L'usage des langues à
Bruxelles et la place du néerlandais
Étude de Rudi Janssens
Brussels Studies, n° 13, janvier 2008 |
À la fin des années 1990, le Centre d'études interdisciplinaires de Bruxelles (Centrum voor de interdisciplinaire studie van Brussel) de la VUB (Vrije universiteit Brussel) lançait le projet Taalverhoudingen, taalverschuivingen en taalidentiteit in Brussel («Comportements, évolutions et identité linguistiques à Bruxelles», Janssens 2001), appelé également Taalbarometer 1 («Baromètre linguistique 1»). L'objectif consistait à esquisser, sur la base d'une enquête représentative auprès de 2500 Bruxellois majeurs, l'image linguistique générale de la Région de Bruxelles-Capitale.
À l'époque, l'étude avait pour intention principale de combler la lacune due à la suppression des recensements linguistiques dont le dernier, réalisé en 1947, avait donné des résultats assez peu fiables. La non-disponibilité de chiffres officiels relatifs au contexte linguistique a donné lieu à de nombreuses discussions, dans le meilleur des cas, reposant sur du matériel et des données partiels, et dans le pire, alimentées par des suppositions et des mythes sans aucun fondement. En 2005, une étude de suivi, menée dans le cadre du BRIO (Brussels Informatie- Documentatie- en Onderzoekscentrum / Centre d'information, de documentation et de recherches sur Bruxelles) à la demande de la Huis van het Nederlands («Maison du néerlandais») à Bruxelles, a été baptisée le «Baromètre linguistique 2».
À l'exemple de la première étude, celle-ci a travaillé sur un échantillon représentatif sélectionné par l'Institut national de statistique (INS). Quelque 2500 Bruxellois âgés de 18 à 70 ans ont été interrogés de vive voix sur leur connaissance, leur usage et leurs comportements linguistiques. Le présent article («L'usage des langues à Bruxelles et la place du néerlandais») présente une synthèse des principaux résultats et changements survenus au sein de l'image linguistique bruxelloise, en se fondant sur les résultats des deux études. Le document a été rédigé en néerlandais; la traduction française est d'Evelyn Mornard.
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Selon le professeur Janssens, les cinq langues les plus parlées en 2006 à Bruxelles-Capitale étaient le français (95,5%), l'anglais (35,4%), le néerlandais (28,2%), l'espagnol (7,3%) et l'arabe (6,3%). Il s'agit bien ici de «langues véhiculaires», c'est-à-dire des langues utilisées en société pour communiquer entre deux ou plusieurs individus. Mais l'étude est intéressante à plus d'un titre, car elle révèle quelles seraient les langues parlées à la maison: 83,7 % utiliseraient l'une des deux langues officielles de la région en 2006, soit les deux : le français (56,8%), le néerlandais et le français (8,6%), le néerlandais (7,0%), le français avec une autre langue que le néerlandais (11,3%), ou toute autre langue étrangère (16%).
Cette étude démontre que, si 95 % des locuteurs emploient le français comme langue véhiculaire, seulement 57% l'utiliseraient comme langue d'usage à la maison (éventuellement comme langue maternelle). Dès lors, le néerlandais serait déclassé par l'anglais comme langue véhiculaire. Comme langue employée à la maison, le néerlandais (7%) est encore déclassé par les langues étrangères (16 %). Une chose est certaine, c'est que la plupart des immigrants et des fonctionnaires européens, qui s'installent à Bruxelles, tendent généralement à apprendre le français, voire l'anglais, plutôt que le néerlandais.
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L'analyse intégrale des résultats se trouve dans JANSSENS, Rudi, "Van Brussel gesproken. Taalgebruik, taalverschuivingen en taalidentiteit in het Brussels Hoofdstedelijk Gewest (Taalbarometer II)", Brusselse Thema's 15, Bruxelles, VUBPRESS, 2007.