I. RÉTROACTES
Le 16 décembre 1997, mon prédécesseur a envoyé la circulaire
BA-97/22 relative à l'emploi des langues dans les administrations
communales de la région de langue néerlandaise. Le principe de base
est que la langue administrative dans les communes de cette région
soit le néerlandais. Seules les communes à facilités sont soumises à
la règle qui veut que les avis et communications émanant de
l'autorité communale et destinés aux habitants de ces communes
soient bilingues, avec la priorité donnée au néerlandais. Tous les
autres contacts individuels doivent s'effectuer en néerlandais. Sur
simple demande, les habitants francophones de ces communes peuvent
obtenir les documents qui leur sont destinés en français. Ils
doivent chaque fois réitérer cette demande.
Le 9 février 1998, le ministre flamand de l'époque, compétent pour
les CPAS, a étendu l'application des directives susvisées aux
centres publics d'aide sociale, par l'intermédiaire de la circulaire
WEL 98/01 relative à l'emploi des langues dans les centres publics
d'aide sociale de la région de langue néerlandaise.
II. POSITIONS DU CONSEIL D'ÉTAT
Cinq administrations communales, une administration de CPAS et
quelques habitants francophones des communes périphériques flamandes
ont demandé au Conseil d'État l'annulation des circulaires
susmentionnées.
Leur principal argument a été que les administrations des communes à
facilités, une fois qu'elles connaissent la langue de leurs
habitants, doivent faire usage de cette langue dans leurs contacts
avec ces habitants. Cela signifierait, d'après ces habitants
francophones des communes à facilités, que, dès qu'ils se sont
adressés une fois à une administration communale ou une
administration de CPAS en français, cette administration devrait
toujours utiliser le français dans ses contacts avec ces habitants.
Cela aurait pour effet que l'administration locale doit enregistrer
l'appartenance linguistique des habitants.
Dans cinq arrêts
datant du 23 décembre 2004 (nos 138.860 à 138.864 inclus), le
Conseil d'État a déclaré que les différentes demandes
sont non-fondées.
Les circulaires Peeters et Martens sont légales.
D'après le Conseil d'État, les dispositions de la loi relative à
l'emploi des langues en matière administrative doivent être
examinées dans le contexte plus large de la législation linguistique
en Belgique. Le Conseil renvoie à l'arrêt n° 26/98 du 10 mars 1998
de la Cour d'Arbitrage qui stipule :
" Bien que les lois coordonnées sur l'emploi des langues en matière
administrative prévoient à l'intention des habitants francophones
des communes périphériques une réglementation particulière qui les
autorise à utiliser la langue française dans leurs relations avec
les services locaux et qui impose à ces services l'obligation
d'utiliser la langue française dans les circonstances précisées dans
ces lois, cette réglementation ne porte pas atteinte au caractère en
principe unilingue de la région de langue néerlandaise à laquelle
ces communes appartiennent. Ceci implique que la langue qui doit y
être utilisée en matière administrative est en principe la langue
néerlandaise et que des dispositions qui autorisent l'emploi d'une
autre langue ne peuvent avoir pour effet qu'il soit porté atteinte à
la primauté de la langue néerlandaise garantie par l'article 4 de la
Constitution."
Le Conseil d'État affirme expressément que l'interprétation de
l'emploi du français dans les communes à facilités doit être
conciliable avec la primauté du néerlandais. L'application
automatique de la langue de l'habitant n'est pas conciliable avec
cette primauté. Celle-ci conduit en fait, d'après le Conseil d'État,
à un système de bilinguisme, ce qui est anticonstitutionnel.
L'interprétation et la pratique souples qui étaient appliquées
auparavant et qui consistaient à ce que, sur base de l'une ou
l'autre forme d'enregistrement, les administrations utilisent
constamment le français dans les rapports avec certains citoyens,
sans qu'il n'y ait de nouvelle demande expresse pour l'usage de
cette langue, ne sont dès lors pas régulières. Cela n'est pas
conciliable avec l'interprétation nécessairement restrictive du
droit de requérir de l'administration qu'elle utilise le français au
lieu du néerlandais. Le Conseil d'État est d'avis que ces
circulaires n'empêchent pas qu'une administration communale réponde
en français à un courrier qui lui est adressé dans cette langue.
Il en découle que tout enregistrement de l'appartenance linguistique
des habitants à l'aide de registres linguistiques ou de fichiers,
afin de définir un choix linguistique automatique, est
anticonstitutionnel.
Les arrêts rendus par le Conseil d'État sont d'une très grande
importance. Ils confirment que le point de vue, adopté en tout temps
par le Gouvernement flamand à l'égard de l'application de la
législation linguistique, est entièrement légal et correct.
Les parties requérantes dans les procédures susvisées devant le
Conseil d'État interprètent les formulations " la langue que
l'intéressé utilise " et " le désir de l'intéressé " inscrites aux
articles 25, 26 et 28 de l'arrêté royal du 18 juillet 1966 portant
coordination des lois sur l'emploi des langues en matière
administrative (Moniteur belge du 2 août 1966) en ce sens que
l'administration communale et l'administration du CPAS doivent
automatiquement utiliser le français dès qu'elles connaissent la
langue du particulier. Le Conseil d'État rejette cette
interprétation et affirme très clairement que cette application
automatique est exclue. Le point de vue qui est formulé dans les
précédentes circulaires Peeters et Martens et selon lequel
l'habitant des communes à facilités doit réitérer expressément sa
demande d'utiliser le français, est parfaitement conciliable avec la
notion du " désir de l'intéressé " inscrite aux articles 26 et 28
des lois sur l'emploi des langues en matière administrative.
Le Conseil d'État ne voit dès lors pas pourquoi les circulaires
précitées des ministres Peeters et Martens violeraient le texte même
des lois linguistiques, mais il suit le point de vue du Gouvernement
flamand selon lequel les circulaires visent uniquement à
contrecarrer une pratique illégale existante, sans pour autant
porter préjudice à la disposition légale qui stipule que
l'administration locale doit employer la langue utilisée par
l'habitant.
Étant donné la grande importance des arrêts du
Conseil d'État en
cette matière, il me semble opportun de rappeler les points de vue
qu'ont exposés mes prédécesseurs dans ces circulaires et de les
expliciter à l'aide d'une série d'exemples concrets. Mon objectif
est nullement de supprimer tout ou partie des circulaires susvisées
du 16 décembre 1997 et du 9 février 1998. Ma circulaire doit donc
être considérée comme complémentaire aux circulaires susvisées. Elle
doit donc être appliquée mutatis mutandis par les structures de
coopération intercommunale et par les organes ou administrations
représentatifs des cultes reconnus.
III. GÉNÉRALITÉS : LES DISPOSITIONS CONSTITUTIONNELLES
L'article 4 de la Constitution stipule que la Belgique comprend
quatre régions linguistiques : la région de langue néerlandaise, la
région de langue française, la région bilingue de Bruxelles-Capitale
(qui comprend les 19 communes) et la région de langue allemande.
Dans son arrêt n° 17 du 26 mars 1986, la Cour d'arb itrage stipule
que l'article 4 de la Constitution implique " la primauté de la
langue de chaque1 région unilingue ". Cette primauté s'applique à
toutes les communes de la région unilingue, y compris les communes
dites à facilités. Ces communes font également partie d'une région
unilingue et, dans ces communes, la langue de la région a également
la primauté. Cela signifie que la langue administrative, appliquée
aux communes à facilités situées en Flandre, est incontestablement
le néerlandais.
Les facilités accordées aux allophones dans ces communes, n'existent
que dans la mesure où elles sont prévues explicitement par l'arrêté
royal du 18 juillet 1966 portant coordination des lois sur l'emploi
des langues en matière administrative, ci-après désigné par
législation linguistique ou L.L.C., et elles n'impliquent dès lors
pas un bilinguisme généralisé de ces communes.
La notion de " région linguistique " qui est non seulement employée
à l'article 4 de la Constitution, mais également dans les L.L.C., ne
porte pas sur une région où une langue déterminée est parlée dans
les faits, mais sur une région où une langue doit être employée en
droit. En vertu de la législation en matière d'emploi des langues,
le néerlandais, le français et l'allemand, en tant que langue de la
région, ont reçu le statut de langue administrative respectivement
dans les régions de langue néerlandaise, française et allemande. La
région bilingue de Bruxelles-Capitale connaît deux langues
administratives : le néerlandais et le français.
Les six communes périphériques, Drogenbos, Kraainem, Linkebeek,
Rhode-Saint-Genèse, Wemmel, Wezembeek-Oppem et les communes de la
frontière linguistique Biévènes, Hestappe, Messines, Renaix,
Espierres-Hechin et Fourons font intégralement partie de la région
de langue néerlandaise. La langue de la région, dans ce cas le
néerlandais, doit en principe être utilisée pour tous les actes de
l'autorité.
Le néerlandais est la langue administrative en région de langue
néerlandaise.
Les facilités instaurées dans certaines communes de la région de
langue néerlandaise en faveur des francophones, n'affectent pas
l'unilinguisme de la région en question. Les facilités impliquent
seulement que, pour un certain nombre d'opérations précisément
définies, l'autorité doit déroger à la règle générale (la langue de
la région est la langue de l'administration) en faveur des
administrés qui donnent la préférence au français, pour autant
qu'ils en formulent à chaque fois la demande expresse.
Les facilités s'appliquent uniquement aux habitants des communes en
question. Les administrateurs (les bourgmestres, les échevins, les
conseillers, les présidents et conseillers de CPAS) ne peuvent
jamais faire appel à cette règle des facilités. Ils doivent
obligatoirement faire usage du néerlandais (voir infra).
On ne soulignera jamais assez que les facilités accordées aux
francophones forment l'exception à l'unilinguisme d'une région
linguistique et qu'elles doivent, par conséquent, être interprétées
restrictivement. Cela implique que cette interprétation doit dans
tous les cas être conforme à la Constitution. Les facilités ne
peuvent donc pas être interprétées d'une manière si large qu'elles
portent préjudice à la primauté de la langue de la région et
qu'elles débouchent sur un bilinguisme généralisé de
l'administration dans les communes à facilités.
À ce sujet,
le Conseil d'État stipule expressément dans ses arrêts
du 23 décembre 2004, ce qui suit :
" (...) qu'il en ressort que, pour se conformer à la Constitution,
l'interprétation des droits des personnes qui résident dans les
communes périphériques et qui souhaitent être administrées en
français doit être conciliable avec la primauté du néerlandais dans
ces communes ; (…) que, dès lors, la large interprétation de ces
droits évoquée ci-dessus, défendue par la partie requérante, qui est
une commune périphérique, n'est pas conciliable avec la primauté
précitée du néerlandais ; qu'en effet cette interprétation et la
pratique administrative précitée qui se fonde manifestement sur
celle-ci conduisent en fait à un système de bilinguisme dans lequel
les préférences linguistiques des personnes sont même fichées ; que,
par conséquent, l'annulation demandée d'une circulaire, dans la
mesure où cette circulaire, comme c'est le cas en l'espèce, entend
contrecarrer une interprétation illégitime, ne peut procurer aucun
avantage licite à la partie requérante."
Les facilités linguistiques sont extinctives.
La Flandre a toujours mis en évidence que les facilités ont pour
objectif de promouvoir l'intégration, ce qui implique qu'elles ont
par définition et pour toutes les personnes individuelles concernées
un caractère extinctif. Dans l'interprétation des facilités, il faut
tenir compte du fait qu'il est possible que, grâce à son séjour en
région de langue néerlandaise, un habitant francophone, qui
initialement faisait appel à ces facilités, a acquis entre-temps une
maîtrise suffisante de la langue de la région et qu'il ne souhaite
dès lors plus faire appel aux facilités.
C'est clairement dans cet esprit que les lois linguistiques de 1962
et 1963 ont été élaborées. Les débats parlementaires qui ont donné
lieu à l'élaboration des lois du 8 novembre 1962 et du 2 août 1963
montrent que les facilités avaient pour but de faciliter la
transition des allophones vers la Communauté à laquelle appartenait
désormais la commune qu'ils habitaient.
En vertu de l'article 129 de la Constitution, les facilités telles
qu'elles sont inscrites dans les L.L.C., ne peuvent être modifiées
que par une majorité spéciale. Il n'empêche que le but originel des
facilités, à savoir procurer un instrument d'intégration, ne change
pas : on peut attendre des francophones qu'ils aient, au fil du
temps, acquis une connaissance suffisante de la langue de la région
qu'ils habitent depuis un certain temps ou, à tout le moins, qu'ils
acceptent qu'on s'adresse à eux, oralement ou par écrit, en
néerlandais. Ces facilités ne peuvent pas être interprétées de
manière si large qu'elles excluent cette intégration. Une telle
interprétation aurait pour effet que le bilinguisme généralisé
deviendrait la règle et que l'autre langue serait mise sur un pied
d'égalité avec la langue de la région, de manière à porter préjudice
à la primauté constitutionnelle du néerlandais dans les communes de
la région de langue néerlandaise.
Afin d'illustrer cette position, les circulaires de mes
prédécesseurs, le ministre Peeters et le ministre Martens, renvoient
au rapport final du Centre Harmel (Centre de recherche pour la
solution nationale des problèmes sociaux, politiques et juridiques
des diverses régions du pays - document 940 Chambre des
Représentants, session 1957-1958, dd. 24.04.1958), qui peut être
considéré comme préparatoire aux lois linguistiques du 8 novembre
1962 et du 3 août 1963 et qui, par rapport au terme de frontière
linguistique, dit :
"Celles des Flamands et des Wallons qui ont vu le danger de cette
équivoque et qui comprennent que la frontière linguistique doit être
une limite, une ligne d'arrêt, enregistrant une fois pour toutes et
par un texte légal, sinon constitutionnel, l'existence séculaire de
deux communautés, sauvegardant ainsi les droits de l'une et de
l'autre, leur originalité et leur culture. Ils respectent la loi des
peuples qui veut que tout immigrant s'assimile la culture et la
langue que l'ensemble a choisies. (...) La communauté wallonne et la
communauté flamande doivent être homogènes. Les Flamands qui
s'établissent en Wallonie et les Wallons qui s'établissent en
Flandre doivent être résorbés par le milieu. L'élément personnel est
ainsi sacrifié au profit de l'élément territorial. Par voie de
conséquence, tout l'appareil culturel doit être français en Wallonie
et flamand en Flandre ".
L'emploi de la langue française : seulement sur demande expresse, à
réitérer chaque fois.
Dans leurs circulaires du 16 décembre 1997 et du 9 février 1998, mes
prédécesseurs ont affirmé à juste titre que, dans les communes
dotées d'un régime linguistique spécifique situées en région de
langue néerlandaise, les francophones ne peuvent, dans les cas où
les L.L.C. leur offrent la possibilité d'utiliser le français, faire
usage de cette facilité que pour autant qu'ils en formulent à chaque
fois la demande expresse. . Dans ses arrêts du 23 décembre
2004, le Conseil d'État adhère au
point de vue de l'ancien Gouvernement flamand, lorsqu'il affirme que
" dans le contexte d'une interprétation nécessairement restrictive
du droit de requérir de l'administration qu'elle utilise le français
au lieu du néerlandais dans la région unilingue concernée,
l'interprétation exprimée dans la circulaire, selon laquelle la
demande d'utiliser le français doit être expressément réitérée, est
conciliable avec la notion légale de 'désir de l'intéressé' inscrite
aux articles 26 et 28 des lois linguistiques ".
IV. SPÉCIFIQUE : EMPLOI DES LANGUES DANS LES SERVICES LOCAUX
L'article 10 de la législation linguistique établit la règle
générale que tout service local établi dans la région de langue
française, de langue néerlandaise ou de langue allemande utilise
exclusivement la langue de sa région dans les services intérieurs,
dans ses rapports avec les services dont il relève, ainsi que dans
ses rapports avec les autres services de la même région linguistique
et de Bruxelles-Capitale.
Dans les communes de la Flandre, y compris dans les communes à
facilités situées dans une région unilingue de langue néerlandaise
en Belgique, la seule langue qui peut être utilisée dans les
services intérieurs des autorités locales et provinciales, est le
néerlandais.
En vertu de l'article 1er de la législation linguistique, cela est
applicable :
" Article 1er, § 1er, [...]
1°
aux services publics centralisés et décentralisés de l'État, des
provinces, des agglomérations, des fédérations de communes et des
communes, dans la mesure où ils ne sont pas régis, au point de vue
de l'emploi des langues, par une autre loi ;
2° aux personnes physiques et morales concessionnaires d'un service
public ou chargées d'une mission qui dépasse les limites d'une
entreprise privée et que la loi ou les pouvoirs publics leur ont
confiée dans l'intérêt général ;
3° [...]
4° [...]
5° [...]
6° [...]
L'emploi des langues au sein de ces services est réglé par le
chapitre III des L.L.C.
Il convient de faire la distinction entre les services locaux de
communes sans régime linguistique spécifique et les services locaux
de communes dotées d'un régime linguistique spécifique.
1. Services d'une commune sans régime linguistique spécifique dans
la région de langue néerlandaise
Les services locaux de communes sans régime linguistique spécifique
de la Flandre utilisent exclusivement le néerlandais dans leurs
services intérieurs, dans leurs rapports avec les services dont ils
relèvent, dans leurs rapports avec les autres services de la même
région linguistique et de Bruxelles-Capitale, dans leurs rapports
avec les services établis dans les communes périphériques et de la
frontière linguistique, dans les avis, les communications et les
formulaires destinés au public et dans leurs rapports avec les
particuliers
Une série d'exceptions légales s'appliquent à cette règle :
Si une administration rédige des actes qui concernent des
particuliers, tout intéressé qui en établit la nécessité peut en
vertu de l'article 13, § 1er, des L.L.C. demander au gouverneur de
la province de son domicile - ou s'il s'agit d'une traduction
allemande, au gouverneur de la province de Liège, - de se faire
délivrer gratuitement la traduction certifiée exacte, valant
expédition ou copie conforme
La même possibilité existe, en vertu de l'article 14, § 1er, des
L.L.C., s'il s'agit de certificats, déclarations, et autorisations
qui sont délivrés aux particuliers.
Dans les communes qui sont considérées comme centres touristiques
(par exemple les communes côtières), les conseils communaux peuvent
décider que les avis et communications destinés aux touristes soient
rédigés dans au moins trois langues. L'article 11, § 3, des L.L.C.
est très clair à ce sujet : il doit s'agir de trois langues au
moins, dont le néerlandais, que les conseils communaux peuvent
définir librement. Il n'est donc pas possible que, dans les communes
concernées, les avis et les communications ne soient rédigés qu'en
néerlandais et en français.
En vertu de l'article 12 des L.L.C., le service local a la
possibilité de répondre à un particulier résidant dans une autre
région linguistique dans la langue dont ce particulier fait usage.
Je constate que certaines communes et certains CPAS en Flandre, et
non seulement celles et ceux de la périphérie autour de Bruxelles,
font appel à un service d'interprétariat pour assister leurs agents
dans leurs contacts avec les allophones, par exemple avec les
demandeurs d'asile ou les réfugiés. Une telle initiative ne me
semble pas être contraire à la législation linguistique. L'article
12 des L.L.C. stipule que tout service local établi dans la région
de langue néerlandaise utilise exclusivement la langue de cette
région dans ses rapports avec les particuliers. Cela n'empêche pas
que les services d'une commune ou d'un CPAS peuvent s'organiser de
manière telle qu'ils soient en mesure, dans le cadre de la politique
d'intégration, de comprendre les questions posées par les étrangers
et ainsi de leur fournir les réponses ou les informations correctes
et de faire appel, pour ce faire, à des interprètes. L'étranger est
naturellement libre de se faire assister par un interprète dans ses
contacts avec l'administration locale.
Cela ne signifie pas qu'un habitant allophone n'a le droit d'exiger
l'assistance éventuelle d'un interprète, en dehors du règlement
établi par la commune. Il incombe par contre à une administration
locale de définir les modalités et les situations qui permettent
l'organisation d'un tel service. En d'autres termes, l'organisation
d'un service d'interprétation ne crée pas de droits dans le chef des
allophones d'une commune, ce qui est quelque peu différent des
facilités.
Il est tout aussi évident que ce service fourni ne peut être que de
nature temporaire. Si un allophone réside depuis un certain temps
dans une commune flamande, il est censé s'intégrer, ce qui signifie
qu'il acquiert également la maîtrise du néerlandais. Si, au fil du
temps, un habitant ne peut ou ne veut toujours pas faire usage du
néerlandais dans ses contacts avec l'autorité locale, cette autorité
locale a pour devoir de ne plus faire appel à un interprète dans ses
contacts avec l'intéressé. On soulignera une nouvelle fois que la
bonne volonté de l'administration locale ne crée pas de droit dans
le chef des intéressés.
2. Emploi des langues des services locaux dans les communes à
facilités et dans les communes de la frontière linguistique
Dans les services locaux des communes sans régime linguistique
spécifique, l'emploi des langues ne pose que peu ou pas de
problèmes. La situation est quelque peu différente dans les communes
dotées d'un régime linguistique spécifique, surtout dans les six
communes périphériques.
2.1 Emploi des langues des services locaux
La règle générale est plutôt simple. Etant donné que les communes en
question sont situées en Flandre et que la Flandre est une région de
langue néerlandaise homogène, la langue qu'elles doivent employer
dans leurs services intérieurs est le néerlandais. Tout comme les
autres communes en Flandre, elles doivent utiliser le néerlandais
dans leurs rapports avec les services dont ils relèvent (par exemple
avec le Gouverneur ou avec le Gouvernement flamand) et dans leurs
rapports avec les autres services en région de langue néerlandaise
et à Bruxelles-Capitale.
La même règle s'applique à leurs rapports avec les entreprises
privées dont le siège d'exploitation est établi dans une commune de
région de langue néerlandaise sans régime linguistique spécifique.
Pour les réunions du conseil communal, du collège des bourgmestre et
échevin et des commissions, conseils consultatifs, organes
consultatifs, etc. institués par le conseil communal ou par le
collège des bourgmestre et échevins, la même règle s'applique :
étant donné que ces organes doivent être considérés comme services
intérieurs de la commune, seul l'emploi du néerlandais est admis
dans le cadre de leurs réunions. Les communes dotées d'un régime
linguistique spécifique font partie du territoire de la Flandre,
sans restriction. Par conséquent, les mandataires de ces communes
(tant le bourgmestre et les échevins que les conseillers) ne peuvent
utiliser que le néerlandais dans l'exercice de l'administration. Le
conseil communal est même un service local dans le sens de l'article
23 des L.L.C. : lors de réunions et de délibérations, le conseil ne
peut donc employer que le néerlandais. Tout autre emploi des langues
est nul. Par ailleurs, la possibilité d'utiliser le français est une
facilité qui n'est octroyée qu'aux habitants de ces communes et non
à ces administrateurs dont la seule langue administrative est le
néerlandais.
L'introduction d'un point de l'ordre du jour ou la délibération
durant la séance qui précède le vote ont pour but de présenter la
position des membres par rapport à ce point de l'ordre du jour et
par conséquent de motiver et de préciser leur attitude de vote.
Elles constituent donc un élément essentiel du processus
décisionnel. Les interventions faites au cours des séances
délibératives ou lors de l'introduction d'un point de l'ordre du
jour dans une langue autre que celle de la région linguistique
peuvent par conséquent entraîner la nullité de la décision prise. De
telles interventions doivent par ailleurs être considérées comme des
perturbations de la séance, contre lesquelles le président de séance
doit intervenir avec les mesures adéquates. Le bourgmestre doit,
avec les moyens mis à sa disposition en tant que président de la
séance, intervenir lorsque d'autres se rendent coupables d'un emploi
illégal des langues.
Les traductions de l'ordre du jour, des notes explicatives, des
explications fournies par le collège des bourgmestre et échevins et,
en général, des paroles exprimées, à l'attention des conseillers,
des échevins ou du bourgmestre, ne sont pas autorisées non plus. En
tant qu'administrateurs d'une commune de la région de langue
néerlandaise homogène, ils sont censés exécuter leurs missions en
néerlandais et donc disposer de connaissances suffisantes de cette
langue.
Quand une autorité communale souhaite organiser une réunion sui
generis, la règle qui s'applique en matière d'emploi des langues est
la même que pour les réunions des commissions, des conseils
consultatifs etc. institués par la commune : pour les
administrateurs, le néerlandais constitue la seule langue
administrative. Ce serait par exemple le cas lorsqu'un conseil
communal ordinaire est interrompu pour permettre au bourgmestre, aux
échevins, aux conseillers ou aux tiers de donner des explications ou
d'échanger des points de vue en français avec des spectateurs ou
même avec des conseillers sur un point abordé durant la séance
ordinaire du conseil communal.
En ce qui concerne les réunions des commissions communales et des
conseils consultatifs, je renvoie encore à un avis que la Commission
permanente de contrôle linguistique (C.P.C.L.) avait remis à M.
Norbert De Batselier, à l'époque ministre flamand de l'Environnement
et du Logement, lorsqu'il avait interrogé la C.P.C.L. sur le statut
linguistique des conseils consultatifs environnementaux communaux
dans les communes de la périphérie linguistique. Je cite un extrait
de cet avis :
" La C.P.C.L. estime que le conseil consultatif environnemental
communal est une institution chargée d'une tâche qui dépasse les
limites d'une entreprise privée (l'avis obligatoire) et qui lui est
confiée par le pouvoir public (le conseil communal) dans l'intérêt
général. Il tombe dès lors sous l'application des lois linguistiques
coordonnées par l'arrêté royal du 18 juillet 1966. Etant donné que
la zone d'action du conseil consultatif environnemental est limité
du point de vue territorial, la C.P.C.L. estime que le conseil
consultatif environnemental communal est un service local dans
le sens des lois linguistiques coordonnées par l'arrêté royal du
18 juillet 1966. Les dispositions du chapitre III de ces lois
sont dès lors tout à fait d'application sur les conseils
consultatifs environnementaux communaux. "
Cet avis de la C.P.C.L. signifie donc clairement que la langue
employée au sein du conseil consultatif environnemental communal
doit être le néerlandais. Cet avis peut parfaitement s'appliquer à
tous les conseils consultatifs institués par les autorités
communales, étant donné qu'ils connaissent tous une délimitation
territoriale limitée à la commune qui les a instaurés et qu'ils
doivent donc être considérés comme services locaux de la commune en
question. Le fait que les conseils consultatifs ne prennent aucune
décision de droit administratif susceptible d'être suspendue ou
annulée, mais qu'ils se limitent à délivrer des avis aux organes
communaux, le plus souvent au conseil communal, ne change rien. Si
une décision du conseil communal ou du collège des bourgmestre et
échevins repose également sur un avis qui a été rendu par un conseil
consultatif et qui présente un vice de forme (par exemple la
violation de la législation linguistique), je peux et je vais
intervenir contre la décision concernée : dans ce cas, soit je
confie la tâche au Gouverneur de suspendre la décision concernée,
soit je l'annule directement, certainement dans le cas où il s'agit
d'un avis obligatoirement recueilli.
L'interdiction d'employer une langue autre que le néerlandais
s'applique également quand le conseil communal doit prendre une
décision qui n'a aucun effet juridique. C'est par exemple le cas
quand le conseil approuve une motion. Même si une motion du conseil
communal n'a aucune valeur juridique, surtout si la motion porte sur
des affaires qui ne relèvent pas de la compétence du conseil
communal, il n'est pas admissible que le français soit employé
durant la délibération de cette motion, d'autant plus que l'emploi
du français a influé sur la prise de décision.
2.2 Emploi des langues des services locaux dans leurs rapports avec
les particuliers
Si des services locaux des communes à facilités et des communes de
la frontière linguistique s'adressent à un particulier, la règle
générale qui veut qu'ils emploient le néerlandais est également
d'application. Les facilités octroyées aux francophones prévoient
une série de situations dans lesquelles l'emploi du français est
obligatoire.
Ci-dessous figure une énumération des contacts possibles entre les
administrations et leurs habitants allophones. La terminologie
utilisée est reprise de la législation linguistique et de ses effets
sur l'emploi des langues.
Au préalable, je voudrais une nouvelle fois attirer l'attention sur
le fait que les facilités sont uniquement destinées aux habitants
des communes visées et non aux tiers.
2.2.1. Avis et communications destinés au public
Les avis sont des annonces affichées de manière bien visible sur les
murs des bâtiments et bureaux administratifs ou à tout autre endroit
dans le but de fournir des informations aux personnes qui
fréquentent ces bâtiments, bureaux ou lieux. Ils peuvent entre
autres être taillés, gravés, peints, imprimés, dactylographiés,
écrits ou être reproduits par des appareils lumineux. Ils peuvent
avoir une certaine dimension ou ne se composer que d'un seul mot.
Les communications sont des informations qui sont diffusées sous
quelque forme que ce soit. Leur portée peut être générale ou limitée
à un public déterminé.
La langue utilisée pour la rédaction de ces avis et communications
dans les communes dotées d'un régime linguistique spécifique, est le
néerlandais et le français, mais AVEC PRIORITÉ AU NÉERLANDAIS.
La législation ne définit pas de quelle manière cette priorité doit
être organisée. Les administrations peuvent elles-mêmes prendre les
décisions adéquates à ce sujet, tout en respectant bien sûr la loi.
Voici une énumération non-limitative de quelques exemples qui
illustrent comment exprimer la priorité au néerlandais :
-
le texte néerlandais est imprimé en caractère plus grand que le
texte français ; le texte néerlandais est encadré, le texte français
non ;
-
si le texte est imprimé sous forme de brochure, la version
néerlandaise figure en premier lieu et la version française suit ;
-
si le texte est imprimé sur une feuille, la version néerlandaise
figure en haut de la page ;
-
si le texte est imprimé en recto-verso, le côté sur lequel est
imprimé le texte néerlandais mentionne que le texte français figure
sur le verso, ce qui signifie que le texte néerlandais doit être
considéré comme le recto de la communication ou de l'avis. Il va de
soi que, dans ce cas, le côté sur lequel est imprimé le texte
français, ne peut pas faire mention du fait que le texte néerlandais
figure sur l'autre côté ;
-
si le texte est imprimé en deux colonnes verticales, le texte
néerlandais figure à gauche et le texte français à droite. Si le texte émane de la commune elle-même, il faut par ailleurs que
le contenu des versions néerlandaise et française soit identique. La
Commission permanente de Contrôle linguistique est très claire à ce
sujet quand elle déclare que les communications délivrées par
l'autorité communale doivent être entièrement bilingues, avec
priorité au néerlandais.
Si le texte émane par contre d'une autre instance publique flamande
(par exemple du Gouvernement flamand ou d'une province), il suffit
de ne fournir qu'un résumé français de l'avis ou de la
communication. Un bilinguisme intégral n'est pas requis selon la
jurisprudence constante de la C.P.C.L.
Le problème est que l'autorité flamande ne peut pas imposer aux
communes de diffuser les avis et communications qui émanent de
l'autorité flamande via les canaux communaux. Si la commune fournit
sa collaboration loyale lors de la diffusion, il y a là une preuve
d'une bonne gestion et d'une collaboration entre les différentes
autorités, ce qui profite finalement à la population. Les
administrateurs communaux qui empêchent cette diffusion, témoignent
d'un manque de respect pour leurs propres habitants, parce qu'ils
les privent de certaines informations ou parce qu'ils ne mettent pas
certains avantages à leur disposition. Avec cette attitude rigide,
les habitants sont discriminés par rapport aux habitants des autres
communes flamandes.
Si les avis et communications concernés sont bel et bien diffusés
via les canaux communaux, ils doivent être conformes à la
législation linguistique, non seulement s'ils émanent de la commune
ellemême ou de l'autorité flamande, mais aussi s'ils émanent de
tiers. Cela signifie plus concrètement que si une initiative privée
est diffusée via un canal communal, par exemple via les écoles
communales, cette information doit être diffusée conformément à la
législation linguistique. L'avis ou la communication doit être
diffusée en néerlandais et en français, avec priorité au
néerlandais. Une diffusion uniquement en français ou uniquement en
néerlandais, même s'il s'agit d'une initiative privée, n'est pas
autorisée dans ce cas. La Commission permanente de Contrôle
linguistique a en effet déclaré dans une série d'avis que les
brochures, les avis ou les communications destinés à l'ensemble des
habitants de la commune, indépendamment de qui ils émanent, sont
soumis à la législation linguistique lorsque le secteur public
apporte sa contribution à l'édition ou à la diffusion des brochures,
des avis ou des communications.
Il importe de souligner qu'un envoi non personnalisé peut être
considéré comme un avis ou une communication au public. Quand un
document, qui peut bel et bien être considéré comme une
communication à tous les habitants ou à un groupe déterminé
d'habitants, est envoyé nominativement, l'envoi perd sa
qualification d' " avis ou communication " et devient un " rapport "
avec les particuliers. Un tel document n'est par conséquent rédigé
et envoyé qu'en néerlandais, étant entendu que le destinataire doit
avoir la possibilité d'en demander une version française.
L'identité de l'expéditeur importe peu : la commune elle-même, le
CPAS, une intercommunale (une structure de coopération
intercommunale) ou l'autorité flamande.
2.2.2. Rapports avec les particuliers
Les avis ou les communications au public ont une portée générale qui
s'applique à l'ensemble de la population ou à un groupe déterminé de
cette population. Le " rapport avec les particuliers " doit par
contre être considéré comme un contact individuel oral ou écrit
entre le service local de la commune ou du CPAS, une intercommunale
ou une autre instance publique flamande, avec un habitant individuel
d'une commune.
La règle est que ces contacts ont lieu dans la langue de la région :
dans les communes de la région de langue néerlandaise, ces contacts
ont par conséquent lieu en néerlandais. Le régime des facilités
stipule qu'un habitant francophone d'une commune dotée d'un régime
linguistique spécifique a le droit de demander à ce que son contact
avec l'administration se déroule en français. Le français est donc
employé dans le seul cas où un habitant d'une commune périphérique
ou d'une commune de la frontière linguistique en fait la demande
expresse. Il doit par ailleurs réitérer cette demande à chaque fois
pour chaque contact.
Les circulaires des ministres Peeters et Martens expriment cette
vision comme suit :
" Les facilités que les L.L.C. accordent doivent toutefois être
appliquées restrictivement, ce qui implique que le particulier doit
chaque fois demander expressément à pouvoir utiliser le français. En
fin de compte, les facilités ont été instaurées afin de promouvoir
l'intégration des francophones dans la région de langue
néerlandaise.
Dans la pratique, cela signifie que tout service local établi dans
les communes à facilités utilise le néerlandais dans ses rapports
avec les habitants de ces mêmes communes. Le français est uniquement
utilisé lorsqu'un habitant d'une commune périphérique ou d'une
commune de la frontière linguistique en fait chaque fois la demande
expresse.
Dans ce contexte, il importe de souligner à nouveau le caractère
exceptionnel des facilités. Cela signifie dès lors que les facilités
ne sont pas accordées automatiquement et de manière permanente.
Elles doivent être demandées à chaque fois. Il est donc exclu que
les particuliers qui ont demandé une fois l'emploi du français
reçoivent automatiquement de nouveau les documents en français par
la suite. En effet, l'emploi des langues par un particulier n'est
pas un élément statique. On peut supposer que l'intéressé s'est
intégré entre-temps et qu'il a du néerlandais une maîtrise
suffisante pour accepter qu'on s'adresse à lui en néerlandais,
oralement ou par écrit. "
C'est surtout ce passage qui a irrité les administrations et les
habitants des six communes périphériques principalement. Ils
partaient du principe que, si la langue de l'habitant est connue par
l'administration parce que l'habitant s'est déjà adressé une fois à
l'administration en français ou qu'il lui a fait connaître sa
préférence linguistique, l'administration devrait tout le temps le
servir en français.
Dans les arrêts susvisés du 23 décembre
2004, le Conseil d'État a
mis fin une fois pour toutes à cette pratique illégale ; il y
affirme que :
"La circulaire attaquée s'avère ainsi vouloir uniquement
contrecarrer une pratique consistant à ce que, sur la base de l'une
ou l'autre forme d'enregistrement, des administrations utilisent
constamment le français à l'égard de certains justiciables sans
qu'il n'y ait de nouvelle demande expresse pour l'usage de cette
langue ; qu'en revanche la circulaire ne s'avère pas vouloir
empêcher qu'une administration communale réponde en français à un
courrier qui lui est adressé dans cette langue ou traite et clôture
dans cette même langue un dossier ouvert consécutivement à ce
courrier ; que la circulaire ne comporte donc pas d'interprétation
des termes «la langue que l'intéressé utilise» figurant à l'article
25 des lois linguistiques qui serait pertinente dans le cadre du
présent litige … ".
D'autre part, ces arrêts stipulent aussi que :
" dans le contexte d'une interprétation nécessairement restrictive
du droit de requérir de l'administration qu'elle utilise le français
au lieu du néerlandais dans la région unilingue concernée,
l'interprétation exprimée dans la circulaire, selon laquelle la
demande d'utiliser le français doit être expressément réitérée, est
conciliable avec la notion légale de 'désir de l'intéressé' inscrite
aux articles 26 et 28 des lois linguistiques ".
Un exemple de document qui peut être considéré comme un rapport avec
un particulier, a déjà été mentionné dans la circulaire du ministre
Peeters : les avertissements-extraits de rôle concernant les taxes
communales (ex. la taxe sur les déchets ménagers) doivent toujours
être rédigés en néerlandais. La loi du 24 décembre 1996 relative à
l'établissement et au recouvrement des taxes provinciales et
communales s'applique intégralement à l'avertissement-extrait de
rôle initial. Les habitants qui ont demandé un exemplaire en
français reçoivent par la suite de nouveau un exemplaire en
néerlandais. Si nécessaire, ils peuvent une nouvelle fois demander
un exemplaire en français.
La même chose vaut pour les convocations pour les élections. Ces
convocations doivent également être rédigées et envoyées en
néerlandais . Ce n'est que sur demande expresse réitérée qu'un
habitant peut en recevoir un exemplaire français.
La règle selon laquelle le français ne peut être utilisé que si un
habitant d'une commune périphérique ou d'une commune de la frontière
linguistique en fait lui-même la demande expresse, implique bien
évidemment aussi que l'initiative pour utiliser le français lors
d'un contact individuel, par exemple au guichet, ne peut pas émaner
de l'administration. Quand les services locaux d'une commune à
facilités s'adressent à un particulier, ils doivent toujours
utiliser le néerlandais en tant que langue véhiculaire. Un agent de
la commune ne peut, par conséquent, pas lui-même demander quelle
langue utiliser pour aider l'habitant. Ce n'est que lorsqu'un
habitant s'exprime de sa propre initiative en français ou qu'il
demande lui-même expressément d'être servi en français, après s'être
fait adresser la parole en néerlandais, qu'il est possible de
recourir à cette facilité. La demande d'être servi en français doit
d'ailleurs être réitérée lors de chaque nouveau contact avec
l'administration et lors de chaque visite au guichet.
2.2.3. Formulaires destinés au public
Les formulaires destinés au public sont des textes imprimés
incomplets qui doivent être complétés par le public même.
Dans les communes de la frontière linguistique, les formulaires sont
exclusivement délivrés en néerlandais ; dans les communes
périphériques, en néerlandais et français.
2.2.4. Actes concernant les particuliers
Les actes sont toutes les pièces qui servent à établir un acte
juridique.
Dans les communes de la frontière linguistique, l'administration
communale dresse les actes en néerlandais. Tout intéressé habitant
une commune de la frontière linguistique peut obtenir du service qui
a dressé l'acte, et ce sans frais supplémentaires et sans justifier
sa demande, une traduction française certifiée exacte, valant
expédition ou copie conforme.
Dans les communes périphériques, la règle est que, pour les pièces
destinées aux particuliers habitant Rhode-Saint-Genèse et
Wezembeek-Oppem, les actes sont rédigés en néerlandais et que tout
intéressé habitant ces communes peut obtenir du service qui a dressé
l'acte, et ce sans frais supplémentaires et sans justifier sa
demande, une traduction française certifiée exacte, valant
expédition ou copie conforme.
Pour les pièces destinées aux particuliers habitant Drogenbos,
Kraainem, Linkebeek et Wemmel, les actes sont rédigés en néerlandais
ou en français, selon le désir de l'intéressé.
J'attire l'attention sur le fait que, si un habitant doit faire la
demande expresse pour obtenir une version française ou une
traduction du document concerné, il doit réitérer cette demande à
chaque fois et pour chaque document.
2.2.5. Certificats, déclarations, autorisations et permis destinés
aux particuliers
Les certificats sont des attestations écrites délivrées par un
service public qui établissent la réalité d'une chose (p.ex., des
quittances). Par déclarations, on entend des documents officiels
délivrés par les services publics.
Les autorisations sont des documents officiels délivrés par un
service public et qui accordent une autorisation déterminée. Les
autorisations peuvent être délivrées sous la forme d'une concession
(p.ex. une concession d'emplacement sur les marchés).
Dans les communes de la frontière linguistique, les déclarations,
autorisations et permis sont uniquement délivrés en néerlandais. Les
certificats sont rédigés en néerlandais, mais dans ces communes, ils
peuvent être délivrés en français, sur demande expresse de
l'habitant.
Dans les communes périphériques, les certificats, déclarations,
autorisations et permis sont délivrés en néerlandais, à moins qu'un
particulier demande expressément un document rédigé en français.
J'attire l'attention sur le fait que, si un habitant doit faire la
demande expresse pour obtenir une version française ou une
traduction du document concerné, il doit réitérer cette demande à
chaque fois et pour chaque document.
V. INTERDICTION DE TENIR UN REGISTRE LINGUISTIQUE
Le Gouvernement flamand confirme le point de vue qu'il a adopté
jusqu'à présent et qui implique que les facilités doivent être
interprétées restrictivement, que les habitants des communes à
facilités doivent à chaque fois réitérer leur demande d'être servi
en français dans leurs rapports avec les administrations et que la
tenue d'un registre linguistique par les communes à facilités afin
d'entretenir un contact " éternel " en français avec un habitant qui
a signifié une fois vouloir être servi dans cette langue, est
illégal.
Dans ses arrêts du 23 décembre 2004, le Conseil
d'État suit ce point de vue du Gouvernement flamand. D'une part, le
Conseil d'État
reconnaît qu'un des objectifs des circulaires des ministres Peeters
et Martins visait à (vouloir) " contrecarrer une pratique consistant
à ce que, sur la base de l'une ou l'autre forme d'enregistrement,
des administrations utilisent constamment le français à l'égard de
certains justiciables sans qu'il n'y ait de nouvelle demande
expresse pour l'usage de cette langue ".
D'autre part,
le Conseil d'État renvoie à l'arrêt précité n° 26/98
du 10 mars 1998 de la Cour d'Arbitrage, lorsqu'il affirme que :
"Pour se conformer à la Constitution, l'interprétation des droits
des personnes qui résident dans les communes périphériques et qui
souhaitent être administrées en français doit être conciliable avec
la primauté du néerlandais dans ces communes ; (…) que, dès lors, la
large interprétation de ces droits évoquée ci-dessus, défendue par
la requérante, n'est pas conciliable avec la primauté précitée du
néerlandais ; qu'en effet cette interprétation et la pratique
administrative précitée qui se fonde manifestement sur celle-ci
conduisent en fait à un système de bilinguisme dans lequel les
préférences linguistiques des personnes sont même fichées; que, par
conséquent, l'annulation demandée d'une circulaire, dans la mesure
où cette circulaire, comme c'est le cas en l'espèce, entend
contrecarrer une interprétation illégitime, ne peut procurer aucun
avantage licite à la requérante ; (…) leur suppression par
l'annulation demandée conforterait alors ces parties dans leur
volonté de maintenir une pratique administrative qui, ainsi qu'il a
été constaté ci-dessus, repose sur une interprétation non conforme
aux lois sur l'emploi des langues en matière administrative. "
VI. CONTRÔLE
De par ma fonction, je suis compétent, ensemble avec les gouverneurs
de province, pour la tutelle administrative sur les administrations
locales et donc également pour le contrôle du respect de la
législation relative à l'emploi des langues en matière
administrative.
Je vous demande, Monsieur le Gouverneur, en tant que commissaire du
Gouvernement flamand, de veiller scrupuleusement au respect correct
de la législation relative à l'emploi des langues en matière
administrative, d'un point de vue tant de la validité légale des
actes administratifs que de l'impact budgétaire et financier qui en
découle. Dans ce contexte, un rôle particulier est attribué aux
gouverneurs des provinces dans le ressort desquels se trouvent des
communes à facilités.
Je vous demande dès lors de suspendre des décisions contraires à la
L.L.C. En ce qui concerne les administrations, communales, les
gouverneurs des provinces du Brabant flamand et du Limbourg ont,
respectivement pour les six communes périphériques et pour les
Fourons, une compétence d'annulation des décisions qui ont été
prises par les organes communaux et qui sont contraires à la L.L.C.
En ce qui concerne les Fourons, cette compétence d'annulation n'est
absolue que si la décision est annulée exclusivement pour des
raisons de violation de la législation linguistique.
Je vous demande de porter cette circulaire à la connaissance de la
députation permanente, aux collèges des bourgmestre et échevins des
communes, aux administrations de CPAS et aux structures de
coopération intercommunale, en mentionnant sa date de publication au
Moniteur belge dans le Mémorial administratif.
Je vous demande également d'envoyer cette circulaire aux
administrations des cultes reconnus, tant celles organisées au
niveau communal que celles organisées au niveau provincial.
Pour être complet, je transmets cette circulaire directement à
toutes les administrations communales et de CPAS et aux structures
de coopération intercommunale.
La présente circulaire peut être consultée via internet à l'adresse
suivante :
http://binnenland.vlaanderen.be/regelgeving/omzend.htm. |