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Le peuple kurde |
1 Le Kurdistan
Le Kurdistan est une région de hautes montagnes du sud-ouest de l'Asie. Cette région s'étend sur le nord-ouest de l'Iran, le nord-est de l'Irak et l'est de la Turquie, au sud du mont Ararat (voir la carte du Kurdistan). Ainsi, bien que partagés entre plusieurs États principaux, la Turquie, l'Irak, l'Iran et la Syrie, sans compter la diaspora. Or, les Kurdes ne contrôlent aucun de ces pays, tandis que les quelque 29 millions de Kurdes sont restés relativement concentrés dans leur Kurdistan ancestral, à cheval sur quatre frontières.
2 Le nombre des Kurdes
On dénombrait en 2014 environ sept millions de Kurdes en Irak, soit 21 % de la population du pays. On compte aussi 15 millions de Kurdes en Turquie (24 % de la population du pays), 6 millions en Iran (18 %), 80 000 en Syrie (8 %) et quelque 115 900 disséminés en Arménie, en Géorgie, en Azerbaïdjan, au Turkménistan, en Kirghizie et au Kazakhstan. En outre, on estime qu'environ un million de Kurdes se sont réfugiés dans divers pays d'Europe, mais surtout en Allemagne, en France et en Suède.
Répartition géographique des Kurdes en 1990 (hors diaspora)
Zone géographique Nombre d'habitants Pourcentage par rapport à la population kurde totale Pourcentage par rapport au nombre d'habitants des pays de rattachement
Kurdistan du Nord 13 150 000 44,32 % 24 % Kurdistan oriental 9 260 000 31,21 % 18,9 % Kurdistan du Sud 4 760 000 16,04 % 28 % Kurdistan occidental 1 240 000 4,18 % 11 % Arménie, Azerbaïdjan et Géorgie 301 000 1,01 % 0,1 % Région anatolienne 385 000 1,30 % 0,7 % Région du Khorassan et autres 500 000 1,69 % 1,03 % Liban 75 000 0,25 % 2,59 %
Total 29 671 000 100 % Source : Kurdistan, CBSR ,1999, Arbil, p. 39.
Si la plupart des Kurdes vivent dans le Grand Kurdistan historique, qui comprend une partie de la Turquie, de l'Irak, de l'Iran et de la Syrie, beaucoup de Kurdes vivent dans les pays voisins tels l'Arménie, la Géorgie, la Russie, l'Azerbaïdjan, le Liban, l'État d'Israël, la Jordanie, mais aussi le Kazakhstan, le Turkménistan, le Kirghizistan, l'Afghanistan, le Pakistan, etc. D'autres (la diaspora) se sont réfugiés en Europe (Allemagne, France, Suède, etc.), aux États-Unis, au Canada, en Australie ou en Nouvelle-Zélande.
3 La langue kurde
La très grande majorité des Kurdes (80 %) ne parlent pas d'autre langue que le kurde, une langue qui, à l'instar du persan, de l'afghan, du baloutche, etc., fait partie de la branche iranienne issue de la famille indo-européenne. Ainsi, le kurde n'est apparenté ni à l'arabe ni au turc. Avec les Arabes, les Perses et les Arméniens, les Kurdes constituent l'un des peuples les plus anciens de la région. Le pays qu'ils habitent est appelé le Kurdistan.
Conséquence du fractionnement politique des Kurdes, la langue kurde n'est pas unifiée; elle est fragmentée en plusieurs variétés dialectales dont le kurmancî et le soranî, les variétés les plus importantes, puis le zazaî, le lorî, le bakhtyarî et le goranî. Le kurmancî est parlé par environ 90 % des Kurdes de Turquie; il est également parlé dans les régions kurdes d'Iran et d'Irak, ainsi qu'en Syrie, soit 60 % de l'ensemble des Kurdes. Le soranî est parlé dans les régions centrales du Kurdistan en Iran et en Irak; le zazaî est parlé dans certaines régions du Kurdistan de Turquie; dans les trois parties du sud du Kurdistan, on parle le goranî et d'autres dialectes. De plus, les Kurdes de Géorgie et d'Arménie écrivent leur langue en alphabet cyrillique, ceux de Turquie en alphabet latin, ceux d'Irak, d'Iran et de Syrie en alphabet arabe ou arabo-persan. Ils sont davantage unifiés par la religion, étant presque tous des musulmans sunnites.
4 Le peuple kurde
Les Kurdes possèdent toutes les caractéristiques d'une nation, sans pouvoir disposer d'un État qui leur appartienne en propre. Pour conserver leur identité, ils ont dû s'opposer à des gouvernements centralisateurs et répressifs, la plupart du temps par la violence, à défaut d'autres solutions que leur refusent conjointement les États dans lesquels ils sont intégrés. Retranchés dans leurs chaînes de montagnes et hauts plateaux d'accès difficile, les Kurdes résistent farouchement aux dominations étrangères depuis plus de 70 ans. Pris en étau, ils ont été longtemps pourchassés par l'armée irakienne, refoulés par l'aviation turque, affamés et réprimés en Iran. Bref, une sorte de coalition qui faisait l'affaire des trois États concernés.
Beaucoup d'observateurs croient que ces agressions sont le fruit d'un accord entre les oppresseurs du peuple kurde. D'ailleurs, la Turquie n'a jamais caché qu'elle souhaitait le rétablissement de l'autorité de Bagdad sur le Kurdistan d'Irak malgré la tutelle internationale imposée en 1991 par l'ONU. Depuis que les Kurdes irakiens ont obtenu une réelle autonome dans la Constitution de 2005 et par la communauté internationale, les autorités turques craignent de voir apparaître des velléités autonomistes dans leur pays.
Il est vrai que la plupart des Kurdes nationalistes ont rêvé d'un Kurdistan indépendant et unifié. Dans les faits, les dirigeants et leaders kurdes, tant irakiens, iraniens que turcs, ont pour diverses raisons limité leurs revendications dans cadre des États existants. Ils tiennent, depuis longtemps, à des autonomies politiques ainsi qu'à des droits linguistiques et culturels. Jamais ces velléités ne se sont transformées en des objectifs concernant tous les Kurdes de l'ancienne Mésopotamie.