Décision no 96-373 DC du 9 avril 1996 Loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 15 mars 1996, par le premier ministre, conformément aux dispositions des articles 46 et 61, alinéa 1er, de la Constitution, de la Loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française; [...]
- SUR LE TITRE VII RELATIF À L'IDENTITE
CULTURELLE :
Considérant que le titre VII comporte deux articles, le premier relatif notamment à la langue tahitienne et aux langues polynésiennes, le second à la création d'un collège d'experts en matière foncière; Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 115 : "Le français étant la langue officielle, la langue tahitienne et les autres langues polynésiennes peuvent être utilisées"; Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la Constitution : "La langue de la République est le français"; Considérant qu'eu égard à cette disposition, la référence faite par l'article 115, premier alinéa, au français en qualité de "langue officielle", doit s'entendre comme imposant en Polynésie française l'usage du français aux personnes morales de droit public et aux personnes de droit privé dans l'exercice d'une mission de service public, ainsi qu'aux usagers dans leurs relations avec les administrations et services publics ; que toute autre interprétation serait contraire à l'article 2 de la Constitution; Considérant que le deuxième alinéa de l'article 115 prévoit l'enseignement de la langue tahitienne dans le cadre de l'horaire normal des écoles maternelles et primaires ainsi que dans les établissements du second degré ; qu'un tel enseignement ne saurait toutefois sans méconnaître le principe d'égalité revêtir un caractère obligatoire pour les élèves ; qu'il ne saurait non plus avoir pour objet de soustraire les élèves scolarisés dans les établissements du territoire aux droits et obligations applicables à l'ensemble des usagers des établissements qui assurent le service public de l'enseignement ou sont associés à celui-ci ; que, sous ces réserves, cet article n'est contraire à aucun principe ni à aucune règle de valeur constitutionnelle; Considérant que le troisième alinéa de l'article 115 prévoit que la langue tahitienne peut être remplacée dans certaines écoles maternelles et primaires et dans les établissements du second degré par l'une des autres langues polynésiennes ; que sous les mêmes réserves que celles énoncées ci-dessus, cette disposition est conforme à la Constitution; Considérant que le législateur a pu sans méconnaître la Constitution prévoir au quatrième alinéa de l'article 115 que l'étude et la pédagogie de la langue et de la culture tahitiennes sont enseignées à l'école normale de la Polynésie française; Considérant que l'article 116 qui institue un collège d'experts en matière foncière dont il précise les attributions et le mode de consultation est conforme à la Constitution; Considérant que les dispositions susanalysées du titre VII de la loi ne sont relatives ni aux compétences des institutions propres du territoire, ni aux règles essentielles d'organisation et de fonctionnement de ces institutions ; que dès lors elles sont étrangères au domaine de la loi organique; [...] D É C I D E : Article premier.- Les mots "et sous réserve des dispositions de l'article 28 (13° et 14°)" ainsi que le mot "fondamentales" au 7° de l'article 6, les 13°, 14° et 25° de l'article 28, les mots "et des procédures relatives à la constatation des infractions aux réglementations territoriales" au 8° de l'article 6 ainsi que le premier alinéa de l'article 113 de la loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française sont déclarés contraires à la Constitution. Article 2.- Sous les réserves d'interprétation qui précèdent, les autres dispositions de cette loi, tant celles qui ont le caractère de loi organique que celles qui ont le caractère de loi, sont déclarées conformes à la Constitution. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel, dans
sa séance du 9 avril 1996, où siégeaient : MM. Roland DUMAS, Président,
Etienne DAILLY, Maurice FAURE, Georges ABADIE, Jean CABANNES, Michel
AMELLER, Jacques ROBERT et Mme Noëlle LENOIR. |