minoritaires. Il n'a pas réussi ni désiré les protéger. Les groupes de défense des droits des communautés officiellement désignées comme «minorités» sont privés de leurs droits les plus élémentaires.

Dernière mise à jour: 22 févr. 2024
 

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TALBOT, Ian. Provincial Politics and the Pakistan Movement, Karachi, Oxford University Press, 1988.

 

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