Collectivité
française
d'outre-mer
|
-
Wallis-et-Futuna
(France)
|
1 Données
géographiques
|
Wallis-et-Futuna est une
collectivité d'outre-mer française (COM) située dans le
Pacifique-Sud, soit dans la zone géographique de la Polynésie à
l’est de la Papouasie-Nouvelle-Guinée et de l’Australie, plus
précisément au nord des îles Fidji et Tonga, mais à l’ouest des îles
Samoa (voir la carte du
Pacifique, no 1). Le territoire de Wallis-et-Futuna est
formé de deux archipels distincts: d’une part, l’île Wallis, appelée
‘Uvea par les insulaires (77,5 km²) et bordée d’une quinzaine
d’îlots (81,5 km²), d’autre part, à 240 km au sud-ouest de Wallis,
les îles Futuna (64 km²) et Alofi (51 km²) séparées l’une de l’autre
par un chenal de 2 km (voir
la carte); seules les îles Wallis et Futuna sont
habitées. Ce territoire français d’outre-mer est situé à 2100 km au
nord-est de la Nouvelle-Calédonie et à 3200 km de la Polynésie
française (voir
la carte du Pacifique).
À quelque 22 000 km de Paris,
Wallis-et-Futuna représente sans nul doute le territoire le plus
éloigné de la Métropole. Il est à noter que Wallis-et-Futuna
constitue l’un des trois «territoires français» du Pacifique-Sud,
avec la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie. |
Le territoire de Wallis-et-Futuna est
composé de cinq unités
territoriales : deux circonscriptions administratives à Futuna, celle de
Sigave et celle d'Alo, comprenant l'île Alofi, une circonscription à Wallis
(Uvea en wallisien), cette dernière étant elle-même partagée en trois
districts: Hihifo, Hahake et Mua).
La France a respecté les institutions coutumières de Wallis-et-Futuna, dont
l'établissement des trois royaumes: le royaume d'Uvéa à Wallis, le royaume
d’Alo et le royaume de Sigave à Futuna, lesquels se confondent avec les
circonscriptions administratives.
À
l'île Wallis, le roi d'Uvea, appelé «lavelua», est le chef de la hiérarchie
coutumière. Il est assisté d'un premier ministre (appelé «kivalu») et de
cinq ministres. Il nomme, sur proposition de la population, trois chefs de
district («faipule») qui ont autorité sur les 21 chefs de village reconnus
par la population. L'île Wallis compte 21 villages répartis dans les trois
districts :
- Hihifo : Malae,
Alele, Vaitupu, Vailala, Tufuone ;
- Hahake : Liku, Akaaka, Mata’Utu (chef-lieu), Ahoa, Falaleu,
Haafuasia ;
- Mua : Lavegahau, Tepa, Haatofo, Gahi, Utufua, Malaefoon, Teesi,
Kolopopo, Halalo, Vaimalau.
À Futuna, l’île compte 15 villages :
- Alo : Malae, Taoa,
Ono, Kolia, Alofi, Poï, Vele, Tamana, Tuatafa ;
- Sigave : Leava, Nuku, Vaisei, Fiua, Toloke, Tavai.
Le
territoire de Wallis-et-Futuna fait partie d’un
ensemble plus vaste couvrant une grande partie du Pacifique et formant ce
qu’on appelé le «triangle polynésien»
dont les sommets sont Hawaï au nord, l’île de Pâques au sud-est et la
Nouvelle-Zélande au sud-ouest.
2 Données
démolinguistiques
Le territoire de Wallis-et-Futuna comptait quelque
15 000
habitants en 2005, mais 13 445 au recensement de 2008.
Population des
îles Wallis-et-Futuna (2018) |
Unité
administrative |
2003
|
2008
|
2018 |
Circonscription d’Alo
|
2 993 |
2 655 |
1 950 |
Circonscription de
Sigave |
1 880 |
1 583 |
1 275 |
Total Futuna |
4 873 |
4 238 |
3 225
|
Circonscription d’Uvea : |
District de Hahake
|
3 950 |
3 748 |
3 415 |
District de Hihifo
|
2 422 |
2 197 |
1 942 |
District de Mua
|
3 699 |
3 262 |
2 976 |
Total Wallis |
10 071 |
9 207 |
8 333 |
Ensemble de Wallis et Futuna |
14 944 |
13 445 |
12
058 |
L'île de Wallis (9207 hab.) comptait pour 68,4 % de la
population du Territoire, Futuna (4238 hab.), 31,5 %. Il n'y a pas de résident à
l'île Aloti. On peut remarquer que, entre 2003 et 2008, le territoire a perdu
quelque 1500 résidents, ce qui correspond à 10 % de la population. Cette
diminution du nombre d’habitants serait due à deux facteurs: d'une part, les
décès sont plus élevés que les naissances, d'autre part, un mouvement
d'émigration a contribué à la baisse de la population. Il s'agirait surtout de
jeunes étudiants qui s'expatrient vers la Nouvelle-Calédonie et la France, qui
offrent davantage de perspectives universitaires et professionnelles. Ajoutons
aussi que l'étroitesse du marché du travail ne permet pas d'absorber la demande
d’emploi.
Le gouvernement français a révélé que, depuis 1961, quelque 17 563 Wallisiens
et Futuniens se sont installés en Nouvelle-Calédonie, principalement dans la
région de Nouméa, mais aussi dans des zones d’extraction minière. En somme, on
compte davantage de Wallisiens et de Futuniens hors du territoire (17 563) qu’à
l’intérieur du territoire (13 445).
On peut estimer que la population continuera de
diminuer au cours des prochaines années.
Sur l’ensemble des habitants, 84 % sont nés à Wallis et
Futuna; 8 % en Nouvelle-Calédonie; 6 % en France, dans un département
d’outre-mer ou dans une autre collectivité d’outre-mer (DOM-COM); et 2 % à
l’étranger. Parmi les individus nés à l'extérieur de Wallis et de Futuna, 45 %
n’y résidaient pas cinq ans auparavant. La cause de ces mouvements migratoire
s'explique, entre autres, par les mutations du personnel de l'Administration, de
l’enseignement et du milieu médical (dispensaires et hôpitaux), personnel qui
occupe des postes d'une durée de deux ans, renouvelables une seule fois.
2.1 La population autochtone
À part les quelque
400 Français qui vivent à Wallis et à Futuna, les
insulaires sont presque tous d'origine polynésienne. La
population de ce petit territoire n’est pas
linguistiquement homogène puisqu’elle forme deux
groupes différents
d’origine austronésienne: les Wallisiens et les
Futuniens.
2.2 Les langues
Au plan linguistique, Wallis et
Futuna connaissent une situation de bilinguisme: la
langue maternelle de la quasi-totalité de la population
est le futunien à l’île Futuna et le wallisien à l’île
Wallis. Le wallisien compte près de 9000 locuteurs, le
futunien, presque 4000.
Outre le wallisien et le futunien, ce sous-groupe océanien comprend notamment le
tonguien à Tonga, le samoan aux Samoa occidentales et Samoa américaines, le
tokelau à Tokelau, le tahitien le marquisien et le tuamotu en Polynésie
française, l’hawaïen à Hawaï, le maori en Nouvelle-Zélande, etc. Les différences
entre les deux langues polynésiennes du territoire sont importantes au point où
l’intercompréhension est difficile, bien qu’elles aient, toutes deux, hérité du
proto-polynésien la grande majorité de leur vocabulaire.
Le wallisien a subi l’influence du tongien, alors que le futunien est resté plus
proche du samoan. Néanmoins, d'une part, suite aux premiers contacts avec les
baleiniers et autres commerçants anglo-saxons, et à la présence de nombreux
"marines" américains (à Wallis seulement) pendant la Seconde Guerre mondiale,
et, d'autre part, suite à la christianisation à partir du XIXe
siècle, le wallisien et le futunien ont tous deux emprunté à l'anglais et au
latin d'église; à partir de 1961, les emprunts se sont surtout faits à partir du
français.
Enfin, précisons que le wallisien et le futunien présentent tous deux des
variantes locales. À Futuna, il existe des variantes de parler, tant phonétiques
que lexicales entre le royaume de Sigave à l'ouest et le royaume d'Alo (voir
la carte) au sud-est. À Wallis, des variantes moins manifestes
existent aussi entre les trois districts de l'île: Hihifo au nord, Hahake au
centre et Mu’a au sud (voir la
carte). Cependant, il ne s’agit pas de différences majeures et
celles-ci ne nuisent pas à l’intercompréhension dans la même langue; elles
permettent surtout de déterminer l’appartenance à l’un des deux royaumes de
Futuna ou l’appartenance sociale à Wallis. Le wallisien, et dans une moindre
mesure, le futunien, présentent en outre un registre de langue noble, qu'on
utilise pour s'adresser aux rois ou aux ministres, ou encore au Dieu chrétien.
Le français est la
langue officielle du Territoire. C'est la langue
maternelle des Français, mais une langue véhiculaire
pour les Wallisiens et les Futuniens.
3 Données
historiques
Le peuplement dans cette partie de l'Océanie commença quelque
1500 ans avant notre ère. Auparavant, à partir d'abord de l'Asie du sud-est, des
populations avaient peuplé la Nouvelle-Guinée, le Vanuatu et la
Nouvelle-Calédonie. Le peuplement s'est ensuite poursuivi vers l'est avec les
îles Fidji, Wallis, Futuna, Tonga et les Samoa. Des fouilles archéologiques ont
mis au jour des sites wallisiens datant de 1400 avant notre ère et des sites
futuniens datant de 800 ans avant notre ère. On sait aussi que des Tongiens,
habitants du royaume de Tonga, colonisèrent plusieurs archipels de la région,
dont Wallis, vers le XVe
siècle. À Futuna, c'est une migration d'origine samoane qui exerça une forte
influence sur l'île. Le système de “chefferies à titres” toujours en vigueur
aujourd'hui serait d'origine tongienne.
3.1 Les
Hollandais
La première présence européenne se manifesta le 28 avril 1616
alors que les Hollandais Jacob Le Maire et William Cornélius Schouten
découvrirent Futuna et Alofi qu'ils appelèrent îles Horn, du nom de leur
ville natale, qu'ils ont aussi donné au cap Horn. Mais l’île Futuna ne servit
que de lieu de ravitaillement et les Hollandais ne s’y installèrent pas.
3.2 Les Anglais
En juin 1767, la frégate du navigateur anglais Samuel Wallis
aborda le rivage de l’île de Tahiti en Polynésie; le capitaine Wallis en prit
possession au nom du roi d’Angleterre. Le 16 août de la même année, le
navigateur anglais passa une journée à l’île d’Uvéa qui fut alors baptisée
Wallis
par ses officiers. Mais son passage se limita à quelques échanges de vivres et
la découverte du capitaine Wallis ne connut pas de suite.
3.3 Les
Français
L'influence européenne se fit sentir plus nettement en novembre 1837 avec
l'implantation de missions catholiques françaises. Les archipels de Wallis
et de Futuna furent rapidement convertis au christianisme par les pères
maristes. Le père Chanel, l'un des fondateurs de la Mission de Futuna, fut
assassiné le 28 avril 1841, ce qui entraîna des conflits entre les royaumes.
Dès le 5 avril 1842, les autorités coutumières firent une première demande
de protectorat à la France; quelques mois plus tard, les royaumes d'Alo et
de Sigave (Futuna) firent de même. Cette demande ne fut ratifiée qu'en 1887,
sous le règne, à Wallis, de la reine Amélia. Le traité signé consolidait les
positions françaises dans le Pacifique, tout en assurant la protection des
Wallisiens et des Futuniens en cas de conflit. Cependant, Wallis et Futuna
restaient rattachées administrativement à la Nouvelle-Calédonie. Le statut
de protectorat fut remanié en mai 1910 et ratifié à nouveau en novembre de
la même année. Ce n'est qu'en 1931 que Wallis-et-Futuna connut sa première
liaison maritime avec la Nouvelle-Calédonie ainsi que l'introduction du
franc français dans l'économie.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, en juin 1942, l’île Wallis fut utilisée
comme base aérienne stratégique par les États-Unis. Les Américains créèrent,
le 28 mai 1942, la base «Navy 207»: ce furent 6000 soldats qui
s'installèrent à Wallis et dotèrent l'île d'infrastructures modernes.
Puis, le 27 décembre 1959, les insulaires de Wallis et de Futuna choisirent
le
statut de territoire français d'outre-mer
(TOM). Cette décision fut prise par une très large majorité dans le cadre
d'un référendum avec une réponse positive de 94,3 % des suffrages exprimés.
Le référendum a été confirmé juridiquement un an et demi plus tard par la
loi n°
61-814 du 29 juillet 1961 conférant aux îles Wallis et Futuna le statut de
territoire d'outre-mer. Puis, le décret no 62.288 du 14 mars 1962 fixa les
attributions du Conseil territorial des îles. Enfin, la loi no 73.549 du 28
juin 1973 modifia l'article 12 de la loi no 61.814 du 29 juillet 1961. Dans
tous ces documents juridiques, aucune disposition n'a été prévue au sujet de
la langue. En fait, le territoire de Wallis-et-Futuna, en tant que
territoire français d'outre-mer, dépend de la Constitution française et des
lois françaises, avec quelques ajustements liés au droit coutumier local
(les chefferies).
Contrairement aux deux autres territoires français du Pacifique, la
Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française, les deux îles de Wallis et
Futuna semblent ne connaître aucun mouvement autonomiste. Les Wallisiens et
les Futuniens ont conservé leurs traditions polynésiennes. C'est le Lavelua,
le roi de Wallis, qui veille sur la coutume, avec sa «grande chefferie»,
ainsi que les deux souverains de Sigave et d’Alo (île de Futuna). Dans ce
territoire français d’un autre monde, l'Église et la monarchie se partagent
le pouvoir: la coutume des clans et les conflits familiaux supplantent
aisément les usages politiques de la Métropole. De plus, la petite
aristocratie locale bloque toute réelle modernisation, mais elle profite
largement des subventions métropolitaines, qui sont considérables et
impossibles à chiffrer avec précision.
4 La politique
linguistique
Étant donné que le territoire de Wallis-et-Futuna fait partie de la France, la
politique linguistique qui y est appliquée tient compte de cette réalité
juridique incontournable. Ainsi, en vertu de l’article 2 de la Constitution, le
français demeure la langue officielle de ce territoire: «La langue de la
République est le français.» Comme dans les départements d’outre-mer (DOM) et
les autres territoires d’outre-mer (TOM), tous les textes nationaux de la
République y sont applicables, mais certaines adaptations ont été prévues par la
loi n°
61-814 du 29 juillet 1961 conférant aux îles Wallis et Futuna le statut de
territoire d'outre-mer. Cependant, aucune disposition particulière n’est prévue
en matière linguistique.
4.1 L’Administration
Tout le système politique, administratif et judiciaire de Wallis-et-Futuna
fonctionne en français. Le territoire est représenté au Parlement français
par un sénateur, un député et par un conseiller au Conseil économique et
social. Depuis 1987, l'administrateur supérieur du territoire a le rang de
préfet. Il préside le Conseil territorial composé des trois chefs
traditionnels, c'est-à-dire les rois de Wallis-et-Futuna: le Lavelua
(roi de Wallis), le Tui Agaifo (roi d'Alo) et le Keletaona
(roi de Sigave), membres de droit, et de trois membres nommés par
l'administrateur supérieur du territoire. Ce sont, en quelque sorte, les
derniers rois de France.
De plus, le territoire est doté d’une Assemblée territoriale qui comprend 20
conseillers (13 pour Wallis et sept pour Futuna) et est élue pour cinq ans
au suffrage universel. Le chef-lieu de Wallis est Mata-Utu et celui de
Futuna est Leava. Le territoire
est partagé en trois circonscriptions: Uvéa (à Wallis), Alo (à Futuna),
Mata’utu (à Wallis) et Sigave (à Futuna), dont l'organisation administrative
intègre les institutions coutumières. Les conseils coutumiers se déroulent,
selon le cas, en wallisien ou en futunien. Lors des rencontres officiels
entre chefs coutumiers et délégués ou fonctionnaires français, un interprète
assure la traduction. Bien que le français soit la langue
administrative, le wallisien et le futunien sont utilisés dans les
communications orales entre les représentants d’une même ethnie.
Dans les services administratifs de Wallis, les gens s'adressent en wallisien
si l'employé est wallisien; à Futuna, c'est en futunien si l'employé est
futunien. Si l'employé est un Métropolitain, tout se déroulera en
français.
|
Il existe depuis 2015 une
Académie des langues wallisienne et futunienne (ALWF), dont la
mission est de sauvegarder, protéger, valoriser et promouvoir
les langues wallisienne et futunienne. L'ALWF est un
établissement territorial, doté de la personnalité morale, de
l’autonomie administrative et financière. Quoi que créée en
2015, l’ALWF ne fut inaugurée que le 5 mars 2019, par la
ministre des Outre-mer, Mme Annick Girardin, lors de sa visite
officielle sur le territoire du 4 au 8 mars 2019.
Dans le but de répondre à ses différents objectifs, l'Académie
des langues wallisienne et futunienne dispose de deux antennes
correspondantes aux deux langues respectives des îles Wallis et
Futuna. |
4.2 L’éducation
Dans le domaine de l’éducation, le français occupe évidemment la première
place et le système est placé
sous l'autorité d'un vice-recteur. Les
écoles maternelles
enseignent dans la langues locale tout en structurant l'apprentissage du
français.
L'enseignement
primaire
public, entièrement en français, est concédé à la Mission catholique qui
accueille plus de 5200 enfants. Toutefois, la Direction de l'enseignement
catholique (DEC), qui a en charge l'enseignement des premiers cycles, a fait
depuis quelques années une analyse des besoins en vue de créer des classes
d'accueil en langue vernaculaire à l'école maternelle. Les écoles consacrent
entre une heure à une heure trente à la langue vernaculaire. Au second
cycle, la priorité est donnée à l’expression orale et à l’acquisition du
vocabulaire en français, alors qu’au troisième cycle l'apprentissage est
étendu à la syntaxe, à la grammaire, à la production de phrases, notamment à
l’écrit (avec l’existence d’un cahier de wallisien ou de futunien). Les
langues locales peuvent aussi être utilisées au quotidien par l’enseignant
pour compléter une explication, notamment en cas de difficulté de
compréhension, ou par l’élève pour répondre s’il n’arrive pas à le faire en
français, le maître ou un autre élève traduisant ensuite en français afin
qu’il puisse répéter.
En 1995, quelque 2142 élèves étaient scolarisés au
secondaire.
L'enseignement du second degré, de statut entièrement public, présente la
particularité d'offrir un cours d’une heure par semaine en langue
wallisienne ou en langue futunienne afin de tenir compte du particularisme
local. Les enfants scolarisés vont en classe jusqu'à 14 ans dans près de
100% des cas et la scolarisation élémentaire est assurée à 90%. Toutefois,
le taux de scolarisation à la fin du secondaire s'élève à 40 % de la
population scolaire. Il existe sur le territoire un lycée, plusieurs
collèges qui dispensent un enseignement général, technologique et
professionnel, ainsi que le CETAD (Centre d'enseignement technique adapté au
développement). Hormis l’heure hebdomadaire facultative allouée au
wallisien et au futunien, l’enseignement ne se donne qu’en français.
Jusqu'à tout récemment, il n'existait pas de documents pédagogiques dans ces
langues; la Direction de l'enseignement catholique a publié quelques manuels
en wallisien, notamment des catalogues de légendes pour les enseignants du
primaire. Le Service des Affaires culturelles de Wallis-et-Futuna demande à
maintes reprises à l'État et à l'Assemblée territoriale la création d'une
Académie des langues wallisienne et futunienne à l'image de ce qui se fait à
Tahiti. Pour le moment, c'est toujours mentionné dans les contrats de
développement avec l'État, mais rien de concret encore.
Il faut ajouter également une loi plus récente adoptée par l’Assemblée
nationale française: la Loi
d'orientation pour l'outre-mer (ou loi 2000-1207 du 13 décembre 2000)
entrée en vigueur le 14 décembre 2000. Ce sont les articles 33 et 34 de
cette loi qui concernent tous les DOM-TOM. À l’article 33, on apprend que
«l’État et les collectivités locales encouragent le respect, la protection
et le maintien des connaissances, innovations et pratiques des communautés
autochtones et locales fondées sur leurs modes de vie traditionnels et qui
contribuent à la conservation du milieu naturel et l'usage durable de la
diversité biologique» et qu’à l’article 34 que «les langues régionales en
usage dans les départements d'outre-mer font partie du patrimoine
linguistique de la Nation» et qu’elles «bénéficient du renforcement des
politiques en faveur des langues régionales afin d'en faciliter l'usage».
D’après la Loi d’orientation d’outre-mer, la loi no 51-46 du 11
janvier 1951 relative à l'enseignement des langues et dialectes locaux leur
est applicable.
N’oublions pas tout de même que le système actuel, tel qu’il est appliqué
dans le territoire, passe sous silence les
difficultés pédagogiques
qu’entraînent l’enseignement quasi exclusif de la langue française et
l’importation du moule pédagogique métropolitain. La quasi-totalité des
élèves n’étant pas d’origine francophone, de sérieux problèmes
d’apprentissage surgissent, vu que les méthodes pédagogiques sont peu
appropriées à des élèves dont le français constitue une langue seconde.
Comme dans les autres DOM-TOM, la question des manuels scolaires cause
également des problèmes d’intégration socioculturelle. Le territoire de
Wallis-et-Futuna vit une situation de dépendance quasi exclusive de la
France, non seulement pour ce qui concerne son système éducatif, mais aussi
pour son approvisionnement en manuels et autres documents pédagogiques. Tous
les enfants d’origine non européenne — la quasi-totalité — évoluent dans un
milieu naturel et humain tout à fait différent de celui qui est représenté
dans les manuels de classe européens et la plupart d’entre eux se perçoivent
facilement comme étrangers dans leur propre pays. Cette situation a favorisé
un fort taux d’analphabétisme et d’illettrisme, ce qu’on peut considérer
comme une honte pour un territoire français.
Enfin, le système scolaire du Territoire assure
l’enseignement gratuit jusqu’au lycée. Les jeunes qui souhaitent poursuivre
des études supérieures au baccalauréat ou bénéficier de formations
complémentaires sont dans l’obligation de partir, en général en
Nouvelle-Calédonie ou en France. Bref, l'augmentation du niveau de scolarité
entraîne aussi à davantage de départs. Il existe aussi des
publications en wallisien et en futunien pour les enfants bilingues.
4.3 Les médias
Du côté des médias, le français règne encore en maître, mais le bilinguisme
et le trilinguisme sont tout de même assez fréquents. Depuis 1995, il
existait un hebdomadaire trilingue (français + wallisien + futunien)
d'information nommé Te Fenua Fo’ou (TFF), mais il a cessé ses
publications en 2002. En Nouvelle-Calédonie, le quotidien de Nouméa, Les
Nouvelles calédoniennes, fait paraître en raison de deux à trois fois
par semaine quelques articles en français sur le territoire, essentiellement
pour de l'information destinée à l'importante colonie wallisienne et
futunienne résidant en Nouvelle-Calédonie (plus de 17 000 personnes).
|
Le service public de la radiotélévision est assuré par
Wallis-et-Futuna La Première (auparavant par la RFO, Société
nationale de radio et télévision pour l'outre-mer) qui diffuse sur
un seul canal. La chaîne retransmet en français des programmes de
TF1, France 2, France 3, et la Cinquième en direct ou en différé: ce
sont des reprises des journaux télévisés, des jeux, des feuilletons,
ainsi que des films diffusés par les grandes chaînes nationales.
Wallis-et-Futuna La Première produit quotidiennement un journal
télévisé en français et en wallisien à Wallis, en français et en
futunien à Futuna, sinon alternativement dans l'une des deux
langues, selon la langue maternelle de l'employé(e). |
C’est le premier magazine audiovisuel dans l'histoire de la télévision
wallisienne; les danses et coutumes des deux îles font également l'objet de
plusieurs magazines télévisée. Les émissions culturelles comme
"Talanoa" ou "Filifaiva" sont entièrement en wallisien ou futunien.
Conformément aux articles 19 et 29 du
décret no 93-535 du 27 mars 1993 portant approbation du cahier des missions
et des charges de la Société nationale de radiodiffusion et de télévision
française pour l'outre-mer,
RFO peut en effet diffuser en wallisien et en futunien:
Article 19
La Société contribue à
l'expression des principales langues régionales parlées dans chaque
département, territoire ou collectivité territoriale.
Article 29
1) La Société veille
à illustrer toutes les formes d'expression de la musique en ouvrant
largement ses programmes aux retransmissions de spectacles vivants.
2) Dans ses
programmes de variétés pris dans leur ensemble, la Société donne une
place majoritaire à la chanson d'expression française ou régionale et
s'attache à promouvoir les nouveaux talents.
3) Elle s'efforce de
diversifier l'origine des oeuvres étrangères diffusées.
|
Télé Wallis-et-Futuna utilise à la fois
le français, le wallisien et futunien, afin de répondre aux besoins locaux.
L'émission «Talalogo» diffuse quotidiennement à 19 h 15 un journal local de
quinze 15 minutes, présenté en langue wallisienne; «Lea ote Temi» ("Parole
d’aujourd’hui") est une émission de trente minutes diffusée tous les
mercredis à 20 heures; en fonction de l’invité, cette émission est diffusée
soit en français soit en wallisien; «Temi ote Agaifenua» ("La minute de la
Chefferie") est diffusé durant trente minutes tous les vendredis à 20
heures; cette émission est présentée en wallisien ou en futunien.
À la radio, Radio Wallis-et-Futuna présente des émissions en
futunien, alors que Radio-Matin s’intéresse au troisième âge et traite du
vocabulaire et de l’emploi de la langue wallisienne par les aînés, en
wallisien uniquement. Tous les jours, des émissions sont offertes en
wallisien et en futunien. Une émission religieuse est animée par un prêtre,
en français et en wallisien ou en futunien durant une heure. Le mercredi,
«Parole aux enfants» est présenté aux jeunes pour approfondir leur
expression orale, en français ou en wallisien.
Tout compte fait, la politique linguistique du gouvernement français consiste
simplement à ignorer les langues locales, le wallisien et le futunien, dans le
cadre de l’administration de l’État et de l’éducation institutionnalisée. Cette
pratique est relativement similaire à celle de bien des pays où la langue
coloniale a supplanté les langues locales. À cet égard, la France n’a pas fait
pire que la Grande-Bretagne et les États-Unis. Les Wallisiens et les Futuniens
vivent dans un environnement culturel et linguistique où leur langue et le
français ne sont guère en concurrence, le wallisien et le futunien servant aux
communications informelles, le français pour les communications officielles;
quant à l’anglais, c’est la langue des pays voisins.
Cependant, puisque la France vient de signer (mais n’a toujours pas ratifié) la
Charte européenne des langues régionales ou minoritaires,
la politique linguistique pratiquée à Wallis-et-Futuna devrait être profondément
révisée. Sur le plan de l’éducation et de l’administration, la France pourrait
laisser une place plus significative à l’utilisation et à l’enseignement des
langues locales. C’est avant tout une question de reconnaissance d’une identité
pour ces insulaires, sinon le situation actuelle pourrait hypothéquer leur
développement socioculturel et économique.
Dernière mise à jour:
31 déc. 2023
Bibliographie
ENCYCLOPÉDIE MICROSOFT ENCARTA, 2004, art.
«Wallis-et-Futuna», pour la partie historique.
GRAU, Richard, Le statut juridique
de la langue française en France. Québec, Éditeur officiel
du Québec, 1981, 154 p.
GRAU, Richard, Les langues et les
cultures minoritaires en France, Québec, Éditeur officiel
du Québec, 1985, 471 p.
MOYSE-FAURIE, Claire. «Une
introduction au wallisien et au futunien» dans Bienvenue sur
le site de Wallis-et-Futuna, 3 octobre 1999,
http://wallis-islands.com/langage.htm
MOYSE-FAURIE, Claire. Échange important
de lettres et de documents par courrier électronique
(Wallis-et-Futuna).
MOYSE-FAURIE, Claire.
«Wallis et Futuna» dans Les langues de France, Paris, PUF,
sous la direction de Bernard Cerquiglini, 2003, p. 333-345.
ROUQUETTE, Rémi. «Le régime juridique
des langues en France», Paris, Université de Paris X (Nanterre),
thèse de doctorat, septembre 1987, 702 p.
SECRÉTARIAT D’ÉTAT À L’OUTRE-MER.
«Wallis-et-Futuna» dans L'outre-mer ou la respiration de la
France dans le monde, Paris, 24 février 1999,
[http://www.outre-mer.gouv.fr/domtom/wallis/index.htm].
SELLIER, Jean. «Les langues d'Océanie»
dans Une histoire des langues, Paris, Éditions La Découverte,
2020, p. 529-544.
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