Les accords de Taëf (1989)

    

Le 22 octobre 1989, réunis à Taëf — la ville d'Arabie Saoudite où les députés libanais se sont réunis pour mettre fin à une série de conflits armés qui avaient duré 16 ans —, à l'initiative de la Ligue des États arabes et du pays hôte, pour tenter de mettre fin à la guerre civile au Liban, 31 députés musulmans et 31 députés chrétiens libanais signèrent un «document d'entente nationale», connu depuis sous le nom d'accords de Taëf.

Ce document prévoyait un plan de désarmement progressif des milices et une révision de la Constitution de 1943 pour adapter le système politique libanais au poids démographique actuel des diverses communautés. Cette réforme constitutionnelle devait aboutir aux trois points suivants:

1) réduire les pouvoirs du président (chrétien maronite) au profit de ceux du premier ministre (musulman sunnite) et du président de l'assemblée (musulman chiite);

2) confier le pouvoir exécutif à un Conseil des ministres où les portefeuilles seront également répartis entre chrétiens et musulmans;

3) accroître le nombre des députés de 99 à 108 supprimant la supériorité numérique des chrétiens pour atteindre une parité entre chrétiens et musulmans.

Pour le reste, les postes-clés de l'État devaient rester répartis confessionnellement comme par le passé à savoir:

1) la présidence de la République revient à un chrétien maronite;
2) la présidence du Conseil (premier ministre), à un musulman sunnite;
3) la présidence de la Chambre des députés, à un musulman chiite.

Les accords de Taëf se sont traduits par une révision de la Constitution libanaise, promulguée le 21 septembre 1990. Le nouveau Préambule prévoit dans son paragraphe 4 la suppression graduelle du confessionnalisme politique. De son côté, l'article 95, dans sa nouvelle version, prévoit l'égalité politique:

La Chambre des députés élue sur une base égalitaire entre les musulmans et les chrétiens doit prendre les dispositions adéquates en vue d'assurer la suppression du confessionnalisme politique, suivant un plan par étapes. Un comité national sera constitué et présidé par le président de la République, comprenant en plus du président de la Chambre des députés et du président du Conseil des ministres, des personnalités politiques, intellectuelles et sociales. [...]

La règle de la représentation confessionnelle est supprimée. Elle sera remplacée par la spécialisation et la compétence dans la fonction publique, la magistrature, les institutions militaires, sécuritaires, les établissements publics et d'économie mixte, et ce, conformément aux nécessités de l'entente nationale, à l'exception des fonctions de la première catégorie ou leur équivalent. Ces fonctions seront réparties à égalité entre les chrétiens et les musulmans sans réserver une quelconque fonction à une communauté déterminée tout en respectant les principes de spécialisation et de compétence.

Les accords de Taëf du 22 octobre 1989 ont mis fin à la guerre civile commencée en 1975, mais le Liban ne contrôle pas encore la totalité de son territoire. La Syrie, qui n'a jamais admis la constitution du Grand Liban par les Français lors du mandat, a fait du «pays du Cèdre» son satellite ainsi que son poumon économique ouvert sur la mer. Aujourd'hui, le Liban est en reconstruction et cherche à retrouver son rôle économique et financier qui était le sien avant la guerre civile.

Malgré les accords de Taëf, le confessionnalisme subsiste toujours au Liban, tandis qu'un nouveau déséquilibre politique pourrait surgir avec l'arrivée du Hezbollah chiite (le «Parti de Dieu») qui a formé, avec grand succès, l'ossature de la résistance à la présence israélienne dans le Sud. On sait que les forces israéliennes ont quitté le sud du Liban le 24 mai 2000, de manière unilatérale, un départ presque en déroute, comme une défaite militaire. Cette journée-là fut considérée par les Libanais comme un «jour de la libération nationale». En raison de sa victoire, le Hezbollah compte maintenant parmi les principales forces politiques organisées au Liban.

Il est probable que la suppression du confessionnalisme rencontre encore des résistances au Liban. Jusqu'ici, cette suppression a été perçue comme nécessaire pour assurer la paix civile entre Libanais, mais ceux-ci étaient habitués de vivre avec ce système. Ils ne s'en départiront pas si facilement.


 

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