Drapeau de l'Autorité palestinienne
L'Autorité palestinienne

Palestine

(Sous occupation israélienne)

 

Capitale: Jéricho / Gaza (provisoire)
Population: 5,4 millions (est. 2023)
Langue officielle: arabe (de facto)
Groupe majoritaire: arabe palestinien (81,5 %)
Groupes minoritaires:  hébreu (16,1 %), arabe égyptien (0,9 %), arabe levantin de l'Est (0,5 %), arabe syrien ou levantin du Nord (0,3 %), néo-araméen de l'Ouest, italien, français, allemand, adyghéen, grec, tsigane domari, arménien, assyrien, arabe levantin du Sud, etc.
Système politique:  Territoire autonome sous occupation israélienne
(en attente d'être souverain)
Articles constitutionnels (langue):  art. 5 et 28 du projet constitutionnel de 2003
Lois linguistiques:  sans objet

REMARQUE:

La partie concernant les «Données historiques» sur la Palestine peut contenir des informations identiques aux «Données historiques» sur l'État d'Israël.   

Plan de l'article

1 Situation générale
1.1 La Palestine actuelle
1.2 La Cisjordanie enclavée
1.3 La bande de Gaza

2 Données démolinguistiques
2.1 L'arabe et les langues sémitiques
2.2 L'arabe palestinien
2.3 Les réfugiés palestiniens
2.4 Les autres communautés linguistiques

3 Données historiques
3.1 La patrie d'origine des Arabes
3.2 La province byzantine
3.3 La conquête arabe
3.4 Le temps des croisades
3.5 La domination ottomane
3.6 La Palestine britannique (1922-1948)
3.7 Le plan de partage de 1947
4 La création de l'État d'Israël (1948)
44.1 Les guerres israélo-arabes
4.2 L'impasse perpétuelle
4.3 Les accords d’Oslo
4.4 Les difficiles relations israélo-palestiniennes

5 Les points litigieux du conflit
5.1 Les éléments fondamentaux
5.2 Le maintien du statu quo
5.3 La division politique des Palestiniens
5.4 Une image peu inspirante
5.5 Le plan de paix américain
5.6 L'attaque du Hamas d'octobre 2023

6 La politique linguistique
6.1 L'administration
6.2 La justice
6.3 L'éducation
6.4 Les médias

1 Situation générale

Dans la francophonie, le terme «Palestine» est employé depuis plusieurs siècles pour désigner le territoire situé géographiquement entre la mer Méditerranée et le fleuve Jourdain, y compris la bande de Gaza.

Dans l'Antiquité, à l'âge du fer, la Palestine historique avait une superficie beaucoup plus grande que celle d'aujourd'hui, car elle englobait non seulement la Palestine actuelle, mais également une grande partie de la Jordanie et de la Syrie contemporaines. Elle englobait donc la côte orientale de la Méditerranée (Samarie et Judée), sans la bande de Gaza occupée par les Philistins, un peuple ennemi des Israélites.

La Palestine comprenait aussi de petits royaumes à l'est du Jourdain: Aram-Damas, Ammon, Moab et Édom), ce qui signifiait une portion du territoire de la péninsule Arabique.

La plupart des peuples de la Palestine historique parlaient des langues sémites, y compris les Philistins, quoique d'origine indo-européenne au départ, qui ont changé. de langue.

1.1 La Palestine actuelle

Aujourd'hui, la Palestine compte une portion de territoire près de la Méditerranée, la bande de Gaza (360 km²), et une autre partie, la Cisjordanie (5800 km²), appelée en anglais West Bank, sans oublier le fait qu'il existe de nombreux villages palestiniens en Israël même. La superficie de la Palestine actuelle est de 6160 km² Israël: 20 770  km²; Liban: km²; Jordanie: 92 300 km²; Égypte: 1 001 450 km².

Juridiquement, la Palestine n'existe pas comme État, indépendant ou non, car son statut n'est pas définitif. La Cisjordanie et la bande de Gaza, qui forment aujourd'hui la Palestine, font partie des «territoires occupés» par Israël. Deux partis politiques représentent les Palestiniens: le Fatah et le Hamas. En principe, c'est l'Autorité palestinienne qui représente les habitants arabes comme gouvernement du «pays».

Cette «Palestine» fragmentée a été créée en 1993 par les accords d'Oslo, afin de négocier avec Israël un accord final sur le conflit opposant Israël et la Palestine. Elle a un président et une assemblée élue au suffrage universel, une police et des représentants dans plusieurs pays. La capitale provisoire est Jéricho. L'Autorité palestinienne revendique Jérusalem-Est (Al-Qods) comme capitale d'un futur État palestinien.

Rappelons que l'Autorité palestinienne n'exerce actuellement que des pouvoirs limités dans une portion de la Cisjordanie (car il y a des enclaves de colonies juives) et que c'est le Hamas qui gère la bande de Gaza depuis 2007 depuis sa victoire aux élections législatives de 2006 et l'éviction de l'Autorité palestinienne à la suite d'une brève guerre civile.

1.2 La Cisjordanie enclavée

Les Territoires palestiniens, tous occupés par Israël (sauf Gaza), se composent de deux zones séparées géographiquement par plus de 50 km:

1) la Cisjordanie, dont les 5800 km² (équivalant au sixième de la Suisse) sont enfermés entre Israël et la Jordanie, et qui comprend Jérusalem-Est  (72 km²); la Cisjordanie est bordée à l’est par la rive occidentale du Jourdain, à l’ouest par la «ligne verte», la frontière israélo-jordanienne avant l’invasion israélienne; la Cisjordanie un territoire aride qui n’offre pratiquement aucune ressource naturelle; dans ce territoire, vivent plus 2,5 millions de Palestiniens encerclés par les colonies juives;

2) la bande de Gaza (360 km²) fait frontière avec l'Égypte et s'étire sur quelque 55 km le long de la mer Méditerranée; cette région est composée d'un territoire de dunes de sable, où s’entassent environ deux millions de Palestiniens.

En Cisjordanie, les villes où l'Autorité palestinienne est responsable des affaires civiles et de la sécurité sont : Jénine, Tulkarem, Qalqiliya, Naplouse, Bethléem, Jéricho, Ramallah et Hébron.

Cependant, depuis la création d'Israël en 1948, la bande de Gaza et la Cisjordanie ont toujours été occupées par les Forces armées d'Israël. Celle-ci a évacué Gaza en août 2005, ainsi que les 21 colonies juives. La carte de gauche illustre ce qu'était la Cisjordanie en 2020 tant que territoire, en principe sous le contrôle de l'Autorité palestinienne. En fait, la discontinuité territoriale caractérise l’État palestinien «en gestation», divisé en différentes zones: les colonies juives de peuplement (en rouge), les zones sous contrôle de l'Autorité palestinienne (en vert) et les zones sous contrôle de l'armée israélienne (en rose et en mauve). Mais la Palestine est dirigée par deux factions rivales: l'Autorité palestinienne contrôle en principe la Cisjordanie; le Hamas, la bande de Gaza.

Les colonies juives semblent particulièrement en expansion dans Jérusalem-Est. La population totale des colons juifs est désormais de 436 000, dont 190 000 à Jérusalem et 246 000 en Cisjordanie. Comme on le constate, les Forces armées israéliennes se sont réservé des zones et des couloirs pour «protéger» les colonies de peuplement juives. Il devient alors difficile pour l'Autorité palestinienne d'exercer un contrôle efficace sur ses ressortissants. Depuis septembre 1993, l’État d'Israël a intensifié ses travaux d’infrastructure afin de consolider sa mainmise en Cisjordanie, aujourd'hui truffée de routes de contournement qui permettent, sans traverser les principales enclaves palestiniennes, de relier entre elles la plupart des colonies juives. Fait à noter: les colons juifs sont armés jusqu'aux dents!

1.3 La bande de Gaza

Limitée au nord et à l'est par le territoire israélien, à l'ouest par la Méditerranée et au sud par l'Égypte, la bande de Gaza est un territoire exigu de 362 km² long de 41 km et large de 6 à 12 km. S'y entassent deux millions de Palestiniens, soit l'une des plus fortes densités de population au monde.

En droit international, il s'agit d'un «territoire occupé». Par conséquent, cette enclave palestinienne, constituée de réfugiés ou de descendants de réfugiés qui ont déjà été ethniquement nettoyés et expulsés de leurs foyers et de leurs terres, abrite une population pauvre et surpeuplée, soumise par Israël à un sévère blocus.

La carte ci-contre illustre le découpage administratif de la bande de Gaza avant la guerre de novembre 2023. Or, plus de 100 000 bâtiments ont été détruits par les frappes d'Israël, c'est-à-dire près de 70% des bâtiments, ce qui aura pour effet de rendre ce petit territoire pratiquement invivable. Selon un rapporteur de l'ONU, cette destruction massive constituerait un crime de guerre, car elle rend le territoire «inhabitable». Ce genre de campagne militaire a généralement comme objectif d'encourager la population touchée à se soulever contre ses dirigeants, mais cela n'a jamais fonctionné. 

- Les occupations étrangères

Le territoire actuel de la bande de Gaza est depuis longtemps occupé par des puissances étrangères. Après l'Empire romain et l'Empire byzantin, ce fut en 1517 la domination de l'Empire ottoman. En 1832, les Ottomans firent entrer Gaza sous administration égyptienne au sein de leur empire, jusqu'à la Première Guerre mondiale, alors que la Grande-Bretagne occupa la région après le 7 novembre 1917. L'Égypte occupa Gaza en 1948 et l'annexa en 1949. Au début de la guerre des Six Jours (juin 1967), Israël s'empara de la bande de Gaza pour la coloniser et l'occuper militairement pendant trente-huit ans. Après la seconde Intifada, Israël mit fin à la colonisation de la bande de Gaza et en septembre 2005, les troupes et les colons israéliens quittèrent le territoire.

- L'élection du Hamas

Le drapeau palestinien fut hissé de nouveau dans la bande de Gaza, mais l'espace aérien et maritime ainsi que la quasi-totalité des frontières demeurèrent sous contrôle israélien. Lors des élections parlementaires palestiniennes de 2006, le Fatah, qui dominait la politique palestinienne depuis sa création dans les années 1950, subit la défaite aux mains du Hamas, ce qui reflétait certainement des années d'insatisfaction à l'égard du Fatah, critiqué pour son inefficacité et sa corruption. Le terme de "Hamas" un acronyme partiel de l'arabe harakat al-muqâwama al-'islâmiya, ce qui signifie littéralement «Mouvement de résistance islamique». Il s'agit donc d'un gouvernement islamiste et nationaliste palestinien, qui est constitué d'une branche politique et d'une branche armée appelée les «brigades Izz al-Din al-Qassam». Cependant, c'est la branche armée qui a pris le contrôle de la bande de Gaza.

Au lieu de gérer la bande de Gaza «en bon gouvernement», le Hamas s'est armé pour combattre Israël avec l'aide notamment de l'Iran, l'objectif ultime étant l'instauration d'un État palestinien dans toute la région, ce qui supposait la disparition de l'État d'Israël. Malgré la suppression des colonies juives, les Palestiniens de Gaza, appelés "Gazaouis", restent soumis au contrôle effectif de l’armée israélienne qui a conservé la possibilité de pénétrer à volonté dans la bande de Gaza. Celle-ci est peut-être «libérée» à l’intérieur, mais elle est assiégée de l’extérieur. De fait, le retrait israélien a simplement transformé la bande de Gaza en une immense prison à ciel ouvert.

Aujourd'hui, les infrastructures de Gaza sont un désastre, avec l'eau potable et l'électricité rares et l'insécurité alimentaire généralisée. Les services sociaux gouvernementaux sont pratiquement inexistants. Cette privation est alimentée, en partie, par un blocus long et partiel du territoire maintenu par Israël et l’Égypte, mais aussi par la mauvaise administration du Hamas trop occupée à acheter des armes, à creuser des tunnels et à combattre les Israéliens. Cependant, le chef du Hamas vit confortablement au Qatar à l'abri des bombes; il est devenu millionnaire, comme d'autres dirigeants du mouvement militariste, en prélevant une taxe de 20% sur tous les biens entrant à Gaza. Les Gazaouis ne sont certainement pas au bout de leurs peines avec «un aussi bon gouvernement»! Ils sont pris en souricière.

- La Charte du Hamas

Le 18 août 1988, le Hamas a publié la Charte afin de présenter l’idéologie islamiste de son organisme palestinien. Elle comprend 36 articles répartis en cinq chapitres. En 2017, elle fut remplacée par une nouvelle charte: un texte de «principes généraux et politiques». Malgré son caractère solennel, elle n’a jamais constitué par le Hamas comme juridiquement dotée d’un statut de référence contraignante.

Article 14

Le projet sioniste est un projet raciste, agressif, colonial et expansionniste basé sur la saisie des propriétés d'autrui; il est hostile au peuple palestinien et à son aspiration à la liberté, à la libération, au retour et à l'autodétermination. L’entité israélienne est le jouet du projet sioniste et sa base d’agression.

Article 15

Le projet sioniste ne cible pas uniquement le peuple palestinien; c'est l'ennemi de l'Oumma arabe et islamique, qui représente une grave menace pour sa sécurité et ses intérêts. Il est également hostile aux aspirations de l'Oumma à l'unité, à la renaissance et à la libération et a été la principale source de ses troubles. Le projet sioniste constitue également un danger pour la sécurité et la paix internationales ainsi que pour l’humanité, ses intérêts et sa stabilité.

Article 16

Le Hamas affirme que son conflit concerne le projet sioniste et non les juifs en raison de leur religion. Le Hamas ne mène pas une lutte contre les Juifs parce qu’ils sont juifs, mais mène une lutte contre les sionistes qui occupent la Palestine. Pourtant, ce sont les sionistes qui identifient constamment le judaïsme et les juifs avec leur propre projet colonial et leur entité illégale.

Article 18

Sont considérés comme nuls et non avenus : la Déclaration Balfour, le Document du Mandat britannique, la Résolution de partage de la Palestine de l'ONU, ainsi que toutes les résolutions et mesures qui en découlent ou qui leur sont similaires. La création d’«Israël» est totalement illégale et contrevient aux droits inaliénables du peuple palestinien et va à l’encontre de sa volonté et de celle de l'Oumma; c’est également une violation des droits de l’homme garantis par les conventions internationales, au premier rang desquelles le droit à l’autodétermination.

Article 21

Le Hamas affirme que les Accords d'Oslo et leurs suppléments contreviennent aux règles régissant le droit international dans la mesure où ils génèrent des engagements qui violent les droits inaliénables du peuple palestinien. Le Mouvement rejette donc ces accords et tout ce qui en découle, comme les obligations préjudiciables aux intérêts de notre peuple, notamment la coordination sécuritaire (collaboration).

L'ensemble du texte de la Charte peut sembler belliqueux et très ethnocentrique (l'oumma correspond à la «nation islamique»), mais il traduit l'affirmation idéologique et politique du Hamas, c'est-à-dire la création d'un État islamique sur les territoires de l'ancienne Palestine mandataire, la mise en place d'activités visant à prêcher la foi en Allah, la lutte contre les «impérialismes sioniste et occidental», l'anéantissement de l'État d'Israël, le refus de toute négociation et un antisémitisme clairement affiché. Pourtant, les Palestiniens arabophones sont aussi des Sémites!

- Le statut de Gaza

Le statut de la bande de Gaza demeure aujourd'hui indéfini. Israël, qui était la puissance occupante jusqu'en 2005, ne revendique aucune souveraineté sur Gaza. L'Égypte non plus et, quant à l'Autorité palestinienne, elle n'a jamais déclaré un État palestinien et ne contrôle en aucun cas le territoire gazaoui. Et le Hamas ne s’est pas non plus déclaré «entité souveraine», ce qui ne l'empêche pas d'imposer son hégémonie sur le territoire.

En juillet 2004, la Cour internationale de justice de La Haye affirmait que les «territoires occupés par Israël» sont soumis à sa juridiction territoriale «en tant que puissance occupante». Le nouveau statut des Palestiniens à l'ONU se situe entre celui d’«observateur» et celui de «membre», mais sans droit de vote. La délégation palestinienne siège dans la salle de l’Assemblée générale «immédiatement après les États non membres» (comme le Saint-Siège et la Suisse) et «avant les autres observateurs» auprès de qui ils se trouvaient jusqu’ici (comme la Croix-Rouge internationale).

- Le financement

Que ce soit en Cisjordanie ou à Gaza, les gouvernements respectifs ne peuvent pas prélever beaucoup d'impôts à une population appauvrie par les guerres et les privations. Le salaire quotidien moyen en Cisjordanie est de 37 $US, et l'équivalent est de 15 $US à Gaza, contre 79 $US en Israël. Le secteur public reste le plus grand employeur palestinien, fournissant environ 22 % de tous les emplois. 

L’Iran fournirait annuellement 100 millions de dollars US de soutien financier et militaire; les responsables du Hamas félicitent d'ailleurs l’Iran d'envoyer de l’argent, du matériel et une expertise militaire, ainsi que des milliers de roquettes à longue portée pour frapper Israël. De son côté, le Qatar aurait contribué plus de 150 millions de dollars au Hamas en 2019, puis 100 millions en 2020 et 360 millions en 2021. En finançant désormais le Hamas à hauteur de 120 millions de dollars par an, le Qatar affirme soutenir le gouvernement de Gaza, non les terroristes. Le Qatar soutient aussi que l’argent a été utilisé aux fins prévues, c'est-à-dire pour les civils palestiniens. La Turquie, la Malaisie, l’Algérie et le Koweït apportent également un soutien financier, militaire, diplomatique et politique au Hamas.

En Cisjordanie, c'est différent. Généralement, l’Autorité palestinienne enregistre un déficit annuel de plus de 526 millions de dollars. Les donateurs internationaux sont l'Union européenne (52%), les membres de la Ligue arabe à 24% et la Banque mondiale à 18%, pour cent; ils fournissent environ 250 millions de dollars en appui budgétaire direct et plus de 100 millions pour le financement du développement, laissant à l’Autorité palestinienne un déficit de financement de moins de 200 millions de dollars. L'Autorité palestinienne comblé son déficit de financement en contractant des emprunts bancaires. Le public palestinien considère le favoritisme ("wasta") et le népotisme comme les formes de corruption les plus courantes, selon un sondage réalisé en septembre 2022 par la Coalition pour l'intégrité et la responsabilité (AMAN), la section palestinienne de Transparency International.

2 Données démolinguistiques

La population de la Palestine était estimée en 2005 à 3,7 millions d'habitants, dont 2,5 millions en Cisjordanie et 1,2 million à Gaza. En 2017, la population des territoires palestiniens était de 4,9 millions d'habitants, dont 3 millions en Cisjordanie (y compris à Jérusalem-Est) et 1,9 million dans la bande de Gaza). Le taux de fécondité en Palestine en 2011-2013 était de 4,1 enfants par femme et la croissance démographique annuelle, de 2,8 %. En 2023, la Palestine comptait 5,4 millions de personnes, tandis que le taux de fécondité était de 3,4 enfants par femme. Le tableau ci-dessous montre la répartition en 2023 de la population palestinienne en Cisjordanie et dans la bande de Gaza:

Territoire Population (estimation 2023 Densité de la population Superficie
Cisjordanie 3 256 906 576 5655 km²
Bande de Gaza 2 226 544 6 100 365 km²
Total 5 483 450 911 6020 km²

2.1 L'arabe et les langues sémitiques

La première mention du mot «arabe» remonte au IXe siècle avant notre ère dans un texte gravé sur une stèle en cunéiforme. Le texte raconte que Salmanazar III, roi d’Assyrie de 858 à 824, remporta une victoire contre plusieurs rois dont "Gindibou l’Arabe", qui venait du nord de la péninsule Arabique. Pendant plusieurs siècles, le mot «arabe» ne fut employé que dans des textes provenant de peuples étrangers au monde arabe tels les Assyriens, les Israélites, les Grecs, etc. Ce n’est qu’à partir de la fin du IIe siècle ou du début du IIIe siècle de notre ère que des habitants de l’Arabie se déclarèrent eux-mêmes «arabes».

- Le mot «arabe»

Le terme «arabe» viendrait de "abar" signifiant «se déplacer» ou «voyager». Dans le Coran, le mot désigne les nomades d’Arabie qui vivaient de l’élevage de chèvres, de moutons ou de dromadaires, appelés aussi «Bédouins». Par la suite, le mot «arabe» finit par désigner tous les locuteurs qui parlaient la langue arabe issue de l'Arabie, laquelle s'est ensuite fragmentée en de très nombreuses variétés locales.

La quasi-totalité de la population palestinienne actuelle est de langue arabe et de religion musulmane. Les Palestiniens parlent l'arabe palestinien comme langue maternelle. L'arabe est une langue appartenant à la famille chamito-sémitique, appelée aussi famille afro-asiatique, comme l'hébreu. Autrement dit, l'arabe et l'hébreu ont des origines communes et font partie de la branche sémitique, tels l'araméen, l'assyrien, le chaldéen ou l'amharique (en Éthiopie). L’existence des langues sémitiques remonte à plus de quatre millénaires, avec l’akkadien et l’ougaritique. L'hébreu et l'arabe proviennent du même groupe linguistique et, en tant que tels, ils partagent de nombreuses caractéristiques communes:

- la prédominance de racines trilittères (composées de trois consonnes);
- l'usage fréquent de consonnes laryngales et gutturales;
- un grand nombre de mots communs;
- un alphabet consonantique (les voyelles ne s'écrivent pas): le lecteur doit connaître la langue pour en rétablir toutes les voyelles;
- elles s'écrivent et se lisent de droite à gauche:
- des règles grammaticales communes.

On peut consulter une structure arborescente illustrant la plupart des langues chamito-sémitiques ou afro-asiatiques en cliquant ici s.v.p.

- Le mot «antisémite»

Puisque le mot «sémite» regroupe des langues parlées par des peuples aussi divers que les Phéniciens, les Cananéens, les Israélites (puis les Hébreux), les Arabes, les Éthiopiens, etc., il devrait s'appliquer à tous ces peuples. Donc, une personne antisémite dirigerait son mépris, par exemple, contre les Juifs et les Arabes, voire les Éthiopiens, puisque ce sont des peuples sémites.

Or, les termes «antisémite» et «antisémitisme» ne désignent que ceux qui manifestent leur hostilité envers les Juifs! Il y a ici une extension de sens qui semble inexplicable. En fait, ce sens restrictif appliqué au Juifs vient de l'Allemagne de la fin du XIXe siècle, ce qui démontre ainsi une méconnaissance profonde de la réalité scientifique en visant exclusivement les Juifs. Il n'en demeure pas moins que le mot «antisémitisme» semble inapproprié parce qu'il vise en principe toutes les populations de langue sémitique dont les Arabes.

Il convient d'ajouter une précision sur le mot «juif» écrit avec une minuscule initiale et «Juif» écrit avec une majuscule. Lorsque le mot désigne les adeptes du judaïsme, il s'écrit avec une minuscule (p.ex., les musulmans, les chrétiens et les juifs); lorsqu'il fait référence au peuple, il prend la majuscule (p.ex., les Arabes et les Juifs). Lorsque ces termes qualifient un nom, ils prennent toujours la minuscule: le peuple juif, l'alphabet arabe.

2.2 L'arabe palestinien

Si tous les Palestiniens parlent l'arabe local, c'est-à-dire l'arabe palestinien, ils n'écrivent qu'en arabe classique. L'arabe parlé par les Palestiniens est également appelé arabe levantin, arabe levantin du Sud (par opposition au levantin du Nord de la Syrie et du Liban) ou encore arabe jordanien. Autrement dit, l'arabe palestinien et l'arabe jordanien sont similaires, bien que certaines légères différences soient sensibles, notamment entre l'arabe local parlé à Amman (Jordanie) et l'arabe local de Jéricho (Cisjordanie). Il existe d'autres arabophones en Palestine: l'arabe égyptien, l'arabe levantin de l'Est, l'arabe syrien.

N'oublions pas que la quasi-totalité des Palestiniens vit dans des territoires occupés. Dans ces conditions, les Palestiniens voient se dégrader progressivement les infrastructures dont ils dépendent, notamment avec un système de santé et un système d'éducation déficients. La Cisjordanie est «cantonisée» (comme en Bosnie-Herzégovine) par les colonies juives, ce qui limite et complique les transports des biens et des personnes aux prises avec d'innombrables contrôles militaires israéliens.

L’accès aux administrations, aux hôpitaux et aux établissements d'enseignement est devenu aléatoire, encore davantage avec la construction du «Mur», appelé par les Arabes «mur d'Annexion», «mur d'Apartheid» ou «mur de la Honte». Des Palestiniens, notamment les médias de l'Autorité palestinienne, le désignent en arabe par «mur de Séparation raciale» ("jidar al-fasl al-'unsuri"). En Israël, c'est avant tout une «barrière antiterroriste»!

Avant octobre 2023, tous ceux qui travaillaient dans les colonies ou en Israël pouvaient perdre leur emploi d'un jour à l'autre. En raison du fort taux de chômage (40% en Cisjordanie, mais 50% à Gaza), un travailleur devait nourrir plus de six personnes, alors que plus de la moitié de la population vivait avec moins de deux dollars US par jour. Les Palestiniens vivent aujourd'hui à l'heure de la «tiers-mondisation» et de la paupérisation dans des frontières constamment bouclées, que ce soit en direction d’Israël ou des pays arabes voisins. Non seulement plus de 50% de la surface des terres est confisquée par Israël, mais les Israéliens ont réquisitionné 90% de l'eau pour leurs besoins. Dans la bande de Gaza, c'est la catastrophe depuis la guerre entre le Hamas et Israël d'octobre 2023.

La population palestinienne a souvent été caractérisée par une fertilité exceptionnellement élevée, avec 5,8 enfants par femme en Cisjordanie et 7,8 dans la bande de Gaza, contre 4,9 en Jordanie, 4,3 en Égypte et 2,3 au Liban. Ainsi, la population de la Cisjordanie et de Gaza a presque triplé en trente ans. À cela s'ajoutaient une faible mortalité et une espérance de vie relativement longue, soit 73 ans pour les femmes et 69 ans pour les hommes. C'est pourquoi Israël voulait tant peupler les colonies juives. Ariel Sharon, du temps qu'il était premier ministre, avait déclaré après une rencontre avec le président américain Georges W. Bush : «Nous avons obtenu que les grands blocs de population juive de Cisjordanie restent en place» (comprendre «même en cas de retrait de l'armée»). Le taux de fécondité a beaucoup baissé en Palestine, il est aujourd'hui de 3,9 dans la bande de Gaza et de 3,8 en Cisjordanie.

2.3 Les réfugiés palestiniens

La diaspora palestinienne compte environ six millions d'individus. Plus de cinq millions d'entre eux ont le statut de réfugiés, à la suite de l'exode palestinien de 1948. Plus de trois millions vivent en Jordanie et 500 000 dans le continent américain, tandis que le reste est réparti dans le monde arabe. Seuls 3,7 millions vivent dans les «territoires palestiniens» (bande de Gaza, Cisjordanie et Jérusalem-Est).

Pays d'intervention (2014)

Nombre de camps

Nombre de réfugiés

Nombre total de réfugiés dans les camps

Jordanie

10 2 070 973

2 154 486

Liban

12 447 328

483 375

Syrie

9 517 255

569 645

Cisjordanie

19 754 411

914 192

Bande de Gaza

8 1 240 082

1 307 014

Total

58 5 030 049

5 428 712

Source : UNWRA (Agence des Nations unies pour les réfugiés de Palestine au Proche-Orient)

Il conviendrait également de compter de nombreux réfugiés palestiniens en Irak (env. 75 000), en Égypte (plus de 40 000), en Arabie Saoudite (274 000), au Koweït (35 000), d'autres États arabes (112 000) et d'autres pays (220 000), sans oublier les aux États-Unis (175 000).

En somme, la population palestinienne totale s'élève à environ huit millions, mais seuls 5,4 millions se trouvent en Cisjordanie et Gaza. Le reste du peuple palestinien habite des camps de réfugiés dans les pays arabes voisins ou constitue une diaspora. Autrement dit, sur une population palestinienne mondiale estimée en 2014 à plus de huit millions (y compris les Arabes d’Israël), 4,2 millions étaient classés par l’ONU dans la catégorie des réfugiés.

2.4 Les autres communautés linguistiques

Après les Arabes, ce sont les Juifs qui sont les plus nombreux en Palestine, mais la quasi-totalité de ces derniers réside en Cisjordanie, pas à Gaza: ils sont au nombre d'au moins 400 000 sur 3,2 millions d'habitants. Les Juifs installés en Palestine parlent surtout l'hébreu, bien que de nombreux colons juifs parlent en plus l'une ou l'autre des langues occidentales (telles que l'anglais, le français, le russe, etc.). On trouve aussi quelques petites minorités telles que les Araméens, les Roms/Tsiganes, les Arméniens, les Assyriens, les Samaritains, etc.

La troisième langue parlée en Cisjordanie est l’anglais, mais c'est la deuxième à Gaza. C’est une langue largement comprise dans ce territoire et elle est devenue plus courante au fil du temps. Aujourd'hui, l'anglais continue de se développer en Cisjordanie, car il existe des aides pédagogiques pour aider les gens à apprendre et à comprendre la langue.

2.5 Les religions

Les trois religions dominantes en Cisjordanie sont l’islam, le judaïsme et le christianisme. Les musulmans constituent le groupe religieux prédominant dans la région, représentant environ les trois quarts de la population. La plupart des musulmans appartiennent à la confession sunnite. Les 25% restants de la population de Cisjordanie sont juifs ou chrétiens. Le peuple juif représente 17% et vit généralement dans des colonies subventionnées par le gouvernement israélien; ces chrétiens comptent pour 8%. Il existe de nombreuses «villes saintes» pour chaque religion en Cisjordanie, lesquelles contribuent aux conflits religieux. À Gaza, 99 % sont musulmans, les autres, chrétiens (0,7 %) et juifs (0,3 %). 

3 Données historiques

Avant la conquête arabe de 638 par le calife Omar (634-644), la Palestine fut cananéenne, puis phénicienne, égyptienne, hébraïque, perse, grecque, romaine et byzantine. Autrement dit, l'histoire de cette époque ancienne est en partie commune aux Palestiniens arabes et aux Hébreux.

3.1 La patrie d'origine des Arabes

En 854 avant notre ère, les Arabes auraient fait leur apparition dans l’histoire. Les premières nations arabes furent généralement des nomades vivant dans le centre de ce qui est aujourd'hui l'Arabie Saoudite. Cependant, ils avaient développé également des centres urbains et de petits royaumes au sud de la péninsule Arabique, plus précisément dans l'actuel Yémen. Avec le temps, ils s'établirent aussi au nord de la péninsule, puis en Mésopotamie et en Syrie. Les conquêtes arabo-musulmanes ne devaient survenir qu'au VIIe siècle avec l'avènement de Mahomet (570-632). 

Pendant ce temps, avant l'arrivée des Romains, les Hébreux (ou Israélites) vivaient dans ce qui est aujourd'hui la Palestine. En 63 avant notre ère, après le siège de Jérusalem, le général romain Pompée fit de la Palestine une province romaine — la Judée — gouvernée par des rois hébreux. Les Romains désignèrent la région sous le nom de Palaestina Prima au sud et de Palaestina Secunda au nord.

3.2 La province romaine, puis byzantine

Sous l'Empire romain, la population de la Palestine était peuplée majoritairement par des Grecs, alors que les Juifs ne représentaient que le quart ou le tiers des habitants. En plus de ces deux grandes communautés, il y avait aussi des Arabes et des Nabatéens (Arabes nomades) dans le sud de la Palestine. Le grec, l'araméen, le latin et l'hébreu restaient les seules langues écrites dans la région, car l'arabe ne s'écrivait pas encore.

- Les Romains

Les Romains expulsèrent les Juifs pratiquants hors de la région qu'ils nommèrent Palaestina Syria, c'est-à-dire la «Syrie palestinienne», le royaume israélite de Judée étant définitivement aboli. La ville de Jérusalem fut déclarée «cité romaine» et interdite aux Juifs sous peine de mort. Par conséquent, plusieurs communautés juives se réfugièrent en Galilée, au nord de la Palestine, notamment au lac de Tibériade (mer de Galilée).

Quant à la communauté juive d'Égypte, estimée à 300 000 individus, elle fut exterminée entre 115 et 117 par les soldats romains de Trajan et par les citoyens grecs d'Alexandrie. En 300 de notre ère, les Juifs formaient environ un quart de la population et vivaient dans des colonies compactes en Galilée, tandis que les Samaritains restaient concentrés en Samarie. Le christianisme avait gagné du terrain parmi la population et les chrétiens formaient une majorité en Palestine et à Jérusalem; l’empereur romain Constantin légalisa même cette religion en 313 par les édits de Milan.

- Les Byzantins

Après le partage de l'Empire romain en 395, la Palestine devint byzantine («Empire romain d'Orient»). Les chrétiens devinrent de plus en plus puissants, puis majoritaires. La Palestine byzantine connut un âge d’or économique, politique et culturel, alors que l'Empire romain d'Occident disparaissait. La population de la Palestine byzantine était composée de colons romains, de juifs convertis au christianisme, de divers peuples amenés par les Romains, ainsi que de petites communautés arabes et d'un groupe de Samaritains. Jusqu'à cette époque, les Arabes ne formaient que de petites communautés minoritaires en Palestine, notamment par l'apport des Bédouins. Les relations entre les juifs et les chrétiens de l'Empire byzantin furent généralement tendues, car les autorités empêchaient les juifs de prier sur le mont du Temple, un lieu sacré pour les juifs.

Les langues les plus courantes de la Palestine byzantine étaient le grec et l'araméen. Néanmoins, les Juifs restant en Palestine ne parlaient plus l'hébreu, mais l'araméen, tandis que les Ghassanides, une importante communauté arabe christianisée, s'exprimait en arabe.

En somme, les Ghassanides constituaient les premiers Arabes de la Palestine et du Levant. Une fois installés dans la région, ils devinrent un État vassal de l’Empire byzantin auprès duquel ils jouèrent le rôle d'«alliés fédérés». Ayant été autorisés à créer un royaume au sein de l'Empire byzantin, les Ghassanides servirent également de zone tampon entre les terres annexées par les Romains et l'Arabie. À son apogée, le royaume des Ghassanides s'étendit du sud de la Syrie jusqu'à Médine en Arabie, avec pour capitale Jabiyah dans le Golan actuel. Durant cette période, les Ghassanides effectuèrent des pèlerinages en «Terre sainte». En 542, une épidémie de peste bubonique survint et fit périr un tiers de la population.

3.3 La conquête arabe

À la fin du VIe siècle, une nouvelle religion monothéiste appelée «islam» fut fondée par Mahomet, dont les adeptes furent connus sous le nom de «musulmans». Mahomet réussit à unir les tribus d’Arabie dans un régime militaro-religieux, un califat, dont lui et ses successeurs étendirent les domaines en un vaste empire au moyen de «guerres saintes» successives. Les affrontements militaires avec l’Empire byzantin commencèrent du vivant de Mahomet. La première bataille opposant musulmans et Byzantins eut lieu en 629 près du village de Mu’tah, à l’est du Jourdain. Mahomet voulait ainsi conquérir les territoires des Arabes chrétiens, les Ghassanides, vassaux de l'Empire byzantin. Les forces musulmanes furent mises en déroute, mais Mahomet considéra néanmoins la défaite comme une victoire.

- L'arabisation

Avant sa mort en 632, Mahomet et ses troupes avaient réussi à soumettre la plus grande partie de l'Arabie, l'Iran et l'Afghanistan. En même temps, Mahomet avait pu arabiser et islamiser les populations vaincues, mais certains peuples refusèrent d'adopter l'arabe, dont l'Iran et l'Afghanistan, et conservèrent leurs langues locales.

Les armées musulmanes finirent par vaincre les Byzantins à la bataille de Fahl, dans la vallée du Jourdain en Jordanie, le 23 janvier 635. Dès lors, presque toute la Palestine, la Jordanie et la Syrie méridionale, à l’exception de Jérusalem, furent aux mains des musulmans. En 638, le calife Omar (634-644) envahit le reste de la Palestine et prit Jérusalem. Il annexa les territoires de la Syrie et de la Palestine. Des juifs et des chrétiens restèrent néanmoins à Jérusalem, et les premiers musulmans, des Arabes de la péninsule Arabique, commencèrent à s'y installer, tandis que les juifs ne formaient plus que de petites communautés éparses.

Avec la conquête arabe commença une période de treize siècles de présence musulmane en Palestine. Les Arabes divisèrent la province d'ash-Sham («Syrie») en cinq districts (jund), dont l'un conserva le nom de Palestine (Filastīn) et s'étendit du Sinaï jusqu'à Akko (future Saint-Jean-d'Acre); la capitale locale fut d'abord Ludd, puis dès 717 ar-Ramlah (Ramallah) et, plus tard, Jérusalem qui devient la troisième ville sainte de l’islam.

- Le statut des non-musulmans

Au cours du premier siècle après la conquête arabe, le calife et les gouverneurs de la «Syrie» régnèrent entièrement sur des habitants chrétiens et juifs. Les seuls Arabes à l'ouest du Jourdain étaient les Bédouins installés avant la conquête arabe, si l'on fait exception des soldats qui formaient les garnisons militaires. Les Palestiniens, juifs comme chrétiens, ne furent pas dans l'obligation de devenir musulmans. On peut croire qu'il s'agissait d'un acte de tolérance de la part des conquérants musulmans, mais en réalité cette «concession» correspondait à une conviction fondamentale de l'islam: les juifs et les chrétiens devaient être considérés comme des individus appartenant à une «classe inférieure» possédant un statut particulier de dhimmi («protégés»). Donc, pas question d'égalité, la discrimination étant plus avantageuse pour l'Empire!

Ce statut de dhimmi obligeait non seulement les chrétiens et les juifs à payer un impôt particulier par tête, mais aussi à être bannis de l'administration publique, à se faire interdire de construire de nouveaux temples (synagogues et églises) et d'employer obligatoirement des travailleurs musulmans. C'est pourquoi, après plus d'un siècle, la majorité de la population, devenue plus pragmatique, avait adopté l'islam. La plupart des Palestiniens, chrétiens comme juifs, qui parlaient l'araméen, finirent par adopter non seulement la langue arabe, mais aussi la religion islamique.

- L'âge d'or arabo-musulman

Malgré les nombreux conflits politiques et les luttes dynastiques pour le pouvoir, le pays profita de la prospérité de la civilisation islamique et son âge d’or dans les sciences, les arts, la philosophie et la littérature. Les musulmans prirent soin de préserver les connaissances léguées par les Grecs et développèrent de nouveaux domaines de connaissance, ce qui allait contribuer plus tard au succès de la Renaissance en Europe. Le géographe arabe Muqaddasi, né à Jérusalem en 942, considérait en 985 que la Palestine s’étendait de la plaine côtière à la steppe, à travers la montagne, puis la dépression du Jourdain. Il se plaignait qu'«à Jérusalem la grande majorité de la population est juive» et déplorait que «la mosquée soit vide des adorateurs». Cela signifiait que les Arabes ne constituaient encore qu'une minorité de la population, du moins à Jérusalem. Mais la langue arabe s'était néanmoins implantée partout en Palestine.

Au Xe siècle, la dynastie régnante des Fatimides s'opposa aux attaques turques, bédouines et byzantines. Bien que la Palestine soit désormais sous une autorité  musulmane, l’affection du monde chrétien pour la «Terre sainte» n'avait pas cessé de croître, au contraire. Jérusalem restait pour les chrétiens le centre du monde spirituel terrestre.

3.4 Le temps des croisades

À partir de 1096 jusqu'à 1099 eut lieu la première croisade des chrétiens. La Palestine fut alors appelée «Terre sainte» par les chrétiens. Le nom de «Palestine» perdit sa valeur officielle sous le gouvernement des Croisés, qui créèrent un nouvel État: le Royaume latin de Jérusalem. Une grande partie des habitants musulmans et juifs fut massacrée par les chrétiens. Le Royaume latin de Jérusalem devait durer un peu moins de deux siècles. Sous le régime des Croisés, le français (surtout), mais aussi l'allemand, l'anglais et l'italien furent largement employés dans l'organisation administrative.  Toutefois, la langue de communication quotidienne resta l'arabe dans toute la région.

Après la défaite et le départ des Croisés (XIIe et XIIIe siècles), les jund arabo-musulmans (districts) furent réintroduits à la place des évêchés et des paroisses. La communauté juive redevint plus nombreuse, notamment dans les villes côtières.

À la fin du XIIIe siècle, la «Syrie» fut divisée en neuf «royaumes», dont les royaumes de Gaza (avec Askalon et Hébron), Karak (avec Jaffa), Safed (avec Acre, Tyr et Sidon) et Damas (avec Jérusalem au sud). Au milieu du XIVe siècle, l'appellation «Filastin» redevint le nom officiel du district avec pour chef-lieu Jérusalem; Tibériade devint le chef-lieu d'un autre district, celui de Hauran. Au cours de cette période, la Palestine accueillit des réfugiés arabes chassés par l’arrivée des Mongols en Irak et en Syrie; vers la fin du XVe siècle, ce fut le tour de nombreux réfugiés juifs chassés d’Espagne. Beaucoup d’entre eux s’installèrent en Galilée. Cependant, à la fin de la domination arabe, il ne restait plus que quelques milliers de Juifs en Palestine.

3.5 La domination ottomane

Lors de la victoire des Turcs ottomans sur les Mamelouks égyptiens en 1517, la Palestine allait devenir turque et faire partie de l'Empire ottoman jusqu'à l'hiver de... 1917-1918. Le pays fut divisé en quatre districts administrativement rattachés à la «province de Damas» et gouvernés depuis Istanbul. Le district de Jérusalem fut placé entre les mains de Palestiniens arabisés, descendant des Cananéens et des colonisateurs successifs. Le nom de Palestine perdit sa dénomination officielle pour «province de Damas» (Dimashq al-Shâm), mais la population locale continua d'employer familièrement et officieusement Filastin. Le turc devint la langue officielle de l'administration, alors que l'arabe restait la langue de la majorité de la population locale. Cependant, certaines communautés apprenaient l'arabe classique, le turc ottoman et/ou le français.

Malgré la mainmise turque et musulmane sur la région, les communautés chrétiennes et juives conservèrent une certaine autonomie. La Palestine bénéficia de la prospérité de l’Empire ottoman au cours du XVIe siècle, mais déclina lentement au cours du siècle suivant. Ce déclin eut des répercussions sur le commerce, l’agriculture et la démographie, et il se prolongea jusqu’au XIXe siècle. Au début de ce siècle, la population de la Palestine avait été réduite de la moitié par rapport à ce qu'elle avait été au XVIe siècle; il ne restait environ que 250 000 habitants, dont environ quelque 10 000 juifs et quelques milliers de chrétiens, mais la région restait massivement arabo-musulmane.

C'est à cette époque que les puissances européennes s'installèrent au Proche-Orient parce qu'elles étaient à la recherche de matières premières et de marchés, sans oublier les besoins de stratégie militaire. Au cours des années 1880, des colons allemands et des immigrants hébreux apportèrent des machines modernes et des capitaux nécessaires au développement du pays. On estime que la Palestine abritait quelque 24 000 Juifs, alors que la population totale s'élevait à quelque 400 000 habitants; les langues les plus utilisées étaient l'arabe palestinien et le turc ottoman.

Le gouvernement ottoman imposa de sévères restrictions à l'immigration et à l'achat de terres par les Juifs, beaucoup moins par les Arabes musulmans. La Palestine fut divisée entre le vilayet (province) de Damas, le vilayet (province) de Beyrouth et le sandjak (arrondissement) de Jérusalem. Toute la région fut progressivement appelée par les Ottomans Arz-i Filistin («terre des Philistins») pour désigner la zone située entre la Méditerranée et celle de chaque côté du Jourdain.

Malgré les «rescrits» (ou ordonnances) impériaux ottomans obligeant les autorités locales de fonder des écoles qui incorporaient des élèves de toutes confessions religieuses et malgré une loi générale de l’Empire ottoman de 1869 exigeant une instruction obligatoire d’au moins trois ans pour tous les «citoyens ottomans», les élèves des écoles publiques des vilayets de Beyrouth et de Damas demeurèrent majoritairement musulmans, car les chrétiens et les juifs préféraient envoyer leurs enfants dans les différentes écoles missionnaires occidentales. À la veille de la Première Guerre mondiale (1914), la «Palestine» comptait plus de 700 000 habitants, dont 570 000 Arabes musulmans, 75 000 Arabes chrétiens et 60 000 Juifs. 

3.6 La Palestine britannique (1922-1948)

Lors de la Première Guerre mondiale, la Grande-Bretagne, la France et la Russie décidèrent en secret de se partager le Proche-Orient. Ces grandes puissances croyaient que la Palestine constituait un cas particulier en raison de l’enjeu symbolique des lieux saints et que la région devait bénéficier d’un statut international, ce qui sera fait en 1916 lors des accords de Sykes-Picot. En 1917, les Britanniques s’emparèrent de Jérusalem et forcèrent l’Empire ottoman à la capitulation. Par le traité de Sèvres de 1920, l'Empire ottoman fut démantelé et perdit ses territoires arabes du Proche-Orient.

La Société des Nations (SDN) plaça alors la Palestine (Jordanie et Israël actuels), la Syrie du Sud (Transjordanie) et l'Irak sous Mandat britannique, tandis que la France obtenait le contrôle du Liban et de la Syrie (Mandat français). Les Britanniques furent chargés de la défense et de la sécurité du territoire palestinien, de l'immigration, du service postal, des transports et des installations portuaires.

Bien sûr, pendant que les Britanniques imposaient l'anglais dans l'administration des pays sous leur mandat, les Français implantait le français au Liban et en Syrie. Autrement dit, les populations locales, surtout arabes et hébraïques, changeaient d'empire.

- La déclaration Balfour

La déclaration Balfour

Cher Lord Rothschild,

 

J’ai le plaisir de vous adresser, au nom du gouvernement de Sa Majesté, la déclaration ci-dessous de sympathie avec les aspirations sionistes, soumise au cabinet et approuvée par lui.

 

Le gouvernement de Sa Majesté regarde favorablement l'établissement en  Palestine d'un foyer national pour le peuple juif et emploiera tous ses efforts pour faciliter la réalisation de cet objectif, étant entendu que rien ne sera fait qui peut porter atteinte soit aux droits civils et religieux des communautés non juives existant en Palestine, soit aux droits et au statut politiques dont les Juifs disposent dans tout autre pays.

 

Je vous serais obligé de porter cette déclaration à la connaissance de la Fédération sioniste.

  Le 2 novembre 1917, en pleine guerre mondiale, le ministre britannique des Affaires étrangères, lord Balfour, publia une lettre où il indiquait que son gouvernement était disposé à créer en Palestine un «foyer national pour le peuple juif».

Adressée au baron de Rothschild, la lettre fut en fait rédigée en étroite concertation avec ce dernier, qui présidait l'antenne anglaise du mouvement sioniste, promoteur de l'installation des Juifs en Palestine. Cette lettre ouverte n'avait pour les Anglais d'autre intérêt que de rassurer les Juifs américains, plus portés à soutenir les puissances centrales qu'une alliance où figurait la Russie au passé lourdement antisémite. Mais cette lettre allait légitimer trente ans plus tard la création de l'État d'Israël.

- Le Mandat britannique

En même temps, par la déclaration Balfour de 1917, la Grande-Bretagne promettait à son tour aux Juifs, dont l’aide apportée à l’effort de guerre avait été précieuse, un «foyer national juif». Cette promesse fut par la suite ajoutée dans le mandat conféré à la Grande-Bretagne par la Société des Nations en 1922. Le terme de Palestine redevint alors en usage. L'article 22 du mandat traitait des trois langues officielles:

Article 22

L'anglais, l'arabe et l'hébreu seront les langues officielles de la Palestine. Toute déclaration ou inscription en arabe sur des timbres ou de la monnaie en Palestine doit être répétée en hébreu et toute déclaration ou inscription en hébreu doit être répétée en arabe.

- L'ordonnance de 1922

Le statut des langues fut défini par la Grande-Bretagne dans l'ordonnance prise en Conseil privé de la Palestine (Palestine Order in Council), promulguée le 10 octobre 1922, qui tenait lieu de Constitution. L'article 82 stipulait que l'anglais, l'arabe et l'hébreu seraient les trois langues officielles des actes d'autorité publique, du Conseil législatif, de l'administration, des cours de justice, etc.: 

Article 82

Toutes les ordonnances, tous les avis et actes officiels du gouvernement, de même que tous les avis officiels des autorités locales et municipales dans les zones prescrites en vertu d'un décret du Haut Commissaire, seront publiés en anglais, en arabe et en hébreu. Les trois langues peuvent être utilisées dans les débats et les discussions du Conseil législatif et peuvent être assujetties à tout règlement qui, à l'occasion, est adopté par les services gouvernementaux et les tribunaux.

Cet article de l'ordonnance de 1922 fut le seul texte juridique à portée linguistique jusqu'à la création de l'État d'Israël (1948). Durant toute la période du Mandat britannique, l'anglais devint la principale langue utilisée par le gouvernement. Soulignons que l'anglais, l'arabe et l'hébreu avaient été mentionnés dans cet ordre hiérarchique comme les langues des documents officiels. Dans les écoles, chaque communauté disposait de son propre système et l'enseignement était offert soit en arabe, soit en hébreu, soit en anglais, pas les trois. Dans les écoles britanniques, seul l'anglais était enseigné; dans les écoles arabes privées, le français et l'italien pouvaient également l'être. Pendant les trois décennies qui ont suivi, il y a eu une augmentation considérable de l'usage et de la diffusion de l'anglais en Palestine.

- Les promesses contradictoires

Durant leur mandat, il s'avéra difficile pour les Britanniques de concilier leurs promesses contradictoires, tant à l'égard des Juifs que des Arabes.  Les Juifs voulaient leur «foyer national», tandis que les Palestiniens refusaient que les Britanniques puissent promettre à une troisième partie des terres qui ne leur appartenaient pas ou plutôt «qui ne leur appartenaient plus». Le mandataire britannique avait explicitement pour tâche de «placer le pays dans des conditions politiques, administratives et économiques qui permettront l'établissement d'un foyer national juif et le développement d'institutions d'autogouvernement».

Il devait également «faciliter l'immigration juive et encourager l'installation compacte des Juifs sur les terres». Autrement dit, les Britanniques devaient tout faire pour encourager les Juifs à s’installer en Palestine, car la consolidation du foyer national juif constituait l’assise même du mandat. Cependant, les devoirs de l’administration britannique envers les Arabes étaient beaucoup plus simples: il s’agissait simplement de «veiller à la préservation de leurs droits civils et religieux». Comme on pouvait s’y attendre, cette asymétrie du Mandat britannique ne devait pas être acceptée par les leaders palestiniens. Dès le début, ces derniers exigèrent de respecter les accords anglo-égyptiens qui prévoyaient la formation d’un royaume arabe indépendant recouvrant toute la région. Toutefois, les «arrangements coloniaux» entre la France et la Grande-Bretagne en décidèrent autrement, notamment du fait que les Français déposèrent en 1920 le roi Fayçal de Syrie, mettant fin ainsi au projet de royaume arabe unifié. Pendant que les Britanniques respectaient à la lettre leur engagement vis-à-vis du sionisme, les Arabes firent tout pour faire échec à cette entreprise, mais en vain.

Après 1928, lorsque l’immigration juive augmenta à nouveau, la politique britannique oscilla entre les pressions arabes et juives. L’immigration fit un bond à partir de 1933, soit avec l’avènement du nazisme en Allemagne. En 1935, près de 62 000 Juifs arrivèrent en Palestine. La peur d’une domination juive fut la principale cause de la révolte arabe qui éclata en 1936 et continua par intermittence jusqu’en 1939. Afin de ménager et apaiser les Arabes, la Grande-Bretagne publia un «Livre blanc» qui restreignait l'immigration juive, interdisait l'achat des terres et prévoyait la création en Palestine d'un État fédéral ou binational regroupant Juifs et Arabes, avec une majorité arabe. Les sionistes refusèrent cette proposition.

3.7  Le plan de partage de 1947

Le conflit israélo-palestinien s’atténua au cours de la Seconde Guerre mondiale, puis reprit en 1945. Les horreurs de l’holocauste en Europe provoquèrent la sympathie du monde entier pour la «cause des Juifs européens». Même si la Grande-Bretagne refusait toujours d’accepter 100 000 rescapés juifs en Palestine, de nombreux survivants des camps nazis purent entrer illégalement sur le territoire. La «question palestinienne» continua de se poser.

En 1947, la Grande-Bretagne décida de renoncer à son mandat en Palestine et de remettre le problème (familièrement la «patate chaude») aux Nations unies. Juifs et Palestiniens se préparèrent alors à la confrontation. Pourtant, Arabes et Juifs avaient tous deux d'excellentes raisons de revendiquer la Palestine, sauf qu'ils voulaient le même territoire pour les mêmes motifs, sans vouloir partager quoi que ce soit, d'où une confrontation sans issue.

Tandis que les Juifs ne voulaient rien entendre d'un État palestinien, les Palestiniens refusaient d'accepter un État juif. En novembre 1947, sous la pression des États-Unis et de l'Union soviétique, les Nations unies proposèrent la division de la Palestine en deux États: un État arabe et un État juif. L'État juif proposé regroupait une majorité de Juifs, soit 558 000 et 405 000 Arabes palestiniens. Quelque 10 000 Juifs se trouvaient alors dans l'éventuel État arabe qui comptait 99 % d'Arabes pour une communauté de 804 000 habitants. Quant à la zone internationale de Jérusalem, elle devait compter environ 100 000 Juifs et 105 000 Arabes. De plus, environ 10 000 personnes (2 %) ne se retrouvaient ni dans l'État juif ni dans la zone internationale de Jérusalem, tandis que 31 % des Arabes (soit 405 000) n'étaient ni dans l'État arabe ni à Jérusalem.

Le «plan de partage» de 1947 fut accepté par les Juifs, qui croyaient avoir tout à gagner, mais il fut refusé par les Palestiniens qui croyaient avoir tout à perdre. Les positions radicales se développèrent des deux côtés, et le monde arabe se mobilisa avec les Palestiniens dans une guerre contre les Israéliens qui, armés par l'Union soviétique et les États-Unis, finirent par gagner la guerre. Pendant ce temps, les Juifs en profitèrent pour s'emparer de nouveaux territoires.

Finalement, à l'issue des conflits, au lieu des 50% du territoire attribués par l'ONU, les Palestiniens n'avaient obtenu que 25% du territoire, car les Israéliens avaient pu profiter de leurs victoires pour refaire le partage des frontières en fonction de leurs intérêts. Bref, une occasion manquée pour les Palestiniens!

- La protection linguistique

Dans le texte officiel du partage de la Palestine (résolution 181), adopté le 29 novembre 1947 par l'Assemblée générale des Nations unies, le chapitre II prévoyait des dispositions linguistiques. Il s'agit des points 2, 6 et 7 :

Chapitre II

Droits religieux et droits des minorités

1. La liberté, de conscience et le libre exercice de toutes les formes de culte compatibles avec 1’ordre public et les bonnes mœurs seront garantis à tous.

2. Il ne sera fait aucune discrimination, quelle qu’elle soit, entre les habitants, du fait des différences de race, de religion, de langue ou de sexe

3. Toutes les personnes relevant de la juridiction de l’État auront également droit à la protection de la loi.

4. Le droit familial traditionnel et le statut personnel des diverses minorités ainsi que leurs intérêts religieux, y compris les fondations, seront respectés.

5. Sous réserve des nécessités du maintien de l’ordre public et de la bonne administration, on ne prendra aucune mesure qui mettrait obstacle à l’activité des institutions religieuses ou confessions ou constituerait une intervention dans cette activité et on ne pourra faire aucune discrimination à l’égard des représentants ou des membres de ces institutions du fait de leur religion ou de leur nationalité.

6. L’État assurera à la minorité, arabe ou juive, l’enseignement primaire et secondaire, dans sa langue, et conformément à ses traditions culturelles.

Il ne sera porté aucune atteinte aux droits des communautés de conserver leurs propres écoles en vue de l’instruction et de l’éducation de leurs membres dans leur propre langue, à condition que ces communautés se conforment aux prescriptions générales sur l’instruction publique que pourra édicter l’État. Les établissements éducatifs étrangers poursuivront leur activité sur la base des droits existants.

7. Aucune restriction ne sera apportée à l’emploi, par tout citoyen de l’État, de n’importe quelle langue, dans ses relations personnelles, dans le commerce, la religion, la presse, les publications de toutes sortes ou les réunions publiques.

8. Aucune expropriation d’un terrain possédé par un Arabe dans l’État juif (par un Juif dans l’État arabe) ne sera autorisée, sauf pour cause d’utilité publique. Dans tous les cas d’expropriation, le propriétaire sera entièrement et préalablement indemnisé, au taux fixé par la Cour suprême.

Évidemment, c'est l'article 7 portant sur l'éducation, qui semble le plus important. Quoi qu'il en soit, le traité n'ayant pas été accepté, cette disposition n'a donc jamais été appliquée. Il aurait fallu que chacun des futurs États ait accepté l'Autre, y compris sa minorité juive ou arabe (selon le cas).

4 La création de l'État d'Israël (1948)

L’État d’Israël fut proclamé unilatéralement le 14 mai 1948, au moment même où la Grande-Bretagne remettait officiellement ses pouvoirs à l’ONU. La Déclaration d'indépendance fut prononcée par David Ben Gourion, président de l'Agence juive, qui devint le premier premier ministre du pays. En voici un petit extrait de la Déclaration de l'État israélien:
 
L'ÉTAT D'ISRAËL sera ouvert à l'immigration juive et aux Juifs venant de tous les pays de leur Dispersion; il veillera au développement du pays au bénéfice de tous ses habitants; il sera fondé sur la liberté, la justice et la paix selon l'idéal des prophètes d'Israël; il assurera la plus complète égalité sociale et politique à tous ses habitants sans distinction de religion, de race ou de sexe; il garantira la liberté de culte, de conscience, de langue, d'éducation et de culture; il assurera la protection des Lieux saints de toutes les religions et sera fidèle aux principes de la Charte des Nations unies.

L'ÉTAT D'ISRAËL se montrera prêt à coopérer avec les institutions et les représentants des Nations unies pour l'exécution de la résolution du 29 novembre 1947 et s'efforcera de réaliser l'union économique dans tout le pays d'Israël. NOUS DEMANDONS aux Nations unies d'aider le peuple juif à édifier son État et de recevoir l'État d'Israël dans la famille des Nations.

L'appellation «État d'Israël» permettait d'éviter d'employer la dénomination trop laïque de «République d'Israël» parce que les sionistes religieux ne voulaient pas en entendre parler. La déclaration affirmait assurer la plus complète égalité à tous ses habitants sans distinction de religion, de race ou de langue, mais devait être ouverte à l'immigration juive et aux Juifs venant de tous les pays de leur «Dispersion». Évidemment, cette déclaration égalitariste deviendra bientôt nulle et non avenue.

4.1 Les guerres israélo-arabes

Le nouvel État d'Israël fut immédiatement attaqué par sept armées arabes venues en principe secourir les Palestiniens, mais il y avait aussi d'autres motifs que la solidarité entre «frères arabes»: l'antisémitisme pure et dure, le désir de contrer l'influence américaine et le besoin de rallier leurs propres populations autour de leur régime respectif. Le 23 mai 1948, les forces jordaniennes s'emparèrent de la ville de Jérusalem-Est, en plus d'envahir la Samarie et une partie de la Judée. Le 24 avril, le nouveau Parlement de Jordanie approuva officiellement l'union des deux rives du Jourdain en un seul État, le Royaume hachémite de Jordanie, celui-ci ayant annexé la Cisjordanie.

Par le fait même, les Jordaniens avaient pris pied dans les zones dévolues à un futur État arabe en vertu du plan de partage de l'Organisation des Nations unies de 1947. Le 20 juillet 1951, le roi Abdallah, désapprouvé pour son annexion de la Cisjordanie et les accords d'armistice avec Israël, fut assassiné à Jérusalem. Son fils Talal lui succéda, mais il dut abdiquer pour raison de santé en faveur de son fils Hussein (le 11 août 1952).

Le reste des forces arabes subirent la défaite, ce qui permit à Israël de gagner un territoire au-delà des limites fixées par l’ONU. La guerre israélo-arabe mit sur les routes quelque 780 000 réfugiés palestiniens, dont la moitié environ s’enfuirent dans la panique; la seconde moitié des Palestiniens fut évacuée de force par les Israéliens pour laisser la place aux immigrants juifs. Les Palestiniens furent donc dans l'obligation de s'établir dans des pays voisins, dans des camps de réfugiés, surtout au Liban, en Syrie et en Égypte. En octobre 1956 eut lieu la seconde guerre israélo-arabe, provoquée cette fois-ci par la nationalisation par l’Égypte du canal de Suez. Contraint par les Américains et les Soviétiques, Israël finit par évacuer les territoires conquis.

Plus tard, les frontières allaient rapetisser davantage pour passer à 19% (en 1967) et à 10% (en 2003, avec le plan Sharon). S'ils avaient su ce que leur réservait le prochain demi-siècle, les Palestiniens auraient sans doute accepté le plan de partage de l'ONU de 1947; on aurait aujourd'hui deux États séparés qui se détesteraient probablement, mais qui ne se feraient pas la guerre.

- La guerre des Six Jours

Après la fermeture du détroit de Tiran par le président Nasser d’Égypte, ce qui coupait alors la navigation israélienne à la mer Rouge, Israël déclara, cette fois-ci, la guerre à ses voisins et lança une offensive simultanée contre l'Égypte, la Jordanie et la Syrie.

Ce fut la guerre des Six Jours (du lundi 5 au samedi 10 juin 1967). En moins d'une semaine, l'État hébreu tripla son emprise territoriale; il permit à Israël de reconquérir la bande de Gaza et de s’emparer de la péninsule égyptienne du Sinaï, de la partie arabe de Jérusalem (Jérusalem-Est) et de la Cisjordanie, sans oublier le plateau du Golan. Environ 350 000 Palestiniens durent fuir ces territoires dont l'occupation fut aussitôt condamnée par les Nations unies.

- Les enjeux politiques

Les territoires occupés devinrent un enjeu politique non seulement pour Israël, mais également pour les Palestiniens qui multiplièrent les attentats contre Israël. Les représailles israéliennes, marquées par la destruction de très nombreux villages arabes dans les territoires occupés, accrurent en même temps l'isolement d'Israël et un certain respect par la communauté internationale. Puis, le 6 octobre 1973 (jour du Yom Kippour ou «fête du Grand Pardon»), l'Égypte et la Syrie déclenchèrent une attaque-surprise contre Israël afin de récupérer les territoires perdus en 1967.

Après quelques semaines de combats, l’armée israélienne parvint à refouler ses adversaires, non sans avoir subi de lourdes pertes. Le 2 juin 1964, la Charte nationale palestinienne (ou Charte nationale de l'Organisation de libération de la Palestine: OLP) avait été adoptée à Jérusalem par le premier Conseil national palestinien; cette charte fut profondément remaniée en 1968, après la guerre des Six Jours, à la quatrième session du Conseil national palestinien, réuni au Caire du 1er au 17 juillet 1968. La Charte définit le but ultime de l'organisation, c'est-à-dire l'anéantissement de l'État d'Israël par la lutte armée. Par conséquent, la Charte niait à l'État d'Israël toute légitimité; elle n'a jamais été abrogée par le Conseil national palestinien. Par la suite, le plus grand souci de ces régimes, tous autoritaires, sera d'assurer leur propre survie pour se maintenir au pouvoir.

4.2 L'impasse perpétuelle

En décembre 1987, une révolte générale embrasa les territoires palestiniens occupés par Israël. La répression par l'armée de l'Intifada (en arabe: «soulèvement») accrut le clivage entre les partisans de la paix et les défenseurs d'Israël, notamment les mouvements religieux et les nationalistes sionistes. Mais les images télévisées diffusées dans le monde entier montrant des soldats israéliens brutalisant des enfants palestiniens popularisèrent la cause palestinienne défendue par Yasser Arafat. Pour les Palestiniens, l'Intifada était un «mouvement de libération nationale» en signe de protestation contre l'occupation israélienne.

Avec les années, les milliards de dollars qui affluèrent vers la Palestine n'atteignirent jamais les populations qui y habitaient. Plutôt que de servir, par exemple, à construire des écoles, cet argent conforta les dirigeants à consolider leur pouvoir, creuser des tunnels et acheter des armes pour combattre les Israéliens.

En novembre 1988, l'OLP (Organisation de libération de la Palestine) reconnut explicitement le droit à l'existence de l'État d'Israël et adopta la «déclaration d’indépendance de l’État de la Palestine». Le choix de cette initiative diplomatique facilita la mise en œuvre de négociations israélo-arabes et aboutit à la reconnaissance mutuelle entre Israël et l’OLP (septembre 1993) ainsi que la mise en place d’une Autorité nationale palestinienne (mai 1994-septembre 1995) dirigée par Yasser Arafat.

Mais la politique du premier ministre israélien d’alors, Benyamin Netanyahou, et l’expansion considérable de la présence des colons juifs en milieu palestinien, notamment en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, entraînèrent l’interruption des négociations. Celles-ci reprirent aux États-Unis à Camp David II (en juillet 2000) entre le président américain (Bill Clinton), le président palestinien (Yasser Arafat) et le premier ministre israélien (Ehoud Barak), mais elles aboutirent également à un échec. L’un après l’autre, les signes d’une prochaine reprise des négociations de paix israélo-palestiniennes se firent plus apparents, mais n’aboutirent jamais. C'était encore l'éternelle impasse!

4.3 Les accords d’Oslo

Le 13 septembre 1993, à Washington, sur la pelouse de la Maison-Blanche à Washington, Yasser Arafat, le président de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), et Yitzhak Rabin (entre 1992-1995), alors premier ministre israélien, se donnèrent une poignée de main devant le président américain Bill Clinton. Tous deux venaient de signer des accords de paix, un premier pas vers le règlement du conflit israélo-palestinien. La vive poignée de main entre Yasser Arafat et Yitzhak Rabin fit renaître l'espoir de l'établissement d'une paix durable entre l’État d’Israël et l’OLP.

Depuis, plusieurs traités furent conclus entre les deux parties. Ces traités sont connus sous le terme d’accords d’Oslo. La plupart des rencontres, qui eurent lieu en dehors des négociations de paix officielles, se sont déroulées à Oslo, grâce à M. Johan Joerger Holst, ministre des Affaires étrangères de Norvège, qui en était le médiateur.

La Déclaration de principes sur les aménagements de l'autonomie provisoire du 13 septembre 1993 (Washington) donne les grandes lignes des accords entérinés pour les cinq années intérimaires de l'autonomie palestinienne. D'après cette Déclaration de principes, les négociations sur le statut permanent de la bande de Gaza et de la Cisjordanie devaient commencer la troisième année de la période intérimaire. Le statut permanent des territoires devait être effectif après cette période intérimaire de cinq ans. Depuis la signature de la Déclaration de principes, Israéliens et Palestiniens signèrent les accords et les documents suivants :

- l'Accord Gaza-Jéricho (le 4 mai 1994);
- l'Accord sur le transfert préalable de pouvoir et de responsabilités (le 29 août 1995);
- l'Accord intérimaire israélo-palestinien sur la Cisjordanie et la bande de Gaza (le 28 septembre 1995);
- l'Accord de Hébron (le 21 janvier 1996);
le mémorandum de Wye Plantation (le 23 octobre 1998);
- l'Accord intérimaire de Sharm-el Sheikh (le 4 septembre 1999);
- le Protocole sur le passage direct entre la Cisjordanie et la bande de Gaza (le 5 octobre 1999).

En résumé, les accords d'Oslo représentent l'ensemble des accords conclus entre Israël et les Palestiniens pour fixer le calendrier et les règles de la mise en place progressive de l'autonomie en Cisjordanie et à Gaza, ainsi que les conditions des négociations finales sur les questions restées en suspens. Les Palestiniens demandaient qu’on applique le droit international et qu’en conséquence Israël se retire des territoires occupés depuis 1967. En échange de cette promesse (non tenue), les Palestiniens acceptaient un compromis historique: la reconnaissance de la légitimité du contrôle israélien sur 78 % de la Palestine traditionnelle, c’est-à-dire l’État d’Israël dans ses frontières de l’armistice de1948.

Cependant, le Hamas était contre ces accords, ainsi que les ultranationalistes israéliens. De son côté, le Hamas voulait libérer toute la Palestine de la Méditerranée au Jourdain, tandis que les Israéliens voulaient conserver toute la Palestine. Bref, les deux clans ne demandaient pas mieux que de faire dérailler les accords d'Oslo.

- Le renforcement du contrôle israélien

Or, depuis les accords de paix d’Oslo, le contrôle israélien sur le territoire palestinien s’est renforcé et le nombre de colons juifs a augmenté de 54 % malgré la promesse d'Israël de «geler» la colonisation des terres conquises après la guerre de 1967; en Cisjordanie seulement, le nombre de colons bondit de 100 500 à plus de 190 000, une augmentation de 90%. En 2008, le nombre des colons s'élevait à 285 000 répartis dans 140 colonies juives. Qu'a fait, de son côté, le Hamas après les accords d'Oslo? Il a envoyé des jeunes gens se faire exploser dans les cafés! Bref, cette politique de colonisation juive était de toute façon une violation de l’article 49 (Déportations, transferts, évacuations) de la IVe Convention de Genève, qui se lit comme suit:

Les transferts forcés, en masse ou individuels, ainsi que les déportations de personnes protégées hors du territoire occupé dans le territoire de la Puissance occupante ou dans celui de tout autre État, occupé ou non, sont interdits, quel qu'en soit le motif.

Toutefois, la Puissance occupante pourra procéder à l'évacuation totale ou partielle d'une région occupée déterminée, si la sécurité de la population ou d'impérieuses raisons militaires l'exigent. Les évacuations ne pourront entraîner le déplacement de personnes protégées qu'à l'intérieur du territoire occupé, sauf en cas d'impossibilité matérielle. La population ainsi évacuée sera ramenée dans ses foyers aussitôt que les hostilités dans ce secteur auront pris fin.

La Puissance occupante, en procédant à ces transferts ou à ces évacuations, devra faire en sorte, dans toute la mesure du possible, que les personnes protégées soient accueillies dans des installations convenables, que les déplacements soient effectués dans des conditions satisfaisantes de salubrité, d'hygiène, de sécurité et d'alimentation et que les membres d'une même famille ne soient pas séparés les uns des autres.

La Puissance protectrice sera informée des transferts et évacuations dès qu'ils auront eu lieu.

La Puissance occupante ne pourra retenir les personnes protégées dans une région particulièrement exposée aux dangers de la guerre, sauf si la sécurité de la population ou d'impérieuses raisons militaires l'exigent.

La Puissance occupante ne pourra procéder à la déportation ou au transfert d'une partie de sa propre population civile dans le territoire occupé par elle.

Ce non-respect des dispositions de la Convention de Genève s’est toujours fait avec l’appui inconditionnel des États-Unis. C'est pourquoi les Palestiniens ont toujours soupçonné non sans raison les États-Unis de ne pas être des «courtiers honnêtes» parce qu’ils se révélaient «trop favorables» à l'égard d’Israël. En effet, la politique israélienne a toujours été systématiquement et aveuglément adoptée par les Américains, sans considération suffisante des intérêts et des besoins des Palestiniens. C'est aisé à comprendre: le lobby juif est très puissant aux États-Unis, celui des Palestiniens, nul.

Dans l'éventualité où l'on aurait appliqué les accords d'Oslo de1993, quelque 1,5 million de Palestiniens se seraient autogouvernés sur le tiers réel de la Cisjordanie, tout en se retrouvant encerclés dans le réseau des colonies juives, dont la population était déjà dix fois moins importante (excluant les colons de Jérusalem-Est) que celle des Palestiniens, et en accaparant deux fois plus de terres. Le territoire palestinien de la Cisjordanie est toujours en train de se rétrécir comme une peau de chagrin!

- La création de bantoustans

Israël espérait sans doute, après s'être débarrassé de l'Autorité palestinienne, faire accepter sa «solution à long terme» qu'il préconise depuis 1998: quelques «bantoustans» palestiniens autogérés, enserrés dans un carcan de colonies juives, dont le réseau n'a cessé de s'étendre depuis la signature des accords d'Oslo de 1993. Ces colonies juives, devenues le «cancer de la Palestine», sont au cœur du conflit israélo-palestinien. Les Nations unies considèrent ces colonies comme illégales et les Palestiniens ragent de voir leur éventuel État indépendant se rétrécir à mesure que s'élèvent de nouvelles implantations occupées par des «extrémistes juifs». C'est exactement ce que veut Israël: s'organiser pour que les Palestiniens gèrent éventuellement leurs propres affaires, sans aucune forme de souveraineté, dans des bantoustans qui leur seraient réservés. Toute perspective d'autodétermination palestinienne risque alors de se transformer en mirage et non viable au plan économique.

4.4 Les difficiles relations israélo-palestiniennes

Depuis le 29 septembre 2000, les relations israélo-palestiniennes entrèrent dans une phase d'effondrement du processus de paix. La deuxième Intifada palestinienne éclata en laissant les deux parties profondément ébranlées et en menant à la débâcle toute négociation sur le statut permanent de la Palestine. La répression israélienne atteignit des sommets avec des attaques aériennes et terrestres. Sur le terrain, l'armée israélienne utilisa tous les moyens de répression, tels que des blindés, des hélicoptères et même des F-16, ainsi qu'un blocus sévère, pour écraser les Palestiniens. Comme le souligne l'historien israélien Zeev Sternhell: «Seul un esprit malade peut espérer que l'occupation des territoires entraîne la fin de la guérilla et de la terreur.» Mais les dirigeants israéliens pensent tout le contraire.. avec le succès que l'on connaît, de sorte que le cycle infernal continue.

- L'appui inconditionnel américain

Les Palestiniens, comme les Israéliens, regardaient du côté des États-Unis pour trouver une solution, mais le président américain de l'époque (George W. Bush) ne semblait pas trop s’émouvoir de la situation. L'un des proches conseillers de ce président aurait déclaré: «Laissez-les saigner ("Let them bleed"), au bout d'un moment, ils deviendront plus raisonnables.» En même temps, George W. Bush trouva le moyen de qualifier Ariel Sharon d'«homme de paix».

Pour les Arabes du monde entier, Sharon était considéré comme un «criminel de guerre» au même titre que Slobodan Milosevic au Kosovo. Ils se demandaient pourquoi l'ex-président de la Yougoslavie était traduit devant le Tribunal international, et pas Sharon! L’échec des accords d’Oslo pour le monde arabe semble avoir été ressenti comme une catastrophe bien plus apocalyptique que la destruction, le 11 septembre 2001, des tours jumelles du World Trade Center pour les Américains et le reste du monde. Pourquoi cette politique de deux poids deux mesures de la part de l'Occident?

- La corruption généralisée des dirigeants

De leur côté, les nombreux attentats des Palestiniens révoltés exercèrent à long terme une action déstabilisante sur la population israélienne, tout en braquant les dirigeants israéliens dans une politique consistant à taxer tous les Arabes et les musulmans de «terroristes». Quant à la corruption endémique du régime de Yasser Arafat, elle était connue depuis longtemps, mais ce n'est qu'au moment du décès du leader que le monde commença, éberlué, à en mesurer toute l'ampleur. Arafat est mort milliardaire, avec plus de 200 comptes en banque. Il a employé son argent pour asseoir son autorité, acheter la loyauté et, parfois, secourir directement les Palestiniens qui lui demandaient de l'aide (de l'argent!). Rappelons que le leader palestinien, Yasser Arafat, est décédé, le jeudi 11 novembre 2004 à Paris. Le dirigeant palestinien fut enterré à Ramallah, dans son quartier général de la Mouqataa où il avait été assiégé depuis près de trois ans par l’armée israélienne qui le privait de sa liberté de mouvement.

  L'Autorité palestinienne qu'Arafat présidait aurait siphonné près d'un milliard de dollars US provenant de dons internationaux sans jamais rendre de compte à personne. C'est en arrosant ses alliés de «billets verts» qu'Arafat s'est assuré la haute main sur la société palestinienne, qu'il a exterminé ses ennemis et favorisé ses amis, tout en récompensant les parents des «martyrs» (les jeunes terroristes kamikazes). Il régnait sur un régime archaïque et hautement centralisé, et contrôlait personnellement les groupes armés et les mouvements financiers.

Arafat demeurait néanmoins la voix et le symbole de la cause palestinienne qu'il a propulsés au premier rang des préoccupations mondiales. Et son peuple l'aimait et le respectait! Pour les Juifs, Arafat était un leader corrompu dont l'ego avait cloué le cercueil du processus de paix. Par ailleurs, les nombreuses incursions militaires de l'armée israélienne dans les territoires administrés par l'Autorité palestinienne semblaient prouver que le gouvernement israélien n'accordait aucun crédit à cette «autorité». Bref, on est entre humains!

- L'élection du Hamas

Avec le retrait de la vie politique d'Ariel Sharon en raison d'une grave hémorragie cérébrale (4 janvier 2006) dont il a été victime, la donne changea encore en Israël; même le parti qu'il avait fondé, le Kadima, fut remis en question, ce qui accentuait l'incertitude au Proche-Orient, déjà alimentée à ce moment-là par les doutes sur la tenue des législatives de 25 janvier 2006 dans les territoires palestiniens. Ces élections ont fait élire le Hamas (acronyme de harakat al-muqâwama al-'islâmiya), un mouvement islamiste et nationaliste palestinien constitué d'une branche politique et d'une branche armée, les brigades Izz al-Din al-Qassam. Beaucoup de Palestiniens étaient tellement dégoûtés de la vieille garde corrompue du Fatah, ce parti dirigé par les fidèles de Yasser Arafat, que la montée du Hamas était prévisible. Pour les Palestiniens, le Hamas correspondait à trois réalités:

1) un parti politique, vainqueur des législatives de 2006;
2) un mouvement social, qui devait gérer des hôpitaux, des écoles, etc.;
3) un groupe islamiste et nationaliste.

C'était là un programme très attrayant pour les Palestiniens. Sa charte affirmait que «la terre de Palestine est une terre islamique». Il prônait la destruction de l'État d'Israël et l'instauration d'un État islamique palestinien sur tout le territoire de l'ancienne Palestine mandataire. Le Hamas considérait aussi que l’établissement d’un État palestinien entièrement souverain et indépendant dans les frontières du 4 juin 1967, avec Jérusalem pour capitale, pourrait aboutir à une paix durable. Ce point de vue faisait rêver les Palestiniens, mais c'était oublier que l'État d'Israël existait et qu'il était devenu la plus grande puissance militaire du Proche-Orient.

Dans les faits, au lieu de bien gérer les hôpitaux, les écoles et assurer des services sociaux à une population déjà appauvrie, le Hamas s'est plutôt réarmé grâce à l'ide de l'Iran et a décidé de mener une guerre d'usure contre Israël. On ne peut pas certainement caractériser le Hamas par la "realpolitik" (de l'allemand : «politique réaliste»), ce qui supposerait une politique fondée sur le calcul des forces et l'intérêt national. Avec son attitude résolument belliqueuse, le Hamas plaçait les Palestiniens de Gaza entre l'enclume et le marteau.

De leur côté, les Américains, qui connaissent bien l’histoire de l’État d’Israël, dont l’expansion des colonies juives et la sauvagerie des colons, et l’ont toujours appuyé aveuglément depuis soixante-dix ans, préfèrent ignorer les faits, car ils n’ont, sauf erreur, jamais fait quelque effort que ce soit pour défendre les droits des Palestiniens. La raison paraît évidente: toute intervention effective des États-Unis en Palestine doit en même ne jamais aller à l’encontre du puissant lobby juif dont l'influence est prépondérante au Congrès américain.

5 Les points litigieux du conflit

Les enjeux demeurent considérables, tant pour les Israéliens que pour les Palestiniens. Il y va de la survie des deux peuples. Or, les points litigieux sont importants et concernent l’entité palestinienne, les frontières politiques, le sort des colonies juives, le sort des réfugiés de 1948 et le statut de Jérusalem-Est.

5.1 Les éléments fondamentaux

- L’entité palestinienne: Israël accepte théoriquement la création d’une entité palestinienne — et même un État — constituée de parcelles sans continuité territoriale à Gaza et en Cisjordanie, mais réclame sa «démilitarisation», un contrôle de son espace aérien et de la vallée du Jourdain, bref un mini-État (ou un semblant d'État) au pouvoir partiel dans les domaines de la défense, des affaires étrangères, de l'économie, de l'eau, etc. 

Autrement dit, le gouvernement israélien veut imposer aux Palestiniens une sorte de bantoustan qui n'aura aucune légitimité à long terme. Cependant, les Palestiniens veulent créer un véritable État souverain, sans aucune restriction, et viable au plan économique. En fait, Israël voudrait bien perpétuer le régime d’autonomie actuellement en vigueur, alors que l’Autorité palestinienne a toutes les apparences d’un État, sans en avoir les compétences. Dans l'état actuel des choses, les Palestiniens sont très loin d'obtenir un État et le gouvernement israélien leur a même fait savoir qu'ils ne l'auront pas.

- Les frontières: Israël exclut un retour aux frontières politiques de juin 1967 qu’exigent les Palestiniens et veut annexer les zones de Cisjordanie où ont été construites les principales colonies juives de peuplement.

- Les colonies juives: Israël veut annexer les grands blocs de colonies où vivent près de 80% des quelque 200 000 colons implantés en Cisjordanie, ce qui représente 20% des terres saisies aux Palestiniens; seules les colonies isolées seraient évacuées. Les Palestiniens, pour leur part, demandent que toutes les colonies, au nombre d’environ 150, soient démantelées ou placées sous la souveraineté du futur État palestinien.

- Les réfugiés de 1948: Les Palestiniens veulent que l’État hébreu admette la responsabilité du problème des réfugiés et reconnaisse le «droit de retour» aux trois millions et demi de ces réfugiés établis dans les territoires occupés, en Jordanie, en Syrie et un demi-million au Liban. 

Israël est opposé à tout retour en masse des réfugiés qui transformerait «l’État juif» en un «État binational». Il propose leur indemnisation par la communauté internationale et admet le retour en Israël de quelques milliers d’entre eux dans le cadre du «regroupement des familles». Bref, l’immense majorité des réfugiés palestiniens devrait définitivement rester dans les pays voisins. Pour Israël, c'est le futur État palestinien qui devrait accueillir les réfugiés désirant bénéficier d'un droit de retour.

- Le statut de Jérusalem: Israël, qui a annexé la partie orientale de la ville (Jérusalem-Est) en 1967 et y a installé plus de 180 000 de ses ressortissants, refuse de façon catégorique que la Ville sainte soit coupée à nouveau en deux et prétend que «Jérusalem restera à jamais unifiée sous sa souveraineté et capitale éternelle de l’État hébreu», sur laquelle les Palestiniens n'auraient aucun droit de souveraineté. Quant aux Palestiniens, ils exigent que Jérusalem-Est devienne la capitale de leur futur État. D’ailleurs, Yasser Arafat, l'ancien président de l’Autorité palestinienne, aurait déclaré: «Le dirigeant arabe qui abandonnerait Jérusalem n’est pas encore né.»

5.2 Le maintien du statu quo

Le 7 mars 2001, le gouvernement israélien (alors sous Ariel Sharon) présenta un programme qui n’augurait rien de bon pour les Palestiniens. En effet, cette coalition gouvernementale d’union nationale, présentée comme «modérée», faisait table rase des acquis des négociations antérieures et tournait le dos à l'idée même d'un accord définitif. Non seulement le gouvernement israélien refusait toute concession sur un nouveau retrait de l'armée israélienne comme sur Jérusalem et sur les réfugiés, mais il déclarait toujours imposer aux Palestiniens le statu quo.

- Les violations des droits de la personne

En Israël, la plupart des membres des forces de sécurité bénéficient longtemps de l'impunité pour les violations des droits de la personne. La torture, officiellement autorisée, fut systématiquement employée, bien que la Haute Cour de justice ait considéré illégale cette méthode d'interrogatoire. Pourtant, Amnistie internationale continua de recevoir des informations selon lesquelles des Palestiniens étaient maltraités et battus à des postes de contrôle. Au lendemain des attentats du World Trade Center, le premier ministre israélien, Ariel Sharon, saisit l’occasion et en profita pour envahir, détruire et supprimer l’Intifada, pendant que les Américains étaient trop occupés avec les terroristes et Oussama ben Laden. 

- Le Mur

Comme si la situation n'était pas encore assez sombre, les autorités israéliennes érigèrent en 2004 ce qu'elles ont appelé le «mur de Sécurité» destiné à «protéger l’État hébreu et les colonies juives de Cisjordanie», ce qui eut pour effet d'annexer une zone de 975 kilomètres carrés, grignotant encore le territoire palestinien. L'ONU condamna le geste d'Israël, de même que la Cour internationale de justice de La Haye.

Dès lors, les habitants de Cisjordanie et de Gaza devaient être enfermés derrière des clôtures, des miradors et des caméras de surveillance, et devenir les «citoyens de l’Autorité palestinienne». La carte de gauche reproduit approximativement le «mur de Sécurité» (en rouge); les zones en jaune montrent la partie de la Cisjordanie qui resta sous occupation militaire israélienne; les zones en vert (Cisjordanie palestinienne) demeurent toujours haute surveillance de l'armée israélienne.

Le mur suit des lignes sinueuses afin d'enclaver le plus possible de colonies juives en Cisjordanie: la plupart des colonies doivent rester du côté occidental du Mur de façon à ce qu'elles soient éventuellement annexées à Israël. C'est aujourd'hui la plus grande prison à ciel ouvert de la planète! On en est rendu à croire qu'Israël veut rendre la vie des Palestiniens tellement insupportable qu'ils finiront pas vouloir d'eux-mêmes quitter leurs terres. Les Palestiniens parlent de cette «clôture» ou de cette «barrière» comme du «mur de séparation raciale» ("jidar al-fasl al-'unsuri"). En construisant ce mur, le gouvernement israélien étendait encore davantage ses colonies sur la base du principe selon lequel «ce qui est construit aujourd'hui, nous le garderons demain». Bien qu'elles soient contraires à la loi internationale, y compris à des dizaines de résolutions des Nations Unies, il n'existe aucun mécanisme pour empêcher ce genre d'entreprise. 


Si pour les Israéliens, l'unique objectif du mur est la sécurité des citoyens israéliens, il n'en est pas ainsi pour les Palestiniens: c'est une stratégie manifeste pour annexer une partie de la Cisjordanie, celle contenant la quasi-totalité des colons juifs, ce qui ferait encore reculer les frontières d'un hypothétique État palestinien. Quoi qu'il en soit, les Juifs et les Arabes se disputent la Palestine depuis si longtemps, que les premiers ont humilié si souvent les seconds et que ces derniers sont piégés si profondément dans une haine inextinguible qu'il ne peut pas y avoir d'issue au conflit. Les Palestiniens, que ce soit en Cisjordanie ou à Gaza, détestent encore davantage Israël que leurs propres dirigeants. 

5.3 La division politique des Palestiniens

La victoire du Hamas islamiste jugé radical eut pour effet de changer la donne politique au Proche-Orient. La reprise d'éventuels pourparlers de paix avec Israël parut plus improbable, car le Hamas demeurait voué à la lutte armée et prônait la destruction de l'État d'Israël.

- La politique militariste
 

Auparavant, les Palestiniens pouvaient blâmer le Hamas pour chaque mauvais service qu'il leur rendait; maintenant, ils peuvent le blâmer pour tous les services qui leur manquent. Ayant accédé au pouvoir, le Hamas se devait de tenir compte d'abord des préoccupations des Palestiniens qui l'ont élu pour assainir l'administration publique et améliorer leur sort, et non pas pour les replonger dans une autre ère de noirceur et un bain de sang! Or, le Hamas construit, depuis vingt ans, des tunnels pour «résister» plutôt que de nourrir, soigner et éduquer sa population de Gaza.

Le Hamas s'est longtemps limité à exercer une politique de harcèlement à l'égard d'Israël en lançant des milliers de roquettes sur les territoires israéliens. Chaque fois que l'armée israélienne répliquait en tuant des Palestiniens, chaque fois le Hamas augmentait ses appuis après de la population. Peu importe le nombre de morts, les Gazaouis sont avant tout des pions dans cet interminable conflit dans la mesure où le Hamas gagne des appuis.

Effectivement, le Hamas aurait pu utiliser ses fonds considérables mis à sa disposition par la communauté internationale, notamment par l'Iran, afin de relever le niveau de vie misérable de ses citoyens, mais il a préféré le réarmement et les tunnels. Le Hamas a installé ses armes dans les résidences privées, les écoles, les hôpitaux et les quartiers densément peuplés, ce qui rend toute riposte militaire extrêmement atroce.

En même temps, les photos déchirantes d'enfants massacrés deviennent une arme de propagande efficace. En harcelant Israël avec ses roquettes tout en espérant des représailles, le Hamas fait passer Israël pour un «État qui tue des femmes et des enfants» avec des bombes au phosphore. Les dirigeants du Hamas sont aux petits oiseaux pendant que les morts s'accumulent pour la bonne cause!

Dans ce petit territoire que se disputent les Israéliens et les Palestiniens, les morts continuent d'augmenter de décennie en décennie. Les affrontements meurtriers qui se produisent chaque jour rendent improbable le règlement du plus ancien conflit ouvert de la planète. Pourtant, il existe des solutions, dont une souvent envisagée, soit la création de deux États distincts. Chacun chez soi! Les Israéliens devraient alors renoncer à leurs colonies; les Palestiniens, à leurs villages arabes devenus juifs. Est-ce inacceptable pour les deux parties? Certainement si c'est perçu ainsi !

De plus, chaque fois qu'un Palestinien ou un Israélien modéré amorce une tentative de compromis, chaque fois un attentat ou une bombe humaine vient torpiller ces efforts. En fait, seuls les États-Unis pourraient théoriquement imposer LA solution, mais ils ne peuvent pas le faire, le lobby juif ferait tomber n'importe quel président américain, sans oublier les parlementaires, républicains comme démocrates. D'un côté, on a affaire à une force occupante qui bafoue en toute impunité le droit international depuis plus de soixante-dix ans; de l'autre, on trouve des leaders palestiniens corrompus ou fanatisés par des actions autodestructrices, avec comme résultat plus d'un demi-siècle d'immobilisme!

Plus le Hamas persiste vainement à détruire Israël, plus les Israéliens sont sur le pied de guerre. Plus les Israéliens passent à trépas des Palestiniens, plus ceux-ci se radicalisent. On tourne en rond, comme un chat qui mord sa queue! La spirale se poursuit et se poursuivra encore longtemps. Personne parmi les dirigeants des deux camps ne veut renoncer à quoi que ce soit, préférant sans doute le statu quo avec ses guerres incessantes et ses morts qui s'accumulent par milliers. Ce serait pertinent de savoir ce qu'en pensent les populations locales, hormis les irréductibles extrémistes!

5.4 Une image peu inspirante

Par ailleurs, on ne peut pas dire que les dirigeants palestiniens présentent au monde l'image la plus inspirante qui soit. Lorsque Yasser Arafat est décédé en novembre 2004, il n'a laissé aucun mécanisme de contrôle pour administrer les millions de dollars d'aide versés par la communauté internationale. Le président de l'État de Palestine, Mahmoud Abbas, administre en Cisjordanie un gouvernement totalement englué dans la corruption. Pendant ce temps, les islamistes du Hamas au pouvoir à Gaza ont adopté une politique d'intransigeance et de confrontations armées, ce qui a transformé ce petit territoire de 365 km² en un îlot de grande pauvreté entaché d'une intense corruption.

Aucun pays arabe ne s'est indigné devant le fait que le chef du Hamas vivait dans une demeure confortable au Qatar et, une fois millionnaire comme d'autres dirigeants du mouvement, qu'il prélève une taxe de 20% sur tous les biens qui entrent dans Gaza, afin d'acheter des armes et d'améliorer les tunnels. De fait, la plupart des principaux dirigeants du Hamas vivent au Qatar avec la bénédiction du gouvernement qatari.

Dans ces conditions, il n'est pas vraiment surprenant, par exemple, qu'un président américain, tel Donald Trump, pourfendeur des minorités et profondément raciste, ait davantage de sympathie pour Israël que pour la Palestine. Avec lui, la solution «à deux États», vivant en bons voisins, devait demeurer une réalité strictement virtuelle, il n'y croyait pas plus que le Hamas. Trump donnerait son accord pour qu'Israël rase Gaza.

Malgré des vues divergentes au sein du Parti démocrate, le successeur de Trump, Joe  Biden, ne devait pas changer le positionnement américain dans la région: les États-Unis demeurent un soutien indéfectible d’Israël tout en maintenant leur statut potentiel d'unique médiateur entre Israël et la Palestine. Cependant, à force de montrer un soutien aveugle à l'égard d'Israël, les États-Unis vont aussi perdre leur crédibilité, car en plus ils n'exigent rien en retour de leur «protégé» hébreu. Le plus grave problème des Israéliens demeure l'affaiblissement du soutien inconditionnel envers leur pays de la population américaine, voire l'affaiblissement de la puissance américaine. Qui protègerait Israël dans ce cas?    

5.5 Le plan de paix américain

Le 29 janvier 2020, les États-Unis présentèrent un «plan de paix» s'inscrivant dans le cadre de la solution à «deux États» préconisés par les Nations unies, c'est-à-dire la création d’une Palestine au côté d’Israël. Cependant, la version de Donald Trump s’alignait en tout point sur les préoccupations israéliennes et comblait la plupart des attentes territoriales de la droite nationaliste, notamment celles du premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, parmi lesquelles la reconnaissance de Jérusalem comme «capitale indivisible» de l’État hébreu. Or, la proposition américaine ne tenait aucunement compte des demandes palestiniennes, comme d'habitude.

- Un État gruyère

Pour résumer ce «plan de paix» unilatéral, il s'agissait d'un plan qui donnait à Israël tout ce qu’il voulait et concédait aux Palestiniens ce qu'Israël ne voulait pas, en tentant d'acheter les Palestiniens avec la promesse d’une aide de 50 milliards de dollars, une aide qui ne pouvait voir le jour. Parmi les nombreux points sensibles de ce plan figurait la reconnaissance de l’annexion par Israël à son territoire des colonies qu’il avait implantées en Cisjordanie occupée, en particulier dans la vallée du Jourdain. Dans ces conditions, les Palestiniens continueraient de vivre dans un État gruyère entièrement enclavé par les Israéliens. Pour relier Gaza à l'État palestinien, on proposait un long tunnel qui n'aurait jamais été construit. 

Un futur État palestinien sur ces tracés de 2020 apparaissait évidemment nettement en deçà de ce à quoi aspiraient les Palestiniens, c'est-à-dire la totalité des Territoires occupés depuis 1967 par Israël. Du côté palestinien, ce fut donc un refus en bloc! Dans la région, personne ne fait des compromis! La guerre est préférable!

Évidemment,
rares sont ceux qui ont donné au projet présenté par Donald Trump la moindre chance d’apporter la paix dans la région. Ce plan décidé unilatéralement risquait plutôt de transformer l’occupation temporaire en occupation permanente.

- La politique des bantoustans

Ce que le «deal du siècle» américain proposait en réalité, ce n'était la politique des bantoustans, ces régions créées durant la période d'apartheid en Afrique du Sud et réservées aux populations indigènes pour bénéficier à des degrés divers d'une autonomie factice. Comment ce président américain pouvait-il croire qu'il allait enfoncer dans la gorge des Palestiniens ce projet, alors qu'il ne les a jamais consultés et qu'il ne s'était jamais intéressé à eux? Ce n'était pas un «plan de paix», mais un «plan de reddition»! Ce n’est donc pas une surprise que l’Autorité palestinienne ait repoussé le tout d’un revers de la main. En somme, ni les Palestiniens, ni les Israéliens, ni les Américains n'ont tenté le moindre compromis. D'ailleurs, ce mot «compromis» est un blasphème pour les extrémistes des deux communautés!

Le problème aussi, c'est que, pour toutes sortes de raisons, les Palestiniens à la merci du Hamas repoussent toutes les propositions de paix depuis 1947. De plus, Joe Biden fut le premier président américain à ne prendre aucune initiative pour relancer le processus de paix dans cette région, bien que tous les acteurs internationaux aient commis la même erreur. Quant aux Palestiniens, ils n'ont jamais été capables de se doter d’une direction crédible ni de mettre en œuvre un éventuel traité de paix; ils soutiennent le Hamas par lassitude ou par la terreur plutôt que par une véritable adhésion, et ce, d'autant plus que l’Autorité palestinienne leur paraît incompétente et corrompue. Bref, ce conflit est un nid de crabes autant pour les Palestiniens que pour les Israéliens!

5.6 L'attaque du Hamas d'octobre 2023

Le 7 octobre 2023, le Hamas, perçu par les Occidentaux comme une organisation politico-religieuse totalitaire désirant conquérir Israël et y imposer un régime islamiste, lança de violentes attaques sur le territoire israélien près de la bande de Gaza. Des centaines de roquettes furent tirées vers des villes israéliennes afin de faire diversion sur ce qui devait se jouer au sol. Puis 1200 «combattants du Hamas» lourdement armés massacrèrent dans des villages des centaines de personnes, sans aucune discrimination, que ce soit des femmes, des enfants, des bébés, des jeunes, des gens âgés, etc. Lors de ces attaques, inédites par leur violence et leur ampleur, plus de 1400 personnes israéliennes perdirent la vie, en majorité des civils tués le premier jour des attaques. 

Pour les militants du Hamas, Israël est un envahisseur et un colonisateur à Gaza et en Cisjordanie. Comme il fallait s'y attendre, les dirigeants des pays arabes ont appuyé la cause palestinienne qu’ils ont instrumentalisée à leur profit, comme d'habitude, sans comprendre que l’opinion publique chez eux ne partageait pas nécessairement leur «enthousiasme».

Quant aux Américains, eux aussi comme d'habitude, ils ont soutenu aveuglément Israël qui a tout fait depuis des années pour faire échouer les processus de paix et qui a non seulement toujours refusé de céder la Cisjordanie, mais y a installé illégalement des colonies juives.

Bien sûr, de nombreux manifestants pro-palestiniens ont célébré l’attaque «héroïque» du Hamas au lendemain du massacre; ils sont même convaincus du bien-fondé de leur cause au point de refuser de voir les atrocités commises par les «héros de la résistance». D’autres pays apportent divers degrés de soutien au Hamas et le plus important d’entre eux est l’Iran, qui fournit depuis longtemps du financement, des armes et une formation aux combattants du Hamas.

Cependant, si le droit à la résistance est légitime de la part des Palestiniens, y compris la résistance armée, il est en principe limité par les règles du droit international, notamment le droit de ne pas prendre les civils pour cible. Autrement dit, le droit de tuer ou de cibler des civils sans discernement est interdit, un principe qui s'applique aussi aux forces armées israéliennes. De plus, le fait de placer des armes dans un hôpital ou d'y installer un quartier général constitue aussi un crime de guerre. La punition collective infligée par Israël aux civils palestiniens est également un crime de guerre, tout comme l'évacuation forcée illégale de civils. Dans tous les cas, cela devient du terrorisme!

- La vie des Palestiniens

Israël a répliqué violemment en bombardant sans relâche la bande de Gaza, la réduisant en un amas de destruction avec en prime une population totalement piégée. En voulant éradiqué le Hamas, l'armée israélienne doit «sacrifier» des milliers de civils palestiniens qui n'ont aucun autre endroit pour se réfugier que dans le sud de la bande de Gaza. De plus, les Gazaouis risquent de mourir de faim et de soif, ce qui entraîne des souffrances intenables pour cette population totalement démunie. Le roi de Jordanie, Abdallah II, a de façon éloquente résumé le sentiment populaire dans le monde arabe:

Les vies des Palestiniens comptent moins que celles des Israéliens. Nos vies comptent moins que d’autres vies. L’application du droit international est optionnelle. Et les droits de la personne ont des limites. Ils s’arrêtent devant des frontières, ils s’arrêtent devant des races et ils s’arrêtent devant des religions.

Ces paroles du roi de Jordanie (rapportées par un journal canadien) méritent d’être citées parce qu’elles expriment un sentiment qui est peu diffusé dans le monde occidental et encore moins aux États-Unis. Par exemple, on parle de 30 000 personnes tuées à Gaza, dont plus de 15 000 enfants. Si le centième de ce traitement était fait aux Israéliens, les gouvernements occidentaux se manifesteraient aussitôt pour dénoncer ce sort horrible. Mais celui réservé aux Palestiniens ne provoque que du silence! Israël a oublié que toute puissance occupante est responsable de la sécurité des gens qu'elle contrôle. .

Des milliers de personnes vont encore mourir à Gaza, et des familles entières vont être anéanties, et ce n'est pas terminé, la faim et les maladies guettant les survivants. Les frappes aériennes israéliennes ont réduit les quartiers palestiniens à des étendues de décombres, tandis que les médecins soignent les enfants qui crient leurs douleurs dans des hôpitaux sombres, sans anesthésie, sans électricité. Aujourd'hui, on assiste au triste «spectacle» de la pire malnutrition infantile au monde. Dans tout le Proche-Orient, la peur s’est répandue quant à l’éventualité (peu probable) d’une guerre régionale plus vaste, bien que ce ne soit dans l'intérêt de personne.

- Le prix nécessaire pour casser le statu quo

Selon les dirigeants du Hamas, le carnage israélien n’est pas le résultat regrettable d’une grave erreur de calcul. Bien au contraire, c’est le prix nécessaire d’une grande réussite: la disparition du statu quo et le commencement d’une nouvelle période plus instable, dans leur lutte contre Israël. Dans une entrevue en date du 8 octobre 2023, le New York Times rapportait ces propos de Khalil al-Hayya, membre de la direction du Hamas à Doha (Qatar):

[It was necessary to] change the entire equation and not just have a clash. We succeeded in putting the Palestinian issue back on the table, and now no one in the region is experiencing calm. [Il fallait] changer toute l’équation et ne pas se contenter d’un affrontement. Nous avons réussi à remettre la question palestinienne sur la table, et désormais personne dans la région ne connaît le calme.

Ce que le Hamas recherchait, c'est le chaos et un état de guerre permanent! Un conseiller médiatique du Hamas, Taher Nounou, déclarait aussi au New York Times:

“I hope that the state of war with Israel will become permanent on all the borders, and that the Arab world will stand with us. J’espère que l’état de guerre avec Israël deviendra permanent sur toutes les frontières, et que le monde arabe sera à nos côtés.

Les dirigeants du Hamas, ainsi que les responsables arabes, israéliens et occidentaux qui se tiennent au courant du mouvement, ont déclaré que l'attaque avait été planifiée et exécutée par un cercle restreint de commandants à Gaza qui n'ont pas partagé les détails avec leurs propres représentants politiques à l'étranger ou avec leurs alliés régionaux comme le Hezbollah, laissant les gens en dehors de l’enclave surpris par la férocité, l’ampleur et la portée de l’assaut.

La riposte israélienne avait tué (au 14 novembre 2023) plus de 15 000 personnes à Gaza (dont 6000 enfants), mais pour le Hamas l’attaque était justifiée parce que la cause palestinienne avait été mise de côté pendant trop longtemps et que seule une action spectaculaire de sa part pouvait la relancer. Ainsi, en planifiant ces attaques suicidaires jugées nécessaires pour la cause, le Hamas espérait une riposte israélienne si épouvantable qu’elle aurait eu comme résultat de remplacer la sympathie du monde à l'égard d'Israël par une grande indignation. Le Hamas demande à son «public cible» les Palestiniens, les communautés arabes et musulmanes d’être solidaire contre l’agression israélienne et compatir aux souffrances du peuple palestinien, donc de condamner Israël et de soutenir le «mouvement de résistance». De son côté, à force de les bombarder, Israël espère que les Gazaouis finiront pas se retourner contre le Hamas. Tant que les Gazaouis ne sauront pas si le Hamas reprendra le pouvoir à Gaza, ils ne prendront pas le risque de lui tourner le dos. Israël oublie l'importance de l'idéologie de la résistance chez les Palestiniens.

- Diabolisation et indignation

Dans ses campagnes de propagande, le Hamas utilise diverses technologies pour légitimer sa gouvernance à Gaza et diaboliser Israël. Les sites Web et les publications du Hamas sont en arabe, en anglais, en français et en hébreu, bien que l'arabe (classique) soit la langue dominante, étant donné l'accent mis par le Hamas sur la communication avec ses constituants immédiats à Gaza et ses efforts pour attirer ses partisans en Cisjordanie. Le Hamas utilise également des images saisissantes pour glorifier les kamikazes et autres «martyrs» de la cause palestinienne.

Sauf que l'expérience passée avec les pays arabes démontre que l'indignation va se restreindre à quelques manifestations, à des paroles et à des prières! Le Hamas préfère sacrifier sa population et l'exposer aux bombes israéliennes dans la poursuite de son dessein ultime: faire disparaître l’État hébreu de la carte. Les protestations mondiales massives n’ont jusqu’à présent affecté ni la violence vengeresse des Israéliens à Gaza ni la fourniture d’armes américaines pour la soutenir.

Deux choses n'arriveront pas: l'État d'Israël ne disparaîtra pas et les revendications palestiniennes n'arrêteront pas. La "realpolitik" n'est pas le propre des dirigeants du Hamas! Ils poursuivent une cause, une mission: la libération du peuple palestinien. Jusqu'ici, après trois quarts de siècle, il faut admettre que le succès est plutôt modeste. Le Hamas affirme que son combat concerne le «projet sioniste» et non les juifs en raison de leur religion; il ne mènerait pas une lutte contre les Israéliens parce qu’ils sont juifs, mais parce que ce sont des «sionistes qui occupent la Palestine». Pourtant, il y a des juifs très religieux, ultra-orthodoxes, qui veulent faire disparaître les musulmans et des sionistes qui sont contre les colonies de peuplement. Quoi qu'il en soit, l'obscurantisme religieux musulman est confronté à l'obscurantisme religieux juif. Les deux ont besoin l'un de l'autre pour survivre.

- La férocité de la riposte

En fin de décembre 2023, on comptait plus de 30 000 morts du côté palestinien (donc plus de 100 000 blessés), la majorité étant des civils, des femmes et des enfants. Ce n'est plus une guerre contre le Hamas, c'est une guerre contre la population palestinienne. Quant à Israël, la férocité de sa riposte militaire risque de ne rien accomplir de bon, surtout pas d'attirer la sympathie des Palestiniens! Lorsqu'on admet qu'Israël a le droit de se défendre, on se trouve à donner carte blanche à un gouvernement d'extrême-droite dirigé par un premier ministre (Benyamin Netanyahou) inféodé aux ultra-orthodoxes qui veulent anéantir les Palestiniens jusqu'au dernier. Dans les deux camps, on n’hésite pas à prendre la population en otage pour finaliser un projet consistant à anéantir l’Autre et à prendre possession de tout le territoire compris entre la Méditerranée et le Jourdain.

Cela n'arrivera pas! Mais il y a déjà deux gagnants dans cette sale histoire: d'une part, le Hamas est assuré d'avoir des recrues pour les quinze prochaines années, d'autre part, Vladimir Poutine, le président de la Russie, réussit à détourner l'attention sur sa sale guerre en Ukraine, ce qui lui permet d'accumuler des crimes de guerre en toute impunité.

Lorsque ce triste épisode en Israël sera terminé, on sera plus éloigné que jamais de l’effort qui serait nécessaire pour aboutir à une paix viable. Or, la seule façon d’obtenir une paix durable, ce serait de reconnaître les aspirations nationales légitimes des Palestiniens, mais ce n'est pas pour demain et cela n'arrivera pas de sitôt. L'avenir de Gaza après le conflit paraît sombre.

En fait, Israël et la Palestine, c’est l’histoire de deux extrémismes religieux radicaux hostiles à tout compromis et voués à la destruction de l’Autre. Pour ce faire, les fanatiques du Hamas ont besoin des fanatiques ultra-orthodoxes du gouvernement israélien afin de perpétuer le carnage dans l'espoir d'en finir avec l'Autre! À ce petit jeu guerrier, c'est la population palestinienne qui sera sacrifiée pour la cause des uns et des autres. C'est pourquoi certains Israéliens rêvent déjà de déporter tous les Palestiniens et de construire de luxueuses villas le long de la Méditerranée!

6 La politique linguistique

La politique linguistique n'est pas très élaborée pour l'Autorité de la Palestine et le Hamas. Néanmoins, il existe une réelle politique linguistique axée à la fois sur l'arabe et l'anglais. Jusqu'à présent, aucun projet de texte constitutionnel n'a abouti. Pour la préparation de la Constitution, en coopération avec des organismes civils, politiques et universitaires, un comité avait rédigé, vers la fin de décembre 2000, un premier projet de Constitution pour l'État de la Palestine. Il fut publié en février 2001. Un second, puis un troisième projet furent préparés et largement distribués pour permettre à un plus grand nombre de personnes de l'étudier. Ce troisième projet a été soumis Comité central palestinien, le 9 mars 2003. C'est ce texte qui pourrait donner une idée du statut de l'arabe en Palestine. L'article 3 proclame que l'arabe est la langue officielle palestinienne:

CONSTITUTION DE L'ÉTAT DE LA PALESTINE

Troisième projet, le 7 mars 2003, révisé le 25 mars 2003

Article 5

L'arabe et l'islam sont la langue et la religion palestinienne officielle. Le christianisme et toutes les autres religions monothéistes seront également vénérés et respectés. La Constitution garantit l'égalité en droits et obligations à tous les citoyens, sans tenir compte de leur croyance religieuse.

6.1 L'administration

Les structures administratives de la Palestine semblent relativement complexes et fonctionnent selon le modèle anglo-saxon. L'Autorité palestinienne emploie en principe l'arabe classique pour tout ce qui concerne l'administration écrite. Cependant, l'anglais est couramment employé, presque autant que l'arabe, surtout dans les relations internationales. Rappelons que, pendant le Mandat britannique, l'anglais avait été la principale langue du gouvernement, ce qui a laissé des traces. L'administration cisjordanienne emploie également l'hébreu dans ses relations avec l'État d'Israël, mais dans ses communications avec les citoyens, l'arabe palestinien est la pratique générale à l'oral.

Les indications toponymiques et les panneaux de signalisation sont à la fois en arabe (classique) et en anglais. Beaucoup de commerçants affichent également dans ces deux langues.

6.2 La justice

En matière de justice, l'arabe classique, l'arabe palestinien et l'anglais sont les langues généralement employées à l'oral. L'article 28 du projet constitutionnel de 2003 autorisait l'emploi de plusieurs langues:

L'article 28

Toute personne a le droit à la liberté et à la sécurité personnelle.  Ce droit ne peut être violé, sauf dans les cas et procédures prévus par la loi.  Nul ne peut être arrêté, fouillé, emprisonné ou retenu de quelque façon que ce soit, sauf par ordre d'un juge qualifié ou le Ministère public, en conformité avec la loi, afin de sauvegarder la sécurité de la société. Quiconque est arrêté sera immédiatement informé du crime dont il est accusé dans une langue qu'il peut comprendre, aura alors droit à un avocat et sera immédiatement amené devant les autorités judiciaires compétentes. La loi définira les conditions de détention temporaire. Quiconque a été illégalement arrêté, emprisonné ou retenu aura droit à une compensation.

Dans les faits, il est possible d'utiliser d'autres langues, comme l'hébreu, le français, l'italien, etc., en ayant recours à un interprète. Rappelons que le système judiciaire palestinien résulte d'un mélange des anciennes lois ottomanes, britanniques, égyptiennes, jordaniennes et israéliennes, avec quelques ajouts de l'Autorité palestinienne. Dans les faits, il est peu performant, n'assure que difficilement la sécurité juridique des personnes civiles et morales. La communauté internationale a souvent proposé des réformes au système judiciaire palestinien afin d'assurer son indépendance face aux politiciens et de respecter l’État de droit.

De plus, le système judiciaire palestinien n'a jamais convaincu la majorité de la population d'avoir recours à ses services. Le droit tribal, c'est-à-dire la loi coutumière, demeure encore omniprésent en Palestine. Lorsqu'il faut régler des problèmes tels que le viol, le meurtre, le vol, le désaccord sur les propriétés, etc., les Palestiniens ont tendance à faire appel à la loi coutumière (en arabe 'urf : «qui est connu») plutôt qu'aux tribunaux. S'exerçant en dehors de tout tribunal civil ou religieux et faisant appel aux «comités de conciliation» (lijân al-islâh), la loi coutumière est basée sur un ensemble de traditions orales et faites de coutumes tribales, ainsi que de préceptes religieux dont les racines sont parfois antérieures à l'islam lui-même. Bref, le système judiciaire palestinien aurait grand besoin d'être entièrement revu.

6.3 L'éducation

Le système d'éducation en Palestine révèle que le taux de scolarisation est relativement peu élevé. En effet, seuls 49 % des enfants terminent le primaire et 48 %, le secondaire. Soulignons aussi que l'éducation palestinienne a souffert de multiples arrêts dans la mesure où l'armée israélienne a imposé des fermetures de territoires qui ont empêché et empêchent encore les élèves et les professeurs de se rendre à leur école pour de longues périodes. Par exemple, durant la seule année scolaire de 1999-2000, plus de six écoles ont été fermées par le commandement militaire israélien, mais 66 écoles ont dû interrompre leur enseignement en raison des nombreux couvre-feux imposés dans certaines régions. Par ailleurs, au cours de «bombardements aléatoires» dans lesquels des chars, des avions et des hélicoptères ont été utilisés, quelque 50 écoles ont dû être évacuées, sans oublier que les forces israéliennes sont entrées dans 23 écoles. Dans un pays continuellement en guerre, le système d'éducation ne peut qu'être déficient.

À la fin de l'année scolaire 2001-2002, le ministère de l'Éducation avait rapporté les faits suivants:

- 216 écoliers ont été tués, 2514 blessés, et 164 arrêtés;
- 17 professeurs et membres du secteur de l'éducation ont été tués, et 71 ont été arrêtés;
- 1289 écoles ont été fermées pour au moins trois semaines consécutives durant l'invasion israélienne entre le 29 mars et la fin l'année scolaire; 
- environ 50 % des écoliers et 35 000 employés du secteur de l'éducation ont été empêchés de se rendre dans leurs écoles.

Lors que les écoles sont en opération, l'enseignement de la première langue se fait en arabe classique (ou coranique) dès la première année du primaire. Il en est ainsi au secondaire. C'est du côté de l'enseignement des langues étrangères que la Palestine se distingue passablement.

- L'enseignement des langues étrangères

L'objectif général du programme de langue anglaise palestinienne est la communication globale en mettant l'accent sur l'apprentissage de la culture associée à la langue anglaise. Ses buts généraux contiennent trois objectifs : 1) développer la compréhension et l'appréciation interculturelles; 2) favoriser la compréhension et développer la sensibilité culturelle à la culture de la langue cible et à d'autres milieux culturels; 3) développer le respect des autres chez les élèves, c'est-à-dire avoir le sens de la valeur des autres, en particulier ceux issus de milieux sociaux, culturels et familiaux différents du leur, et en les encourageant à rejeter les stéréotypes sexuels, raciaux et ethniques. Il y a une seule exception: le respect ne concerne pas les Juifs.

L'enseignement de l'anglais est obligatoire dans toutes les écoles palestiniennes. Ainsi, dans la bande de Gaza, l'anglais est demeuré jusqu'à récemment la seule langue étrangère enseignée dans les écoles. En Cisjordanie, il est possible d'enseigner aussi l'hébreu et d'autres langues.

Au cours du Mandat britannique, il y a eu une prolifération d'écoles primaires, secondaires et professionnelles, dirigées par des communautés religieuses occidentales. Ces écoles dispensaient leur enseignement en anglais et en hébreu, mais aussi en français, en italien, en allemand et en espagnol. Cette tradition est demeurée en Cisjordanie. Beaucoup d'écoles privées et certaines universités palestiniennes tentent de promouvoir un certain multilinguisme. Beaucoup d'étudiants apprennent, en plus de l'anglais, certaines langues européennes comme le français, l'allemand, l'espagnol et l'italien, surtout lorsqu'ils se destinent à des carrières telles que la gestion des hôtels ou des restaurants ainsi que dans le tourisme. Cela dit, l'anglais est aujourd'hui la première langue étrangère enseignée aux Palestiniens: elle est apprise en public, dans les écoles privées, dans les universités et les centres éducatifs partout en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. C'est que la connaissance de l'anglais est perçue comme une marque de prestige social et un indice d'une appartenance sociale supérieure.

En plus des écoles privées et des universités, il existe des monastères qui peuvent dispenser un enseignement dans d'autres langues. Outre le latin et le grec ancien, certains monastères enseignement des langues comme l'arménien, l'assyrien, le copte et l'abyssinien.

Dans les universités, par exemple l'Université polytechnique de Hébron et l'Université nationale An-Najah de Naplouse, les cours sont donnés à la fois en arabe classique et en anglais. Il est donc impossible de poursuivre des études universitaires en Palestine sans connaître ces deux langues. 

Il n'en demeure pas moins que beaucoup de Palestiniens ont appris l'hébreu, car c'est la principale des affaires et du commerce entre les Israéliens et les Palestiniens. Ceux qui désirent travailler dans des hôtels et des restaurants, dans l'industrie de la construction où les marchés publics ont appris l'hébreu. De nombreux ouvriers palestiniens ont trouvé du travail en Israël et ont acquis une certaine connaissance de l'hébreu parlé, mais généralement aucune de l'hébreu écrit. De façon générale, lorsque les Palestiniens apprennent l'hébreu, ils l'apprennent de façon informelle, c'est-à-dire lors de contacts directs avec les Juifs israéliens, que ce soit dans les travaux manuels, les transactions commerciales ou dans les... prisons. Bref, l'hébreu n'est que peu enseigné dans les écoles.

Le ministère palestinien de l'Éducation prépare un nouveau programme dans lequel une troisième langue (après l'arabe classique et l'anglais) serait enseignée sur une base obligatoire: il s'agirait soit d'une «langue du monde» comme français ou d'une «langue fonctionnelle de la région» comme l'hébreu. 

Grâce à l'arabe standard, connue sous le nom d'al-Fuṣḥā (signifiant «arabe éloquent»), les relations avec les pays arabes de la région peuvent être maintenues, tandis que l'hébreu et l'anglais peuvent servir de moyen de communication avec Israël, qui demeure partie intégrante de la réalité géopolitique palestinienne. La connaissance d'autres langues étrangères serait nécessaire pour entretenir des contacts avec d'autres régions du monde. Pour des raisons historiques, la Palestine a toujours été en contact avec de nombreux pays du monde, probablement plus que la plupart des autres pays arabophones. Il reste à voir comment sera résolue, d'une part, la bataille actuelle entre l’arabisation et le fondamentalisme musulman, d’autres parts, l’occidentalisation et la désécularisation, mais quelle que soit l’issue la Palestine ne peut guère se permettre de se détourner du reste du monde.

- Les manuels de classe

Il existe un certain nombre de rumeurs plus ou moins fondées au sujet de la qualité des manuels scolaires en Palestine. Beaucoup de Juifs estiment que, depuis que l'Autorité palestinienne est responsable de l'éducation (1994), les enfants apprendraient dans leurs manuels à considérer Israël comme «l'ennemi diabolique colonialiste qui a volé leurs terres». On dit que les professeurs «n'enseignent pas l'acceptation de l'existence d'Israël au niveau national» et qu'ils «n'incitent pas à la tolérance envers les Juifs au niveau personnel».

Or, une journaliste américaine, Deborah Sontag du New York Times, a visité une école palestinienne à Ramallah, le 7 septembre 2000. Elle a affirmé n'avoir pas trouvé d'évidences de ces lavages de cerveau ou d'incitations anti-juives dans les nouveaux manuels publiés en arabe classique par l'Autorité palestinienne. Une équipe de chercheurs de l'Institut Harry S. Truman pour le progrès de la paix (de l'Université hébraïque de Jérusalem), conduite par la Dre Ruth Firer, a démontré que les nouveaux livres contiennent «moins de stéréotypes négatifs des Juifs et d'Israël que les livres d'origine jordanienne ou égyptienne». Il est vrai que les manuels scolaires palestiniens visent à créer une forte identité palestinienne, arabe et musulmane, chez les élèves, mais ils ne feraient référence, ni en bien ni en mal, à l'histoire judaïque.

De fait, l'Autorité palestinienne a publié deux séries de manuels scolaires. La première série de 1994 («Éducation nationale») était destinée à remplacer les manuels égyptiens et jordaniens utilisés jusqu'alors; elle ne contenait ni racisme ni d'incitation au racisme, et ne mentionnait pas d'autres territoires palestiniens que ceux des «territoires occupés» par Israël en 1967. Les manuels apparaissaient fort discrets au sujet de la plupart des problèmes politiques. La seconde série de manuels présente un programme d'études complet pour tout le primaire. Ces nouveaux manuels, tout en brisant certains silences dans les anciens manuels, continuent de traiter les points sensibles de la région avec une grande circonspection. Un Israélien, Akiva Eldar, écrivait dans le journal Haaretz du 2 janvier 2001 : «Les Palestiniens sont blâmés, alors qu'ils devraient en fait être félicités.»

Bref, les nouveaux manuels semblent exempts de racisme et d'antisémitisme. Loin d'encourager les enfants à la violence, ces mêmes manuels demandent aux enfants de faire des sacrifices pour leur religion et leur pays (comme on le fait en Israël et aux États-Unis). De plus, tous les textes font de l'islam «la religion officielle de l'État». Il ne faut pas oublier que, en Palestine, les réalités politiques étant confuses et complexes, les éducateurs peuvent avoir d'énormes difficultés à expliquer la situation aux enfants. Si les programmes scolaires palestiniens ne constituent pas un «programme de guerre», il ne correspond pas non plus à un «programme de paix».

- Les faiblesses de l'enseignement

Cependant, la situation de la langue anglaise en Palestine est entourée de plusieurs problèmes et la qualité de l'enseignement en anglais s'en ressent. L’un des problèmes de l’enseignement de l’anglais est qu’il souffre d’un manque de matériel et de ressources pédagogiques. De plus, les étudiants sont confrontés au manque d’accès à la technologie et à l’instabilité de l’Internet, lesquels constituent d’autres facteurs ayant un impact négatif sur l’enseignement et l’apprentissage de l’anglais dans les écoles publiques palestiniennes. Par ailleurs, surtout à Gaza, les étudiants ont très peu de possibilités de pratiquer réellement la langue. Il s'agit d'un autre obstacle à l’apprentissage et à l’enseignement de l’anglais, car celui-ci se fait dans un vide culturel qui donne l’impression que ce n'est pas pertinent ni nécessaire.

En conclusion, tous ces problèmes ont un impact sur la qualité de l’enseignement de l’anglais en Palestine. Par conséquent, les étudiants obtiennent leur diplôme d’études secondaires avec de faibles compétences en anglais.

- La scolarité

En dépit d'une pauvreté endémique, les Palestiniens affichent un taux d'alphabétisation relativement élevé, soit 94,6% des personnes de 15 ans et plus, sachant lire et écrire. Avec sa population jeune croissante et ses taux élevés de fréquentation scolaire, la Cisjordanie et Gaza disposent d’une offre abondante de main-d’œuvre instruite et qualifiée. Selon le Bureau central palestinien des statistiques (PCBS), la population totale de la Cisjordanie et de Gaza en décembre 2022 était d'environ 5,35 millions, dont 3 millions en Cisjordanie et 2,3 millions à Gaza.

6.4 Les médias

Dans l'ensemble, les médias palestiniens sont relativement bilingues. Dans la presse écrite, les principaux journaux nationaux sont en arabe: Al Ayyam (Ramallah), Al Hayat Al Jadedah (Jérusalem) , Al Manar (Jérusalem), Al Quds (Jérusalem) et Fasl Al Maqal (Ramallah).  D'autres sont en anglais tels que le Jerusalem Times et le Bethlehem News. Certains journaux étrangers, publiés en anglais, sont disponibles dans les territoires: le Palestine Times et le Washington Post Gaza Strip West Bank. La plupart des journaux locaux de Gaza (Amlalommah) et dans certaines villes israéliennes sont en arabe. 

Dans les médias électroniques officiels, l'arabe classique, l'arabe palestinien et l'anglais sont largement employés. Les Palestiniens peuvent capter quotidiennement les émissions radiophoniques et télévisées diffusées en arabe par Israël. Les stations de télévision et de radio du Hamas, toutes deux basées à Gaza, proposent une gamme d'émissions comprenant des informations, des drames et même des divertissements pour enfants. Toutefois, son contenu pour enfants comporte des personnages animés qui meurent aux mains de l'armée israélienne ou à cause de la politique israélienne.

L'Autorité palestinienne, comme le Hamas à Gaza, ne peut avoir une politique linguistique très élaborée en raison de sa situation particulière: la Palestine ne constitue pas encore un État et elle ne possède pas tous les pouvoirs et privilèges d'un État souverain. Néanmoins, l'Autorité de la Palestine a orienté tant bien que mal sa politique vers l'arabisation tout en restant tributaire de l'anglais depuis la fin du Mandat britannique. C'est donc une politique encore en voie d'élaboration et, en ce sens, elle ressemble un peu à celle de plusieurs autres États arabes qui commencent cependant à rattraper le temps perdu en essayant de protéger la langue arabe avec plus ou moins de succès, car elles doivent encore assumer la concurrence de la langue coloniale.

D'une part, cette politique promeut une langue officielle qui n'est parlée par personne (l'arabe classique), d'autre part, elle ne favorise que fort peu la langue des Palestiniens, l'arabe palestinien. La Palestine, en Cisjordanie comme à Gaza, est restée attachée à la langue coloniale, l'anglais. Cette politique linguistique ne laisse aucune place aux communautés minoritaires habitant le territoire. Il faut avouer que les circonstances actuelles ne sont guère favorables au maintien ou à la reconnaissance de droits linguistiques à l'égard des Juifs ou à tout autre groupe minoritaire. On oublie aussi que la Palestine favorise la concurrence de l'anglais, une langue plus forte que l'arabe, ce qui ne peut que défavoriser l'arabe. 

Si la Palestine devenait un État de droit, si elle vivait en paix à côté de son puissant voisin, il est certain que la politique linguistique changerait. Pour ce faire, il faudrait au préalable avoir réglé la question des colonies de peuplement juives et solutionner les conflits entre l'Autorité palestinienne et le Hamas. Les Palestiniens, ainsi divisés, ne sont pas au bout de leurs peines! En attendant, l'Autorité palestinienne ne peut que se contenter d'une politique sectorielle limitée, pour l'essentiel, à l'éducation. Même dans ce secteur, des améliorations seraient possibles, mais il faudrait que le futur État palestinien s'ouvre davantage sur d'autres langues que l'anglais.

Compte tenu de sa situation géographique et de l'imbrication des Israéliens et des Palestiniens, la Palestine aurait intérêt à faire de la place à l'hébreu et à d'autres langues occidentales (que l'anglais). Dans un monde idéal, on peut espérer qu'un jour des accords de réciprocité entre l'État juif et l'État palestinien puissent favoriser tant l'arabe que l'hébreu dans les deux pays. Pour le moment, c'est encore une vue de l'esprit totalement virtuelle! Quant à Gaza, c'est la liquéfaction d'un semblant d'État conduit par des dirigeants extrémistes incapables de s'adapter à la réalité géopolitique; ils ne peuvent accepter que des êtres «maudits par Allah» puissent habiter en «terre musulmane»! Sauf que la terre musulmane a déjà été une terre «juive» avant les conquêtes arabes. Répétons-le, Arabes et Israéliens ont tous deux de bonnes raisons de revendiquer le même territoire qu'ils refusent de partager. Les deux peuples ne disparaîtront pas à coup de roquettes ou de prières!  Les deux peuples veulent un État ethnocentrique et religieux, ce qui suppose l'exclusion réciproque. 

L'État palestinien n'est pas pour demain, car bien que certains présidents américains aient favorisé ouvertement la création d'un État palestinien, ils se sont heurtés à l'intransigeance du gouvernement israélien, surtout celui de Netanyahou inféodé aux juifs ultra-orthodoxes. Et les Israéliens ne semblent pas vouloir se faire dicter leur conduite par un président américain qui leur fournit les armes pour se défendre (ou se venger). De leur côté, les Palestiniens n'ont rien à attendre de la part d'un président américain prisonnier d'un électorat juif qui pourrait le faire tomber. De plus, l'Autorité palestinienne en Cisjordanie et le Hamas à Gaza sont à couteaux tirés comme des rivaux en guerre!

Comme si ce n'était pas suffisant, les pires ennemis des Palestiniens demeurent probablement «leurs frères arabes» qui les manipulent cyniquement depuis des décennies. En 1994, l'ancien chef de l'OLP, Yasser Arafat, déclarait déjà ce qui suit: «Les Saoudiens nous ont isolés, les Jordaniens cherchent à nous affaiblir et les Syriens, à nous dominer.» Effectivement, on demande à l'Europe d'accueillir les migrants fuyant le Proche-Orient, alors qu'on ne demande rien aux régimes arabes d'accueillir leurs «frères» palestiniens, bien que la Palestine soit membre de la Ligue arabe.

Lorsque des Palestiniens réussissent à se réfugier dans les pays du Moyen-Orient, ils ne bénéficient d’aucun droit civil, contrairement aux citoyens arabes en Israël.  Cette situation est pour le moins révélatrice de la «fraternité arabe». En réalité, le traitement des Palestiniens dans les pays arabes apparaît comme une oppression pire que celle qu'ils n'ont jamais expérimentée, ce qui ne légitime pas Israël de perpétuer sa politique d'éradication. Quant à la communauté internationale, elle ne peut espérer régler le problème des réfugiés, alors qu'elle collabore avec le monde arabe en traitant ces réfugiés comme des pions politiques, en les privant des droits élémentaires. De fait, partout où les réfugiés palestiniens ont joui de droits égaux, ils ont pu prospérer et contribuer à leur société, que ce soit en France, en Amérique du Sud, aux États-Unis ou au Canada.

Finalement, la communauté internationale s’est peu à peu convaincue que le statu quo demeurait la solution préférable à défaut d’un conflit sans solution. Dans quelques décennies, un fait incontournable va poindre à l'horizon. Les musulmans vont être deux fois plus nombreux que les juifs en Palestine, entre la Méditerranée et le Jourdain. À moins d'expulser les Palestiniens ou de les occire comme Staline a fait en URSS, le Proche-Orient risque de vivre d'autres années atroces. 

Dernière révision: 15 mars, 2024

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