Les langues régionales de France

Éva Joly, 2012

Éva Joly, candidate aux présidentielles de 2012, pour Europe Ecologie-Les Verts (EELV), est une Franco-Norvégienne polyglotte, qui enseigne en Norvège dans une université créée pour la minorité same. Elle propose la reconnaissance des langues régionale» et dénonce «la volonté hégémonique d’imposer l’unique langue française». Dans une entrevue accordée le 29 mars 2012 à l'Association des Bretons de Science Po Paris (Bretoned Sant-Gwilherm), elle déclarait ce qui suit.

Les langues et les cultures régionales font partie non seulement du patrimoine de la France, mais de celui de l’humanité. Or, comme le souligne l’UNESCO la plupart des langues «régionales de France sont en sérieux danger d’extinction, du fait d’une politique d’État d’abord hostile jusqu’aux années 1950 puis passive depuis lors. Depuis 2008, l’article 75-1 de la Constitution reconnaît certes l’existence des langues régionales, mais seulement en tant que « patrimoine ». Cette modification constitutionnelle n’octroie de fait aucun droit nouveau aux locuteurs de langues régionales, et nous devons bien reconnaître qu’elle n’a débouché sur aucune modification législative. Encore une fois, derrière un vernis de réforme, c’est l’immobilisme voire la régression qui caractérise le bilan de Nicolas Sarkozy.

Mon ambition est de permettre aux locuteurs de langues régionales et minoritaires de transmettre leur langue, et de l’utiliser dans tous les aspects de leur vie quotidienne. Pour cela, je prône une réforme constitutionnelle permettant la ratification de la Charte européenne des langues régionales et minoritaires, de même que de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales, et la possibilité pour toute région de définir sa ou ses langues régionales comme co-officielles avec le français.

Une loi-cadre devrait également être votée, établissant un statut juridique stable et ambitieux en termes de moyens mis en œuvre. Les priorités sont le développement des langues régionales dans l’enseignement, les médias et les relations publiques. Ce programme n’est en rien radical. Il s’agit ni plus ni moins que d’aligner la France sur les normes européennes en matière de diversité linguistique, de donner les même droits aux Français qu’à leurs voisins, de sortir de cette fascination anachronique de la France pour l’unification linguistique. Et je suis persuadée qu’une telle politique volontariste, paradoxalement, renforcera la langue française, langue à laquelle je suis très attachée, en rendant plus crédible le discours français en faveur de la diversité linguistique à l’échelle mondiale.

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