1. Le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires
Après la disparition de l'Union soviétique (1991), quatre anciennes républiques soviétiques — la Russie, l'Ukraine, la Biélorussie et le Kazakhstan — se trouvèrent à posséder sur leur territoire des armes nucléaires. Désirant éviter qu'un trop grand nombre de pays détiennent ce type d'armes, les États-Unis et d'autres grandes puissances intervinrent pour en réduire le nombre. C'est ainsi que l'Ukraine, la Biélorussie et le Kazakhstan renoncèrent à posséder des armes nucléaires et s'engagèrent à adhérer au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et à transférer leur arsenal nucléaire à la Russie. Cependant, les trois pays demandèrent des contreparties au plan financier et relativement à leur sécurité. L'article 1er du traité stipulait ce qui suit:
Article 1er La Fédération de Russie, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et les États-Unis d’Amérique réaffirment leur engagement envers l’Ukraine, conformément aux principes énoncés dans l’Acte final de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe, de respecter son indépendance et sa souveraineté ainsi que ses frontières existantes. |
Le traité entrait en vigueur le 5 décembre 1994 au moment des signatures des chefs d'État suivants: Leonid Koutchma pour l'Ukraine, Boris N. Eltsine pour la Russie, Bill Clinton pour les États-Unis et John Major pour le Royaume-Uni. La Russie, les États-Unis et le Royaume-Uni s'engageaient ainsi :
- à respecter l'indépendance et la souveraineté ukrainienne dans ses frontières actuelles;
- à s'abstenir de toute menace ou usage de la force contre l'Ukraine;
- à s'abstenir de recourir à la pression économique sur l'Ukraine en vue d'influencer sa politique;
- à demander l'aval du Conseil de sécurité des Nations unies si des armes nucléaires sont utilisées contre l'Ukraine;
- à s'abstenir d'utiliser des armes nucléaires contre l'Ukraine;
- à consulter les autres parties prenantes si des questions se posaient au sujet de ces engagements.
Les textes authentiques étaient rédigés en anglais, en russe et en ukrainien, le texte français n'étant qu'un traduction (voir le document complet).
2. Les traités d'amitié
L'Ukraine a conclu un certain nombre de traités bilatéraux avec la Russie, qui impliquent ou réaffirment expressément que la Russie acceptait les frontières de l’Ukraine comme établies et définitives. Cependant, aucun de ces traités ne faisait allusion à la langue.
- Le Mémorandum de Budapest (1994)
Dans ce traité, le Mémorandum de Budapest, la Russie ainsi que le Royaume-Uni et les États-Unis réaffirmaient leur engagement envers l’Ukraine «de respecter son indépendance, sa souveraineté et ses frontières existantes» (sous-article 1). La Russie s'engageait en particulier à «s’abstenir de recourir à la menace ou à l’emploi de la force contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de l’Ukraine, et qu’aucune de leurs armes ne soit utilisée contre l’Ukraine» (sous-article 2). Et cela, sauf en cas de légitime défense ou autrement, conformément à la Charte des Nations unies.
Bien que le Mémorandum de 1994 avait une portée politique importante, il ne prévoyait pas de mesure de rétorsion en cas de violation par l’une des parties des engagements pris. Autrement dit, les garanties en matière de sécurité n’avaient pas de force contraignante. Si l'Ukraine avait conservé ses armes nucléaires, est-ce que la Russie de Poutine aurait envahi l'Ukraine? Bref, ce mémorandum de 1994 semble aujourd'hui un «mauvais souvenir pour les Ukrainiens», car les signataires, dont les États-Unis, n’ont pu contraindre la Russie à respecter les engagements signés. Autrement dit, l'Ukraine fut victime d'un marché de dupes, car elle n'obtint jamais ce qu'elle aurait dû avoir, une protection de la part des forces occidentales contre la fédération de Russie.
De plus, les droits linguistiques des minorités nationales devaient être conformes aux obligations de l'Ukraine en vertu de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires; ces droits devaient être garantis par une loi distincte proposée au Parlement six mois après la promulgation de la Loi sur la langue.
- Le traité d'amitié de 1997
Le 31 mai 1997, la Russie et l'Ukraine signaient un traité d'amitié, dont l'article 12 portait sur la question linguistique:
Договор о дружбе, сотрудничестве и партнерстве
между Статья 2 |
Accord d'amitié, de coopération et de partenariat Article 2 Article 12 |
Cet article 12 laissait entendre que l'Ukraine s'engageait à respecter la langue russe, tandis que la Russie devait faire de même avec l'ukrainien. Ce genre d'engagement était de toute évidence être plus lourd à porter pour l'Ukraine que pour la Russie.
- Les autres traités d'amitié
Les deux États ont signé d'autres accords du même type en 2003, en 2010, en 2011, en 2012 et en 2014. Dans tous les cas, la reconnaissance par la Russie des frontières de l’Ukraine est explicitée et reconnue formellement. Cependant, l'annexion de la Crimée en 2014 à la fédération de Russie allait faire voler en éclats tous ces traités d’amitié russo-ukrainiens. Si l'on fait exception de l'article 12 du traité de 1997 (voir ci-dessus) relatif aux droits linguistiques, ces traités ne firent jamais allusion à la langue. Il faut se souvenir que, dans l'histoire de l'humanité, les traités sont généralement valides jusqu'à leur abrogation unilatérale par l'une des parties.